Le Musée du Quai Branly a ouvert ses portes au public aujourd'hui et pour fêter cet énènement durant trois jours l'entrée au Musée des Arts Premiers est gratuite.
Guidé par un souci de transparence et par une volonté de présenter, sans les hiérarchiser, les objets et les œuvres d’art des différentes civilisations d’Afrique, d’Asie, d’Océanie et des Amériques, l’architecte Jean Nouvel a conçu un « musée passerelle ». Aux quatre continents correspondent quatre espaces, répartis sur un seul plateau et sans cloison -métaphore architecturale d’une volonté de faire dialoguer entre elles les différentes cultures. A quelques heures de l’ouverture de ce nouvel espace dédié aux arts extra-européens, invitation à déambuler au cœur même du bâtiment-musée où sont installées les collections permanentes.
Si l’architecte Jean Nouvel explique bien volontiers qu’il a bâti l’ensemble du complexe architectural « autour » des collections qui font à la fois la richesse même du musée et sa raison d’être, la comparaison de deux chiffres suffit à justifier une petite déception du visiteur gourmand : tandis que l’ensemble des bâtiments occupe 40 600 m², l’unique plate-forme que se partagent les quatre continents d’Afrique, d’Océanie, d’Asie et des Amériques ne représente, quant à elle, que 4 750 m². S’y bousculent quelque 3 500 œuvres, des hauts mâts totémiques sur estrade aux petites statuettes protégées dans leurs cage en verre.
Une fois la porte d'entrée franchie, commence alors une lente ascension le long d’une rampe blanche en pente douce –mais semble-t-il trop pentue pour des handicapés moteurs, qui emprunteront les ascenseurs. Sonorisée de bruits de la forêt mêlés de percussions, elle serpente autour d’une grande colonne où sont exposés plusieurs milliers d’instruments de musique. Ici et là, au sol, des projections de diapositives évoque des fêtes rituelles ou des visages du monde entier. Il faut alors traverser les ténèbres d’un corridor zébré de quelques rais de lumière, sorte de métaphore du bois sacré où se célèbre en quelque sorte le rite de passage symbolique de l’Occident vers l’ailleurs, vers « l’autre monde » -originel ? lointain ? oublié ? Au bout de la nuit, le visiteur choisira son chemin, libre de partir explorer à droite l’Afrique et l’Océanie, ou à gauche l’Asie et les Amériques, sachant qu’au final il pourra faire le tour du monde en zig-zaguant entre les vitrines. A la croisée des quatre continents, un bras levé vers le ciel, un totem hermaphrodite Djennenké (Mali) accueille avec bienveillance le visiteur, qu’il salue solennellement.
« Il faut prendre le temps de la transition »
Que toutes les cultures du monde qui sont d’une égale beauté et d’une égale valeur puissent un jour communiquer entre elles dans la plus grande transparence et sans hiérarchie : telle était l’idée fondatrice du projet. Pour le dire autrement, il fallait trouver une écriture architecturale susceptible d’inviter le visiteur à découvrir et comprendre l’altérité, susceptible également de sensibiliser le visiteur au brassage des influences d’un continent l’autre, d’une civilisation l’autre. Ainsi naquit l’idée d’un seul plateau divisé en quatre aires géographiques et traversé par un goulet ocre à la manière des murets en terre sèche, introduisant le visiteur dans tel ou tel univers : africain, océanien, asiatique, amérindien. D’environ deux mètres de large (on préfère ne pas imaginer les visiteurs s’y presser un jour d’affluence!), ce chemin « serpente, explique Jean Nouvel, comme ces fleuves que remontaient les explorateurs. Il fait passer lentement le visiteur d'une civilisation à une autre. (…) Il faut prendre le temps de la transition. Ce musée n'obéit pas à la rationalité européenne. Il appartient à un autre monde (…) Il s'agissait de créer un nouveau territoire plutôt qu'une architecture. Un lieu de dialogue, de réflexion sur l'autre et sur nous-mêmes ». Jean Nouvel l’a créé : un musée « passerelle » fait de transparences, de reflets et de vitrines autour desquelles chacun peut tourner, un musée où la pénombre rime avec spiritualité –au risque d’étouffer le visiteur claustrophobe.
