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Entretien avec Soraya Haddad

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    - Pourquoi avez-vous accepté de faire cette interview ?
    - Je peux toujours changer d’avis…
    - Ok. Commençons par tes débuts à El-Kseur (Béjaïa)…
    - Avant de pratiquer du judo, j’ai fait 4 ans de gymnastique. De 8 à 12 ans. Ils ont fermé la salle. Manque de moyens. J’ai choisi donc de faire du judo.
    - On est sûrs que vous avez été influencé par quelqu’un dans la famille…
    - (Rires). Oui, mon grand frère Salim est un judoka. Il m’a beaucoup encouragée. En fait, je suis issue d’une famille sportive. Ça m’a beaucoup aidée à percer.
    - Quand est-ce que vous avez su que vous pouviez vivre de ce sport ?
    - Vous voulez dire survivre ?
    - Oui, si on veut…
    - Quand j’étais dans la catégorie des cadets et que j’ai commencé à gagner des titres nationaux.
    - Premier titre international ?
    - Médaille d’or au Championnat d’Afrique juniors en 2002.
    - C’est à cette époque-là que vous deviez passer votre bac, non ?
    - Oui. Mais je ne l’ai pas passé parce qu’il y avait en même temps le Championnat du monde juniors en Corée du Sud. J’ai choisi la compétition pour laquelle j’étais le mieux préparée. Le judo. J’ai gagné la médaille de bronze.
    - Ce fut un choix difficile quand même ?
    - Pas tant que ça. Mes profs étaient contre car j’étais bonne élève. Mais moi je savais dès le début ce que je voulais. Il n’est jamais trop tard pour étudier, par contre le sport de haut niveau n’attend pas.
    - Plusieurs tournois mondiaux remportés, 6 fois championne d’Afrique, médaillée olympique à Pékin, meilleure athlète féminine africaine en 2009, première femme africaine et arabe a avoir gagné une médaille olympique en judo, c’est énorme…
    - Oui, je suis contente de mes résultats et ce n’est pas fini, mais je pense qu’avec un peu plus de moyens, j’aurais fait beaucoup mieux.
    - C’est-à-dire ?
    - Les JO se préparent en 4 ans, pas en 2 ou 3 mois. Moi, pour remporter cette médaille olympique, j’ai dû bloquer mes études 4 ans et me consacrer entièrement au judo. Je ne faisais que m’entraîner, manger et dormir. Aucune vie privée, aucun plaisir, aucun répit… C’est ça les exigences du haut niveau. Quand je compare les moyens et surtout la considération qu’on donne aux athlètes des autres pays, qui sont beaucoup moins performants que nous, j’ai envie de tout arrêter.
    - D’ailleurs, vous l’avez fait une fois avant de vous rétracter, non ?
    - Oui, après les JO de Pékin. On avait décidé de me changer d’entraîneur. Je n’ai pas accepté, alors j’avais pris la décision de mettre fin à ma carrière.
    - Vous parlez de M. Bouhedou, c’est ça ?
    - Oui. Cet entraîneur me suit depuis que je suis enfant. Il me connaît par cœur. C’est avec lui et grâce à lui que j’ai gagné mes titres. Je lui dois beaucoup. Rien qu’en me voyant avant une compétition, il sait si je vais gagner ou pas. Après les JO, on a décidé de changer une équipe qui gagne et je ne l’ai pas accepté.
    - C’était Souakri qui a été désigné pour le remplacer, non ?
    - Oui, c’est ça. Ne me demandez pas de détails, parce que je n’ai pas trop envie d’en parler.
    - L’essentiel, vous avez gardé Bouhedou et c’est avec lui que vous allez préparer les JO de Londres…
    - Oui, heureusement. C’était ma condition et on l’a acceptée. Je pense que c’était légitime. On travaille avec quelqu’un qui peut vous faire avancer. La complicité joue un grand rôle dans les sports individuels.
    - Qu’est-ce qu’on ressent quand on est sur le podium aux JO ?
    - (Ses yeux brillent). De la fierté. On pense à la famille, aux gens qu’on aime, aux sacrifices, à l’Algérie…
    - Les JO c’est dans 2 mois, êtes-vous capable de rééditer l’exploit ?
    - Incha Allah. Je me sens en super forme. Je vais entrer en stage au Qatar dans quelques jours. C’est la dernière ligne droite. Les pronostiqueurs et les spécialistes pensent que je serai sur le podium, mais moi, je sais que ça va être très difficile, car le niveau est vraiment trop élevé.
    - Mis à part Morceli et Boulmerka, tous nos médaillés olympiques sombrent après les JO, pourquoi ?
    - Parce que leur joie s’arrête dès qu’ils rentrent au pays et découvrent la réalité. Vous savez combien on m’a donné pour avoir ramené une médaille olympique ? 75 millions. Heureusement qu’il y a eu nos sponsors qui ont un peu sauvé la face.
    - Il y a eu des logements aussi, non ?
