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Parti Russie Unie & Poutine: critiquables mais pas menacés par 1 opposition divisée et dangereusement polluée

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  • Parti Russie Unie & Poutine: critiquables mais pas menacés par 1 opposition divisée et dangereusement polluée

    Une Opposition pour partie, à la marge, carrement dangereuse pour la quietude des citoyens de Federation de Russie. Y a quelques personnes dangereuses pour la planete entiere dans cette opposition et ce ne sont pas les communistes de Ziouganov . Poutine est pas sans faute, il a declenché la 2° guerre de Tchtchenie, il a verrouillé mais y a pire que son parti Russie Unie , y a dans l'opposition aussi des gens tres minoritaires qui peuvent provoquer de graves troubles en Federation de Russie voire une guerre civile voire ethnique en Federation de Russie , une deflagration qui aurait peut être des prolongements sur 2 continents voisins crise economique mondiale aidant.

    Russie Unie gagnera les prochaines elections presidentielles avec Poutine apres avoir gagné les legislatives et assouplira le fonctionnement, moins de corruption et plus de democratisation dans les rouages locaux ...et ça vaut mieux pour tout le monde vu l'etat de cette opposition soit disant nombreuse et unie. ''Unie'' contre Russie Unie mais comprenant des bien plus ravagés que Poutine

    Au sein de cette opposition mediatisée , hormis quelques mouvements ecologistes et de defense des droits humains, quelques syndicalistes et quelques electeurs du Parti communiste en attente de progres contre la corruption et droits sociaux legitimes.......presque tout est à jeter dans cette opposition .
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    Ci dessous un article d'Alexandra Latsa
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    Un autre regard sur la Russie par Alexandre Latsa

    L'année 2011 se termine et avec elle un mois de décembre placé sous le signe des manifestations politiques. Rappelons les faits: suite aux élections du 04 décembre 2012 qui ont entraîné une baisse de Russie Unie et une forte hausse des partis nationalistes ou de gauche, des fraudes électorales ont été dénoncées. Ces fraudes auraient permis au parti au pouvoir et disposant de la ressource administrative, de gonfler son score et de fausser les résultats. Pourtant, près de deux semaines après les élections, alors que des enquêtes sont en cours suite aux plaintes déposées, le nombre de fraudes recensées dans le pays y compris Moscou ne semble pas avoir faussé notablement le scrutin, dont les résultats sont conformes aux nombreux sondages et estimations d'avant et d'après vote.

    Revenons aux manifestations: Le 10 décembre 2011, un grand meeting unitaire d'opposition avait lieu à Moscou, rassemblant 30 à 40.000 personnes. J'ai déjà décrit la relative incohérence politique de cette manifestation qui rassemblait côte à côte des membres de la jeunesse dorée Moscovite, des nationalistes radicaux, des antifascistes, ainsi que des libéraux et des communistes. Souhaiter le départ à la retraite de Vladimir Poutine n'est pas un programme politique, et quand à la tenue de nouvelles élections, on se demande en quoi elle concerne des dizaines de sous-groupuscules politiques non candidats à la représentation nationale.

    Le 17 décembre le parti d'opposition libérale Iabloko a rassemblé quelques 1.500 partisans, alors que le meme jour qu'un millier de sympathisants du mouvement eurasien et du syndicat des citoyens russes (???????? ??????? ??????) se réunissaient pour dénoncer les manipulations oranges et rappeler la nécessité d'un état fort. Le lendemain, le 18 décembre, ce sont près de 3.500 militants du parti Communiste qui se sont réunis. Le 10 décembre, lors de la grosse manifestation dopposition, l'un des leaders de l'opposition liberale, Mikhaïl Kassianov, avait affirmé que "Si aujourd'hui nous sommes 100.000, cela pourrait être 1.000.000 demain". Celui ci a appelé à un printemps politique en Russie, un discours étrangement similaire à celui de l'excessif républicain John Mc Cain ces dernières semaines. Pour autant aucune marée humaine n'a déferlé dans les villes du pays, au grand dam de nombre de commentateurs occidentaux qui annonçaient déjà l'Armageddon en Russie, et c'est seulement une neige abondante qui a recouvert le pays le 24 décembre, jour de la manifestation unitaire.

