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Les élites algériennes entre exil volontaire et émigration choisie

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  • Les élites algériennes entre exil volontaire et émigration choisie

    Le départ à l’étranger de chercheurs de haut niveau, de médecins spécialistes, de grands économistes et autres spécialistes dans leur métier est devenu une plaie pour l’économie algérienne depuis longtemps.

    Dès l’indépendance, la politique volontariste de formation à l’étranger, du reste nécessaire, a ouvert à beaucoup de cadres des perspectives d’installation dans les pays d’Europe et d’Amérique du Nord. Mais le phénomène de la fuite des cerveaux n’est devenu perceptible et contraignant que vers la fin des années 80. Et c’est la conjugaison de plusieurs facteurs et de comportements à leur égard qui a amené ces compétences à quitter le pays. Car l’émigration du cadre n’est pas due uniquement aux conditions de sa propre vie sociale, mais aussi à celles qui entourent son travail: la marginalisation ressentie, la place réservée à la science et à la connaissance dans le développement, ainsi que l’absence d’évaluation par le travail sont autant de raisons qui participent au départ des compétences. Cette ressource humaine est donc souvent amenée à s’expatrier pour faire valoir son savoir-faire dans un cadre offrant de meilleures garanties pour sa progression.

    Le phénomène existe dans beaucoup de pays en développement. Mais il est inquiétant chez nous parce qu’il concerne un grand nombre, et surtout parce que la tentation du départ se généralise maintenant à toutes les catégories sociales. Malgré cela, la question n’est toujours pas appréhendée: se sentant méprisés, marginalisés ou simplement à la recherche d’une meilleure qualité de la vie, beaucoup d’Algériens diplômés, ou ayant accumulé une grande expérience, continuent à quitter le pays. De plus, des facteurs nouveaux, endogènes ou exogènes comme la politique française d’émigration choisie, viennent aujourd’hui aggraver la situation et risquent de vider nos universités de leurs enseignants-chercheurs, nos hôpitaux de leurs spécialistes et, de façon générale, notre économie de ses experts et de son meilleur encadrement.

    En effet, alors que l’Algérie n’a pas encore réussi à définir une politique qui limiterait les dégâts causés par cette émigration des élites, certaines mesures prises par le secteur de l’Enseignement supérieur risquent d’encourager le phénomène, quand elles ne sont pas bien prises en charge par les établissements, à la base. Les récentes décisions de renforcement de la formation à l’étranger, présentées comme susceptibles d’améliorer quantitativement et qualitativement l’encadrement de l’Université algérienne, ne vont-elles pas produire l’effet inverse de ce qui est recherché ? D’abord, parce que la formation à l’étranger, telle que pratiquée par le passé et reconduite aujourd’hui, n’a pas été une grande réussite, relativement aux moyens consentis par l’Etat. Ensuite, les stages à l’étranger sont aujourd’hui répartis sur la base de critères considérés comme « socialement » justes, consistant en la division d’un quota global par le nombre d’enseignants demandeurs, sans aucun critère scientifique. Comme ce mode de répartition ne changera sans doute pas sous la pression d’un certain syndicalisme, il n’y a alors aucune raison de croire en l’efficacité des stages à l’étranger, même en grand nombre.

    Par ailleurs, beaucoup des 17.000 maîtres-assistants s’inscriront à la demande de détachement de trois ans, avec pour première conséquence le recul de la soutenance jusqu’au bénéfice de ce «nouveau droit»: le détachement à l’étranger. Et comme les mêmes causes produisent les mêmes effets, ces dispositions encourageront la fuite des cerveaux, phénomène déjà considéré comme l’une des plaies de l’Université algérienne. Le constat fait à la fin des années 80 montre que de nombreux boursiers ne reviennent pas ou ne soutiennent aucune thèse. De plus, la tentation de «partir d’ici» est, aujourd’hui, beaucoup plus grande et le piège pour «rester ailleurs» va en grandissant.

    La France, qui reçoit le plus grand nombre de nos stagiaires, a déjà annoncé les facilitations des séjours permanents à ce genre d’immigrés diplômés. Alors, les stages de quelques mois et détachements de trois années n’auront pas d’effet remarquable sur la cadence des soutenances de doctorat en Algérie, mais permettront plutôt à certains de rester définitivement à l’étranger.

