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Gueddar, caricaturiste : « Le Maroc sera une dictature tant qu’on mettra des artistes en prison »

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  • Gueddar, caricaturiste : « Le Maroc sera une dictature tant qu’on mettra des artistes en prison »

    (De Rabat) Le procès du caricaturiste Khalid Gueddar, bête noire du pouvoir marocain, aurait dû avoir lieu ce mercredi matin, mais a été reporté au 5 septembre. « Ils ont convoqué un nouveau témoin », explique le caricaturiste.
    Il y a deux semaines, il a été arrêté avec un ami à la sortie d’un hôtel de Kenitra, au nord de Rabat. Il a passé la nuit en détention sans savoir pourquoi.
    A plusieurs reprises, raconte-t-il, les policiers ont voulu le relâcher mais il a refusé de quitter les lieux sans qu’on lui explique les raisons de son arrestation.
    Khalid sera présenté le lendemain devant le procureur et accusé d’avoir été en état d’ébriété sur la voie publique et d’« insultes et injures aux policiers ». Il nie catégoriquement ces accusations.
    Fait troublant, le lancement de son journal satirique en ligne, Baboubi, qui a été retardé depuis, devait avoir lieu deux jours plus tard.
    Khalid est le premier dessinateur marocain à avoir osé caricaturer le roi Mohamed VI dans une bande dessinée publiée sur le site satirique français Bakchich.
    Ce n’est pas la première fois qu’il a affaire à la justice marocaine. Khalid a déjà été condamné en février 2010 à quatre ans de prison avec sursis pour avoir caricaturé le prince Moulay Ismail, le cousin du roi Mohammed VI.
    S’il est reconnu coupable, il pourrait être incarcéré. Il s’est expliqué mardi dans une interview à Rue89.
    Rue89 : Vous avez été arrêté il y a deux semaines sans savoir pourquoi. Le savez-vous aujourd’hui ?
    Khalid Gueddar : Je ne sais toujours pas pourquoi j’ai été arrêté. Vraiment. Mais je sais pourquoi je suis poursuivi : état d’ébriété, humiliation et insulte à agents.
    Pensez-vous être victime d’un procès politique ?
    Pour l’instant, je ne sais pas comment les choses vont évoluer. Je ne peux pas dire qu’on a été arrêtés exprès. Peut-être que c’est une erreur de la police, mais peut-être aussi que j’ai été arrêté parce que je lançais mon journal satirique deux jours plus tard.
    La caricature du ministre de la Justice, Mustapha Ramid [après que ce dernier a déclaré qu’il ferait don de ses organes après sa mort, ndlr], que vous avez lancée sur Facebook en mars dernier y est-elle pour quelque chose ?



    Après mon arrestation, pas avant. Mustapha Ramid a contacté le tribunal et a demandé au procureur d’appliquer la loi, ce que je trouve très bizarre, parce que le ministre de la Justice n’appelle pas au sujet de chaque citoyen arrêté. C’est une exception. Pourquoi n’est-il pas resté neutre ? Je préfèrerais qu’il soit neutre.
    Il y avait un malentendu entre nous à cause de la caricature. Je crois qu’il y a un lien entre le coup de fil et la caricature. Je ne peux pas dire que c’est une sorte de vengeance. Il a appelé le tribunal et ils ont voulu me faire des analyses de sang. C’est de l’abus.
    Vous la regrettez, cette caricature ? Y a-t-il des caricatures que vous regrettez ?
    Je n’ai jamais regretté une caricature. Avant de faire cette caricature, j’étais très conscient de ce que je faisais. Je ne regrette aucune caricature, même celle de Moulay Ismail. Il faut assumer. Avant de dessiner, il faut être convaincu par l’idée et par le sujet. Une caricature, c’est ma position par rapport à un sujet, je ne peux pas la regretter.
    Dans quel état d’esprit êtes-vous, à la veille du procès ?

