Une délégation japonaise, composée de 10 experts environnementaux, effectue, depuis quelques jours, une série de visites au niveau des annexes de l’Observatoire national de l’environnement et du développement durable (Onedd)
et ce, dans le cadre d’un programme de coopération entre le ministère de l’Environnement et de l’Aménagement du territoire et l’Agence japonaise de coopération internationale.
Le programme de coopération, qui a démarré fin 2005 et devrait s’étaler jusqu’en 2008, prévoit plus particulièrement la participation de l’agence japonaise “au renforcement des capacités d’analyse des laboratoires par la fourniture d’équipements censés améliorer ainsi le contrôle de toutes les formes de pollution et par la mise en place de formations destinées aux ingénieurs et laborantins...”, a expliqué M. Akihiko Yahata, conseiller de coopération auprès de l’ambassade. Lors de leur déplacement à Oran jeudi dernier, où un programme de travail prévoyait une visite au niveau des zones industrielles, le chef de la délégation japonaise a présenté le projet de dépollution de l’oued El Harrach, la véritable plaie d’Alger et qui constitue l’image des plus néfastes pour la capitale. Sollicité par le ministère de l’Environnement, les experts japonais ont lancé une campagne de surveillance et de mesure de la pollution touchant l’oued El Harrach qui se déverse dans la baie d’Alger.
Ainsi, pendant plusieurs jours, les spécialistes japonais ont, dans un premier temps, recensé l’ensemble des sites industriels implantés tout le long et tout autour du lit de l’oued. Ce sont pas moins de 300 entreprises qui ont été recensées et qui déversent leurs déchets, sans aucun traitement pour la plupart, dans l’oued El Harrach. L’autre étape du projet a constitué à reconnaître les types de pollutions, que ce soit au niveau de l’oued où au niveau de la baie d’Alger, par des prélèvements d’eau et de sédiments.
Les premiers constats sont des plus alarmants puisque les principaux métaux lourds, comme le mercure ou le zinc du nickel sont présents en grande quantité, y compris des métaux liquides. D’ailleurs, des mesures de comparaison ont été présentées par l’un des experts japonais qui permettent d’avancer que les quantités de métaux lourds trouvées dans les sédiments de l’oued El Harrach et dans la baie d’Alger sont très supérieures aux normes environnementales.
L’absorption du mercure par inhalation ou par la consommation de poissons contaminés par ce métal lourd peut être très dangereuse pour la santé publique et représente un vrai risque en matière de sécurité alimentaire. Il est connu que le mercure peut affecter les fonctions cérébrales et rénales de l’homme et serait encore à l’origine de certains types de cancers. Il y a quelques années, au Japon même, ce qu’il convient d’appeler “la tragédie de la baie de Minamata” a provoqué la contamination et l’apparition de maladies chez des centaines de personnes qui consommaient du poisson intoxiqué par le mercure.
C’est pourquoi, beaucoup de spécialistes dans le monde recommandent aux femmes enceintes et aux enfants de moins de 2 ans de ne pas consommer de poisson où se trouvent des quantités importantes de mercure. Un conseil qui pourrait être donné aux Algérois, habitués à consommer le poisson de la baie d’Alger. Mais pour les experts japonais, qui ont présenté leur travail d’analyses, il s’agit pour l’instant d’approfondir les données recueillies, car c’est surtout le mercure organique qui est nocif, nous dit-on. D’où l’importance de la précision des analyses, ont encore expliqué les intervenants. Pour ce qui est des industries qui ont fait l’objet d’un contrôle de surveillance, 18 jusqu’ici, il s’est avéré que 9 ont des rejets qui sont polluants et 2 extrêmement polluants.
Dans leurs conclusions, les experts, qui précisent que les analyses doivent être plus approfondies pour déterminer avec précision tous les types de pollutions et leur teneur, recommandent comme solution de dépollution le dragage de l’oued El Harrach. Une décision qui doit revenir au ministère, compte tenu du coût et des moyens importants pour une telle solution. L’urgence de la décision devrait s’imposer aux pouvoirs publics.
F. BOUMEDIENE
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