    C’est pourquoi, les formations à l’étranger qu’il faut consentir doivent se situer dans le cadre d’une coopération où l’institution et le pays d’accueil s’engagent sur le retour du stagiaire. C’est une pratique en vigueur dans certains pays en voie de développement. Il y a lieu, également, de multiplier et de revaloriser les congés scientifiques, parce qu’ils encouragent la publication et la participation aux rencontres scientifiques internationales et permettent le maintien au contact du développement scientifique universel.

    Et puis, les vraies solutions résident, à notre avis, dans le renforcement et l’amélioration des capacités de la recherche et de la post-graduation locales, seules sources d’un développement durable. L’implantation, déjà initiée, d’écoles doctorales menées localement par des équipes mixtes, est une de ces solutions. Il est aussi intéressant d’agir sur toutes les autres conditions de travail qui permettent aux thèses d’avancer plus vite, en donnant du sens au diplôme soutenu, notamment en revalorisant les salaires selon les grades. Cela créerait réellement de l’émulation. En réalité, ce sont l’environnement défavorable de la recherche et le nivellement des salaires par le bas qui empêchent les doctorants d’avancer normalement.

    D’un autre côté, la réorganisation des diplômes en système LMD (Licence, Mastère, Doctorat) peut aussi participer à l’aggravation de la situation. C’est pourtant une réforme nécessaire puisque ce système se généralise de par le monde. Mais la simple duplication du système LMD étranger sans adaptations aux besoins du pays, comme il semble se faire actuellement, ne fera que faciliter le départ à l’étranger de nos étudiants. Cette méthode, qui se suffit d’aligner formellement les diplômes algériens sur ceux de l’étranger, n’améliorera en rien le niveau de nos diplômés. Car le système LMD, fondant l’essentiel de la formation de l’étudiant sur lui-même, exige pour son application des conditions particulières de mise en oeuvre. La question des moyens matériels et humains nécessaires à un encadrement académique et scientifique adéquat en est la principale. Le LMD algérien doit, dans son architecture et son contenu, tenir compte des conditions et spécificités du pays. Par exemple, les licences professionnelles doivent répondre à nos propres besoins de développement.

    D’un autre côté, le maintien de l’orientation scientifique de notre système d’enseignement, avec ses 70% de bacheliers scientifiques et techniques, ne répond plus à la situation de l’Algérie. A l’inverse, cet avantage peut servir les universités et laboratoires étrangers qui connaissent, depuis quelques années déjà, un déficit important en scientifiques.

    Le problème de la fuite des cerveaux va donc se compliquer davantage avec l’entrée en vigueur de la mondialisation et de ses corollaires, comme l’émigration choisie. Ce nouveau concept, par ailleurs déjà appliqué par certains pays comme le Canada à l’endroit des Algériens compétents et francophones, videra l’Algérie de sa meilleure substance. Hier, la colonisation a pillé les ressources naturelles et exploité les hommes des pays pauvres; aujourd’hui, la mondialisation vise à piller les ressources humaines et à exploiter les richesses naturelles qui existent encore dans ces mêmes pays. Seule la méthode a changé.

    Car les relations entre les pays du Nord et ceux du Sud ont toujours été conçues à sens unique, dans l’intérêt du plus fort. En témoigne le processus à suivre pour un pays comme l’Algérie pour accéder à l’accord d’association avec l’Union européenne: le texte de l’accord est standardisé et préparé à l’avance pour tous les pays candidats au partenariat, les étapes et le timing sont déterminés par l’Union européenne, ainsi que les conditionnalités. Alors que le concept même d’association devrait autoriser le futur partenaire à négocier le contrat, les relations commerciales, les conditions douanières et la circulation des marchandises et des personnes sont dictées par l’Union européenne.

  • #2
    Les pays du Sud devraient créer la solidarité nécessaire entre eux pour introduire de façon spécifique dans les accords les termes qui leur assureraient un développement durable. Par exemple, les pays du Maghreb auraient certainement obtenu plus d’avantages en négociant de façon solidaire leur partenariat européen. Parce que dans l’essentiel, leurs problèmes se ressemblent. De plus, la coopération ne doit plus concerner que les questions décidées par l’Occident, comme l’économie (la leur), la sécurité (la leur) et leur «démocratie». Des sujets comme l’accès au savoir et à la technologie, l’utilisation des compétences des pays du Sud et la sécurité des populations face aux divers dangers technologiques et nucléaires, sont des sujets qui doivent arriver à la «table des négociations» dans les partenariats futurs.

