De mon enfance
Asalam aleykoum wa rahmatullah wa barakatuh. Je me présente mon prénom est Dîna, et celui que m’a donné mes parents à ma naissance est Jessica. J’ai 24 ans aujourd’hui, je viens de finir mon Master 2 qui devrait pouvoir me permettre de devenir professeur d’espagnol inshâ’Allah. Je suis née dans une famille modeste, dans la banlieue lyonnaise. Mes parents se sont séparés alors que je venais tout juste de souffler ma première bougie. Ma maman, qu’Allah la protège et la guide, a toujours tout fait pour que nous soyons à l’abri du besoin: beaux vêtements, beaux jouets, beaux repas… Ayant elle-même grandi dans la misère auprès de parents qui la délaissaient quelque peu, elle et ses cinq frères et sœurs, elle s’est pliée en quatre pour nous offrir ce qu‘elle pensait être essentiel à notre bonheur.
Malgré tout, je garde de mon enfance un souvenir amer. Au niveau matériel, nous ne manquions de rien hamdulillah. En revanche, au niveau affectif, je ne peux pas dire que nous ayons été comblés. Ma mère était souvent malade, obsédée à mener à bien sa quête matérielle. Du coup, nous avons, mes frères et moi, transité pas mal dans des foyers, chez ma tante, ma grand-mère pendant que notre maman se battait avec ses vieux démons. Quand on était réunis à la maison, c’était les cris liés au stress en permanence.
Pour moi qui n’ai connu que ça pendant des années, j’ai longtemps cru qu’il s’agissait de la normalité, le schéma classique qui régnait dans toutes les familles.Quand j‘entrai dans l‘adolescence, ma mère et moi ne faisions que nous éloigner davantage. Je lui en voulais tellement de se rendre malheureuse pour des choses non essentielles. Elle, ne supportait pas que je sois différente d’elle: plus réservée, moins matérielle, je rêvais d’ailleurs. Mais j’étais bel et bien à la maison et nos relations ont été parfois explosives. Je le regrette aujourd’hui et j’essaie de me faire pardonner chaque fois que je peux.
Mes origines juives : mon lot de réconfort pour un temps
La seule chose qui nous rapprochait un peu c’était la religion: ma mère est juive séfarade par sa maman. Ma grand-mère est née en Algérie, dans une famille très respectueuse de la religion du Livre. Son grand malheur a été de se marier avec un français qui l’a emmenée à Lyon et a exigé d’elle qu’elle oublie sa religion. L’éducation religieuse qu’a reçue ma mère était donc très pauvre, mais malgré tout, il restait une dimension culturelle importante.
Au moment du décès de ma grand-mère, qu’Allah ait pitié de son âme, ma mère a décidé de se rapprocher un peu du Judaïsme. Il s’agissait pour elle de faire revivre le souvenir de sa mère. Pour moi, qui l’ai suivie tout naturellement dans sa pratique naissante, c‘était cette envie d‘ailleurs qui se concrétisait. Je découvrais enfin autre chose: le jeûne, le repli dans un lieu d‘adoration, la quête de spiritualité. Je me mis donc à lire quelques livres sur le Judaïsme pour comprendre mieux ce qui m’attirait. Et puis plus rien…
Je ne sais pas comment l’expliquer mais mon engouement apparu soudainement s’est tout aussi vite essoufflé, je retombais dans l’aspect culturel, identitaire: j’étais juive, je portais une grosse étoile David en or qui brille, c’était pour moi une manière de m’affirmer, d’être différente. Mais sans plus. Je n’étais pas convaincue, peut-être parce que la communauté juive que je rencontrais à la synagogue ne correspondait pas à ce que je recherchais; ils ne me ressemblaient pas, et je ne voulais pas leur ressembler. En disant cela, je tiens à préciser que je ne porte aucun jugement de valeur sur les juifs. J’apprécie toute personne juste, qu’importe d’où elle vient et qui elle est, et puis de toute manière je ne suis personne pour juger; je pense juste que le destin prévoyait autre chose pour moi.
Les quelques personnes de confession juive que j’ai rencontrées à la synagogue ne m’ont pas permis d’entretenir et d’aviver ma foi naissante. Ma soumission à Dieu devait se faire dans d’autres conditions tout simplement.
