Oui, il est possible de relancer l'économie sans fabriquer plus de dettes, et de réduire les déficits sans sombrer dans le cercle vicieux de l'austérité. Alors que les idées neuves manquent dans cette campagne, l'économiste Guy Abeille propose deux pistes originales : un mécanisme de report de perception de l'impôt sur le revenu et un nouvel instrument financier mobilisant l'immense capital immobilier détenu par les ménages.
Ancien chargé de mission à la direction du Budget, Guy Abeille s'est fait connaître en publiant dans "La Tribune" un article racontant comment François Mitterrand avait demandé qu'on lui invente un moyen de contenir les ardeurs dépensières de sa majorité : cela avait donné le fameux ratio des 3% du PIB promis à un bel avenir avec le Traité de Maastricht (retrouvez ce témoignage en cliquant ici).
Il récidive en proposant au débat de la morne campagne électorale française deux idées iconoclastes pour résoudre le dilemne principal de la politique économique, celui dont aucun des candidats ne parle sérieusement : comment les économies européennes peuvent-elles réduire leurs déficits sans que cette austérité ne vienne peser encore sur leur croissance... dont la dépression accentuée nourrira en retour les déficits.
Il a imaginé pour cela deux mécanismes simples, qui sont tous deux des dispositifs de relance, ou au moins de soutien conjoncturel, qui laissent indemnes les dettes souveraines. S'appuyant sur les mécanismes existants et visant, d'abord et avant tout, à la plus grande simplicité, ils peuvent selon lui être mis en oeuvre sans obstacle ni délai. Ils ont chacun pour but de redonner un pouvoir d'achat immédiat aux ménages par une action publique qui, cependant, ne coûte pas aux Etats.
Le premier est un simple mécanisme de trésorerie modifiant, le temps de la relance, le mode de perception de l'impôt sur le revenu. Il l'a intitulé "REPIT", pour "Report, Exceptionnel et Portant Intérêt, de Taxe".
Le second est plus audacieux. Il vise à relâcher dans l'économie une fraction de l'immense capital détenu, et gelé, sous forme d'immobilier par les ménages (7.000 milliards d'euros pour la France, de l'ordre de 20.000 milliards pour la zone Euro et, au bas mot, de 30.000 milliards pour l'Europe dans son ensemble). Cela, en faisant droit à une nouvelle forme de propriété, qualifiée de "propriété faible", et en pratiquant un nouveau mode de "politique monétaire non conventionnelle", qu'il nomme "Householders Easing". Cet outil de relance pourrait s'intituler le MIEL, pour "Mobilisation d'Immobilier En Liquidité".
Retrouvez ci-dessous le détail de ces deux mécanismes.
1 - Le REPIT, ou "Report, Exceptionnel et Portant Intérêt, de Taxe"
En anglais, ce pourrait être RESPITE, répit en anglais, pour "Running Economic Stimulus by Postponing, with Interest, Tax on Earnings". C'est un simple mécanisme de trésorerie, techniquement et juridiquement facile à mettre en oeuvre.
Le mécanisme
L'année n, l'Etat signifie, comme à l'ordinaire, à chaque ménage le montant de son impôt sur le revenu. Cet impôt a donc été voté ; fixé par une loi (la loi de finances), il est une créance sûre de l'Etat sur chaque contribuable - c'est même la meilleure créance imaginable, puisque l'Etat, comme nul autre, a tout moyen de se faire payer, et que, par ailleurs, l'ensemble des contribuables n'a guère de risque de faire défaut...
Cependant l'Etat décide de reporter transitoirement la perception d'une fraction conséquente de cet impôt, 10% par exemple ; mais on peut imaginer, pour un effet plus massif de relance, d'aller bien au delà, et pourquoi pas jusqu'à 25 %, voire même, avec un peu d'audace, jusqu'au tiers de l'impôt (le tiers provisionnel).
L'Etat ne renonce pas à son impôt - ce n'est pas une politique de tax-cut. Il sursoit simplement, pour un temps, à une fraction de son encaissement : il soulage la trésorerie des contribuables en une période de vaches maigres où il est tout sauf intelligent de les pressurer. Cet encaissement, il y procèdera ; mais à un moment où l'économie aura fait retour à meilleure fortune.