    Cette journée du 24 décembre n'aura finalement été un succès qu'a Moscou. En province, dans les autres villes de Russie, la mobilisation aura faibli par rapport aux rassemblements du 10 décembre. A Vladivostok, la manifestation a réuni 150 personnes, contre 450 le 10 décembre. A Novossibirsk 800 personnes ont défilé contre 3.000 le 10 décembre. A Tcheliabinsk dans l'Oural, les manifestants étaient moins de 500 contre 1.000 le 10 décembre, à Iekaterinbourg 800 personnes ont manifesté contre 1.000 le 10 décembre dernier. A Oufa, 200 manifestants se sont rassemblés, soit autant que le 10 décembre. Enfin 500 personnes ont défilé à Krasnoïarsk contre 700 le 10 décembre. Notons qu'à Saint-Pétersbourg, haut lieu de la contestation et bastion libéral en Russie, de 3 a 4.000 personnes ont défilé, contre près de 10.000 le 10 décembre dernier. (Sources : Ria-Novosti et Ridus.ru).

    Dans la capitale le 24 décembre, 3 meetings différents ont eu lieu. 2.000 nationalistes du parti nationaliste Libéral-Démocrate de Vladimir Jirinovski, et 3.000 sympathisants du politologue Sergueï Kurginyan ont manifesté séparément pour répondre à la "peste orange". Enfin et surtout dans ce qui est sans doute le plus gros meeting d'opposition de l'année, avenue Sakharov, ce sont 40 à 50.000 personnes qui se sont rassemblées. La manifestation de Moscou s'est déroulée sans incidents notables, si ce n'est à la fin du meeting, quand des radicaux d'extrême droite ont tenté de monter sur la tribune en force, alors même que le leader ultra nationaliste Vladimir Tor (dirigeant du mouvement NazDems) avait pris la parole quelques minutes auparavant. On peut du reste se demander pourquoi les nombreux journalistes occidentaux présents n'ont pas relevé le fait que plusieurs milliers de jeunes nationalistes radicaux sifflaient ou criaient "russophobe" en direction de certains orateurs de diverses confessions et scandaient des slogans tels que: "les russes ethniques de l'avant", ou "donnez la parole aux russes ethniques". Un deux poids deux mesures pour le moins surprenant.

    Dans le pays et donc surtout à Moscou, les rassemblements du 24 décembre ont tourné à la cacophonie politique totale. Les meetings ont de nouveau rassemblé toutes les composantes politiques les plus improbables, des nationalistes radicaux aux antifascistes, en passant par les libéraux, les staliniens, les activistes gays et lesbiennes ou quelques stars du Show Business russe. Plus surprenant, toujours lors de la manifestation de Moscou, la présence du milliardaire Prokhorov et de l'ancien ministre des finances Aleksei Koudrine, pourtant proche de Vladimir Poutine. Aleksei Koudrine a d'ailleurs pris la parole, ajoutant à la cacophonie ambiante et déclenchant un record de sifflements du public. Pour la première fois un député d'opposition très connu a mis le doigt sur cette désunion systémique de la soi disant opposition, en quittant la manifestation avant même de prendre la parole. Même son de cloche pour l'analyste politique Vitali Ivanov, pour qui l'opposition à Vladimir Poutine est une nébuleuse qui mène des conversations de cuisine.

    La prochaine grande journée de manifestation devrait avoir lieu en févier, c'est à dire pendant le mois précédant l'élection présidentielle du 4 mars 2012. Pour autant, on imagine difficilement comment Vladimir Poutine ne serait pas réélu et tout d'abord au vu de la situation économique que connaît le pays. La croissance du PIB devrait frôler les 4,5% en 2011 et sans doute autant en 2012. Le taux de chômage est descendu à 6,3%, la dette du pays est faible, inférieure a 10% du PIB, et les réserves de change sont d'environ 500 milliards de Dollars. L'inflation est à la baisse, estimée pour cette année à 6,5% soit son plus faible niveau depuis 20 ans. La Russie est aujourd'hui la 10ieme économie du monde en produit intérieur brut nominal et la 6eme économie mondiale à parité de pouvoir d'achat. Selon les analyses du centre de recherche britannique CBER la Russie devrait être la 4ieme économie de la planète aux environ 2020.