«Des gens aux visages apaisés, ceux de musulmans, ont suscité ma curiosité»
Et puis j’ai eu le bac, avec des notes médiocres, malgré mes très bons résultats tout au long de ma scolarité. J’étais mal dans ma peau, je n’avais pas confiance en moi. Sélectionnée pour rentrer en prépa HEC dans un établissement situé en centre ville, ma mère a accepté (après moult négociations) que je quitte le domicile familiale pour prendre une chambre étudiante. Ces deux années d’études ont été très difficiles. Je pensais que m’émanciper de ma famille m’aiderait à aller mieux mais j’étais au plus mal.
Le seul aspect positif de ces deux années a été ma rencontre avec une ou deux personnes de ma résidence. Des personnes simples, honnêtes que j’admirais pour leur comportement et pour leur force de caractère. Quel était donc leur secret pour paraître si heureux? Je remarquais que cette expression apaisée sur leur visage était aussi celle d’autres femmes, et d’autres hommes que j’avais croisé dans le passé où que j’observais dans la rue au quotidien. Toutes ces personnes avaient pour point commun apparent leur appartenance à la religion musulmane.
Intriguée, je posais vite des questions. Les réponses que je recevais me convainquaient, suscitaient davantage ma curiosité, et me donnèrent vite l’envie de lire des livres sur le sujet. Des livres d’initiation qui m’apprirent les bases sur l’islam et des livres sur la vie du Prophète (sallallahou alayhi wa salam) qui faisaient naître dans mon cœur une grande admiration. Parallèlement à cela, je visitais les familles de mes nouvelles amies musulmanes et me rendais compte qu’il régnait chez eux une ambiance tout à fait différente de chez moi: la paix, la sérénité, la solidarité semblaient faire partie du quotidien… Comment ne pas être heureux dans de telles conditions ? Dans mon cœur, tout devenait de plus en plus clair: je voulais être musulmane, et je l’étais déjà d’une certaine manière.
Mais ma tête me disait le contraire: comment allait réagir ma mère, pour elle qui était si fragile, ma reconversion allait être une véritable catastrophe, un affront, une trahison à nos origines… Je décidai donc de m’armer de patience et d’en apprendre davantage sur l’islam: j’augmentais mon courage en lisant des livres sur les premiers musulmans reconvertis qui avaient dû souffrir la torture, affronter la mort de près pour enfin pouvoir vivre en paix avec leur nouvelle religion, j’apprenais quelques sourates en vue d’une future pratique et j’en lisais d’autres afin d’être prête et ferme le jour où je devrais affronter les réticences de mes proches non musulmans.
Asalam aleykoum wa rahmatullah wa barakatuh. Je me présente mon prénom est Dîna, et celui que m’a donné mes parents à ma naissance est Jessica. J’ai 24 ans aujourd’hui, je viens de finir mon Master 2 qui devrait pouvoir me permettre de devenir professeur d’espagnol inshâ’Allah. Je suis née dans une famille modeste, dans la banlieue lyonnaise. Mes parents se sont séparés alors que je venais tout juste de souffler ma première bougie. Ma maman, qu’Allah la protège et la guide, a toujours tout fait pour que nous soyons à l’abri du besoin: beaux vêtements, beaux jouets, beaux repas… Ayant elle-même grandi dans la misère auprès de parents qui la délaissaient quelque peu, elle et ses cinq frères et sœurs, elle s’est pliée en quatre pour nous offrir ce qu‘elle pensait être essentiel à notre bonheur.
Malgré tout, je garde de mon enfance un souvenir amer. Au niveau matériel, nous ne manquions de rien hamdulillah. En revanche, au niveau affectif, je ne peux pas dire que nous ayons été comblés. Ma mère était souvent malade, obsédée à mener à bien sa quête matérielle. Du coup, nous avons, mes frères et moi, transité pas mal dans des foyers, chez ma tante, ma grand-mère pendant que notre maman se battait avec ses vieux démons. Quand on était réunis à la maison, c’était les cris liés au stress en permanence.
Pour moi qui n’ai connu que ça pendant des années, j’ai longtemps cru qu’il s’agissait de la normalité, le schéma classique qui régnait dans toutes les familles.Quand j‘entrai dans l‘adolescence, ma mère et moi ne faisions que nous éloigner davantage. Je lui en voulais tellement de se rendre malheureuse pour des choses non essentielles. Elle, ne supportait pas que je sois différente d’elle: plus réservée, moins matérielle, je rêvais d’ailleurs. Mais j’étais bel et bien à la maison et nos relations ont été parfois explosives. Je le regrette aujourd’hui et j’essaie de me faire pardonner chaque fois que je peux.