Cela, selon les deux modalités suivantes, qui sont le coeur du mécanisme :
- en combinant à la fois un différé de paiement (suffisant pour laisser à la relance le temps de produire ses effets) et un échelonnement (destiné à éviter un contre-effet dépressif lors de la mise en paiement). Par exemple si 10% de l'impôt est reporté l'année n, l'Etat décrète - dès l'année n, d'entrée de jeu - qu'il encaissera cette part au cours des années n+2 à n+4, c'est à dire en trois ans avec un décalage de deux ans ; ou, si le report est de 25%, qu'il l'encaissera au cours des années n+2 à n+6, c'est à dire en cinq ans avec décalage de deux ans."L'Etat décrète", car l'impôt a été voté, vote qui n'est pas remis en question ; et qu'il entre, en effet, dans les prérogatives de l'exécutif de consentir, si les circonstances le justifient, des facilités de trésorerie à ses contribuables. Cependant, les lois organiques (ou du moins leur esprit) interdisent qu'il y ait, ce faisant, un quelconque alourdissement des charges de l'Etat. D'où la seconde modalité, essentielle :
- de l'année n à l'année n+4 (dans mon premier exemple, ou n+6 dans mon deuxième), l'Etat inscrit, systématiquement, irrévocablement, sur chaque avis individuel d'imposition le montant de l'impôt reporté, ainsi que le montant échelonné, c'est à dire l'échéancier, ferme, de ce qui année après année devra être réglé au titre du report. Mais - et c'est le point crucial - il ne s'en tient pas là : en sus, il charge chaque élément de cet échéancier avec l'intérêt, effectif, de l'emprunt spécifique qu'il aura souscrit l'année n pour couvrir le report accordé. Cela, il le fait sans difficulté ni aléa, car de cet emprunt il connaît toutes les caractéristiques : le volume (la fraction reportée de l'impôt émis), la durée (cinq ans, ou sept ans, dans mes deux exemples), le différé d'amortissement (deux ans dans mes exemples), et enfin l'intérêt (celui - constaté - au moment où, précisément, il emprunte).
Tout le monde (Etat, contribuables, prêteurs) évolue donc, au long du processus, en univers certain : impôt connu, car non seulement voté, mais mis en recouvrement et porté sur chaque avis d'impôt ; et donc montant d'emprunt exactement connu ; taux d'intérêt connu ; échéancier de remboursement - y compris intérêt - connu des débiteurs (les contribuables) car inscrit sur leur feuille d'impôt, et connu des marchés. Impôt voté, intérêt "facturé", débiteurs qui ne peuvent faire défaut : il n'y a pas de risque de dette.
Ancien chargé de mission à la direction du Budget, Guy Abeille s'est fait connaître en publiant dans "La Tribune" un article racontant comment François Mitterrand avait demandé qu'on lui invente un moyen de contenir les ardeurs dépensières de sa majorité : cela avait donné le fameux ratio des 3% du PIB promis à un bel avenir avec le Traité de Maastricht (retrouvez ce témoignage en cliquant ici).
Il récidive en proposant au débat de la morne campagne électorale française deux idées iconoclastes pour résoudre le dilemne principal de la politique économique, celui dont aucun des candidats ne parle sérieusement : comment les économies européennes peuvent-elles réduire leurs déficits sans que cette austérité ne vienne peser encore sur leur croissance... dont la dépression accentuée nourrira en retour les déficits.
Il a imaginé pour cela deux mécanismes simples, qui sont tous deux des dispositifs de relance, ou au moins de soutien conjoncturel, qui laissent indemnes les dettes souveraines. S'appuyant sur les mécanismes existants et visant, d'abord et avant tout, à la plus grande simplicité, ils peuvent selon lui être mis en oeuvre sans obstacle ni délai. Ils ont chacun pour but de redonner un pouvoir d'achat immédiat aux ménages par une action publique qui, cependant, ne coûte pas aux Etats.
Le premier est un simple mécanisme de trésorerie modifiant, le temps de la relance, le mode de perception de l'impôt sur le revenu. Il l'a intitulé "REPIT", pour "Report, Exceptionnel et Portant Intérêt, de Taxe".
Le second est plus audacieux. Il vise à relâcher dans l'économie une fraction de l'immense capital détenu, et gelé, sous forme d'immobilier par les ménages (7.000 milliards d'euros pour la France, de l'ordre de 20.000 milliards pour la zone Euro et, au bas mot, de 30.000 milliards pour l'Europe dans son ensemble). Cela, en faisant droit à une nouvelle forme de propriété, qualifiée de "propriété faible", et en pratiquant un nouveau mode de "politique monétaire non conventionnelle", qu'il nomme "Householders Easing". Cet outil de relance pourrait s'intituler le MIEL, pour "Mobilisation d'Immobilier En Liquidité".
