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Les raisons de l’Allemagne que sa raison ignore

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  • Les raisons de l’Allemagne que sa raison ignore

    Du haut de sa priorité accordée à une politique d’austérité sur le long terme, l’Allemagne peut se targuer de résultats incontestables en termes de redressement de ses finances publiques. Elle se devait en effet de réagir avec détermination face au coût colossal de sa réunificaton et suite à la très faible compétitivité des usines de l’Est.

    Elle a donc mis en place une mesure contre cyclique judicieuse, à savoir l’augmentation de sa T.V.A. de 16 à 19% en 2007, à l’issue de trois années prospères. Si ces nouvelles recettes engrangées autorisèrent forcément l’assainissement de ses comptes publics, il est à l’évidence tellement plus aisé de procéder à une consolidation fiscale en cas de prospérité que dans le cadre d’une crise économique et financière. Cette majoration de la T.V.A. fut bien-sûr un des jalons posés dans le cadre d’une politique de dévaluation intérieure volontaire dont la manifestation la plus évidente fut une austérité stricte en matière de salaires.

    Les excédents commerciaux furent en quelque sorte la sécrétion naturelle de cette rigueur allemande qui se solda également par une balance des paiements très nettement excédentaire. En effet, impressionnés par ces performances et toujours en quête de placements solides, les investisseurs mondiaux se ruèrent ainsi vers les Bons du Trésor allemand, ce qui contribua mécaniquement à instaurer dans le pays un contexte général – et permanent – de taux d’intérêts réels extrêmement bas, sans pour autant aucun impact en faveur d’une progression de la consommation intérieure. Il n’en reste pas moins que l’exemple suprême était là : les pays en difficulté devaient le suivre et se prescrire strictement à un régime fait de salaires et de cotisations chômage en berne assortis d’une pression fiscale indirecte substantiellement plus élevée. Telle était donc la formule magique que se devaient d’appliquer les pays d’Europe périphérique pour doper leurs exportations en adoptant un modèle de relance de la croissance par les exportations. Le tout dans un souci d’émulation vis-à-vis du modèle allemand présenté comme parfait, non sans raison vu du côté du premier exportateur européen.

    Si ce n’est que les excédents d’un pays sont tout bonnement le pendant aux déficits des autres et que la dynamique allemande n’a été couronnée de succès – en se soldant en excédents commerciaux substantiels – que du fait de la consommation européenne (et mondiale) en produits manufacturés dans ce pays. Il ne sert donc à rien et il serait même totalement contre productif que toutes les nations européennes adoptent en même temps des mesures d’austérité ayant pour but de doper leur productivité afin d’opérer par ce biais une relance de leur économie par leurs exportations. La seule et unique condition du succès d’une telle entreprise serait que l’Europe cesse de consommer et que le reste du monde se rue sur les produits européens, ce qui est bien peu réaliste.

    En conclusion, comment et pourquoi l’Allemagne est-elle persuadée que son modèle est transposable à travers l’ensemble de ses partenaires européens sommés, en d’autres termes et indirectement, de ne plus acheter ses propres marchandises ? Elle dont les exportations vers l’Union se montent à 60% de son chiffre global en 2011 ? Est-elle réellement convaincue que l’Union Européenne muera sous son impulsion pour se convertir allègrement en une gigantesque machine à exporter vers le reste du monde ? Si un pays peut à lui seul – fût-il de la taille et de l’importance de l’Allemagne – procéder à des dévaluations intérieures dans le but d’améliorer sa compétitivité, un ensemble économique comme l’Union Européenne disposant du premier P.I.B. mondial ne saurait opérer une telle révolution dans ses habitudes de consommation et d’exportation sans provoquer un cataclysme à l’échelle planétaire.


    par Michel Santi, économiste
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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