    Il est donc très difficile d'imaginer comment la personne jugée directement responsable de ce redressement économique par la majorité des citoyens pourrait ne pas être réélue. Bien sur il est plausible que la vague de mécontentement se reflète dans les scores de la présidentielle de mars 2012, et que Vladimir Poutine ne soit pas élu au premier tour avec 71% des voix, comme en 2004, ou avec 72% des voix, comme Dimitri Medvedev en 2008, dans une Russie en totale euphorie économique. Celui ci devra probablement envisager un score plus proche de celui de mars 2000 (Vladimir Poutine avait obtenu 52% des voix) voire se préparer à un second tour. Si tel est était le cas, il y affronterait probablement le candidat du parti communiste, Guennadi Ziouganov. Un choix cornélien pour les occidentaux, mais qui refléterait parfaitement la tendance électorale initiée par les dernières élections législatives russes qui ont vu les partis de gauche augmenter fortement leur poids électoral.

    * Alexandre Latsa est un journaliste français qui vit en Russie et anime le site DISSONANCE, destiné à donner un "autre regard sur la Russie". Il collabore également avec l'Institut de Relations Internationales et Stratégique (IRIS), l'institut Eurasia-Riviesta, et participe à diverses autres publications.
    Dernière modification par Sioux foughali, 30 décembre 2011, 00h26.

  • #2
    autre article : ''« Révolution blanche », drapeaux rouges et forces de l’ombre''

    Jean-Marie Chauvier


    « Les » Russes contre Poutine ? Une « révolution blanche » (ou orange) ? Un « printemps russe », à l’image du « printemps arabe », contre un « système verrouillé », voire « la dictature » poutinienne ? L’imminence redoutable du « retour de l’URSS » ? Comme chaque fois qu’il s’agit de ce pays, les tendances à l’exagération et à la caricature paraissent irrépressibles. Les fréquentes erreurs de pronostic des médias devraient pourtant inciter à l’humilité.

    Les nouvelles turbulences russes ont un point de départ : les législatives du 4 décembre 2011, attendues comme une simple formalité en vue d’asseoir le succès — assuré et préfabriqué — de M. Vladimir Poutine à la présidentielle de mars 2012, et supposées lui garantir deux mandats successifs jusqu’en 2024. Effrayante perspective pour les opposants. Le scrutin serait donc sans surprise. Selon le Centre Levada, un institut de sondages de tendance libérale, « une immense majorité de Russes se déclarent certains de la victoire de “Russie Unie” le 4 décembre et l’apathie électorale de cette situation est bénéfique à Vladimir Poutine (1) ».

    Première source d’étonnement donc : les résultats qui sanctionnent le parti au pouvoir.
    Manifestement, ce dernier n’est pas trop « absolu »… Par rapport à 2007, Russie unie (ER) recule de 64,30 % à 49,32 %, le Parti communiste (KPRF) remonte de 11,57 % à 19,19 % et son rival de gauche Juste Russie (SR), social-démocrate, passe de 7,74 % à 13,24 %, le parti (d’extrême droite) libéral-démocrate (LDPR) de 8,14 % à 11,67 %, le parti libéral Iabloko de 1,59 % à 3,43 %, un score qui ne lui permet pas d’entrer à la Douma.


    Résultat des législatives russes du 4 décembre 2011

    Parti Russie Unie 12 599 507 voix soit 49,19 % 238 sieges ( = 52,9 % du parlement) ; Parti communiste de la Fédération de Russie 8 695 522 voix 13,24 % 92 sieges , Parti libéral-démocrate de Russie 7 664 570 voix soit 11,67 % 56 Sièges; Iabloko 2 252 403 voix soit3,43 % donnant 0 sieges

    Deuxième surprise : grâce aux militants des oppositions, à la surveillance de l’organisation non gouvernementale (ONG) Golos — financée par les Etats-Unis à travers USAID et le National Endowment for Democracy (NED) — et aux observateurs de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), des « fraudes massives » sont mises en évidence. Aussitôt, la protestation s’exprime dans les rues. Des affrontements ont lieu, et des arrestations — tantôt simples interpellations, tantôt condamnations et emprisonnements de plusieurs jours. Mais la vision d’une Russie « à feu et à sang » a été exagérée dans certains médias occidentaux — le comble étant atteint par la chaîne américaine Fox News, dont un reportage sur les incidents en Russie fut « illustré » par des images d’émeutes… en Grèce (2). Point culminant de cette première vague de contestation : le meeting des 30 000 à 40 000 participants du 10 décembre à Moscou. Réussite relative — vu les 11 à 15 millions d’habitants du grand Moscou et le peu de mobilisation ailleurs en province —, mais réussite inattendue après dix-sept années (depuis 1993) d’apathie politique.

