Militant du RCD
En ce cinquantième anniversaire de la libération de l’Algérie du joug colonial français, je voudrais d’abord rendre hommage aux martyrs avant d’essayer de raviver le serment qu’ils ont honoré à travers l’épopée qui a mené à l’indépendance de notre pays.
Ils étaient une poignée de patriotes et de justes inconnus sur la scène publique officielle. Ils ont pris la décision de déclencher les hostilités contre la 5e puissance militaire mondiale pour, comme ils l’ont proclamé dans la déclaration du 1er Novembre 1954, libérer le pays de la longue nuit coloniale et redonner la dignité à leur peuple. Aboutissement d’un long processus de luttes portées par des générations de militants, cette décision sonne, du même coup, le glas de l’ère coloniale sur tout le continent africain. Ma pensée va aussi à tous ceux qui ont enduré privations, souffrances et mutilations. C’est grâce à leur conviction, leur courage, leur moralité et l’exemple du sacrifice suprême, c’est-à-dire le don de soi pour la liberté et la dignité, que l’écrasante majorité du peuple algérien a accompagné la lutte armée dès les premières années. Cette adhésion a scellé la détermination des premiers dirigeants de la révolution. Ni les menées messalistes qui ont dérivé vers la trahison ni les tiédeurs multiples des biens-pensants de tout bord n’ont pu imposer la moindre inflexion au noyau originel rejoint par tous les patriotes que comptait le pays. Ces maquisards ont infligé à l’ordre colonial la pire des humiliations, poussant l’Etat français à renoncer à nombre de ses colonies avant de sombrer lui-même dans une crise politique qui emporta la IVe République. Pour redorer le blason de l’Etat colonialiste, de Gaulle, en sauveur suprême, mobilise tout ce que compte la République de forces répressives y compris l’usage du napalm, dont plusieurs localités portent encore aujourd’hui les stigmates. Pendant que la résistance algérienne mobilise à l’intérieur tout son potentiel pour faire face à cette armada dirigée par les Massu, Challe et compagnie, à l’extérieur de l’Algérie une excroissance du mouvement national, renforcée progressivement par les entrants de la 25e heure, s’affairait à affaiblir les maquis par la rétention de l’armement et à déconstruire le processus d’un Etat algérien démocratique et social incarné, sur le sol national, par les Abane Ramdane, Larbi Ben M’hidi, Krim Belkacem, Mustapha Ben Boulaïd, Benyoucef Ben Khedda, Amar Ouamrane, Amirouche, Lotfi… pour lui substituer une dictature militaire. Rompus aux manœuvres et à l’écoute de Paris et du Caire, ces responsables de l’extérieur font bloc dans le congrès de Tripoli pour contrer les instances légitimes de la révolution algérienne et ouvrir la voie au pouvoir des armes. Les travaux de ce conclave du lendemain de l’indépendance n’ont pas été clôturés à ce jour à cause de l’attitude du clan de Oujda emmené par Ben Bella et Boumediène dont l’ivresse du pouvoir ne s’encombre d’aucun scrupule. Tapis dans l’ombre, ils n’ont qu’un seul objectif : la prise d’Alger. Les hésitations et les réactions tardives du GPRA pour dégrader le colonel Boumediène et ses acolytes de l’état-major, le 30 juin 19621(1), ne font que renforcer la folie des conjurés. Ils se ligueront contre l’instance légitime de la révolution algérienne et les maquisards de l’intérieur pour marcher sur Alger au prix de centaines de cadavres, tout au long de leur route. C’est Khaled Nezzar, servant alors sous les ordres du colonel Boumediène dans cette guerre contre les wilayas de l’intérieur, qui écrit dans ses mémoires : «L’intensité des combats qui s’en étaient suivis, jamais je n’en avais vu d’égal personnellement, pas même durant la guerre de libération.»(2) Le GPRA, seule instance légitime de la révolution, est foulé aux pieds par ces assoiffés de pouvoir, aidés par les reliquats de la France coloniale. Le malheur de l’Algérie venait de commencer. Sous les apparences d’un tiers-mondisme exubérant, cette équipe s’installera au pouvoir avec la caution du Caire et de Paris. Elle demeure en place à nos jours. Ceux qui ont pris le pouvoir se sont acharnés à combattre leurs frères et surtout les élites. Ben Bella, qui a fait de l’activisme gauchiste une religion pendant son règne, déclare dans son discours d’ouverture au Congrès du FLN tenu à Alger du 16 au 21 avril 1964 : «Il faut combattre sans répit la tendance de ceux qui affirment que la construction d’un Etat est un préalable de la révolution. Une telle voie est fausse. Elle aboutirait, si on la prenait, à remettre le pouvoir entre les mains de ceux qui actuellement possèdent la culture. Primaire et folklorique, le personnage ne servait en fait que de potiche à Boumediène. Commencent alors, les liquidations physiques d’opposants actifs ou potentiels, de déportations vers le Sud de dirigeants de la révolution et d’emprisonnements sur fond de confiscation de toutes les libertés. Le 19 juin 1965, c’est au tour de Ben Bella, lui-même, de subir la foudre du clan. Le colonel Boumediène et ses acolytes, adeptes des caves et de l’ombre, sont prêts à affronter la lumière. Pour cela, le programme de Boumediène est simple : mettre fin aux quelques failles de la stratégie répressive de l’ancien président, play-boy à ses heures, pour anéantir toute liberté ; c’est le rôle dévolue à la sinistre sécurité militaire qui cherchera à éliminer tous les opposants, y compris par le meurtre, comme c’est le cas de Mohamed Khider et Krim Belkacem pour enfin créer l’homme nouveau, zombie sans mémoire ni conscience. Dans ce domaine, le stratagème se décline en :
• La falsification de l’histoire, voire son amputation ; le livre de Said Sadi(3) qui relate l’acharnement de Boumediène sur les restes des ossements des colonels Amirouche et Haouès illustre l’immoralité qui habite le clan et l’OPA méthodiquement menée sur la révolution algérienne et ses symboles. Absents du champ de bataille aux heures des périls, les nouveaux maîtres du pays proclament : un seul héros le peuple, pendant que le colonel putschiste terrorisant et mystifiant son monde se pare du statut du père de la nation.
