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Par LE PROFESSEUR DIDIER RAOULT
C'est l'une des maladies qui tue le plus dans le monde et en particulier les enfants. Le paludisme est dû à un parasite, le plasmodium, qui circule dans le sang des humains infectés, mais aussi de nos cousins (les gorilles) et de certains moustiques, les anophèles, qui aiment prendre leur repas de sang sur l'homme. Leurs victimes vivent plutôt dans les zones rurales. Il arrive qu'elles avalent le parasite au cours d'un repas, et le transmettent à un autre humain au cours d'un autre repas.
Lutter contre le paludisme consiste, d'une part, à prévenir l'infection par la prise de médicaments - permanente ou séquentielle - et, d'autre part, par l'utilisation des insecticides épandus à doses massives en particulier dans les zones humides et les flaques afin de tuer les larves de moustiques. C'est ce qui a été fait pendant tout le XXe siècle avec le DDT. Ce puissant insecticide a, incontestablement, permis de faire reculer les limites du paludisme, mais il reste présent dans l'environnement, car du fait de la résistance croissante des moustiques, les volumes utilisés nécessaires sont considérables.
Les moustiques ont changé l'heure du dîner !
Une autre manière d'éviter les piqûres de moustiques est d'utiliser une moustiquaire la nuit, les anophèles ayant l'habitude de piquer entre 23 heures et 4 heures du matin. Ainsi, une stratégie simple, massivement financée par la fondation de Bill Gates et promue par l'OMS, a consisté à distribuer en zone rurale en Afrique des moustiquaires imprégnées d'un nouvel insecticide : la perméthrine. La moustiquaire empêche mécaniquement et chimiquement les moustiques de venir piquer la nuit et de transmettre le paludisme. De fait, la mise en place progressive de ce programme a permis une diminution très spectaculaire du paludisme, à tel point que l'on a commencé à entendre des cris de victoire sur le paludisme dans la presse, y compris scientifique.
Malheureusement, comme souvent, nous sous-estimions nos adversaires ! Une équipe de mon laboratoire a noté, après une disparition quasi complète du paludisme en zone rurale au Sénégal, sa réapparition brutale. Pourquoi ? D'abord, les moustiques ont changé l'heure du dîner ! En effet, la moustiquaire protégeant entre 23 heures et 6 heures du matin, les anophèles se sont mis à piquer plus tôt, vers 21 heures, au moment ou personne n'est encore couché sous sa moustiquaire ! D'autre part, certains moustiques résistent maintenant à la perméthrine.
Enfin, dans les grandes cités, et en particulier à Dakar, les moustiques s'implantent à l'intérieur des villes. Chaque flaque d'eau, chaque zone d'eau non traitée devenant maintenant un gîte pour moustiques. On le voit, les moustiques ont changé de restaurant. Ils ont aussi changé l'heure du repas. Ils s'installent dans les villes, et ils mangent plus tôt puisqu'on les empêche de manger plus tard. Ceci est une histoire typique de notre lutte contre les maladies infectieuses. Elle est ininterrompue, non modélisable et nécessite à la fois de la vigilance et de nouvelles stratégies pour répondre aux défis permanents que les autres êtres vivants nous lancent.
lepoint.fr
C'est l'une des maladies qui tue le plus dans le monde et en particulier les enfants. Le paludisme est dû à un parasite, le plasmodium, qui circule dans le sang des humains infectés, mais aussi de nos cousins (les gorilles) et de certains moustiques, les anophèles, qui aiment prendre leur repas de sang sur l'homme. Leurs victimes vivent plutôt dans les zones rurales. Il arrive qu'elles avalent le parasite au cours d'un repas, et le transmettent à un autre humain au cours d'un autre repas.
Lutter contre le paludisme consiste, d'une part, à prévenir l'infection par la prise de médicaments - permanente ou séquentielle - et, d'autre part, par l'utilisation des insecticides épandus à doses massives en particulier dans les zones humides et les flaques afin de tuer les larves de moustiques. C'est ce qui a été fait pendant tout le XXe siècle avec le DDT. Ce puissant insecticide a, incontestablement, permis de faire reculer les limites du paludisme, mais il reste présent dans l'environnement, car du fait de la résistance croissante des moustiques, les volumes utilisés nécessaires sont considérables.
Les moustiques ont changé l'heure du dîner !
Une autre manière d'éviter les piqûres de moustiques est d'utiliser une moustiquaire la nuit, les anophèles ayant l'habitude de piquer entre 23 heures et 4 heures du matin. Ainsi, une stratégie simple, massivement financée par la fondation de Bill Gates et promue par l'OMS, a consisté à distribuer en zone rurale en Afrique des moustiquaires imprégnées d'un nouvel insecticide : la perméthrine. La moustiquaire empêche mécaniquement et chimiquement les moustiques de venir piquer la nuit et de transmettre le paludisme. De fait, la mise en place progressive de ce programme a permis une diminution très spectaculaire du paludisme, à tel point que l'on a commencé à entendre des cris de victoire sur le paludisme dans la presse, y compris scientifique.
Malheureusement, comme souvent, nous sous-estimions nos adversaires ! Une équipe de mon laboratoire a noté, après une disparition quasi complète du paludisme en zone rurale au Sénégal, sa réapparition brutale. Pourquoi ? D'abord, les moustiques ont changé l'heure du dîner ! En effet, la moustiquaire protégeant entre 23 heures et 6 heures du matin, les anophèles se sont mis à piquer plus tôt, vers 21 heures, au moment ou personne n'est encore couché sous sa moustiquaire ! D'autre part, certains moustiques résistent maintenant à la perméthrine.
Enfin, dans les grandes cités, et en particulier à Dakar, les moustiques s'implantent à l'intérieur des villes. Chaque flaque d'eau, chaque zone d'eau non traitée devenant maintenant un gîte pour moustiques. On le voit, les moustiques ont changé de restaurant. Ils ont aussi changé l'heure du repas. Ils s'installent dans les villes, et ils mangent plus tôt puisqu'on les empêche de manger plus tard. Ceci est une histoire typique de notre lutte contre les maladies infectieuses. Elle est ininterrompue, non modélisable et nécessite à la fois de la vigilance et de nouvelles stratégies pour répondre aux défis permanents que les autres êtres vivants nous lancent.
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