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La France, un investisseur prudent en Algérie

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  • La France, un investisseur prudent en Algérie

    lu dans l'édition du monde aujourd'hui,

    http://www.lemonde.fr/web/article/0,...-779813,0.html

    Venez construire une unité de montage." L'interpellation s'adresse au constructeur automobile français Citroën. Elle émane du ministre algérien de la formation professionnelle, El Hadi Khaldi, qui, mardi 30 mai, inaugurait, à Alger, le nouveau centre de formation de la marque aux chevrons.
    La scène est symptomatique : loin des tensions diplomatiques, la question des investissements français constitue "la dominante" du moment dans les relations entre l'Algérie et la France, comme le relève Pierre Mourlevat, chef de la mission économique française à Alger.
    Ce n'est pas totalement par hasard que le président Abdelaziz Bouteflika a inauguré, jeudi 1er juin, la 39e Foire internationale d'Alger (FIA) en débutant sa visite par le pavillon France (325 sociétés). L'événement diplomatico-commercial doit s'achever le 8 juin.
    "Il faut faire plus", disent les Algériens aux entrepreneurs français, mettant en avant les liens commerciaux forts entre les deux pays et une certaine communauté culturelle. "Nous faisons déjà beaucoup mais il faut créer les conditions pour que nous puissions faire plus", répondent ces derniers, conscients des opportunités offertes par un pays à qui l'explosion des recettes liées aux hydrocarbures a conféré une aisance financière, synonyme aussi d'ouverture accrue à de nouveaux partenaires économiques.
    "Le discours des Algériens c'est : "Ne nous prenez pas uniquement pour des vaches à lait", relève Bernard Faure, directeur général de Sanofi-Aventis en Algérie, où le groupe dispose de trois usines de médicaments. Ils estiment qu'au regard du volume d'affaires que nous réalisons avec eux, le volume des investissements français en Algérie est faible."
    Au plan commercial, la France reste - de très loin - le premier fournisseur de l'Algérie : en 2005, elle lui a vendu 4,7 milliards d'euros (+ 10,3% par rapport à 2004) de produits et de biens.
    Jeudi, en inaugurant la FIA, le président Bouteflika n'a eu de cesse d'exhorter les entreprises présentes - pas seulement les françaises - à investir en Algérie et de ne pas se contenter d'exporter leurs produits. L'Algérie a besoin de savoir-faire, a-t-il insisté.
    "Ce discours sur la frilosité française en matière d'investissements n'est pas tout à fait faux, poursuit M. Faure, mais c'est aussi une vision un peu biaisée. On mélange l'affectif et le factuel, car des investissements, il y en a." "On peut faire mieux, c'est sûr, mais nous sommes quand même les premiers investisseurs, hors hydrocarbures", appuie Michel de Caffarelli, président de la Chambre française de commerce et d'industrie en Algérie.
    "Environ 200 entreprises françaises sont installées, soit 7 000 emplois", détaille M. Mourlevat. En 2005, les investissements directs français ont progressé de 74 %, à 140 millions de dollars (109 millions d'euros), selon la Banque d'Algérie. "Il y a de nombreux projets. Et substantiels", poursuit M. Mourlevat, citant "les banques qui développent leurs réseaux d'agences", ou Accor "et son plan de construction de 36 hôtels Ibis". Le fromager Bel construit une deuxième usine à l'ouest d'Alger. Danone a un projet de biscuiterie.
    MANQUE DE MAIN-D'oeUVRE QUALIFIÉE
    Après Carrefour, qui a ouvert un magasin à Alger en janvier, Casino cherche aussi à s'installer. "Il y a une maturité politique et économique plus grande. Le pays présente toutes les caractéristiques d'une économie ouverte", justifie la direction du groupe de distribution stéphanois.
    "Au-delà du fait que le pays sort d'une guerre civile, l'environnement économique n'est pas optimal pour investir", tempère Marco Lenz, directeur général de Renault Trucks Algérie (réseau de distribution de camions). "Il y a de fortes barrières", confirme M. Faure.
    Outre les lourdeurs administratives, se pose d'abord "le problème" du foncier : trouver un terrain est une tâche ardue. Le système bancaire, pour lequel une réforme est promise de longue date, est également qualifié d'"archaïque". "Mais ça s'améliore", assure Michel de Caffarelli, pointant le fait que le délai pour créditer les chèques "vient de tomber à trois ou quatre jours, contre quatre mois" jusqu'alors. Le contrôle des changes est un autre frein.
    Surtout, dans un pays où le taux de chômage est de 15,3 % (75 % chez les moins de 30 ans), "il y a un manque criant de main-d'oeuvre qualifiée", explique M. Faure. "La formation, c'est l'essentiel de notre investissement, note M. Lenz, mais les Algériens ne la reconnaissent pas comme telle."
    "Pour favoriser les investissements, il faut aussi que les Algériens avancent sur les privatisations", indique-t-on auprès de Christine Lagarde, la ministre française déléguée au commerce extérieur qui était à la Foire d'Alger, le 3 juin, pour la journée France. Le gouvernement algérien s'est engagé dans un plan de privatisation de 1 200 entreprises. Mais il avance lentement. Et les sociétés concernées ne constituent pas forcément une base sur laquelle s'appuyer pour investir. "L'industrie ici n'existe qu'à travers de grandes sociétés nationales qui sont déliquescentes", souligne M. de Caffarelli.
    La pression qu'ils exercent sur les sociétés françaises pour qu'elles accroissent leurs investissements n'empêche pas les Algériens de se passer de plus en plus de leurs services. "Compte tenu de leur aisance financière, les Algériens n'ont pas d'état d'âme", résume M. Lenz.
    Dopée par les recettes tirées du pétrole et du gaz - près de 55 milliards d'euros en 2005 -, l'Algérie, qui n'a plus besoin de financements externes pour ses projets de développement, a troqué les marchés de gré à gré pour les appels d'offres internationaux. Une évolution, qui favorise le moins disant et qui n'avantage donc pas les Français.
    Dans ce contexte, les Asiatiques gagnent du terrain. Les Chinois notamment. Dans le BTP, par exemple, ils raflent tout, ou presque. En 2005, ils sont devenus le quatrième fournisseur de l'Algérie, gagnant sept places.
    "Il n'y a jamais eu de préférence pour les Français. Nous étions plus présents que les autres avant, c'est tout, assure M. de Caffarelli. Aujourd'hui, le marché s'ouvre, il y a des moyens et la concurrence afflue."
    Philippe Le Coeur
    Article paru dans l'édition du 06.06.06
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