Lépante, reine des victoires navales
La bataille de Lépante, l’une des plus grandes de tous les temps, a été étudiée sous tous ses aspects par les historiens les plus éminents. On peut dire de suite que ceux qui voudraient combler Eudj’Ali de louanges trouveraient là une mine inépui-sable, car il n’y pas une voix qui ne le proclame le vainqueur moral de cette gigantesque lutte, pour l’intrépidité calme, le talent de commandement et la lucidité géniale, — pour cette fois du moins, on ne saurait dire moins — qu’il sut y déployer. On a peu d’exemples d’un chef gagnant la bataille sur toute l’envergure d’une aile, abattant les adversaires qui lui sont op-posés, poursuivant son avantage en attaquant ensuite les autres secteurs ennemis et ne subissant f nalement que des pertes mi-nimes. Ceci, pendant que l’autre aile et le centre de la force à laquelle il appartient sont battus et décimés — laissant, par suite, l’ennemi en situation de se concentrer contre l’aile vi-goureuse et d’en tenter la destruction avec des moyens incom-parablement supérieurs. Ce succès étonne moins celui qui a décomposé les res-sorts de cette âme et de ce cerveau puissants, faits pour les plus grands exploits, ne se montrant jamais inégaux aux cir-constances, se préparant à toutes les éventualités, mais sachant aussi, à force de clarté dans l’esprit et de promptitude dans la décision, braver l’inattendu, cas si fréquent dans toutes les batailles et, plus encore, dans les combats maritimes. L’inattendu ! Le coup de massue ! Ce que fut pour Eudj, l’effondrement total du corps de bataille et de l’aile droite de l’armée navale turque, qui empêchèrent certainement toutes les combinaisons qu’il avait pu édif er d’être praticables dé-sormais. Il lui fallut bâtir entièrement une solution nouvelle, avec la tactique correspondante, les ordres à distribuer, tout cela au milieu de la panique toute voisine qui a dispersé les frères d’armes, qui va gagner ceux qui restent invaincus. L’inattendu : c’était presque la règle en ce temps où l’on ne disposait pas des moyens de découverte comparables à ceux d’aujourd’hui, où les renseignements se transmettaient diff cilement, où les ordres s’exécutaient lentement. Mais en-core une fois, l’enfoncement de la droite et du centre turcs constituait plus qu’un incident, plus qu’un événement : c’était un fait capital qui renversait toutes les hypothèses, toutes les proportions, et détruisait l’édif ce des prévisions, menant pres-que fatalement au désastre.
Quant aux préparatifs mêmes de la bataille, ils furent mis au point, de part et d’autre, dans des conseils où ne manquèrent pas de jouer les moyens mis en action par les grands chefs de guerre, lorsqu’il s’agit pour eux de faire triompher l’empire qu’ils servent, et de servir au mieux l’intérêt général et leur intérêt personnel tout à la fois. On peut dire qu’Eudj’Ali s’y f t remarquer de telle sorte que les jalousies qui s’élevèrent contre lui de ce fait f nirent par diminuer son inf uence : parmi ces hommes de cour, et malgré toute sa finesse, il eût fallu mieux doser les vérités, la façon de les présenter, les consé-quences à en tirer. Sans être le moins du monde un paysan du Danube, Eudj, — resté beglierbey de l’Afrique du Nord, bien que remplacé à Alger même, enrageait de voir les immenses intérêts de l’empire balancés par des rivalités, des intérêts mes-quins — le temps inestimablement précieux perdu dans des discussions sur les mérites et les responsabilités de chacun. Il n’a jamais changé d’avis et quand on l’attaquait (... « eaque omnia culpa Uluzalis fada esse... »), on ne le trouvait pas sans verd : « quibus Uluzalis... non in verbis res bellicas verti, neque disputationis, sed actionis prœsens tempus esse respondit ». Et ce n’est point ici un panégyriste qui rapporte le fait. On peut donner une idée de son rôle au cours de la ba-taille, par ces lignes de cet excellent historien, l’abbé Haëdo, qui n’avait, on le sait, rien d’un f atteur, tout spécialement pour les renégats : « Le jour où se donna la bataille entre les deux f ottes, il commandait l’aile gauche, et s’y montra si bon marin qu’il ne se laissa jamais investir ni aborder par les galères chrétiennes ; étant toujours prêt à se dérober quand cela était nécessaire. Plus tard, quand il vit que les galères de Malte, qui étaient de-vant lui, avaient