Sous une myriade de petites lumières zénithales, et dans des vitrines remarquablement éclairées, ce sont ici des poinçons perce-oreilles des Marquises, là des crânes et mannequins funéraires mélanésiens, ou bien encore des statuettes chupicuaros du Mexique (l'une sert d'emblème au musée) qui finissent par se répondre. Voyage poétique, voyage onirique, voyage esthétique. De la massue américaine offerte à François Ier au visage de titan de l'île de Paques, le labyrinthe symbolique conduit aussi bien aux tambours à fente de l’île Ambrymen en Océanie qu’aux tapas (tissus d'écorce) polynésiens, ou aux marionnettes japonaises : « Tous les objets qui sont là peuvent continuer à exister en étant chez eux si c'est possible, un peu comme dans une maison », explique l'architecte de renommée internationale, lauréat en 1999 du concours pour l'élaboration de ce musée.
Au final toutefois, il faut bien admettre que l’on se perd intellectuellement dans la profusion de vêtements traditionnels, de masques, de dieux, d’ancêtres, de héros mythiques, d’objets usuels ou dédiés aux rituels, ni assez légendés ni assez « contextualisés ». Mais le musée ne faisant qu’ouvrir ses portes, sans doute faut-il accorder un peu de temps encore aux équipes pour ajuster les finitions et davantage éclairer le visiteur curieux sur le sens de tel ou tel reliquaire. Au fait, où vivent les Tolai ?
En marge du plateau, trois mezzanines abritent des expositions temporaires et un espace multimédias. La collection du musée rassemble en tout quelque 300 000 objets issus de la quasi totalité du musée de l’Homme et de l’ancien musée du musée des arts d'Afrique et d'Océanie (MAAO). Elle peut être consultée sur internet (www.quaibranly.fr).
Par RFI
Guidé par un souci de transparence et par une volonté de présenter, sans les hiérarchiser, les objets et les œuvres d’art des différentes civilisations d’Afrique, d’Asie, d’Océanie et des Amériques, l’architecte Jean Nouvel a conçu un « musée passerelle ». Aux quatre continents correspondent quatre espaces, répartis sur un seul plateau et sans cloison -métaphore architecturale d’une volonté de faire dialoguer entre elles les différentes cultures. A quelques heures de l’ouverture de ce nouvel espace dédié aux arts extra-européens, invitation à déambuler au cœur même du bâtiment-musée où sont installées les collections permanentes.
Si l’architecte Jean Nouvel explique bien volontiers qu’il a bâti l’ensemble du complexe architectural « autour » des collections qui font à la fois la richesse même du musée et sa raison d’être, la comparaison de deux chiffres suffit à justifier une petite déception du visiteur gourmand : tandis que l’ensemble des bâtiments occupe 40 600 m², l’unique plate-forme que se partagent les quatre continents d’Afrique, d’Océanie, d’Asie et des Amériques ne représente, quant à elle, que 4 750 m². S’y bousculent quelque 3 500 œuvres, des hauts mâts totémiques sur estrade aux petites statuettes protégées dans leurs cage en verre.
Une fois la porte d'entrée franchie, commence alors une lente ascension le long d’une rampe blanche en pente douce –mais semble-t-il trop pentue pour des handicapés moteurs, qui emprunteront les ascenseurs. Sonorisée de bruits de la forêt mêlés de percussions, elle serpente autour d’une grande colonne où sont exposés plusieurs milliers d’instruments de musique. Ici et là, au sol, des projections de diapositives évoque des fêtes rituelles ou des visages du monde entier. Il faut alors traverser les ténèbres d’un corridor zébré de quelques rais de lumière, sorte de métaphore du bois sacré où se célèbre en quelque sorte le rite de passage symbolique de l’Occident vers l’ailleurs, vers « l’autre monde » -originel ? lointain ? oublié ? Au bout de la nuit, le visiteur choisira son chemin, libre de partir explorer à droite l’Afrique et l’Océanie, ou à gauche l’Asie et les Amériques, sachant qu’au final il pourra faire le tour du monde en zig-zaguant entre les vitrines. A la croisée des quatre continents, un bras levé vers le ciel, un totem hermaphrodite Djennenké (Mali) accueille avec bienveillance le visiteur, qu’il salue solennellement.
