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La Syrie veut-elle que Moscou la défende contre vents et marées?

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  • La Syrie veut-elle que Moscou la défende contre vents et marées?

    A une autre époque, certaines personnes malveillantes ont habilement modifié le slogan soviétique officiel de 1961 "Tout pour l'homme, tout pour le bien de l'homme!" Une blague politiquement incorrecte est née à partir de ce slogan contenu dans l'avant-propos du programme adopté par le XXIIe Congrès du PCUS: "En effet, chez nous tout est fait pour le bien de l'homme! Et on connaît même le nom de cet homme (le chef de l'Etat soviétique de l'époque, Nikita Khrouchtchev - ndlr)!".

    En se projetant en juillet 2012 et en appliquant cette plaisanterie à la politique étrangère de Russie, on connaîtra effectivement le nom de cet homme. Il s'appelle Bachar al-Assad. Et, comme son père, il est président de la République arabe syrienne.

    En politique, il existe le principe de "chacun voit midi à sa porte". Et pour cette raison je refuse de croire que la Russie pourrait envoyer son armée en Syrie pour soutenir les dirigeants actuels de Damas. D'autre part, en omettant ce genre d'extrêmes, il semble parfois qu'il n'y a aucun sacrifice que Moscou ne serait pas prêt à faire pour "sauver le soldat Assad".


    Un nouveau scandale avec l'Occident? En veux-tu, en voilà! Une querelle publique avec un pays aussi sérieux que l'Arabie saoudite? Pas de problèmes! Un long conflit idéologique avec pratiquement toutes les forces politiques sunnites du Proche-Orient? Certes, c'est loin d'être une bonne chose, mais quand il le faut, il faut s'y résoudre!

    Il doit y avoir des raisons tangibles à une telle obstination. Et le gouvernement russe estime en avoir. Evidemment, il ne s'agit pas des sympathies personnelles entre Moscou et Bachar al-Assad. Dans la grande politique internationale, les intérêts passent avant les sympathies personnelles. Le fait est qu'à Moscou al-Assad est considéré comme un homme-symbole. Aux yeux des hommes politiques russes, le dirigeant syrien est un symbole de la résistance à une nouvelle tentative de refaire le monde selon le modèle occidental par la force.

    Pour ma part également, je suis de toute mon âme contre l'ingérence dans les affaires intérieures des autres. Et je ne crois pas beaucoup à la noble rhétorique de l'Occident sur la Syrie. Mais est-ce que la Russie voit sous le bon angle Bachar al-Assad et la situation qui règne dans son pays? Et est-ce qu'elle comprend correctement les intérêts russes dans le conflit syrien?

    En lisant les mémoires du diplomate soviétique Oleg Grinevski, je suis tombé sur un passage très intéressant concernant les relations entre Moscou et Damas dans les années 1970.

    "L'énergie débordante de Nouritdine Moukhitdinov, ambassadeur de l'URSS à Damas en 1968-1977, a largement semé la confusion dans les relations soviéto-syriennes. Il prenait ses fonctions d'ambassadeur à Damas comme quelque chose de proche du rôle de secrétaire régional du Parti communiste: quoi qu'il se produise en Syrie, c'est lui qui en répond, l'ambassadeur.


    Pour cette raison, rien de négatif ne pouvait s'y passer. Des dépêches rapportant les nouveaux succès de la Syrie dans le développement de l'industrie, de l'agriculture, etc. arrivaient régulièrement de Damas. Et, évidemment, avant tout elles parlaient du sentiment d'amour et d'amitié nourri par le peuple syrien envers son "frère aîné" (l'URSS).

    Ces éloges étaient constamment suivis de la demande d'un nouveau prêt de plusieurs centaines de millions de dollars, de fourniture de matériel militaire, d'engins agricoles, et de toute sorte d'aide aux conditions les plus favorables, en fait gratuitement, en tant que pays qui lutte contre l'impérialisme.

    Tous ces télégrammes étaient adressés à tous les membres du Politburo et suscitaient une réaction favorable. En général, ils donnaient tout ce que demandait Moukhitdinov."

    Mais voici comment les Syriens remerciaient en retour. Selon Oleg Grinevski, en 1976, Alexeï Kossyguine, président du conseil des ministres de l'URSS, s'est rendu en visite en Syrie. Et c'est ce moment précis qui a été choisi par les Syriens pour envoyer leur armée au Liban, sans en avertir Kossyguine.

    Pas la peine d'avoir fait Saint-Cyr pour mesurer l'ampleur du coup bas. En principe, un allié ne peut pas faire ce genre de choses à son allié.

    Mais Moukhitdinov a une nouvelle fois réussi à s'en tirer : "Pourquoi semer la panique? La Syrie et le Liban sont deux frères. L'un est venu à la rescousse de l'autre. Et Monsieur al-Assad n'avait simplement pas osé inquiéter Monsieur Kossyguine avec des broutilles. Ce dernier a d'autres chats à fouetter!".