Mes origines juives : mon lot de réconfort pour un temps
La seule chose qui nous rapprochait un peu c’était la religion: ma mère est juive séfarade par sa maman. Ma grand-mère est née en Algérie, dans une famille très respectueuse de la religion du Livre. Son grand malheur a été de se marier avec un français qui l’a emmenée à Lyon et a exigé d’elle qu’elle oublie sa religion. L’éducation religieuse qu’a reçue ma mère était donc très pauvre, mais malgré tout, il restait une dimension culturelle importante.
Au moment du décès de ma grand-mère, qu’Allah ait pitié de son âme, ma mère a décidé de se rapprocher un peu du Judaïsme. Il s’agissait pour elle de faire revivre le souvenir de sa mère. Pour moi, qui l’ai suivie tout naturellement dans sa pratique naissante, c‘était cette envie d‘ailleurs qui se concrétisait. Je découvrais enfin autre chose: le jeûne, le repli dans un lieu d‘adoration, la quête de spiritualité. Je me mis donc à lire quelques livres sur le Judaïsme pour comprendre mieux ce qui m’attirait. Et puis plus rien…
Je ne sais pas comment l’expliquer mais mon engouement apparu soudainement s’est tout aussi vite essoufflé, je retombais dans l’aspect culturel, identitaire: j’étais juive, je portais une grosse étoile David en or qui brille, c’était pour moi une manière de m’affirmer, d’être différente. Mais sans plus. Je n’étais pas convaincue, peut-être parce que la communauté juive que je rencontrais à la synagogue ne correspondait pas à ce que je recherchais; ils ne me ressemblaient pas, et je ne voulais pas leur ressembler. En disant cela, je tiens à préciser que je ne porte aucun jugement de valeur sur les juifs. J’apprécie toute personne juste, qu’importe d’où elle vient et qui elle est, et puis de toute manière je ne suis personne pour juger; je pense juste que le destin prévoyait autre chose pour moi.
Les quelques personnes de confession juive que j’ai rencontrées à la synagogue ne m’ont pas permis d’entretenir et d’aviver ma foi naissante. Ma soumission à Dieu devait se faire dans d’autres conditions tout simplement.
«Des gens aux visages apaisés, ceux de musulmans, ont suscité ma curiosité»
Et puis j’ai eu le bac, avec des notes médiocres, malgré mes très bons résultats tout au long de ma scolarité. J’étais mal dans ma peau, je n’avais pas confiance en moi. Sélectionnée pour rentrer en prépa HEC dans un établissement situé en centre ville, ma mère a accepté (après moult négociations) que je quitte le domicile familiale pour prendre une chambre étudiante. Ces deux années d’études ont été très difficiles. Je pensais que m’émanciper de ma famille m’aiderait à aller mieux mais j’étais au plus mal.
Le seul aspect positif de ces deux années a été ma rencontre avec une ou deux personnes de ma résidence. Des personnes simples, honnêtes que j’admirais pour leur comportement et pour leur force de caractère. Quel était donc leur secret pour paraître si heureux? Je remarquais que cette expression apaisée sur leur visage était aussi celle d’autres femmes, et d’autres hommes que j’avais croisé dans le passé où que j’observais dans la rue au quotidien. Toutes ces personnes avaient pour point commun apparent leur appartenance à la religion musulmane.
Intriguée, je posais vite des questions. Les réponses que je recevais me convainquaient, suscitaient davantage ma curiosité, et me donnèrent vite l’envie de lire des livres sur le sujet. Des livres d’initiation qui m’apprirent les bases sur l’islam et des livres sur la vie du Prophète (sallallahou alayhi wa salam) qui faisaient naître dans mon cœur une grande admiration. Parallèlement à cela, je visitais les familles de mes nouvelles amies musulmanes et me rendais compte qu’il régnait chez eux une ambiance tout à fait différente de chez moi: la paix, la sérénité, la solidarité semblaient faire partie du quotidien… Comment ne pas être heureux dans de telles conditions ? Dans mon cœur, tout devenait de plus en plus clair: je voulais être musulmane, et je l’étais déjà d’une certaine manière.
Mais ma tête me disait le contraire: comment allait réagir ma mère, pour elle qui était si fragile, ma reconversion allait être une véritable catastrophe, un affront, une trahison à nos origines… Je décidai donc de m’armer de patience et d’en apprendre davantage sur l’islam: j’augmentais mon courage en lisant des livres sur les premiers musulmans reconvertis qui avaient dû souffrir la torture, affronter la mort de près pour enfin pouvoir vivre en paix avec leur nouvelle religion, j’apprenais quelques sourates en vue d’une future pratique et j’en lisais d’autres afin d’être prête et ferme le jour où je devrais affronter les réticences de mes proches non musulmans.
Commentaire