«Les titres ne sont que la décoration des sots, les grands hommes n’ont besoin que de leur nom.» Frédéric II
C’est une grande figure de la révolution qui disparaît, un militant de la première heure… Représentant du GPRA en Italie et en Suisse, il a tissé des relations utiles avec nombre de représentants et de personnalités de l’opinion publique en Italie et en Suisse. Et c’est par son intermédiaire que le gouvernement helvétique a présenté ses bons offices entre le gouvernement français et le gouvernement algérien en vue des négociations d’Evian. Il était à l’origine des contacts et a fait partie de la délégation», témoignait Réda Malek lors du décès de Tayeb Boulahrouf le 26 juin 2005 à Alger.
L’engagement
Tayeb Boulahrouf, dit Pablo, ce héros de la vraie vie qui affrontait le danger sans hésitation avec rien d’autre que son intelligence, son ingéniosité et sa détermination est né le 9 avril 1923 à Oued Zenati. Orphelin depuis sa tendre enfance, c’est avec son oncle maternel, qui s’occupera désormais de son éducation, qu’il découvrira le sens du combat nationaliste grâce aux réunions clandestines du Néo-Destour auxquelles il assistait à la frontière algéro-tunisienne. A l’âge de 15 ans, il est exclu de son lycée pour «subversion» suite à la vente du journal El Ouma dont il était un lecteur assidu. A partir de 1939, il organise les cellules du PPA à Annaba et à Guelma et prend contact avec le bureau du Parti à Alger. Refusant d’accomplir son service militaire sous le drapeau français, il rentre dans la clandestinité. Habile meneur d’hommes, il mobilisera, grâce aux tracts qu’il rédigera à la main lui-même durant des nuits entières et qu’il fera distribuer, les travailleurs et les chômeurs de sa région pour les manifestations du 1er mai 1945.
Une semaine plus tard, le 8 mai, il est à la tête des manifestations où, pour la première fois, le drapeau algérien est brandi. La répression qui s’en est suivie le rattrapera quelque temps après, et il sera incarcéré à la prison de Annaba avant d’être transféré vers Constantine. A sa libération quelques mois plus tard, il reprend contact avec Mohamed Belouizdad et tente de restructurer Guelma la martyre. Au congrès du Parti à Zeddine, qui décide la création de l’OS en février 1947, il est responsable de la zone qui couvre Annaba, Skikda, Aïn Beïda et les Algériens résidant en Tunisie. L’année suivante, il est arrêté et emprisonné à Barberousse. Il entame alors une longue grève de la faim pour obtenir les droits politiques. Après sa libération, il est membre du Comité central du MTLD. Suite au démantèlement de l’OS en 1950, il est arrêté et torturé et ne sera libéré que vers la fin de l’année 1951 avant de rejoindre la France en 1952.
Du responsable de la Fédération de France au diplomate de guerre
Lors de la crise qui ébranle le MTLD, il prend position contre Messali mais sans s’engager avec les Centralistes. Il rejoint le camp des activistes et retourne en Algérie en 1954 pour y rencontrer dans le Constantinois Mustapha Ben Boulaïd et Didouche Mourad pour les derniers préparatifs avant le déclenchement de la lutte armée. Ce sera leur dernière rencontre.
De retour en France la veille du jour J, le 30 octobre, il prend attache avec le PCF pour une éventuelle reconnaissance du FLN. Peine perdue. Activement recherché, il prendra le pseudonyme de Pablo et réorganisera la Fédération de France après l’arrestation des principaux dirigeants avant qu’elle ne soit confiée à Omar Boudaoud à la fin de l’année 1957.
Toujours traqué par la police française, il réussit à passer en Suisse et s’établit à Lausanne et crée une antenne du FLN dans le petit hôtel Orient, une sorte de pension très discrète, dans l’avenue Ouchy. Ce modeste gîte, devenu un bureau du FLN, sera l’axe idéal France/Italie par lequel transiteront régulièrement Francis Jeanson et son réseau de porteurs de valises. Durant ce premier séjour en Suisse et avant d’être expulsé par les autorités helvétiques pour «activités clandestines», il se liera d’amitié avec un journaliste de la Gazette de Lausanne, Charles-Henri Favrod, à qui il fournira les premiers éléments du livre que ce dernier écrira en temps réel, c’est-à-dire dans le feu de la guerre.
Ce sera le premier ouvrage qui sera intitulé La Révolution algérienne et qui tranchait nettement avec ce qui se disait ou s’écrivait sur la prétendue Algérie française. La prestigieuse maison d’édition française Plon refusera de l’éditer sous ce titre «provocateur» et ce sera une petite imprimerie suisse qui se chargera de le faire. En 1958, il sera ambassadeur du GPRA à Rome. La représentation algérienne sera hébergée à l’ambassade tunisienne dans la capitale italienne. Un jour, l’ambassadeur tunisien s’apercevra que des armes destinées au FLN en guerre transitaient par sa chancellerie. Pris de panique, il s’en plaindra au président Habib Bourguiba. Le leader du Néo-Destour relèvera le plaignant et accréditera son propre fils qui laissera faire. En 1959, lorsque le futur président des Etats-Unis, John Kennedy, prendra position en faveur du FLN, ce sera un séisme politique sans commune mesure qui secouera la France coloniale.
L’Allemagne, la Suède, l’Angleterre et l’Italie, pour ne citer que ces pays occidentaux, encourageront des comités de soutien au FLN. La représentation algérienne à Rome acquiert un statut quasi officiel, et de prestigieux hommes d’affaires italiens, tels que Agnelli (Fiat), Mattei (Eni) prennent contact avec le FLN par le biais de Tayeb Boulahrouf. Le célèbre réalisateur de La Bataille d’Alger, Pontecorvo, sera parmi les contacts privilégiés de Pablo.