    La réaction de Kossyguine était, bien sûr, plus adéquate. Mais il n'a tout de même pas réussi à sortir du piège tendu par al-Assad: "Quoi que je fasse, ça se passera mal ou très mal. Si j'annonçais la vérité publiquement – que nos alliés syriens ne nous ont pas consultés, premièrement, personne ne le croirait. Deuxièmement, on demanderait qui est la force motrice dans cette alliance, l'URSS ou la Syrie? Il s'avère que c'est la queue qui remue le chien. Il ne reste qu'une chose à affaire – ne rien dire."

    36 années se sont écoulées depuis ces événements. Tous leurs acteurs ont depuis longtemps quitté la scène politique. Mais pour ma part, la dynamique des relations entre Moscou et Damas n'a pas changé: c'est toujours la queue qui remue le chien.

    Tous les autres acteurs du drame politique syrien ont de véritables intérêts en jeu. Bachar al-Assad et les hauts dirigeants principalement composés de la minorité alaouite luttent pour leur propre survie, aussi bien politique que physique. L'opposition syrienne voudrait s'emparer du pouvoir.

    Le groupe étranger de soutien à l'opposition syrienne – l'Occident, l'Arabies saoudite et d'autres pays islamiques dirigés par des sunnites – s'efforcent d'affaiblir l'influence de l'Iran, allié d'al-Assad. A son tour, Téhéran cherche à l'empêcher.

    Or, quels sont les intérêts globaux de Moscou en Syrie? La possibilité d'utiliser le port de Tartous par la marine russe et la coopération militaire et technique de longue date avec Damas sont, évidemment, des choses importantes, mais pas globales.


    La Russie ne se bat pas pour la base navale. Comme il a été dit précédemment, la Russie se bat pour le principe. "Hier Tripoli, aujourd'hui Damas, demain partout", voici ce que pensent en réalité les hommes politiques russes. Moscou est convaincu que la crise syrienne actuelle est une sorte de variante de l'intervention américaine en l'Irak en 2003.

    Mais est-ce vraiment le cas? Il me semble qu'entre Bagdad-2003 et Damas-2012 il existe une différence fondamentale. Dans le cas de l'Irak, pendant neuf ans les Américains cherchaient à changer le régime politique de l'extérieur et, pour cette raison, ont été confronté à une avalanche de problèmes. Dans le cas de la Syrie, la tentative de renverser le régime est initiée de l'intérieur. Et les Américains et leurs alliés n'ont fait que "se laisser porter habilement par la vague".

    Où se retrouve la Russie dans ce cas? Non pas simplement dans le rôle du défenseur du statu quo. Moscou protège un statu quo qui changera inévitablement. Le nombre d'ennemis du régime alaouite de Damas a atteint un niveau critique. Qu'on le veuille ou non, mais al-Assad sera renversé tôt ou tard.

    Tous les pays en sont parfaitement conscients. Ce n'est pas par hasard que la Chine, à première vue un allié d'al-Assad, se comporte de façon aussi "modeste". Dans l'arène mondiale, Moscou reste le seul défenseur officiel du gouvernement actuel de Damas.

    Et qu'est-ce que la Russie recevra après la fin inévitable de l'étape actuelle du drame syrien? Lorsque j'ai voyagé à travers la Syrie en 2001, les Russes étaient très appréciés dans le pays. Mais je ne suis pas convaincu que cette attitude restera la même avec un nouveau régime politique syrien. Et les pertes politiques russes ne se limiteront pas à un seul pays. Il est question de pertes géopolitiques colossales à l'échelle de l'ensemble du Proche-Orient.


    Pourquoi Moscou fait de tels sacrifices? Pourquoi la Russie sort des marrons du feu pour l'Iran? "Pour le triomphe du droit international", m'a répondu le général Léonid Ivachov (président de l'Académie russe des problèmes géopolitiques et ancien directeur du Département de la coopération militaire du Ministère russe de la Défense - ndlr), que j'ai récemment interviewé à la radio.

    Mais qu'est-ce que le régime d'al-Assad a à voir avec le droit? La même chose que le régime de Kadhafi en Libye – rien du tout. En Europe occidentale il est possible de se débarrasser d'un président grâce au droit et au vote. Mais le régime d'al-Assad tient par la force des baïonnettes. Et seules les baïonnettes permettront de le supprimer. Et ce n'est pas un point de vue, c'est une réalité de la vie.

    Le slogan "Tout pour l'homme, tout pour le bien de l'homme" est magnifique. Mais je crains que la Russie n'ait pas choisi le bon homme en Syrie.


    L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction



    ria novosti

  • #2
    Le slogan "Tout pour l'homme, tout pour le bien de l'homme" est magnifique. Mais je crains que la Russie n'ait pas choisi le bon homme en Syrie.
    La Russie avait choisit le lieu géographique , comme les USA avait choisit Israël
    A qui sait comprendre , peu de mots suffisent

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