UNE IMPULSION POUR LE MAGHREB
Le nouveau ministre marocain des Affaires étrangères, Saad-Eddine ElOthmani, a réservé sa première sortie à l'Algérie où il sera en visite officielle de deux jours à partir de demain. La visite, qui a été précédée par des progrès de la coopération au niveau sectoriel, a indéniablement un aspect politique important à l'heure où tous les dirigeants des pays de la région, «anciens» et «nouveaux», parlent à l'unisson d'une relance de l'Union maghrébine. Et il n'est pas exagéré de dire que tous les dirigeants des autres pays de l'UMA attendent de l'Algérie et du Maroc qu'ils donnent l'élan qui fait défaut à la construction maghrébine. Tous s'accordent à dire que la nature de la relation bilatérale entre Alger et Rabat est absolument décisive. Que ce soit de manière négative par la perpétuation du «non-Maghreb» ou de manière positive par une remise en marche, voire une accélération du processus.
Certes, la paralysie de l'Union maghrébine n'est pas exclusivement le fait des dissensions algéro-marocaines, mais il est certain que les choses iraient beaucoup mieux si leurs relations étaient bonnes, voire excellentes. Or, il est patent que depuis 1994, l'Algérie et le Maroc n'ont même pas des relations «normales». Les deux parties pouvaient avoir la même idée sur la manière de relancer les relations bilatérales, mais ils ne l'ont jamais eue au même moment. Cette idée, simple, pratique et qui préserve l'avenir et le conforte, consiste à ne plus mêler le dossier du Sahara Occidental à la relation bilatérale.
Ce dossier, sur lequel les positions sont trop éloignées pour imaginer une vision de compromis, pouvait être sorti de la relation bilatérale dès lors qu'il était traité par l'Onu. Ce fut pendant un temps une vision défendue par l'Algérie et refusée par le Maroc. Par la suite, ce fut l'inverse. Et au fond, ces rendez-vous manqués ne faisaient que traduire une absence de volonté politique, s'alimentant d'un climat de méfiance entretenu de part et d'autre. La situation s'est d'autant plus figée que les relations transversales entre acteurs de la société et de la vie économique étaient absentes ou considérablement réduites.
Les choses commencent à bouger, lentement. Et le fait que les Américains managent des rencontres d'entrepreneurs maghrébins devrait donner à réfléchir, sans bien entendu en faire une lecture sur le registre du complot. Depuis l'initiative américaine Eizenstat lancée en 1999 et restée sans lendemain, on sait qu'il existe une demande externe, américaine et européenne, pour un marché maghrébin. Pas pour nos beaux yeux, ni pour donner corps aux idées du Congrès maghrébin de Tanger. Mais on aurait pu en tirer la conclusion qu'il vaut mieux que nous fassions, par nous-mêmes, notre Maghreb au lieu d'attendre qu'on le fasse pour nous
La visite du ministre marocain des Affaires étrangères se fait dans un contexte qui semble favorable à la relation du processus maghrébin. Il faut espérer que cela ne soit pas un nouveau faux rendez-vous. L'Algérie et le Maroc peuvent en effet donner de l'allant à la construction maghrébine. C'est une question de volonté politique, car l'intérêt économique de cet espace n'a nul besoin de grandes démonstrations.
par M. Saadoune
Le Quotidien d'Oran
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