    Caricature de Khalid Gueddar

    J’ai l’habitude ! Pour moi, tout est possible. Je peux être jugé coupable, ou pas. On est dans un pays non démocratique. La justice que vous trouvez ici n’est pas indépendante. C’est la justice des coups de téléphone. Les juges sont téléguidés.
    Vous sentez-vous soutenu par la profession ?
    J’ai été soutenu par beaucoup de gens. Mais par les dessinateurs, non. J’ai eu un soutien moral, mais pas comme celui des dessinateurs Dilem et Plantu. Les dessinateurs marocains, c’est juste un soutien moral. Ils vous appellent au téléphone, etc.
    Mon rédacteur en chef [du journal Akhbar Al Youm, ndlr] m’a soutenu, c’est clair. Mais ensuite, avec ce qu’il a écrit sur le journal, il a joué un double jeu. Il m’a soutenu en coulisses. Il a appelé le ministre de la Justice pour me défendre. Et après, dans son journal, il a essayé de relayer l’information à sa façon. Il a dit que j’avais été arrêté dans le cadre d’une campagne générale donc il a essayé de montrer que je ne suis pas un cas spécial. J’ai ensuite compris que j’avais raison puisque j’ai reçu un mail pour que j’arrête de dessiner. Il m’a viré par e-mail.
    Votre rédacteur en chef vous a-t-il censuré ?
    Je suis souvent censuré puisque je fais sept dessins par semaine et que seulement trois ou quatre passent. J’ai un dossier de dessins censurés. Lorsque je dessine Ramid, sur Akhbar Al Youm, ça ne passe pas.
    D’autres dessins, sur le premier ministre Abdelilah Benkirane, ne passent pas. Je les balance sur Facebook et sur le journal électronique Lakome. Sur Facebook, la caricature de Ramid a été retirée deux fois, elle a dû être signalée.
    Quel est le plus grand tabou au Maroc ? Est-ce dessiner le roi ?
    Non. Les tabous, on en a trois : le sexe, la religion, et le roi. Le plus grand tabou, ce n’est pas le roi, c’est le sexe. Je peux dessiner le roi et tout de même avoir des gens qui me soutiennent. Mais quand je dessine le sexe, j’ai plus de monde contre moi, surtout les islamistes.
    On dirait que vous n’avez aucune limite.
    Je ne crois pas aux limites. C’est pour ça que je suis toujours censuré. Je ne pense pas au support quand je dessine. Je n’ai pas devant moi les limites d’un support. Je travaille spontanément comme si ça va passer dans Le Monde. J’en ai rien à foutre des limites du journal.



    Est-ce que vous pensez avoir réussi à faire bouger les fameuses lignes rouges ?
    J’ai attiré l’attention au Maroc sur le fait que la caricature a une place importante dans la presse. J’ai essayé d’être radical pour tirer la sonnette d’alarme et montrer que le dessin, c’est important. Les lignes, je les ai dépassées à Bakchich et à Courrier International [en dessinant le roi, ndlr]. Je ne crois pas à ces lignes rouges. En fait, je n’ai rien dépassé. J’ai juste fait ce qu’il faut faire. Je ne peux juger ni mon expérience, ni celle des autres. Mais c’est ce que je crois. Je crois qu’on a le droit de dessiner le roi.
    J’ai soutenu le caricaturiste danois [qui a dessiné les caricatures du prophète Mahomet, ndlr] alors que je n’étais pas d’accord. Mais il a le droit de s’exprimer. On a le droit de le juger en tant que lecteur mais pas de lui interdire de s’exprimer.
    Plusieurs artistes sont actuellement en prison (le rappeur Mouad El Haqed, le poète Younes Belkhdim, qui sont aussi militants du Mouvement 20 février). Ça vous inquiète ?
    Bien sûr. Je connais bien El Haqed. C’est quelqu’un qui croit à ce qu’il fait. Mettre un chanteur de rap en prison, c’est la preuve qu’il n’y a pas de volonté de démocratiser le Maroc. Ça montre le vrai visage du régime marocain. C’est une dictature et on continuera à être une dictature tant qu’on mettra des artistes en prison et qu’on laissera les gens qui ont été condamnés par la justice pour avoir pillé les richesses du pays et les trafiquants de drogue libres.
    L’outrage à la police, est-ce une nouvelle façon de se débarrasser des artistes militants ?
    Les accusations sont les mêmes. Les PV sont les mêmes. On ne change que les noms. C’est une façon de se débarrasser des artistes dérangeants.
    Vous sentez-vous moins libre depuis l’arrivée au gouvernement des islamistes ?
    Moi je suis toujours libre. Je m’en fous si les islamistes arrivent ou d’autres arrivent. Je dessine ce que je veux. L’arrivée des islamistes ne change rien. Ce ne sont pas eux qui gouvernent. Eux-mêmes ne sont pas libres. Benkirane, c’est le porte-parole du palais royal. Et le pouvoir est content d’avoir un premier ministre clown. C’est le premier humoriste du Maroc.
    Arrivez-vous à trouver du travail au Maroc ?
    Je n’arrive pas à travailler. J’ai toujours eu des problèmes. Je suis maintenant au chômage.


    Ilhem Rachidi | Journaliste
    veni vidi vici .

  • #2
    au maroc il n'y a pas de prisonnier politique, si tu dérange le makhzen on te colle un motif banal pour t'envoyer en prison c'est simple

    c'est ce qui arrive aussi a lamrabet

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