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Meles Zenawi, le «dernier empereur d'Éthiopie»: décédé

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  • Meles Zenawi, le «dernier empereur d'Éthiopie»: décédé

    Au pouvoir depuis près de 22 ans, le premier ministre est décédé lundi soir. Il était l'un des poids lourds de la politique en Afrique.

    Le premier ministre éthiopien Meles Zenawi, mort lundi soir à 57 ans, probablement dans un hôpital de Bruxelles, avait une ambition: que l'on se souvienne de lui comme l'homme qui a construit l'Éthiopie moderne. À tout prix, y compris celui de la liberté.
    Cet ancien marxiste, passé du modèle albanais au libéralisme, n'avait gardé qu'un seul aspect du communisme, une réticence à rendre le pouvoir. Aux affaires depuis 1991, l'ex-guérillero avait été renommé au poste de premier ministre par son parti après une nouvelle victoire électorale en avril 2010, avec… 99% des voix.Sous son règne, ce pays pauvre de 80 millions d'habitants, encore rural à plus de 80%, avait commencé à se couvrir de barrages. Le premier ministre rêvait de faire de son pays le château d'eau de l'Afrique, fournissant de l'électricité à tout le continent.
    L'Éthiopie était aussi devenue une puissance diplomatique et militaire, meilleure alliée des États-Unis dans la région, pilier de la lutte contre le terrorisme, en particulier en Somalie où l'armée éthiopienne est intervenue régulièrement ces dix dernières années. Le compagnonnage avec Washington ne représentait qu'un paradoxe de plus pour cet homme qui se sentait investi d'un pouvoir presque mystique. Il était, selon un diplomate, «le dernier empereur d'Éthiopie».
    L'Érythrée, son plus grand échec

    Sa légitimité, il la tenait de la guerre. En 1991, il entre dans Addis-Abeba à la tête des guérilleros du Front de libération du peuple du Tigré (FLTP), sa région d'origine. Ancien étudiant en médecine, il dirige le parti depuis l'âge de 25 ans. La guérilla renverse le «Négus rouge», Mengistu Hailé Mariam. Ce dernier avait détrôné le vrai Négus, l'empereur Hailé Sélassié, en 1974. Inspiré par le maoïsme, Mengistu faisait régner la terreur et la famine, et es successeurs sont bien accueillis par la population. D'abord président pendant la transition, Meles Zenawi fonde le Front démocratique révolutionnaire du peuple éthiopien (FDRPE) qui remporte les premières élections en 1992. Un régime parlementaire ayant été adopté, Meles deviendra par la suite un inamovible premier ministre, détenteur du pouvoir exécutif.
    Presque aussitôt se produit l'événement qui reste aujourd'hui comme son plus grand échec. Zenawi accepte en 1993 un référendum qui donnera l'indépendance à l'Érythrée, province qui occupe la totalité de la façade maritime de l'Éthiopie. Sans doute pour remercier son compagnon de lutte du Front populaire de libération de l'Éryhtrée (FPLE), Issayas Afewerki, d'avoir pris une part importante dans la lutte contre Mengistu. Et aussi parce que l'Érythrée, colonisée séparément par les Italiens et annexée ensuite par Haïlé Sélassié, s'était toujours vue comme destinée à l'indépendance.
    La séparation se déroule à l'amiable. On décide de conserver une monnaie commune. L'Érythrée promet la libre circulation dans ses ports des marchandises éthiopiennes. Zenawi croit à la bonne foi de son ancien compagnon d'armes, chrétien comme lui - et comme plus de la moitié des Éthiopiens. Mais Afewerki ne sait faire que la guerre. Échouant à bâtir un État moderne, il se lance en 1998 dans un conflit sanglant avec l'Éthiopie. La guerre dure deux ans, fait plus de 80.000 morts et ne change rien. L'Éthiopie doit se contenter aujourd'hui du port de Djibouti comme unique débouché sur la mer Rouge.
    Virage autoritaire

    À l'intérieur, le premier ministre dirige l'État d'une poigne de plus en plus autoritaire. L'immense pays fait face à deux rébellions. Au centre, celle des Oromos, deuxième ethnie après les Amharas. À l'est, celle de l'Ogaden, où les habitants sont d'ethnie somalienne. Le Front de libération de l'Ogaden est soutenu par les islamistes somaliens. C'est l'une des raisons qui vont pousser Zenawi à intervenir deux fois en Somalie, entre 2006 et 2009 et au début de 2012. Sur le front politique, la contestation enfle au début des années 2000. L'opposition remporte des municipalités, y compris celle d'Addis-Abeba, la capitale.
    Inquiet, le pouvoir prend un virage autoritaire en 2005. Les élections générales donnent la victoire au parti du gouvernement, mais l'opposition dénonce le scrutin comme truqué et des émeutes éclatent. Meles lance des rafles d'opposants, ignore les remontrances de l'allié américain.
    Meles était un homme secret. Héritier d'un royaume de mille ans, il n'avait, pas plus que son prédécesseur Mengistu, osé toucher au palais d'Haïlé Sélassié. Ce château de la belle au bois dormant de 200 pièces est maintenu par une armée de femmes de chambre dans l'état exact où il se trouvait le jour où l'empereur l'a quitté pour la dernière fois sous la garde du Négus rouge, pour aller mourir à l'hôpital.
    En Éthiopie, le pouvoir garde une part de sacré. La succession de Meles Zenawi devra en tenir compte.
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