    « Du jamais vu », dira-t-on, quoique on en ait déjà pas mal vu : les révoltes de 1992-1993 contre la « thérapie de choc » ponctuées par le bombardement du Parlement le 5 octobre 1993, les grèves et protestations contre les retards de salaires en 1998-1999, les 500 000 protestataires, en 2005, contre la suppression de divers avantages sociaux. Mais c’est vrai : jamais une protestation politique de ce type, de cette ampleur, entraînant une nouvelle génération, n’avait été vue. Les raisons et les objectifs de cette révolte n’en sont pas moins disparates.

    On peut distinguer trois composantes : une contestation « hors système » radicale, l’opposition institutionnelle surtout communiste et la nouvelle vague, spontanée et pleine d’inconnues, des blogueurs apparemment sans attaches politiques, quoique…
    La contestation politique « hors système »

    Souvent dite « orangiste » par référence à l’Ukraine de 2004, elle s’est rebaptisée par la voix de son leader libéral Boris Nemtsov « révolution blanche » ou « des neiges ». Des rubans blancs ont été massivement distribués. Cette charge symbolique rappelle les « révolutions colorées ». Le choix de la couleur blanche, en Russie, n’est d’ailleurs pas totalement innocent (3). Les formations les plus remarquées (surtout dans les médias occidentaux) sont le mouvement Solidarnost et le Parti de la liberté du peuple (Parnas). Celui qui parle le plus en leur nom est M. Boris Nemtsov, qui semble faire son grand retour.

    Bras droit de M. Boris Eltsine dans les années 1990, ex-conseiller du président de l’Ukraine Viktor Iouchtchenko (2004-2010), ancien dirigeant de l’Union des forces de droite (SPS), M. Nemtsov a fondé en 2008 avec l’ancien dissident soviétique Vladimir Boukovski et les co-animateurs du Front civique uni Garry Kasparov et Ilya Iachine, le Mouvement démocratique unifié Solidarnost, une coalition de partis et de défenseurs des droits humains.

    Son nouveau parti de droite libérale, le Parnas, compte d’autres personnalités bien connues en Occident : M. Vladimir Ryzhkov, autre ancien leader des années Eltsine, et M. Mikhaïl Kassianov, qui exerça plusieurs responsabilités économiques et financières dans les années 1990 et fut premier ministre de la première période (la plus libérale, 2000-2004) de M. Poutine. En rupture avec celui-ci, il est devenu l’un des responsables politiques russes les plus écoutés aux Etats-Unis et en Europe.

    Les mouvements Pour les droits de l’homme, Mémorial et autres ONG de la société civile font également partie de cette première composante, qui se manifeste d’ailleurs par une condamnation du système soviétique, à la très nette différence des partis et groupes de gauche ou « patriotiques » (4).

    Il y a un cas à part, celui d’Edouard Limonov. Cet écrivain, créateur du Parti national-bolchévique (NBP) en 1994, interdit depuis 2007 pour « extrémisme », a été le co-fondateur avec l’ancien champion d’échecs Garry Kasparov des principales initiatives oppositionnelles pluralistes, de concert avec divers groupes démocratiques et de défense des droits humains : Autre Russie, Forum civique uni, Marches du désaccord, Assemblée nationale, et le Comité de salut national, intégrant l’extrême-gauche du Rotfront. Allié des libéraux mais en désaccord avec eux sur le fond (leurs responsabilités dans la catastrophe sociale des années 1990), il imprime à Autre Russie une nouvelle orientation nationaliste, symbolisée par l’adoption du drapeau impérial noir-jaune-blanc. Il entend poser sa candidature à la présidentielle de 2012.

    Nouvelle vedette de la contestation, une écologiste : Mme Evguenia Tchirikova, animatrice d’un mouvement de défense de la forêt de Khimki, au nord de Moscou, contre le projet d’autoroute Moscou-Saint Pétersbourg mis en chantier par la firme française Vinci.

    La mouvance libérale dispose aussi des sympathies des médias d’opposition qui partagent ses opinions — Novaïa Gazeta, radio Ekho Moskvy, le journal économique et financier Vedomosti (5) et de nombreux sites Internet désormais plus influents que la presse papier, voire même capables de rivaliser avec le monopole officiel sur les principales chaînes de télévision.