• La mutilation de l’identité algérienne pour la réduire à des dimensions folkloriques tout juste bonnes à être exhibées dans des manifestations de villages. Le progrès et la modernité officiels se conjuguent uniquement dans le nationalisme arabe adossé à la légitimité religieuse. Dans sa folie sanglante, le baâth, qui assumait la laïcité, avait au moins le mérite de la cohérence. Liess Boukra(4) note très justement la convergence de l’action de Boumediène avec les tenants des courants religieux rétrogrades «Le premier voulait immuniser la société contre les germes de la modernité, porteuse de l’exigence citoyenne (démocratique, pluraliste), que son autoritarisme et sa mégalomanie ne pouvaient tolérer ni souffrir». Les seconds ne voulaient pas de «l’éclosion d’une conscience sociale libérée de son enveloppe religieuse». La SM veille sur tout : la découverte d’une lettre en tifinagh conduit inéluctablement l’auteur imprévoyant en prison qui se voit désigné ennemi du socialisme et de la nation avant d’être tiré de l’anonymat sous l’étiquette d’agent de l’impérialisme en général et d’élément dormant du SDECE (Services de renseignement français) pour ceux qui ont moins de chance.
En ce cinquantième anniversaire de la libération de l’Algérie du joug colonial français, je voudrais d’abord rendre hommage aux martyrs avant d’essayer de raviver le serment qu’ils ont honoré à travers l’épopée qui a mené à l’indépendance de notre pays.
Ils étaient une poignée de patriotes et de justes inconnus sur la scène publique officielle. Ils ont pris la décision de déclencher les hostilités contre la 5e puissance militaire mondiale pour, comme ils l’ont proclamé dans la déclaration du 1er Novembre 1954, libérer le pays de la longue nuit coloniale et redonner la dignité à leur peuple. Aboutissement d’un long processus de luttes portées par des générations de militants, cette décision sonne, du même coup, le glas de l’ère coloniale sur tout le continent africain. Ma pensée va aussi à tous ceux qui ont enduré privations, souffrances et mutilations. C’est grâce à leur conviction, leur courage, leur moralité et l’exemple du sacrifice suprême, c’est-à-dire le don de soi pour la liberté et la dignité, que l’écrasante majorité du peuple algérien a accompagné la lutte armée dès les premières années. Cette adhésion a scellé la détermination des premiers dirigeants de la révolution. Ni les menées messalistes qui ont dérivé vers la trahison ni les tiédeurs multiples des biens-pensants de tout bord n’ont pu imposer la moindre inflexion au noyau originel rejoint par tous les patriotes que comptait le pays. Ces maquisards ont infligé à l’ordre colonial la pire des humiliations, poussant l’Etat français à renoncer à nombre de ses colonies avant de sombrer lui-même dans une crise politique qui emporta la IVe République. Pour redorer le blason de l’Etat colonialiste, de Gaulle, en sauveur suprême, mobilise tout ce que compte la République de forces répressives y compris l’usage du napalm, dont plusieurs localités portent encore aujourd’hui les stigmates. Pendant que la résistance algérienne mobilise à l’intérieur tout son potentiel pour faire face à cette armada dirigée par les Massu, Challe et compagnie, à l’extérieur de l’Algérie une excroissance du mouvement national, renforcée progressivement par les entrants de la 25e heure, s’affairait à affaiblir les maquis par la rétention de l’armement et à déconstruire le processus d’un Etat algérien démocratique et social incarné, sur le sol national, par les Abane Ramdane, Larbi Ben M’hidi, Krim Belkacem, Mustapha Ben Boulaïd, Benyoucef Ben Khedda, Amar Ouamrane, Amirouche, Lotfi… pour lui substituer une dictature militaire. Rompus aux manœuvres et à l’écoute de Paris et du Caire, ces responsables de l’extérieur font bloc dans le congrès de Tripoli pour contrer les instances légitimes de la révolution algérienne et ouvrir la voie au pouvoir des armes. Les travaux de ce conclave du lendemain de l’indépendance n’ont pas été clôturés à ce jour à cause de l’attitude du clan de Oujda emmené par Ben Bella et Boumediène dont l’ivresse du pouvoir ne s’encombre d’aucun scrupule. Tapis dans l’ombre, ils n’ont qu’un seul objectif : la prise d’Alger. Les hésitations et les réactions tardives du GPRA pour dégrader le colonel Boumediène et ses acolytes de l’état-major, le 30 juin 19621(1), ne font que renforcer la folie des conjurés. Ils se ligueront contre l’instance légitime de la révolution algérienne et les maquisards de l’intérieur pour marcher sur Alger au prix de centaines de cadavres, tout au long de leur route. C’est Khaled Nezzar, servant alors sous les ordres du colonel Boumediène dans cette guerre contre les wilayas de l’intérieur, qui écrit dans ses mémoires : «L’intensité des combats qui s’en étaient suivis, jamais je n’en avais vu d’égal personnellement, pas même durant la guerre de libération.»