    A propos de cette nouvelle menace d’émigration choisie, les futurs départs des compétences algériennes doivent être négociés avec les pays d’accueil. Leur formation par l’Algérie n’est pas uniquement un coût financier, mais le sacrifice de toute une société. La négociation doit être liée à la facilitation pour l’Algérie d’accéder à l’information scientifique, au transfert réel de certaines technologies, à l’implantation de laboratoires de recherches locaux et à d’autres compensations. La négociation doit aussi porter sur la définition d’un cadre qui permet à l’Algérien de l’étranger de continuer à servir son pays à partir de son lieu de travail. Car souvent, c’est la propre demande de cette «matière grise» algérienne basée à l’étranger.

    Dans la recherche de solutions à ce départ de nos compétences vers l’étranger, l’approche relative aux élites scientifiques ne peut être la même que celle qui concerne ceux qui ont réussi en entreprise ou en affaires. Cette dernière catégorie est plus facile à faire revenir pour intervenir ou même s’installer en Algérie, dès lors que son intérêt se situe ici. Alors que le retour au pays des chercheurs et scientifiques reste peu envisageable en l’état actuel des choses. En tout cas, tant que la recherche scientifique n’est pas considérée comme un moyen de développement, et tant que l’Université n’est pas le «moteur» de la société. La solution résiderait alors dans l’utilisation de cette intelligentsia à partir de l’étranger, et à travers les compétences locales qui seront les passerelles avec le pays. D’ailleurs, il est plus facile d’investir à retenir ceux qui sont encore là en les revalorisant, plutôt que de faire revenir ceux qui sont déjà partis. Car pourquoi la même personne n’intéresse-t-elle que lorsqu’elle est de l’autre côté de la Méditerranée ou de l’Atlantique ?

    Il est, bien sûr, fortement souhaité que les moyens soient aussi mis pour permettre une coopération scientifique, équilibrée et de haut niveau entre nos laboratoires et ceux de l’étranger où activent des compatriotes. C’est un moyen sûr pour faire intervenir ces derniers dans notre recherche et notre enseignement locaux. La direction de doctorats et de projets de recherche par les Algériens de l’étranger contribue réellement à l’épanouissement de l’Université. Dans d’autres domaines, l’utilisation de l’expertise des ingénieurs, des médecins, des architectes et d’autres spécialistes algériens de l’étranger, dans la conduite de projets industriels, économiques et autres, sera également bénéfique. Il s’agit de l’organiser.

    Par Mohammed Mebarki : Universitaire (QO)

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    • #3
      C'est la loi de l'offre et la demande : l'économie de marché en quelque sorte...
      La demande en algérie est tellement faible alors qu'ailleurs la demande est tellement forte que le sens est vite déterminé. Bien sûr que les pays européens ne vont pas se gêner pour se servir...

      Ce n'est pas un discours menaçant qui va renverser la vapeur, mais des actions concrêtes sur le terrains sinon il vaut mieux s'abstenir de faire des commentaires et proférer des manances qui ne servent strictement à rien...

      A la place de Bouteflika (si sensé qu'il soit) je ferai un contre discours ou j'enverrai Bedjaoui réctifier discretement la bêtise....

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      • #4
        Essai pour une analogie...

        ...le comportement des "têtes" (facilement repérables sur le plan des acquis de connaissances) ou des plus "volontaires" (même quasi incultes, animés seulement par une volonté de survie) qui partent vers l'étranger me font penser à ces êtres humains qui, lorsqu'ils rencontrent des difficultés intra-familiales, préfèrent changer de famille et notamment de compagne ou de compagnon plutôt que d'affronter et modifier le problème ici et maintenant.

        Mais c'est aussi parce que la prégnance familiale (ou sociale et sociétale) est telle et que les porteuses et porteurs de cette prégnance n'ont même pas conscience de leurs diktats et des pertes qui vont être subies par des attitudes et comportements inadaptés vis-à-vis de personnes disposant d'une autre structure mentale et d'une autre vision sociétale.

        Par définition il semblerait qu'à tous les niveaux socio-culturels ce soient toujours les meilleurs qui soient contraints de partir afin de laisser la place aux plus médiocres.

