Marrakech. Des scandales et des hommes
Dans le souci de rapprocher ses lecteurs d’un livre qui risque de faire des vagues, au Maroc et en France, TelQuel en publie de larges extraits en avant-première.
à Marrakech, le summum, c’est le Royal Mansour, dans le quartier huppé de l’Hivernage, un palace plus discret que la Mamounia et le seul, au fond, qui sait faire la différence entre un millionnaire et un milliardaire. Pour ce réveillon 2010, Cécilia Ciganer-Albeniz et son nouveau mari, Richard Attias, sont descendus au Royal Mansour. Le couple est l’invité de Mohammed VI. Cécilia et Richard Attias ne sont pas des intimes du monarque, mais des “amis” du Maroc. Ils sont logés aux frais de la monarchie dans le “riad d’honneur”, le plus luxueux des cinquante-trois riads qui composent le Royal Mansour : quatre chambres qui donnent sur des jardins, pas moins de deux piscines, un spa, une salle de fitness et en sous-sol un cinéma. Le cadeau est royal : la nuit au riad d’honneur est facturée 34 000 euros. Un tarif très théorique. En réalité, depuis l’ouverture du Royal Mansour en 2010, le riad n’a jamais été loué mais systématiquement offert. Le riad d’honneur est réservé aux amis de Mohammed VI et du Maroc. Il faut le prendre pour ce qu’il est : un présent royal, le témoignage baroque du bon plaisir du souverain.
Demain l’Iran ?
Le Royal Mansour mérite que l’on s’y attarde. Classé en 2011 parmi les hôtels “les plus extraordinaires du monde” par le Conde Nast Traveler, la bible des voyageurs fortunés, il est d’une certaine façon le fruit d’un règlement de comptes posthume. Entre un fils et son père, entre deux rois, Mohammed VI et Hassan II. Ce dernier, à l’image d’un sultan oriental, avait fait construire au fil de ses trente-huit années de règne maints palais par ses architectes français fétiches, Michel Pinseau et André Paccard, sans compter les résidences royales, les villas d’été, les villas d’hiver dans lesquelles il séjournait au rythme des saisons et de son humeur, traînant derrière lui un harem et une armée de serviteurs. Mohammed VI s’est détaché de ce patrimoine immobilier. Le nouveau monarque entend lui aussi être un bâtisseur comme son père. Il veut avoir ses propres palais et, dans le même temps, à coups de millions, transformer en hôtels de luxe certains des biens dont il a hérité. Le Royal Mansour est le premier palace griffé Mohammed VI.
Combien a coûté cette folie condamnée à n’être jamais rentable ? Le chiffre tient du secret d’Etat. Le Royal Mansour appartient donc à Mohammed VI ou, plus précisément, à Siger – le holding où est investi l’essentiel de sa fortune – à travers une kyrielle de filiales. Peut-être dans la perspective de décliner le Royal Mansour comme une marque, Siger a d’ailleurs déposé le nom dans tous les pays d’Europe, aux Etats-Unis… et même dans l’Iran des mollahs.
Sexe, orgies et pédophilie
Depuis 2005, les bas-fonds de Marrakech mais aussi les riads repliés sur eux-mêmes, les palaces étoilés, les bars branchés, les night-clubs baroques, les restos chics, les résidences tapageuses et les villas cossues avec leurs vigiles sourcilleux ont supplanté Bangkok, longtemps destination phare du tourisme sexuel. Aujourd’hui, la capitale thaïlandaise est moins attirante. Trop éloignée de l’Europe. Trop exposée aux tsunamis. Et trop turbulente du point de vue politique.
A Marrakech la paisible, quel que soit le lieu de sortie, le sexe tarifié est omniprésent et les prix aussi variés que les prestations. Tarif de la soirée pour une “ambianceuse” croisée dans un endroit à la mode dans le quartier huppé de l’Hivernage : environ 200 euros. Au total, elles seraient à Kech plus de 20 000, âgées de 16 à 30 ans, à offrir leurs services avec l’espoir de gagner jusqu’à 15 000 euros par mois pour les plus sollicitées. La passe furtive, elle, se négocie aux alentours de 10 euros dans les bosquets attenants au minaret de la Koutoubia. Tarifs identiques dans les jardins du centre-ville et sur Djema’a el-Fna, rebaptisée “le souk des pédés” par les Marrakchis. Ne dit-on pas sur les sites des tours opérateurs que la sulfureuse Kech est la troisième destination “gay friendly” du monde ?
Un riche septuagénaire suisse, ancien dandy homosexuel, raconte au journaliste de passage les folles histoires qu’il a vécues durant des années à Marrakech. Comme celle de ce dîner privé offert par un styliste parisien dans l’un des restaurants les plus courus de la médina où un adolescent nu, porté sur un palanquin, a été offert aux convives en guise de dessert. “C’était comme dans un film de Pasolini”, se rappelle-t-il. Et d’ajouter : “J’ai des amis, des connaissances qui vivent ici et qui sont des célébrités françaises de passage aussi que j’ai souvent croisées en soirée”.
