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LA CRISE D'UN PARTI SANS PORTEFEUILLE
Les islamistes «frèristes» d'Algérie, tendance incarnée par le Hamas-MSP, finiront-ils par faire le bilan d'une participation de pure forme dans un système non démocratique ? Ils ne le font toujours pas, portés par la tendance ancrée à refuser de mettre à plat les questions de fond. Même leur passage annoncé «à l'opposition» paraît aujourd'hui sans crédibilité du fait de cette propension à l'autojustification et à refuser d'ouvrir les vannes du débat. Au Hamas-MSP, quand on n'est pas d'accord, on quitte en silence. C'est la «tradition». C'est ce qui est arrivé au cours de la dernière décennie à des nombreux cadres, instruits et bien formés, qui faisaient la «distinction» de ce mouvement par rapport au parti de «masse» du FIS. On quitte aussi parfois pour essayer de refaire un autre mouvement dont la différence avec «l'original» n'est jamais évidente. Après l'épisode d'Abdelmadjid Menasra qui a créé le Front de changement, voici le temps d'un autre ex-ministre, Amar Ghoul, de se lancer dans l'arène. Avec pour seul argument - d'une indigence politique aussi longue que l'autoroute Est-Ouest - qu'il est au «service de l'Etat» et que le refus de participer au gouvernement du MSP l'empêcherait d'exercer cette vocation. Un programme «attractif» qui ne risque pas de drainer des énergies militantes ; lesquelles, au MSP comme ailleurs, se sont assoupies sous l'effet de la caporalisation des partis sous le label de «l'Alliance présidentielle» ; et d'une manière générale, sous l'effet du verrouillage de la vie politique qu'une ouverture conjoncturelle en temps électoral ne fait que discréditer.
Les dirigeants du MSP n'ont pas tort d'affirmer que le départ d'Amar Ghoul, pour des motifs politiquement triviaux, ne constitue pas une menace. Ils ont tort d'affirmer que leur mouvement, qui se voulait une alternative raisonnable et raisonnée au FIS, va bien. Il ne va pas bien du tout. La participation au gouvernement décidée sous la houlette de Mahfoud Nahnah, plus par contrainte que par choix, est devenue au fil des ans une «ligne» stratégique non soumise à discussion. Sauf que le charisme de Nahnah n'est plus là pour maintenir plus ou moins les choses. Ce n'est pas le départ de Menasra et de Ghoul qui fait l'affaiblissement du MSP, ce ne sont que des noms plus ou moins médiatiques. Et ils cachent en réalité la déperdition continue depuis des années d'un nombre important de cadres intermédiaires et de militants de base qui ne comprennent plus ce que fait le mouvement. Pas plus que les non-islamistes, ils ne saisissaient pas la «ligne» d'un parti qui tout en étant au gouvernement se prétendait dans l'opposition. Et pas plus que les non-islamistes, les ex-militants «nahnahiens» n'ont pas une haute idée de la qualité de la gestion des «ministères MSP» y compris celui de l'autoroute.
Si aujourd'hui les «Frères» de Tunisie, du Maroc ou d'Egypte gagnent des élections, cela tient au fait qu'ils n'étaient pas dans une participation gouvernementale. Ils étaient des opposants et ils sont aujourd'hui en charge de la gestion dans des contextes difficiles. La participation du MSP au gouvernement signifiait l'approbation d'une mise en extinction de la vie politique qui est de mise depuis des années. C'était cher payer pour quelques postes ministériels. La désignation du chef du parti en titre en qualité de ministre d'Etat sans portefeuille était en quelque sorte la suprême ironie du système. Ce ministre d'Etat sans portefeuille était en charge du contrôle du MSP. Pas de son développement. Le MSP se passera du ministre de l'autoroute, mais se décidera-t-il à discuter de l'absurdité politique d'un parti dirigé pendant plus d'une décennie par un ministre ?
par M.Saadoune
Le Quotidien d'Oran