(2) Le GPRA, seule instance légitime de la révolution, est foulé aux pieds par ces assoiffés de pouvoir, aidés par les reliquats de la France coloniale. Le malheur de l’Algérie venait de commencer. Sous les apparences d’un tiers-mondisme exubérant, cette équipe s’installera au pouvoir avec la caution du Caire et de Paris. Elle demeure en place à nos jours. Ceux qui ont pris le pouvoir se sont acharnés à combattre leurs frères et surtout les élites. Ben Bella, qui a fait de l’activisme gauchiste une religion pendant son règne, déclare dans son discours d’ouverture au Congrès du FLN tenu à Alger du 16 au 21 avril 1964 : «Il faut combattre sans répit la tendance de ceux qui affirment que la construction d’un Etat est un préalable de la révolution. Une telle voie est fausse. Elle aboutirait, si on la prenait, à remettre le pouvoir entre les mains de ceux qui actuellement possèdent la culture. Primaire et folklorique, le personnage ne servait en fait que de potiche à Boumediène. Commencent alors, les liquidations physiques d’opposants actifs ou potentiels, de déportations vers le Sud de dirigeants de la révolution et d’emprisonnements sur fond de confiscation de toutes les libertés. Le 19 juin 1965, c’est au tour de Ben Bella, lui-même, de subir la foudre du clan. Le colonel Boumediène et ses acolytes, adeptes des caves et de l’ombre, sont prêts à affronter la lumière. Pour cela, le programme de Boumediène est simple : mettre fin aux quelques failles de la stratégie répressive de l’ancien président, play-boy à ses heures, pour anéantir toute liberté ; c’est le rôle dévolue à la sinistre sécurité militaire qui cherchera à éliminer tous les opposants, y compris par le meurtre, comme c’est le cas de Mohamed Khider et Krim Belkacem pour enfin créer l’homme nouveau, zombie sans mémoire ni conscience. Dans ce domaine, le stratagème se décline en :
• La falsification de l’histoire, voire son amputation ; le livre de Said Sadi(3) qui relate l’acharnement de Boumediène sur les restes des ossements des colonels Amirouche et Haouès illustre l’immoralité qui habite le clan et l’OPA méthodiquement menée sur la révolution algérienne et ses symboles. Absents du champ de bataille aux heures des périls, les nouveaux maîtres du pays proclament : un seul héros le peuple, pendant que le colonel putschiste terrorisant et mystifiant son monde se pare du statut du père de la nation.
• La mutilation de l’identité algérienne pour la réduire à des dimensions folkloriques tout juste bonnes à être exhibées dans des manifestations de villages. Le progrès et la modernité officiels se conjuguent uniquement dans le nationalisme arabe adossé à la légitimité religieuse. Dans sa folie sanglante, le baâth, qui assumait la laïcité, avait au moins le mérite de la cohérence. Liess Boukra(4) note très justement la convergence de l’action de Boumediène avec les tenants des courants religieux rétrogrades «Le premier voulait immuniser la société contre les germes de la modernité, porteuse de l’exigence citoyenne (démocratique, pluraliste), que son autoritarisme et sa mégalomanie ne pouvaient tolérer ni souffrir». Les seconds ne voulaient pas de «l’éclosion d’une conscience sociale libérée de son enveloppe religieuse». La SM veille sur tout : la découverte d’une lettre en tifinagh conduit inéluctablement l’auteur imprévoyant en prison qui se voit désigné ennemi du socialisme et de la nation avant d’être tiré de l’anonymat sous l’étiquette d’agent de l’impérialisme en général et d’élément dormant du SDECE (Services de renseignement français) pour ceux qui ont moins de chance.
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