“Nous étions plus de 100 étudiants, dont 8 garçons, dans deux bus [lors d’une sortie d’étude organisée, le 6 mai, par l’Institut supérieur des sciences biologiques appliquées de Tunis]. Vers 10 heures, on était arrivés à Sejnane [dans le nord-ouest de la Tunisie], où on s’est arrêté. Quelques-unes des filles ont voulu prendre une collation à côté de l’un des deux bus”, raconte une étudiante. Elle soupire, les yeux mouillés, avale sa salive et reprend : “A ce moment-là, un groupe d’enfants de 10 ans ou un peu plus, avec leur cartable sur le dos – d’ailleurs, c’était un dimanche et je ne sais pas pourquoi ils avaient avec eux ces cartables –, ont commencé à taquiner les filles. Et lorsque nos camarades, les garçons, leur ont dit d’arrêter, les petits ont réponduen bousculant et en frappant les étudiants. Ces derniers ont riposté et nous nous sommes tous dépêchés de monter dans les bus. Car nous avons vu des jeunes et même des quinquagénaires qui venaient dans notre direction avec des bâtons.” Selon elle, certains assaillants étaient en moto et les autres armés de bâtons à bord d’une 404 bâchée. L’un des bus a échappé à leur colère en démarrant rapidement.
“Le second bus a tout fait pour les dérouter, mais il s’est trouvé à la fin dans une ruelle, encerclé par un groupe de gens. Nous étions pris en otage ! Ils sont montés sur le bus et, par les fenêtres, ils nous ont vaporisés avec du gaz. Le chauffeur a finalement ouvert la portière pour essayer de discuter avec eux. Là, ils ont commencé à violenter nos camarades (les garçons) et à nous qualifier de aâherat et de fajirat (prostituées), nous disant qu’on n’a pas le droit d’aller à l’école et de vivre en mixité et que Sejnane est le Sejnanistan, un émirat qui ne dépend plus de la Tunisie.” “L’un des 8 garçons a été violenté et plusieurs fois giflé. ‘Nous allons faire appliquer la charia, c’est halal !’ nous ont-ils lancé. ‘C’est-à-dire que nous allons couper la tête de cet étudiant qui est en tee-shirt à côté des filles’“, poursuit la jeune étudiante, très émue. Sa camarade poursuit : “Nous étions à terre, nous avons essayé discrètement de contacter nos familles et la police pour nous secourir. Faute de réseau, tout contact avec l’extérieur était coupé. Entre-temps, une vieille dame du quartier est venue supplier nos assaillants pour qu’ils nous relâchent. Mais le groupe – dont plusieurs étaient barbus – a voulu prendre en otage une fille et un garçon contre notre libération, en promettant de libérer les deux otages plus tard. Nous avons protesté. A la fin, ils nous ont laissés partir après avoir matraqué certains étudiants et ils nous ont dit qu’ils pourraient nous rattraper même si on allait en Chine”, raconte la fille. C’est à ce moment-là que la police est arrivée. “Ce qui nous a frappés, c’est la courtoisie avec laquelle la police a traité ces gens-là. On les a même vus plaisanter ensemble !”
Courrier International
“Le second bus a tout fait pour les dérouter, mais il s’est trouvé à la fin dans une ruelle, encerclé par un groupe de gens. Nous étions pris en otage ! Ils sont montés sur le bus et, par les fenêtres, ils nous ont vaporisés avec du gaz. Le chauffeur a finalement ouvert la portière pour essayer de discuter avec eux. Là, ils ont commencé à violenter nos camarades (les garçons) et à nous qualifier de aâherat et de fajirat (prostituées), nous disant qu’on n’a pas le droit d’aller à l’école et de vivre en mixité et que Sejnane est le Sejnanistan, un émirat qui ne dépend plus de la Tunisie.” “L’un des 8 garçons a été violenté et plusieurs fois giflé. ‘Nous allons faire appliquer la charia, c’est halal !’ nous ont-ils lancé. ‘C’est-à-dire que nous allons couper la tête de cet étudiant qui est en tee-shirt à côté des filles’“, poursuit la jeune étudiante, très émue. Sa camarade poursuit : “Nous étions à terre, nous avons essayé discrètement de contacter nos familles et la police pour nous secourir. Faute de réseau, tout contact avec l’extérieur était coupé. Entre-temps, une vieille dame du quartier est venue supplier nos assaillants pour qu’ils nous relâchent. Mais le groupe – dont plusieurs étaient barbus – a voulu prendre en otage une fille et un garçon contre notre libération, en promettant de libérer les deux otages plus tard. Nous avons protesté. A la fin, ils nous ont laissés partir après avoir matraqué certains étudiants et ils nous ont dit qu’ils pourraient nous rattraper même si on allait en Chine”, raconte la fille. C’est à ce moment-là que la police est arrivée. “Ce qui nous a frappés, c’est la courtoisie avec laquelle la police a traité ces gens-là. On les a même vus plaisanter ensemble !”
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