    Au sein et « en marge » de cette contestation, il y a le célèbre parti Iabloko, membre de l’Internationale libérale, que mène l’économiste et intellectuel d’envergure Grigori Iavlinski. A la différence des autres libéraux, Iabloko a conservé quelque chose de l’esprit humaniste de l’ancienne intelligentsia libérale soviétique et n’a pas approuvé la « stratégie du choc » des années 1990. Il se réclame d’un libéralisme social et respectueux de la démocratie, à l’opposé du « pinochetisme » de la droite libérale dure.

    La contestation attire par ailleurs, encore très modérément, des mouvements nationalistes et néofascistes, vivement contestés lors du meeting du 10 décembre par les anarchistes. Drapeaux rouge-noir contre drapeaux noir-jaune-blanc.

    Alliées mais non alignées sur les libéraux, il y a les forces rassemblées dans le Levyi front (Front gauche) qu’anime M. Serguei Oudaltsov, 34 ans, adepte vibrant de l’auto-organisation du peuple par un retour aux soviets, en vue d’en finir avec le système capitaliste, et non seulement avec Poutine. Emprisonnée pendant dix jours et gravement malade, la figure emblématique de la nouvelle gauche radicale a été opportunément écartée de la scène publique, ce qui a facilité l’imposition du leadership libéral, déjà lourdement appuyé par les médias et autres soutiens politiques et financiers occidentaux. M. Oudaltsov et ses amis incarnent aussi une gauche sociale, non focalisée sur les seules élections, sans illusions sur la démocratie représentative et plus en phase avec les protestations populaires éparses qui, partout en Russie, égratignent sinon ébranlent les pouvoirs sur des questions concrètes : emploi, logement, tarifs de l’énergie, éducation et soins de santé (dont on réclame à nouveau la gratuité), jardins d’enfants, projets urbanistiques (6).
    La gauche institutionnelle

    ..........
    Dernière modification par Sioux foughali, 30 décembre 2011, 00h27.

    Commentaire


    • #3
      suite

      C’est la seconde composante des protestations. La principale force d’opposition en termes de membres et d’électeurs, le Parti communiste de la Fédération de Russie (KPRF) que dirige M. Guennadi Ziouganov apparaît comme le réceptacle des voix protestataires. Le programme de ce parti reste très « soviétique », ce qui n’est pas pour déplaire aux classes âgées et populaires : la nationalisation des secteurs clé, le « retour à l’amitié des peuples », la restauration de la gratuité de l’enseignement et de la médecine. Le KPRF a organisé des meetings importants en Russie méridionale, en Sibérie et en Extrême-Orient. Son rassemblement moscovite, le 18 décembre, n’a pas dépassé les 5 000 participants, ce qui semble exclure le « raz de marée rouge » ou le « retour des communistes » redouté par certains.

      Le parti Juste Russie de M. Mironov, dont le discours est plus réformiste, est réputé manipulé par le Kremlin. Impulsé par ce dernier, de fait, il occupe néanmoins un créneau dont on s’accorde à reconnaître la nécessité : la social-démocratie.

      Les partis de la gauche institutionnelle traînent un lourd handicap : la classe ouvrière dont ils se réclament, sans doute largement déroutée, précarisée, stigmatisée par vingt années de capitalisme offensif, reste largement absente de la scène politique. Elle sera pourtant la première à souffrir d’un autre événement d’actualité, passé inaperçu mais très lourd de conséquences sociales : l’entrée de la Russie dans l’Organisation mondiale du commerce.

      Les deux partis entrent en force à la Douma, de sorte qu’ils ne partagent pas le radicalisme de la contestation hors-système : ils participeront au jeu parlementaire. D’autant que le PC marque nettement ses distances à l’égard de l’orangisme des libéraux. Le 17 décembre, M. Ziouganov a rappelé les précédents de la Yougoslavie, de la Géorgie et de l’Ukraine. Il a qualifié les leaders libéraux de « pope Gapone collectif », référence bien connue en Russie à ce prêtre qui joua un rôle provocateur lors du Dimanche sanglant de 1905. Les financements américains des opposants russes sont d’ailleurs revendiqués par les Etats-Unis : non seulement plusieurs fondations publient régulièrement leurs listes de donations, mais le porte-parole du département d’état, M. Mark Toner, a déclaré le 6 décembre que les fonds accordés aux ONG et « médias indépendants » russes seraient augmentés en 2012 (notamment pour la présidentielle de mars) jusqu’à un peu plus de 9 millions de dollars (7).
      Les blogueurs

      La troisième composante est la plus neuve et la moins prévisible. Elle dispose de cette nouveauté technologique encore peu répandue il y a quelques années : la maîtrise d’Internet et de ses réseaux sociaux (Vkontakte, Twitter, plus rarement Facebook) auxquels les jeunes contestataires libéraux ou gauchistes ont également recours.