(à suivre
Luxe. Au même titre que le Royal Mansour, la Mamounia accueille les millionaires, voire les milliardaires de la planète. (DR)
“Paris Marrakech : luxe, pouvoir et réseaux” (éd. Calmann-lévy) des journalistes Jean-Pierre Tuquoi et Ali Amar, qui sort cette semaine en France, revient sur les liens qui relient le royaume à son ancien pays colonisateur, en mettant l’accent sur la nature très “française” de la ville ocre, avec en toile de fond complots politiques, arrangements économiques… et coulisses people.Dans le souci de rapprocher ses lecteurs d’un livre qui risque de faire des vagues, au Maroc et en France, TelQuel en publie de larges extraits en avant-première.
L’hôtel du roi
à Marrakech, le summum, c’est le Royal Mansour, dans le quartier huppé de l’Hivernage, un palace plus discret que la Mamounia et le seul, au fond, qui sait faire la différence entre un millionnaire et un milliardaire. Pour ce réveillon 2010, Cécilia Ciganer-Albeniz et son nouveau mari, Richard Attias, sont descendus au Royal Mansour. Le couple est l’invité de Mohammed VI. Cécilia et Richard Attias ne sont pas des intimes du monarque, mais des “amis” du Maroc. Ils sont logés aux frais de la monarchie dans le “riad d’honneur”, le plus luxueux des cinquante-trois riads qui composent le Royal Mansour : quatre chambres qui donnent sur des jardins, pas moins de deux piscines, un spa, une salle de fitness et en sous-sol un cinéma. Le cadeau est royal : la nuit au riad d’honneur est facturée 34 000 euros. Un tarif très théorique. En réalité, depuis l’ouverture du Royal Mansour en 2010, le riad n’a jamais été loué mais systématiquement offert. Le riad d’honneur est réservé aux amis de Mohammed VI et du Maroc. Il faut le prendre pour ce qu’il est : un présent royal, le témoignage baroque du bon plaisir du souverain.
Demain l’Iran ?
Le Royal Mansour mérite que l’on s’y attarde. Classé en 2011 parmi les hôtels “les plus extraordinaires du monde” par le Conde Nast Traveler, la bible des voyageurs fortunés, il est d’une certaine façon le fruit d’un règlement de comptes posthume. Entre un fils et son père, entre deux rois, Mohammed VI et Hassan II. Ce dernier, à l’image d’un sultan oriental, avait fait construire au fil de ses trente-huit années de règne maints palais par ses architectes français fétiches, Michel Pinseau et André Paccard, sans compter les résidences royales, les villas d’été, les villas d’hiver dans lesquelles il séjournait au rythme des saisons et de son humeur, traînant derrière lui un harem et une armée de serviteurs. Mohammed VI s’est détaché de ce patrimoine immobilier. Le nouveau monarque entend lui aussi être un bâtisseur comme son père. Il veut avoir ses propres palais et, dans le même temps, à coups de millions, transformer en hôtels de luxe certains des biens dont il a hérité. Le Royal Mansour est le premier palace griffé Mohammed VI.
Combien a coûté cette folie condamnée à n’être jamais rentable ? Le chiffre tient du secret d’Etat. Le Royal Mansour appartient donc à Mohammed VI ou, plus précisément, à Siger – le holding où est investi l’essentiel de sa fortune – à travers une kyrielle de filiales. Peut-être dans la perspective de décliner le Royal Mansour comme une marque, Siger a d’ailleurs déposé le nom dans tous les pays d’Europe, aux Etats-Unis… et même dans l’Iran des mollahs.
Sexe, orgies et pédophilie
Depuis 2005, les bas-fonds de Marrakech mais aussi les riads repliés sur eux-mêmes, les palaces étoilés, les bars branchés, les night-clubs baroques, les restos chics, les résidences tapageuses et les villas cossues avec leurs vigiles sourcilleux ont supplanté Bangkok, longtemps destination phare du tourisme sexuel. Aujourd’hui, la capitale thaïlandaise est moins attirante. Trop éloignée de l’Europe. Trop exposée aux tsunamis. Et trop turbulente du point de vue politique.
A Marrakech la paisible, quel que soit le lieu de sortie, le sexe tarifié est omniprésent et les prix aussi variés que les prestations. Tarif de la soirée pour une “ambianceuse” croisée dans un endroit à la mode dans le quartier huppé de l’Hivernage : environ 200 euros. Au total, elles seraient à Kech plus de 20 000, âgées de 16 à 30 ans, à offrir leurs services avec l’espoir de gagner jusqu’à 15 000 euros par mois pour les plus sollicitées. La passe furtive, elle, se négocie aux alentours de 10 euros dans les bosquets attenants au minaret de la Koutoubia. Tarifs identiques dans les jardins du centre-ville et sur Djema’a el-Fna, rebaptisée “le souk des pédés” par les Marrakchis. Ne dit-on pas sur les sites des tours opérateurs que la sulfureuse Kech est la troisième destination “gay friendly” du monde ?
Un riche septuagénaire suisse, ancien dandy homosexuel, raconte au journaliste de passage les folles histoires qu’il a vécues durant des années à Marrakech. Comme celle de ce dîner privé offert par un styliste parisien dans l’un des restaurants les plus courus de la médina où un adolescent nu, porté sur un palanquin, a été offert aux convives en guise de dessert. “C’était comme dans un film de Pasolini”, se rappelle-t-il. Et d’ajouter : “J’ai des amis, des connaissances qui vivent ici et qui sont des célébrités françaises de passage aussi que j’ai souvent croisées en soirée”.
(à suivre
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