beaucoup souffert, il les aborda, tua à coups d’arquebuses un grand nombre de chevaliers, et les chargea de telle sorte que ses soldats s’emparèrent de la Capitane de Malte. Mais ensuite, ne pouvant plus douter que la victoire ne se déclarât en faveur des chrétiens, il se retira, traînant à la remorque la capitane de Malte et emportant l’étendard de la Religion. Il n’osa pas s’arrêter à Lépante quand il fut cer-tain de la défaite complète de la f otte turque, et f t route vers Constantinople... » Ce résumé présente succinctement le rôle d’Eudj au cours de la bataille. Il ne peut permettre à l’admirateur du Grand Corsaire de se mettre à sa place, par la pensée, avant l’action, pendant la période de tâtonnements et de préparation qui la précèdent, ensuite au cours même de la rencontre quand tou-tes les considérations politiques ou personnelles cèdent de-vant la nécessité d’étreindre l’ennemi et de remporter la vic-toire. La guerre qui avait mis aux prises le Sultan de Constan-tinople et une Ligue de princes chrétiens, trouva certainement des causes dans les haines religieuses et dans les déprédations de toutes sortes auxquelles se livraient les marins des deux religions et plus particulièrement les Barbaresques. Les plus récentes provocations venaient certainement des Musulmans qui avaient attaqué Malte, soutenu les Morisques rebelles en Espagne, pris Tunis et enf n Chypre. Cet ensemble de faits de guerre, pour ne citer que les plus importants, était tellement fa-vorable aux Turcs que la crainte du pire gagna le Pape, Venise et le Roi d’Espagne. Le Souverain Pontife préconisait depuis longtemps, pour des intérêts en majeure partie spirituels, une action contre la puissance ottomane. L’Espagne était menacée en Afrique et chez elle-même par les entreprises musulmanes. Venise, la plus durement traitée jusque-là, était pourtant la plus hésitante. Nikosia, capitale de Chypre, était en effet occupée. Fama-gosta (Famagouste) tombée entre les mains du seraskier turc Mustapha et son défenseur, Bragadino, mené au supplice par les vainqueurs avec des raff nements de cruauté abominables, pour une réponse jugée par Mustapha trop audacieuse de la part d’un prisonnier. On lui avait d’abord coupé les oreilles et le nez. Dix jours après il fut hissé au grand mal de la galère du bey de Rhodes, puis plongé dans l’eau, retiré et plongé de nouveau. En-suite, on lui attacha au cou deux paniers qu’il dut porter remplis de terre sur les deux bastions, pour aider à leur rétablissement ; chaque fois qu’il arrivait auprès du seraskier, il devait s’incli-ner jusqu’à toucher le sol. Enf n, il fut conduit sur la place, attaché au poteau du pilori, couché par terre et écorché vif. Son corps fut écartelé et la peau, bourrée de foin, fut promenée dans le camp et dans les rues « Cette sorte de mannequin fut placé sur une vache et porté ainsi par la ville, sous le parasol rouge qui était tenu au-dessus de la tête de Bragadino quand il vint dans le camp, ensuite attaché à la vergue d’une galère pour servir d’épouvantail aux chrétiens. « Enf n, ces malheureuses dépouilles, avec les quatre tê-tes salées de Baglioni, de Bragadino, de Luigi Martinengo, (un autre Martinengo avait été ignominieusement torturé) et de Quirini, furent enfermées dans une caisse, et envoyées en présents au sultan... La dépouille parvint f nalement à Venise, où elle fut déposée au Panthéon des grands hommes de la ré-publique, dans une urne... » La chute de Famagosta, le supplice de Bragadino, la continuation probable des cruautés et des conquêtes turques étaient mises par le Sénat de Venise en balance avec les ins-tances françaises pour la paix, dont la France devait être la médiatrice, suivant des lettres du sultan à Charles IX bien que le siège de la Sérénissime République fût déjà fait. Le 25 mai 1571, la Sainte Alliance était signée, le 28 juillet, on la proclama. L’Histoire peut enregistrer la treizième ligue qui se formait entre des nations chrétiennes contre la puissance musulmane, depuis l’an 1344 sous le pape Urbain V. Don Juan d’Autriche, f ls naturel de Charles-Quint, était le général de cette Sain-te Ligue. « Parti D. Giovanni da Napoli nel vigesimo giorno d’Agosto, e giunse a ventiquattro in Messina, dové tovo dedici Galee del Pape col Generale Marc Antonio Colonna, cento e dodici Veneziane, sci Galezze e