      Mais la masse des usagers de ces réseaux est avant toute une jeune génération née au temps de ou après la chute de l’URSS, qui n’a guère de rapport avec la politique et ses organisations, et exprime une colère spontanée visant les aspects les plus choquants de la vie publique : la corruption, les détournements de fonds et de biens publics, le crime organisé à tous les niveaux, « le parti des voyous et des voleurs » identifié à Russie unie. Le potentiel mobilisateur des réseaux sociaux, d’après une étude d’Alexei Sidorenko, s’élèverait à 185 000 manifestants (8).

      Plusieurs observateurs ont tenté de décrire une sociologie de cette nouvelle vague. Elle appartiendrait à la classe moyenne bénéficiaire de la croissance des années Poutine, à de jeunes élites en quête d’ascenseur social plus rapide. Ce qui branche les « indignés » de Moscou ne serait donc pas, comme à Madrid et ailleurs en Europe occidentale, les inégalités sociales, la précarité, le chômage, mais le manque de perspectives de jeunes diplômés dans une structure sociale stagnante où trop de places sont déjà prises et défendues par les privilégiés des générations précédentes.

      D’après le sociologue Leontii Byzov, « de multiples facteurs coïncident. D’abord, la montée en puissance d’une nouvelle génération de jeunes qui n’ont pas en mémoire le “traumatisme des années 1990”. Il n’ont pas peur du changement, ils le préfèrent à la “prison dorée” de la stabilité poutiniste. Les jeunes de la classe moyenne veulent la mobilité sociale et rêvent de carrières fulgurantes (9) ». Mais à ce constat sociologique s’en ajoute un autre, politique. La vedette de la mobilisation des internautes est le blogueur Alexei Navalnyi. Il est à l’origine du slogan très populaire qui fait de Russie unie le « parti des voyous et des voleurs ». Très connu aux Etats-Unis où il a étudié, il jouerait un rôle politique à deux niveaux. D’une part, il serait lié, comme d’autres, à la National Endowment for Democracy à Washington. D’autre part, il participe à la Marche russe (10) : il serait donc la passerelle rêvée entre l’extrême droite nationaliste et la « révolution blanche ». A priori mariage contre-nature, cette synthèse tente néanmoins une partie des jeunes révoltés, et pourrait constituer un cocktail explosif, très déstabilisateur (11). Lors des réunions préparatoires du nouveau rassemblement de la contestation prévu le 24 décembre, plusieurs questions qui divisent ont été évoquées. Parmi elles : le danger d’être rejoint par les ethno-nationalistes et la controverse sur le leadership libéral (M. Nemtsov et autres) et son patronage américain. Le mouvement de base entend préserver son caractère démocratique, pacifique, et sa spontanéité.

      (1) Corinne Deloy, « Pas de suspense sur le résultat des élections législatives en Russie » (PDF), Fondation Robert Shuman, 28 novembre 2011.

      (2) « Protester’s Express Outrage Over Russian Elections - Fox News », sur Youtube.

      (3) Pour rappel, en 1917-1922, la guerre civile avait opposé rouges et blancs.

      (4) « Patriotes » : ici dans le sens restreint de nationaux-communistes et de patriotes d’Etat, à l’exception des ethno-nationalistes.

      (5) Edité en collaboration avec le Financial Times et le Wall Street Journal.

      (6) Un inventaire permanent de ces luttes est tenu par le site de l’Institut action collective (IKD) que dirige la sociologue franco-russe Carine Clément.

      (7) Conférence de presse du 5 décembre, sur le site du département d’Etat.

      (8) Alexei Sidorenko, « Russie : La contestation post-électorale sur les réseaux sociaux », GlobalVoices, 9 décembre.

      (9) Donna Welles, « Russie : “Pourquoi les Russes manifestent-ils maintenant ?” », 12 décembre 2011.

      (10) Manifestation annuelle, le 4 novembre, des néonazis et autres mouvements anti-immigration.

      (11) Depuis l’explosion xénophobe de décembre 2010, place du Manège à Moscou, des contacts ont été noués entre les mouvements ultras et des membres de Autre Russie.

      Jean-Marie Chauvier est un collaborateur régulier de Mondialisation.ca.

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