C’est une grande figure de la révolution qui disparaît, un militant de la première heure… Représentant du GPRA en Italie et en Suisse, il a tissé des relations utiles avec nombre de représentants et de personnalités de l’opinion publique en Italie et en Suisse. Et c’est par son intermédiaire que le gouvernement helvétique a présenté ses bons offices entre le gouvernement français et le gouvernement algérien en vue des négociations d’Evian. Il était à l’origine des contacts et a fait partie de la délégation», témoignait Réda Malek lors du décès de Tayeb Boulahrouf le 26 juin 2005 à Alger.
L’engagement
Tayeb Boulahrouf, dit Pablo, ce héros de la vraie vie qui affrontait le danger sans hésitation avec rien d’autre que son intelligence, son ingéniosité et sa détermination est né le 9 avril 1923 à Oued Zenati. Orphelin depuis sa tendre enfance, c’est avec son oncle maternel, qui s’occupera désormais de son éducation, qu’il découvrira le sens du combat nationaliste grâce aux réunions clandestines du Néo-Destour auxquelles il assistait à la frontière algéro-tunisienne. A l’âge de 15 ans, il est exclu de son lycée pour «subversion» suite à la vente du journal El Ouma dont il était un lecteur assidu. A partir de 1939, il organise les cellules du PPA à Annaba et à Guelma et prend contact avec le bureau du Parti à Alger. Refusant d’accomplir son service militaire sous le drapeau français, il rentre dans la clandestinité. Habile meneur d’hommes, il mobilisera, grâce aux tracts qu’il rédigera à la main lui-même durant des nuits entières et qu’il fera distribuer, les travailleurs et les chômeurs de sa région pour les manifestations du 1er mai 1945.
Une semaine plus tard, le 8 mai, il est à la tête des manifestations où, pour la première fois, le drapeau algérien est brandi. La répression qui s’en est suivie le rattrapera quelque temps après, et il sera incarcéré à la prison de Annaba avant d’être transféré vers Constantine. A sa libération quelques mois plus tard, il reprend contact avec Mohamed Belouizdad et tente de restructurer Guelma la martyre. Au congrès du Parti à Zeddine, qui décide la création de l’OS en février 1947, il est responsable de la zone qui couvre Annaba, Skikda, Aïn Beïda et les Algériens résidant en Tunisie. L’année suivante, il est arrêté et emprisonné à Barberousse. Il entame alors une longue grève de la faim pour obtenir les droits politiques. Après sa libération, il est membre du Comité central du MTLD. Suite au démantèlement de l’OS en 1950, il est arrêté et torturé et ne sera libéré que vers la fin de l’année 1951 avant de rejoindre la France en 1952.
Du responsable de la Fédération de France au diplomate de guerre
Lors de la crise qui ébranle le MTLD, il prend position contre Messali mais sans s’engager avec les Centralistes. Il rejoint le camp des activistes et retourne en Algérie en 1954 pour y rencontrer dans le Constantinois Mustapha Ben Boulaïd et Didouche Mourad pour les derniers préparatifs avant le déclenchement de la lutte armée. Ce sera leur dernière rencontre.
De retour en France la veille du jour J, le 30 octobre, il prend attache avec le PCF pour une éventuelle reconnaissance du FLN. Peine perdue. Activement recherché, il prendra le pseudonyme de Pablo et réorganisera la Fédération de France après l’arrestation des principaux dirigeants avant qu’elle ne soit confiée à Omar Boudaoud à la fin de l’année 1957.
Toujours traqué par la police française, il réussit à passer en Suisse et s’établit à Lausanne et crée une antenne du FLN dans le petit hôtel Orient, une sorte de pension très discrète, dans l’avenue Ouchy. Ce modeste gîte, devenu un bureau du FLN, sera l’axe idéal France/Italie par lequel transiteront régulièrement Francis Jeanson et son réseau de porteurs de valises. Durant ce premier séjour en Suisse et avant d’être expulsé par les autorités helvétiques pour «activités clandestines», il se liera d’amitié avec un journaliste de la Gazette de Lausanne, Charles-Henri Favrod, à qui il fournira les premiers éléments du livre que ce dernier écrira en temps réel, c’est-à-dire dans le feu de la guerre.
Ce sera le premier ouvrage qui sera intitulé La Révolution algérienne et qui tranchait nettement avec ce qui se disait ou s’écrivait sur la prétendue Algérie française. La prestigieuse maison d’édition française Plon refusera de l’éditer sous ce titre «provocateur» et ce sera une petite imprimerie suisse qui se chargera de le faire. En 1958, il sera ambassadeur du GPRA à Rome. La représentation algérienne sera hébergée à l’ambassade tunisienne dans la capitale italienne. Un jour, l’ambassadeur tunisien s’apercevra que des armes destinées au FLN en guerre transitaient par sa chancellerie. Pris de panique, il s’en plaindra au président Habib Bourguiba. Le leader du Néo-Destour relèvera le plaignant et accréditera son propre fils qui laissera faire. En 1959, lorsque le futur président des Etats-Unis, John Kennedy, prendra position en faveur du FLN, ce sera un séisme politique sans commune mesure qui secouera la France coloniale.
L’Allemagne, la Suède, l’Angleterre et l’Italie, pour ne citer que ces pays occidentaux, encourageront des comités de soutien au FLN. La représentation algérienne à Rome acquiert un statut quasi officiel, et de prestigieux hommes d’affaires italiens, tels que Agnelli (Fiat), Mattei (Eni) prennent contact avec le FLN par le biais de Tayeb Boulahrouf. Le célèbre réalisateur de La Bataille d’Alger, Pontecorvo, sera parmi les contacts privilégiés de Pablo.
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