Retrouvez ci-dessous le détail de ces deux mécanismes.
1 - Le REPIT, ou "Report, Exceptionnel et Portant Intérêt, de Taxe"
En anglais, ce pourrait être RESPITE, répit en anglais, pour "Running Economic Stimulus by Postponing, with Interest, Tax on Earnings". C'est un simple mécanisme de trésorerie, techniquement et juridiquement facile à mettre en oeuvre.
Le mécanisme
L'année n, l'Etat signifie, comme à l'ordinaire, à chaque ménage le montant de son impôt sur le revenu. Cet impôt a donc été voté ; fixé par une loi (la loi de finances), il est une créance sûre de l'Etat sur chaque contribuable - c'est même la meilleure créance imaginable, puisque l'Etat, comme nul autre, a tout moyen de se faire payer, et que, par ailleurs, l'ensemble des contribuables n'a guère de risque de faire défaut...
Cependant l'Etat décide de reporter transitoirement la perception d'une fraction conséquente de cet impôt, 10% par exemple ; mais on peut imaginer, pour un effet plus massif de relance, d'aller bien au delà, et pourquoi pas jusqu'à 25 %, voire même, avec un peu d'audace, jusqu'au tiers de l'impôt (le tiers provisionnel).
L'Etat ne renonce pas à son impôt - ce n'est pas une politique de tax-cut. Il sursoit simplement, pour un temps, à une fraction de son encaissement : il soulage la trésorerie des contribuables en une période de vaches maigres où il est tout sauf intelligent de les pressurer. Cet encaissement, il y procèdera ; mais à un moment où l'économie aura fait retour à meilleure fortune.
Cela, selon les deux modalités suivantes, qui sont le coeur du mécanisme :
- en combinant à la fois un différé de paiement (suffisant pour laisser à la relance le temps de produire ses effets) et un échelonnement (destiné à éviter un contre-effet dépressif lors de la mise en paiement). Par exemple si 10% de l'impôt est reporté l'année n, l'Etat décrète - dès l'année n, d'entrée de jeu - qu'il encaissera cette part au cours des années n+2 à n+4, c'est à dire en trois ans avec un décalage de deux ans ; ou, si le report est de 25%, qu'il l'encaissera au cours des années n+2 à n+6, c'est à dire en cinq ans avec décalage de deux ans."L'Etat décrète", car l'impôt a été voté, vote qui n'est pas remis en question ; et qu'il entre, en effet, dans les prérogatives de l'exécutif de consentir, si les circonstances le justifient, des facilités de trésorerie à ses contribuables. Cependant, les lois organiques (ou du moins leur esprit) interdisent qu'il y ait, ce faisant, un quelconque alourdissement des charges de l'Etat. D'où la seconde modalité, essentielle :
- de l'année n à l'année n+4 (dans mon premier exemple, ou n+6 dans mon deuxième), l'Etat inscrit, systématiquement, irrévocablement, sur chaque avis individuel d'imposition le montant de l'impôt reporté, ainsi que le montant échelonné, c'est à dire l'échéancier, ferme, de ce qui année après année devra être réglé au titre du report. Mais - et c'est le point crucial - il ne s'en tient pas là : en sus, il charge chaque élément de cet échéancier avec l'intérêt, effectif, de l'emprunt spécifique qu'il aura souscrit l'année n pour couvrir le report accordé. Cela, il le fait sans difficulté ni aléa, car de cet emprunt il connaît toutes les caractéristiques : le volume (la fraction reportée de l'impôt émis), la durée (cinq ans, ou sept ans, dans mes deux exemples), le différé d'amortissement (deux ans dans mes exemples), et enfin l'intérêt (celui - constaté - au moment où, précisément, il emprunte).
Tout le monde (Etat, contribuables, prêteurs) évolue donc, au long du processus, en univers certain : impôt connu, car non seulement voté, mais mis en recouvrement et porté sur chaque avis d'impôt ; et donc montant d'emprunt exactement connu ; taux d'intérêt connu ; échéancier de remboursement - y compris intérêt - connu des débiteurs (les contribuables) car inscrit sur leur feuille d'impôt, et connu des marchés. Impôt voté, intérêt "facturé", débiteurs qui ne peuvent faire défaut : il n'y a pas de risque de dette.
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