Un mois après sa victoire, François Hollande continue à dérouler ses promesses électorales, à faire des "coups" de politique intérieure. L’ennui, c’est qu’il le fait aussi sur le front diplomatique et que cela donne au moins trois erreurs majeures en trois semaines...
Pierre Lellouche reproche "trois erreurs en "trois semaines" à François Hollande. (Reuters)
D’abord, avec l’annonce du retrait précipité d’Afghanistan qui nuit à la crédibilité de la France et à la fierté de nos armées. Ensuite, en exigeant des Allemands qu’ils payent à fonds perdus, avec les fameux eurobonds, ses promesses électorales non financées. Enfin, en faisant mine de faire la leçon à la Russie sur la Syrie, pour exploiter l’émoi légitimement suscité en France par le massacre de populations civiles en Syrie, et en rajouter sur l’image détestable du régime de Moscou dans les médias français. Tout cela pour faire oublier son évocation aussi imprudente qu’irréfléchie d’une intervention militaire française en Syrie – fût-elle sous mandat de l’ONU.
Bien sûr, personne ne peut accepter le massacre de civils par un gouvernement supposé protéger sa population. Bien sûr, tout serait plus sympathique si nous avions une Russie parfaitement démocratique qui soit à la fois notre alliée et notre partenaire. L’ennui, c’est que le monde réel ne fonctionne pas comme un coup médiatique à la manière de François Hollande. Chacun sait bien depuis des mois que toute option militaire en Syrie est illusoire et particulièrement dangereuse. Non seulement personne parmi nos alliés n’en veut, ni les Anglais qui se sont battus avec nous en Libye, ni les Allemands et encore moins les Américains – Obama n’a pas besoin d’une guerre de plus à quelques mois de ses élections. Mais, pis encore, toute opération armée nous plongerait immédiatement dans une poudrière multiconfessionnelle entre majorité sunnite et minorité alaouite chiite –, la minorité chrétienne ayant choisi de rester fidèle à la protection que lui offre le régime de Bachar El-Assad. Souhaitons-nous vraiment envoyer des troupes au sol dans une guerre civile qui, de surcroît, peut s’étendre au Liban où sont déjà déployés des soldats français sous casque bleu?
Et que dire alors de la méconnaissance crasse dont fait preuve le nouveau président à l’égard de la Russie?
Moscou n’a pas apprécié d’avoir été mis à deux reprises devant le fait accompli par des opérations militaires occidentales. En Bosnie, en 1995, et, l’an dernier, en Libye. Face à une Europe et à une Amérique affaiblies et endettées, la Russie entend demeurer une grande puissance dont nous avons besoin autant pour nos approvisionnements énergétiques que pour nos intérêts stratégiques (Iran, Afghanistan, Moyen-Orient). À quoi sert-il donc d’entamer la relation avec un président russe nouvellement réélu par des leçons de morale dont on sait par avance qu’elles ne conduiront qu’à l’effet exactement contraire à celui qui est souhaité? Tout cela n’est pas de la politique étrangère. C’est au mieux une politique de gribouille tirée de propos d’estrade.
- Le Journal du Dimanche
Pierre Lellouche reproche "trois erreurs en "trois semaines" à François Hollande. (Reuters)
D’abord, avec l’annonce du retrait précipité d’Afghanistan qui nuit à la crédibilité de la France et à la fierté de nos armées. Ensuite, en exigeant des Allemands qu’ils payent à fonds perdus, avec les fameux eurobonds, ses promesses électorales non financées. Enfin, en faisant mine de faire la leçon à la Russie sur la Syrie, pour exploiter l’émoi légitimement suscité en France par le massacre de populations civiles en Syrie, et en rajouter sur l’image détestable du régime de Moscou dans les médias français. Tout cela pour faire oublier son évocation aussi imprudente qu’irréfléchie d’une intervention militaire française en Syrie – fût-elle sous mandat de l’ONU.
Bien sûr, personne ne peut accepter le massacre de civils par un gouvernement supposé protéger sa population. Bien sûr, tout serait plus sympathique si nous avions une Russie parfaitement démocratique qui soit à la fois notre alliée et notre partenaire. L’ennui, c’est que le monde réel ne fonctionne pas comme un coup médiatique à la manière de François Hollande. Chacun sait bien depuis des mois que toute option militaire en Syrie est illusoire et particulièrement dangereuse. Non seulement personne parmi nos alliés n’en veut, ni les Anglais qui se sont battus avec nous en Libye, ni les Allemands et encore moins les Américains – Obama n’a pas besoin d’une guerre de plus à quelques mois de ses élections. Mais, pis encore, toute opération armée nous plongerait immédiatement dans une poudrière multiconfessionnelle entre majorité sunnite et minorité alaouite chiite –, la minorité chrétienne ayant choisi de rester fidèle à la protection que lui offre le régime de Bachar El-Assad. Souhaitons-nous vraiment envoyer des troupes au sol dans une guerre civile qui, de surcroît, peut s’étendre au Liban où sont déjà déployés des soldats français sous casque bleu?
Et que dire alors de la méconnaissance crasse dont fait preuve le nouveau président à l’égard de la Russie?
Moscou n’a pas apprécié d’avoir été mis à deux reprises devant le fait accompli par des opérations militaires occidentales. En Bosnie, en 1995, et, l’an dernier, en Libye. Face à une Europe et à une Amérique affaiblies et endettées, la Russie entend demeurer une grande puissance dont nous avons besoin autant pour nos approvisionnements énergétiques que pour nos intérêts stratégiques (Iran, Afghanistan, Moyen-Orient). À quoi sert-il donc d’entamer la relation avec un président russe nouvellement réélu par des leçons de morale dont on sait par avance qu’elles ne conduiront qu’à l’effet exactement contraire à celui qui est souhaité? Tout cela n’est pas de la politique étrangère. C’est au mieux une politique de gribouille tirée de propos d’estrade.
- Le Journal du Dimanche
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