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«Un excédent commercial, cela ne se mange pas»

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  • «Un excédent commercial, cela ne se mange pas»

    Nicolas Sarkozy a évoqué pas moins de quinze fois l'Allemagne lors de sa dernière intervention télévisée. Berlin se révèle alors comme le modèle à suivre. Pour Laurent Pinsolle, soutien de Nicolas Dupont-Aignan, « cette lubie présidentielle destinée à vendre sa réélection ne résiste pas à une analyse de fond ».

    La France, ce n’est pas l’Allemagne

    Bien sûr, il est toujours intéressant de regarder ce qui se passe en dehors de nos frontières pour voir si on peut s’inspirer de bonnes pratiques qui pourraient nous profiter. Mais là, Nicolas Sarkozy a poussé l’exercice jusqu’à la caricature, instaurant notre voisin comme le modèle absolu, qu’il faudrait suivre sans la moindre nuance. Par-delà le fait qu’il soit un peu tard dans le quinquennat pour avoir cette révélation, cela montre l’épuisement idéologique de l’équipe au pouvoir.

    Mais surtout, la France, ce n’est pas l’Allemagne et il est totalement absurde de vouloir calquer notre politique sur celle de notre voisin, très différent de nous. De l’autre côté du Rhin, la population diminue, du nôtre, nous gagnons quatre cent mille habitants tous les ans. En clair, nous avons structurellement besoin d’une croissance du PIB supérieure de près d’un point. En outre, notre démographie impose à l’Etat des dépenses supplémentaires.

    Notre pays, 20 % moins peuplé et moins riche, doit financer l’éducation et la garde de 20 % d’enfants de plus que l’Allemagne. Nos besoins en matière de logements sont sans cesse croissants. Enfin, notre voisin dispose d’une spécialisation industrielle réussie et d’un excédent commercial colossal, qui implique une monnaie chère quand notre pays, en difficulté sur le plan commercial et qui dépend du tourisme, a besoin d’une monnaie plutôt bon marché.

    Et il ne faut pas fantasmer le modèle allemand, qui n’est pas sans limite. Le Marianne du 21 janvier est revenu sur son côté obscur. En introduction, il faut rappeler que la compétitivité du pays a été obtenue au prix d’une stagnation globale des salaires (le salaire moyen a baissé de 2,5 % de 2000 à 2010 ) qui camoufle de fortes inégalités, puisque les bas salaires (qui ne sont pas protégés par un SMIC) ont baissé, eux, de 20%. Et puis, la croissance n’a pas été forte sur la période.

    Bien sûr, le chômage allemand est plus faible, mais cela vient en partie de la démographie et il y a débat sur les chiffres, comme le rapporte le blog du débat sur le libre-échange. 15 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, plus qu’en France, avec l’explosion du nombre de travailleurs pauvres. Ceci est d’autant plus vrai que le temps partiel a explosé. Marianne souligne que le pays compte pas moins de 6,5 millions de « mini-jobers » avec des emplois à 400 euros pour 60 heures par mois…

    Bref, l’Allemagne, qui était un pays de classes moyennes, subit la centrifugeuse de la mondialisation, qui fait exploser les revenus des plus riches mais lessive également les revenus des classes populaires et moyennes. En outre, les records d’exportations du pays ne se traduisent pas de manière très concrète pour les Allemands : un excédent commercial, cela ne se mange pas. Pire, il y a débat sur le niveau réel du chômage, qui serait camouflé et beaucoup plus élevé.

    Bref, Nicolas Sarkozy fait totalement fausse route quand il glorifie de manière aussi absolue (on pourrait dire enfantine) le modèle allemand. Non seulement ce modèle est inadapté à notre pays, trop différent de notre voisin, mais en plus, on ne saurait en oublier les côtés obscurs…

    Laurent Pinsolle - Blogueur associé à Marianne
    Ce que vous faites de bien et de mal, vous le faites à vous
    Mahomet
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