due Navi, col Generale Se-bastiano Veniero, e tre della Religione di Malta, col Generale Fr. Pietro Giustiniano Prior di Messina, a queste s’àccopiarno ventiquattro Navi del Ré, e ottantadue Galec, fra le quali si nu-meravano le tre di Genova sotto Ettore Spinola lor Generale, e altre tre di Savoia, solto’l General Monsignor di Ligni. » En tout, don Juan avait avec lui deux cent neuf galères, six ga-léasses, vingt-six naves et soixante-seize moindres bâtiments, lorsqu’il quitta Messine le 16 septembre. Il apprit bientôt que l’Armada ottomane était dans le golfe de Lépante. Il eut aus-si conf rmation de la chute de Famagosta, caduta f n da sette d’Agosto nelle niani de gl’Infedeli, che contro al tenore de’ patti, decapitarono Astore Baglione, e scorticarono vivo Marc’ Anionio Bragadino che l’havverano valorosamente difesa ». Ce dernier acte de cruauté fournissait à Don Juan le thème de proclamations qui enf ammeraient l’ardeur de ses équipages indignés de la barbarie des Turcs. Ses off ciers seraient, d’autre part, rassurés par les chiffres des effectifs passés en revue le 8 septembre, à Messine. 30.000 hommes de troupes sont embar-qués sur les galères, vieilles bandes espagnoles et allemandes des guerres d’Italie. Leur solidité est inégalable, l’expérience des batailles en a fait des soldats de premier ordre. La nécessi-té de combattre sur des navires supprimera l’immense danger de les voir se débander pour piller. De plus, là, on pourra les surveiller de près, brider leurs instincts d’ivrognerie. Enf n, la coalition étant formée sur l’initiative pressante du pape Pie V, le sentiment religieux domine, devient le meilleur liant entre des corps de troupes souvent rivaux et mêmes ennemis. La haine commune de l’inf dèle domine tout autre sentiment. Les troupes seront donc bien en main — et c’était là un diff cile problème à résoudre pour une coalition.
La bataille de Lépante, l’une des plus grandes de tous les temps, a été étudiée sous tous ses aspects par les historiens les plus éminents. On peut dire de suite que ceux qui voudraient combler Eudj’Ali de louanges trouveraient là une mine inépui-sable, car il n’y pas une voix qui ne le proclame le vainqueur moral de cette gigantesque lutte, pour l’intrépidité calme, le talent de commandement et la lucidité géniale, — pour cette fois du moins, on ne saurait dire moins — qu’il sut y déployer. On a peu d’exemples d’un chef gagnant la bataille sur toute l’envergure d’une aile, abattant les adversaires qui lui sont op-posés, poursuivant son avantage en attaquant ensuite les autres secteurs ennemis et ne subissant f nalement que des pertes mi-nimes. Ceci, pendant que l’autre aile et le centre de la force à laquelle il appartient sont battus et décimés — laissant, par suite, l’ennemi en situation de se concentrer contre l’aile vi-goureuse et d’en tenter la destruction avec des moyens incom-parablement supérieurs. Ce succès étonne moins celui qui a décomposé les res-sorts de cette âme et de ce cerveau puissants, faits pour les plus grands exploits, ne se montrant jamais inégaux aux cir-constances, se préparant à toutes les éventualités, mais sachant aussi, à force de clarté dans l’esprit et de promptitude dans la décision, braver l’inattendu, cas si fréquent dans toutes les batailles et, plus encore, dans les combats maritimes. L’inattendu ! Le coup de massue ! Ce que fut pour Eudj, l’effondrement total du corps de bataille et de l’aile droite de l’armée navale turque, qui empêchèrent certainement toutes les combinaisons qu’il avait pu édif er d’être praticables dé-sormais. Il lui fallut bâtir entièrement une solution nouvelle, avec la tactique correspondante, les ordres à distribuer, tout cela au milieu de la panique toute voisine qui a dispersé les frères d’armes, qui va gagner ceux qui restent invaincus. L’inattendu : c’était presque la règle en ce temps où l’on ne disposait pas des moyens de découverte comparables à ceux d’aujourd’hui, où les renseignements se transmettaient diff cilement, où les ordres s’exécutaient lentement. Mais en-core une fois, l’enfoncement de la droite et du centre turcs constituait plus qu’un incident, plus qu’un événement : c’était un fait capital qui renversait toutes les hypothèses, toutes les proportions, et détruisait l’édif ce des prévisions, menant pres-que fatalement au désastre.