    - Quels logements ? On nous a demandé de payer 220 millions. Vous savez, si seulement on nous avait organisé une cérémonie pour nous recevoir et nous encourager, heureusement que je suis une passionnée de ce sport, sinon, j’aurais arrêté depuis longtemps.
    - Et dire que certains footballeurs en Algérie touchent 500 millions par mois…
    - Bsahthom. Je ne demande pas ça, je sais que je ne l’aurai jamais. Ce que je veux c’est de la considération, qu’on m’aide dans mes études, qu’on me donne le minimum pour me préparer et un salaire pour vivre et faire vivre ma famille et je vais vous dire pourquoi ?
    - Oui…
    - J’ai sacrifié ma jeunesse, mes études, ma vie pour ce sport. J’ai tout donné. Et Dieu merci, j’ai réussi à offrir plusieurs titres à l’Algérie. Tous les athlètes de haut niveau le font c’est vrai, mais l’Etat doit leur assurer leur avenir en leur offrant des postes de travail dignes dans leur domaine de compétence.
    - C’est quoi votre plan de retraite ?
    - Je suis en 4e annnée à l’ISTS. Je veux donc faire apprendre aux plus jeunes les bases et les principes de ce sport et les faire profiter de mon expérience. Je ne pense pas le faire ici.
    - Pourquoi ?
    - Je vais peut-être rejoindre mon frère aux USA. Parce que ce que je vois ici ne m’encourage vraiment pas. J’aimerais rester dans mon pays et contribuer à faire progresser ce sport, mais…
    - On va parler un peu de Soraya Haddad, la personne non l’athlète ?
    - Elle n’existe pas, j’ai tout donné, tout sacrifié pour ce sport. Mais essayez quand même.
    - Enfant, vous étiez comment ?
    - Un peu garçon manqué, bagarreuse, hyper active. Je jouais au football et je faisais partie des meilleures. Meilleure que des garçons qui jouaient dans des clubs. D’ailleurs, je vais vous donner un scoop. Un club algérois de football féminin voulait me faire signer une licence en 2003. Ses dirigeants m’ont vu jouer au lycée sportif de Draria.
    - Vous avez déjà frappé un garçon ?
    - Au primaire et au collège oui, mais depuis que je suis athlète de haut niveau jamais…
    - Vous le referez si jamais on vous y oblige ?
    - Oui, si c’est pour me défendre, je n’hésiterai pas. Mais je suis calme et très sage. Les combats de rue, ce n’est pas ma tasse de thé.
    - C’est vrai que vous ne regardez jamais les matchs de foot ?
    - Oui, le foot me dégoûte, surtout en Algérie. Le judo, l’athlétisme ou la boxe ont donné des titres à l’Algérie et ils n’ont pas 5 % de ce qu’ont les footballeurs, mais c’est le système, c’est la vie.
    - Avec qui vous ne partirez jamais en voyage ?
    - Avec un «footeux».
    - Qui emmènerez-vous si on vous laissait le choix ?
    - Ma maman.
    - Vous êtes donc fille à maman et pas fille à papa…
    - J’ai le physique de maman et le caractère de papa.
    - Que mange Soraya Haddad ?
    - Des salades, des pâtes, des fruits, mais mon plat préféré c’est la rechta.
    - Etes-vous bonne cuisinière ?
    - Je me débrouille assez bien.
    - Si on devez changer quelque chose en vous, ça sera quoi ?
    - Avoir moins de masse musculaire pour paraître plus féminine.
    - Pourquoi, vous pensez ne pas l’être ?
    - Je suis très féminine à l’intérieur, mais à l’extérieur ça ne se voit pas trop.
    -Pensez-vous à fonder une famille ?
    - Oui, bien sûr, comme chaque femme dans ce monde, je veux être maman et vivre avec une personne qui m’aime et que j’aime.
    - Vous devrez dans ce cas arrêter le judo ?
    - Non, pas forcément. Mais, on verra bien.
    - Donc par amour, vous renoncerez au judo ?
    - Peut-être que oui, peut-être que non.
    - Y a-t-il une personne auquel vous avez fait du tort et à qui vous voulez demander pardon aujourd’hui ?
    - Un camarade de classe au primaire que je frappais à chaque fois qu’il refusait de faire ce que je voulais (rires). S’il se reconnaît, et bien je lui demande pardon.
    - Est-ce que vous irez voter ?
    - Ce n’est pas votre problème.
    - Un regret dans votre vie ?
    - Aucun.
    - Un souhait ?
    -Que les autorités donnent plus de considération aux athlètes de l’élite, surtout ceux qui hissent le drapeau algérien au-dessus de tous les autres.
    - Un rêve ?
    - Remporter une autre médaille olympique, de préférence en vermeil.
    - Le football ?
    - On attend les résultats.
    - Qu’est-ce qui pourrait vous empêcher de gagner une médaille à Londres?
    - Rien.
    - Meilleur endroit pour se détendre…
    - Les plages de Saket et de Béni Ksila du côté de Bougie.

    Compétition.
    "Tout ce que je sais, c'est que je ne sais rien."
    Socrate.

  • #2
    grande championne
    veni vidi vici .

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