        Ce n'est pas propre à l'Algérie mais c'est également partagé par beaucoup de pays sous-developpés... notamment lorsqu'il y a une volonté idéologique tendant à s'imposer via les structures étatiques.

        A vous lire...

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        • #5
          quand on voit le sort réservé à ces cerveaux au canada qu'ils soient algeriens ou autres on reste perplexe.pourquoi les avoir fait venir ?et ne pas prévoir de reconnaissance de leurs diplomes.
          c'est juste pour priver les pays pourvoyeurs de cerveaux de leurs cadres ?

          par contre il va y avoir une flambée de besoins medicaux en france et même si on double le numerus clausus l'appel à l'encadrement étranger est incontournable.
          le president senegalais envisage de racourcir le cursus medical pour que les diplomes sénégalais ,calqués sur les français ne soient plus équivalents.
          alors que faire.culpabiliser les volontaires a l'émigration ,abaisser le niveau d'études ,changer de langue d'éducation ou encore négocier cette exportation de matiere grise ?

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          • #6
            Moi je pense que c’est un enrichissement pour notre élite de partir à l’étranger. C’est un moyen pour elle de se former et d’acquérir une expérience dans les pays occidentaux. Quand l’Algérie s’ouvrira d’avantage et qu’ils trouveront de bonnes opportunités de travail avec une meilleure qualité de vie, ils n’hésiteront pas à rentrer au pays. Déjà avec l’ouverture du secteur des télécoms plusieurs experts dans le secteur des TICs, qui étaient en France et au Canada, sont revenus pour y travailler. Les autres pourront toujours continuer à aider l'Algérie même à partir des pays où ils se trouvent.

            C’est comme ça qu’il faut prendre la chose. Mais malheureusement nos responsables sont toujours à côté. Après avoir supprimer les bourses d’études à nos bacheliers ayant obtenus une mention Très-Bien avec comme argument qu’ils partent à l’étranger pour ne pas y revenir, notre président s’attaque maintenant aux binationaux. On ne peut pas obliger nos compatriotes de ne pas partir ou de revenir au pays par la force. C’est un choix personnel et comme a dit citoyen : le flux migratoire obéit au principe de l’offre et la demande.

            Pour moi notre élite qui se trouve à l'étranger représente un grand espoir pour l'Algérie.
            Dernière modification par shadok, 30 juin 2006, 20h42.
            Le bon sens est la chose la mieux partagée du monde... La connerie aussi - Proverbe shadokien

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            • #7
              l'algerie devrait copier israel.tous leurs cadres sont aux meilleurs postes dans tous les pays etrangers.ils apportent un soutien indispensable a l'economie de ce pays.
              on doit reconnaitre que l'apport des cadres algeriens expatriés est nul.pourtant les bonnes volontés existent mais il n'y a pas de cadre organisé.et la société civile (syndicats, associations ) en est encore aux balbutiements.

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              • #8
                @job-trotter

                C'est vrai l'apport des cadres algériens de l’étranger est faible et mal organisé. L’effort doit s’orienter dans ce sens et non pas dans l’intimidation.
                Le bon sens est la chose la mieux partagée du monde... La connerie aussi - Proverbe shadokien

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                • #9
                  80 000 cadres ont quitté l'Afrique ! Des milliers pour l'Algérie.
                  Ceux qui cherchent à fuire une guerre, la misère, le despotisme du pays ou le chômage, respect et humilité pour ces gens. Mais un cadre, même en fonction, qui quitte son pays c'est autre chose. Je peux vous en parler pendant des heures car chaque individu a sa raison.
                  Comme étant curieux et pertinent, je pose des questions pertinentes.
                  Un point important que personne ne discute ou ne suggère.
                  Il m'arrive de voyager, d'inviter ou se faire inviter par un cadre algérien; de se réunir autour d'une table au restau, de boire un pot en famille sur une terrasse! Enfin vivre au III ° millénaire.
                  Alors, il serait judicieux d'inviter en Algérie ces cadres en famille pour un petit séjour, leur faire vivre le quotidien de tout un chacun et à la fin du séjour leur demander ce qu'ils en pensent et s'ils désirent s'installer avec le même salaire qu'ils ont en Europe.
                  Ma grand mère me disait( du haut de nos montagnes): Alger pleure celui qui ne l'a jamais vue...

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