Quant aux préparatifs mêmes de la bataille, ils furent mis au point, de part et d’autre, dans des conseils où ne manquèrent pas de jouer les moyens mis en action par les grands chefs de guerre, lorsqu’il s’agit pour eux de faire triompher l’empire qu’ils servent, et de servir au mieux l’intérêt général et leur intérêt personnel tout à la fois. On peut dire qu’Eudj’Ali s’y f t remarquer de telle sorte que les jalousies qui s’élevèrent contre lui de ce fait f nirent par diminuer son inf uence : parmi ces hommes de cour, et malgré toute sa finesse, il eût fallu mieux doser les vérités, la façon de les présenter, les consé-quences à en tirer. Sans être le moins du monde un paysan du Danube, Eudj, — resté beglierbey de l’Afrique du Nord, bien que remplacé à Alger même, enrageait de voir les immenses intérêts de l’empire balancés par des rivalités, des intérêts mes-quins — le temps inestimablement précieux perdu dans des discussions sur les mérites et les responsabilités de chacun. Il n’a jamais changé d’avis et quand on l’attaquait (... « eaque omnia culpa Uluzalis fada esse... »), on ne le trouvait pas sans verd : « quibus Uluzalis... non in verbis res bellicas verti, neque disputationis, sed actionis prœsens tempus esse respondit ». Et ce n’est point ici un panégyriste qui rapporte le fait. On peut donner une idée de son rôle au cours de la ba-taille, par ces lignes de cet excellent historien, l’abbé Haëdo, qui n’avait, on le sait, rien d’un f atteur, tout spécialement pour les renégats : « Le jour où se donna la bataille entre les deux f ottes, il commandait l’aile gauche, et s’y montra si bon marin qu’il ne se laissa jamais investir ni aborder par les galères chrétiennes ; étant toujours prêt à se dérober quand cela était nécessaire. Plus tard, quand il vit que les galères de Malte, qui étaient de-vant lui, avaient beaucoup souffert, il les aborda, tua à coups d’arquebuses un grand nombre de chevaliers, et les chargea de telle sorte que ses soldats s’emparèrent de la Capitane de Malte. Mais ensuite, ne pouvant plus douter que la victoire ne se déclarât en faveur des chrétiens, il se retira, traînant à la remorque la capitane de Malte et emportant l’étendard de la Religion. Il n’osa pas s’arrêter à Lépante quand il fut cer-tain de la défaite complète de la f otte turque, et f t route vers Constantinople... » Ce résumé présente succinctement le rôle d’Eudj au cours de la bataille. Il ne peut permettre à l’admirateur du Grand Corsaire de se mettre à sa place, par la pensée, avant l’action, pendant la période de tâtonnements et de préparation qui la précèdent, ensuite au cours même de la rencontre quand tou-tes les considérations politiques ou personnelles cèdent de-vant la nécessité d’étreindre l’ennemi et de remporter la vic-toire. La guerre qui avait mis aux prises le Sultan de Constan-tinople et une Ligue de princes chrétiens, trouva certainement des causes dans les haines religieuses et dans les déprédations de toutes sortes auxquelles se livraient les marins des deux religions et plus particulièrement les Barbaresques. Les plus récentes provocations venaient certainement des Musulmans qui avaient attaqué Malte, soutenu les Morisques rebelles en Espagne, pris Tunis et enf n Chypre. Cet ensemble de faits de guerre, pour ne citer que les plus importants, était tellement fa-vorable aux Turcs que la crainte du pire gagna le Pape, Venise et le Roi d’Espagne. Le Souverain Pontife préconisait depuis longtemps, pour des intérêts en majeure partie spirituels, une action contre la puissance ottomane. L’Espagne était menacée en Afrique et chez elle-même par les entreprises musulmanes. Venise, la plus durement traitée jusque-là, était pourtant la plus hésitante. Nikosia, capitale de Chypre, était en effet occupée. Fama-gosta (Famagouste) tombée entre les mains du seraskier turc Mustapha et son défenseur, Bragadino, mené au supplice par les vainqueurs avec des raff nements de cruauté abominables, pour une réponse jugée par Mustapha trop audacieuse de la part d’un prisonnier. On lui avait d’abord