Abdou B n’est plus. Il a quitté trop prématurément le monde des médias… Mais l’image qu’il laisse derrière lui est trop forte ; elle est inaltérable. Elle est gravée dans les esprits.
Son parcours, ses faits parlent pour l’homme. Abdou B était pétri de talents. Critique de cinéma, polémiste, agitateur d’idées ; on ne peut rester indifférents face à ce créatif qui abreuvait, à chaque rencontre, d’anecdotes un brin nostalgiques… Abdou B a traversé plusieurs périodes politiques du pays, marquant les esprits. C’est à la télévision qu’il avait donné la pleine mesure de son talent. Il restera, dans l’histoire des médias algériens, le professionnel qui a réussi à briser le carcan de la médiocrité.
Nommé en 1990 par Mouloud Hamrouche à la tête de l’ENTV, avec une volonté politique très soutenue de faire bouger les lignes dans un secteur très sensible pour les différents cercles du pouvoir, Abdou B relève le challenge. Non sans difficultés et avec beaucoup d’opiniâtreté, il modifie les règles qui ponctuent la marche de l’ENTV. La télévision publique se libère des pesanteurs politiques et bureaucratiques. Elle adopte le ton de la réalité ; elle s’ouvre à la société, traversée par des contradictions jusque-là enfouies. C’est la rupture. C’est même une révolution, disaient certains.
Abdou B n’hésite pas, ne recule pas, l’expression est libérée. Le haut lieu de l’autoritarisme de Boumediène et de l’expression de la pensée unique vacille. La langue de bois est chassée du boulevard des Martyrs : débats politiques contradictoires, reportages et enquêtes montrent une autre Algérie… La politique de Mouloud Hamrouche, à l’époque aux commandes du gouvernement, est passée au peigne fin et critiquée parfois vertement. Impensable avec d’autres… C’était en 1990. Des Tunisiens et des Marocains sont branchés sur l’ENTV tous les soirs, savourant les débats, les envolées des hommes politiques. Dix ans après, Al Jazeera lui emboîte le pas avec le succès qu’on lui connaît.
Abdou B s’était appuyé, pour revoir de fond en comble la grosse machine, à cacher la vérité de l’ENTV, sur l’apport de nouvelles compétences. De jeunes talents furent recrutés, s’engouffrant dans les nouveaux espaces d’expression. Quand la parenthèse de la liberté se referme, ces journalistes, formés à la dure, iront faire le bonheur des plateaux des télévisions arabes, laissant l’ENTV renouer avec son ronronnement imposé par les dirigeants du pays.
Abdou B avait innové, cassant les tabous. On ne peut s’empêcher de faire le lien avec l’état actuel de l’audiovisuel algérien et les bouleversements que le Monde arabe a connus.
Al Jazeera et d’autres chaînes arabes façonnent aujourd’hui l’opinion algérienne. Les dirigeants de notre pays portent une lourde responsabilité dans l’arriération indigne de l’audiovisuel algérien. Les politiques restrictives des libertés d’expression et de presse ont favorisé la percée des chaînes arabes dans nos foyers. Les téléspectateurs algériens sont jetés en pâture aux chaînes étrangères. L’ENTV ne fait plus le poids. Les Algériens ne la regardent plus depuis fort longtemps déjà. Elle n’a plus aucun attrait pour eux. Et ce ne sont pas les sondages «bidon» qui modifieront la réalité. Il aurait fallu tout simplement laisser Abdou B et bien d’autres faire leur boulot à la tête de l’ENTV. Mais les dirigeants algériens ont peur des journalistes ; ont peur de la vérité.
Omar Belhouchet
El Watan
Son parcours, ses faits parlent pour l’homme. Abdou B était pétri de talents. Critique de cinéma, polémiste, agitateur d’idées ; on ne peut rester indifférents face à ce créatif qui abreuvait, à chaque rencontre, d’anecdotes un brin nostalgiques… Abdou B a traversé plusieurs périodes politiques du pays, marquant les esprits. C’est à la télévision qu’il avait donné la pleine mesure de son talent. Il restera, dans l’histoire des médias algériens, le professionnel qui a réussi à briser le carcan de la médiocrité.
Nommé en 1990 par Mouloud Hamrouche à la tête de l’ENTV, avec une volonté politique très soutenue de faire bouger les lignes dans un secteur très sensible pour les différents cercles du pouvoir, Abdou B relève le challenge. Non sans difficultés et avec beaucoup d’opiniâtreté, il modifie les règles qui ponctuent la marche de l’ENTV. La télévision publique se libère des pesanteurs politiques et bureaucratiques. Elle adopte le ton de la réalité ; elle s’ouvre à la société, traversée par des contradictions jusque-là enfouies. C’est la rupture. C’est même une révolution, disaient certains.
Abdou B n’hésite pas, ne recule pas, l’expression est libérée. Le haut lieu de l’autoritarisme de Boumediène et de l’expression de la pensée unique vacille. La langue de bois est chassée du boulevard des Martyrs : débats politiques contradictoires, reportages et enquêtes montrent une autre Algérie… La politique de Mouloud Hamrouche, à l’époque aux commandes du gouvernement, est passée au peigne fin et critiquée parfois vertement. Impensable avec d’autres… C’était en 1990. Des Tunisiens et des Marocains sont branchés sur l’ENTV tous les soirs, savourant les débats, les envolées des hommes politiques. Dix ans après, Al Jazeera lui emboîte le pas avec le succès qu’on lui connaît.
Abdou B s’était appuyé, pour revoir de fond en comble la grosse machine, à cacher la vérité de l’ENTV, sur l’apport de nouvelles compétences. De jeunes talents furent recrutés, s’engouffrant dans les nouveaux espaces d’expression. Quand la parenthèse de la liberté se referme, ces journalistes, formés à la dure, iront faire le bonheur des plateaux des télévisions arabes, laissant l’ENTV renouer avec son ronronnement imposé par les dirigeants du pays.
Abdou B avait innové, cassant les tabous. On ne peut s’empêcher de faire le lien avec l’état actuel de l’audiovisuel algérien et les bouleversements que le Monde arabe a connus.
Al Jazeera et d’autres chaînes arabes façonnent aujourd’hui l’opinion algérienne. Les dirigeants de notre pays portent une lourde responsabilité dans l’arriération indigne de l’audiovisuel algérien. Les politiques restrictives des libertés d’expression et de presse ont favorisé la percée des chaînes arabes dans nos foyers. Les téléspectateurs algériens sont jetés en pâture aux chaînes étrangères. L’ENTV ne fait plus le poids. Les Algériens ne la regardent plus depuis fort longtemps déjà. Elle n’a plus aucun attrait pour eux. Et ce ne sont pas les sondages «bidon» qui modifieront la réalité. Il aurait fallu tout simplement laisser Abdou B et bien d’autres faire leur boulot à la tête de l’ENTV. Mais les dirigeants algériens ont peur des journalistes ; ont peur de la vérité.
Omar Belhouchet
El Watan
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