« Il faut prendre le temps de la transition »
Que toutes les cultures du monde qui sont d’une égale beauté et d’une égale valeur puissent un jour communiquer entre elles dans la plus grande transparence et sans hiérarchie : telle était l’idée fondatrice du projet. Pour le dire autrement, il fallait trouver une écriture architecturale susceptible d’inviter le visiteur à découvrir et comprendre l’altérité, susceptible également de sensibiliser le visiteur au brassage des influences d’un continent l’autre, d’une civilisation l’autre. Ainsi naquit l’idée d’un seul plateau divisé en quatre aires géographiques et traversé par un goulet ocre à la manière des murets en terre sèche, introduisant le visiteur dans tel ou tel univers : africain, océanien, asiatique, amérindien. D’environ deux mètres de large (on préfère ne pas imaginer les visiteurs s’y presser un jour d’affluence!), ce chemin « serpente, explique Jean Nouvel, comme ces fleuves que remontaient les explorateurs. Il fait passer lentement le visiteur d'une civilisation à une autre. (…) Il faut prendre le temps de la transition. Ce musée n'obéit pas à la rationalité européenne. Il appartient à un autre monde (…) Il s'agissait de créer un nouveau territoire plutôt qu'une architecture. Un lieu de dialogue, de réflexion sur l'autre et sur nous-mêmes ». Jean Nouvel l’a créé : un musée « passerelle » fait de transparences, de reflets et de vitrines autour desquelles chacun peut tourner, un musée où la pénombre rime avec spiritualité –au risque d’étouffer le visiteur claustrophobe.
Sous une myriade de petites lumières zénithales, et dans des vitrines remarquablement éclairées, ce sont ici des poinçons perce-oreilles des Marquises, là des crânes et mannequins funéraires mélanésiens, ou bien encore des statuettes chupicuaros du Mexique (l'une sert d'emblème au musée) qui finissent par se répondre. Voyage poétique, voyage onirique, voyage esthétique. De la massue américaine offerte à François Ier au visage de titan de l'île de Paques, le labyrinthe symbolique conduit aussi bien aux tambours à fente de l’île Ambrymen en Océanie qu’aux tapas (tissus d'écorce) polynésiens, ou aux marionnettes japonaises : « Tous les objets qui sont là peuvent continuer à exister en étant chez eux si c'est possible, un peu comme dans une maison », explique l'architecte de renommée internationale, lauréat en 1999 du concours pour l'élaboration de ce musée.
Au final toutefois, il faut bien admettre que l’on se perd intellectuellement dans la profusion de vêtements traditionnels, de masques, de dieux, d’ancêtres, de héros mythiques, d’objets usuels ou dédiés aux rituels, ni assez légendés ni assez « contextualisés ». Mais le musée ne faisant qu’ouvrir ses portes, sans doute faut-il accorder un peu de temps encore aux équipes pour ajuster les finitions et davantage éclairer le visiteur curieux sur le sens de tel ou tel reliquaire. Au fait, où vivent les Tolai ?
En marge du plateau, trois mezzanines abritent des expositions temporaires et un espace multimédias. La collection du musée rassemble en tout quelque 300 000 objets issus de la quasi totalité du musée de l’Homme et de l’ancien musée du musée des arts d'Afrique et d'Océanie (MAAO). Elle peut être consultée sur internet (www.quaibranly.fr).
Par RFI
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