coupé les oreilles et le nez. Dix jours après il fut hissé au grand mal de la galère du bey de Rhodes, puis plongé dans l’eau, retiré et plongé de nouveau. En-suite, on lui attacha au cou deux paniers qu’il dut porter remplis de terre sur les deux bastions, pour aider à leur rétablissement ; chaque fois qu’il arrivait auprès du seraskier, il devait s’incli-ner jusqu’à toucher le sol. Enf n, il fut conduit sur la place, attaché au poteau du pilori, couché par terre et écorché vif. Son corps fut écartelé et la peau, bourrée de foin, fut promenée dans le camp et dans les rues « Cette sorte de mannequin fut placé sur une vache et porté ainsi par la ville, sous le parasol rouge qui était tenu au-dessus de la tête de Bragadino quand il vint dans le camp, ensuite attaché à la vergue d’une galère pour servir d’épouvantail aux chrétiens. « Enf n, ces malheureuses dépouilles, avec les quatre tê-tes salées de Baglioni, de Bragadino, de Luigi Martinengo, (un autre Martinengo avait été ignominieusement torturé) et de Quirini, furent enfermées dans une caisse, et envoyées en présents au sultan... La dépouille parvint f nalement à Venise, où elle fut déposée au Panthéon des grands hommes de la ré-publique, dans une urne... » La chute de Famagosta, le supplice de Bragadino, la continuation probable des cruautés et des conquêtes turques étaient mises par le Sénat de Venise en balance avec les ins-tances françaises pour la paix, dont la France devait être la médiatrice, suivant des lettres du sultan à Charles IX bien que le siège de la Sérénissime République fût déjà fait. Le 25 mai 1571, la Sainte Alliance était signée, le 28 juillet, on la proclama. L’Histoire peut enregistrer la treizième ligue qui se formait entre des nations chrétiennes contre la puissance musulmane, depuis l’an 1344 sous le pape Urbain V. Don Juan d’Autriche, f ls naturel de Charles-Quint, était le général de cette Sain-te Ligue. « Parti D. Giovanni da Napoli nel vigesimo giorno d’Agosto, e giunse a ventiquattro in Messina, dové tovo dedici Galee del Pape col Generale Marc Antonio Colonna, cento e dodici Veneziane, sci Galezze e due Navi, col Generale Se-bastiano Veniero, e tre della Religione di Malta, col Generale Fr. Pietro Giustiniano Prior di Messina, a queste s’àccopiarno ventiquattro Navi del Ré, e ottantadue Galec, fra le quali si nu-meravano le tre di Genova sotto Ettore Spinola lor Generale, e altre tre di Savoia, solto’l General Monsignor di Ligni. » En tout, don Juan avait avec lui deux cent neuf galères, six ga-léasses, vingt-six naves et soixante-seize moindres bâtiments, lorsqu’il quitta Messine le 16 septembre. Il apprit bientôt que l’Armada ottomane était dans le golfe de Lépante. Il eut aus-si conf rmation de la chute de Famagosta, caduta f n da sette d’Agosto nelle niani de gl’Infedeli, che contro al tenore de’ patti, decapitarono Astore Baglione, e scorticarono vivo Marc’ Anionio Bragadino che l’havverano valorosamente difesa ». Ce dernier acte de cruauté fournissait à Don Juan le thème de proclamations qui enf ammeraient l’ardeur de ses équipages indignés de la barbarie des Turcs. Ses off ciers seraient, d’autre part, rassurés par les chiffres des effectifs passés en revue le 8 septembre, à Messine. 30.000 hommes de troupes sont embar-qués sur les galères, vieilles bandes espagnoles et allemandes des guerres d’Italie. Leur solidité est inégalable, l’expérience des batailles en a fait des soldats de premier ordre. La nécessi-té de combattre sur des navires supprimera l’immense danger de les voir se débander pour piller. De plus, là, on pourra les surveiller de près, brider leurs instincts d’ivrognerie. Enf n, la coalition étant formée sur l’initiative pressante du pape Pie V, le sentiment religieux domine, devient le meilleur liant entre des corps de troupes souvent rivaux et mêmes ennemis. La haine commune de l’inf dèle domine tout autre sentiment. Les troupes seront donc bien en main — et c’était là un diff cile problème à résoudre pour une coalition.
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