21/08/2012
Réseau Voltaire
Plusieurs centaines de combattants de l’Armée syrienne libre, appartenant à des groupes salafistes et takfiristes distincts, ont convergé vers le bourg d’Al-Tal, le 20 juillet dernier. La plupart n’étaient pas Syriens. Quelques habitants, favorables à la démocratie, les ont accueillis pensant partager les mêmes objectifs. Les combattants ont attaqué le commissariat et fait prisonniers les policiers, dont certains ont été blessés. Ils n’ont accepté de transférer à l’hôpital que les fonctionnaires sunnites et ont refusé que les autres soient soignés. Rapidement, le nouveau Conseil révolutionnaire d’Al-Tal, imposa une loi sectaire. La population fuya la ville, à commencer par les gens qui avaient accueilli l’ASL en rêvant aux promesses occidentales.
Les combattants prirent en otage une trentaine de civils, y compris une équipe de la télévision Al-Akhbariya accourue sur les lieux, puis ils se retranchèrent dans le bourg. Les otages furent dispersés dans des bâtiments différents, et déplacés chaque jour. Alors que les combattants espéraient créer sur place un Émirat islamique, le Conseil révolutionnaire, commandé par un déserteur syrien, fut informé d’une attaque imminente de l’armée nationale. Dans une vidéo, il menaça de tuer les journalistes et exigea la levée des barrages autour du bourg pour pouvoir fuir. Ne parvenant pas à obtenir satisfaction, il reçut l’ordre par téléphone satellite de déplacer sa troupe vers une autre localité. Dans la nuit du 15 au 16 août, 500 à 700 hommes, emmenant avec eux leurs otages les plus précieux, sortirent en file indienne à travers la campagne. Lorsque soudain, plusieurs fusées éclairantes illuminèrent la nuit permettant à l’armée nationale d’ouvrir le feu et d’éliminer plus de 200 jihadistes en quelques minutes.
Yarah Saleh, journaliste d’Al-Akhbariya détenue depuis 6 jours, eut le réflexe de se jeter à terre pour se protéger. Les autres otages, restés emprisonnés dans le bourg, furent retrouvés au matin et libérés.
Voici le témoignage de Yara Saleh, recueilli quelques heures plus tard.
Thierry Meyssan : Comment vous ont-ils enlevée avec votre équipe TV ?
Yara Saleh : Nous étions allés à Al-Tal pour y faire un reportage. Je savais que c’était dangereux, mais j’espérais faire quelque chose sur les civils, ce qui leur arrivait, ce qu’ils pensaient de ces combats, comment les gens armés les traitaient. J’ai déjà été dans de tels endroits de nombreuses fois, et je sais que c’est très important du point de vue journalistique tout ce qui concerne les civils. D’abord, j’ai remarqué qu’il n’y avait pas de civils dans la ville. J’en ai juste vu 7 à l’entrée, seulement 7, tous les autres étaient des combattants.
Thierry Meyssan : Combien de combattants ?
Yara Saleh : Je ne sais pas. Lorsqu’ils nous ont enlevés, ils nous en emmenés dans un centre qui était censé être une école. La construction n’était pas finie. Ils l’occupaient. Ils étaient environ 700…, 500…, 700… J’ai appris qu’ils occupaient d’autres lieux.
Thierry Meyssan : Ils étaient de la ville ou venaient-ils d’ailleurs ?
Yara Saleh : Ils étaient de différentes villes et de différentes nationalités. Oui, j’en ai entendu parler libyen. J’ai entendu parler des gens qui nous entouraient, juste hurler, crier en nous frappant. L’un d’entre eux, quant ils nous ont laissés, parlait de Saoudiens parmi eux. Je ne parvenais pas à les distinguer parce qu’ils étaient tous pareils : avec une barbe sans moustache, comme les salafistes. L’un d’entre eux était même appelé Salafi, son nom et son groupe étaient « les Salafistes ». Ils portaient tous des armes à feu, des kalachnikovs, PKC. Je ne sais pas le nom des armes, mais ils m’en ont parlé. Ils ont arrêté la voiture lorsque nous sommes entrés dans la ville. Ils ont verrouillé les portes. 6 ou 7 civils criaient : « S’il vous plaît, laissez les, laissez les partir ». Ils ont posé une arme sur la tempe d’une femme : « Stop ! c’est notre business ». Ils nous ont emmenés avec eux. Ils étaient 10 ou 15 hommes armés. D’abord, ils nous on fait descendre de la voiture. Ils nous ont frappés. Ils m’ont giflée. J’étais au sol. Ils ont ligoté les mains de mes amis. Ils ne m’ont rien fait parce que j’étais une femme non voilée. Alors ils me trouvaient dégoûtante. Ils nous ont remis dans la voiture. Ils ont mis nos visages comme ça. Moi parce que mes amis étaient sur le plancher de la voiture, entre les sièges. Ils nous ont emmenés je ne sais où. Je ne sais pas quoi. J’ai vu un immeuble pas fini. Des murs, un toit, mais rien d’autre. Pas de portes, ni de fenêtres. Ils nous ont mis dans une pièce. Il y avait au moins 100 personnes avec nous dans la pièce. Peut-être 50…, 75…, je ne sais pas.
Thierry Meyssan : C’était tous des combattants ?
Yara Saleh : Oui des combattants. Au moins 75… ou 50, je ne sais pas. Je ne sais pas combien ils étaient. Ils tabassaient mes amis. Ils m’hurlaient au visage. Ils me crachaient dessus en proférant des jurons. « D’où êtes vous ? De quelle religion êtes-vous ? ». Les premières questions étaient à propos de nos origines, de notre religion. « Soutenez-vous Bachar ? Soutenez-vous le gouvernement ? ». Toutes les questions étaient comme ça.
Thierry Meyssan : Dans une vidéo qu’ils ont faite par la suite avec vous, ils disent que des civils ont été tués par les bombardements de l’armée. Ils disent aussi qu’un membre de votre équipe, auquel ils avaient demandé de filmer, a été tué par l’armée ?
Yara Saleh : Non. D’abord, ils nous ont arrêtés et enlevés. Ils ont pris nos téléphones portables et les ont fouillés. Ils y ont trouvé une vidéo montrant un entraînement de l’armée. Ils ont dit : « Vous soutenez l’armée ! l’armée syrienne ! ». Ils l’ont pris avec le chauffeur, l’assistant cadreur qui a été tué. Ils les ont pris tous les deux. J’ai entendu les coups de feu. Le chauffeur est revenu seul. Je lui ai demandé ce qui était arrivé à Hatem. Il a dit qu’ils l’ont tué. Quant ils l’ont pris, je hurlais : « Prenez-moi et laissez-le ! c’est avec moi que vous avez un problème, c’est moi qui faisais le reportage ». Ils ne l’ont pas fait. Ils ont dit qu’ils allaient me punir, à part. Ils l’ont pris et ils l’ont tué.
Thierry Meyssan : Comment vous ont-ils traités, vous et les membres de l’équipe ?
Yara Saleh : Si mal. Je suis désolé de dire ça. L’un d’entre eux a essayé de me violer.
Thierry Meyssan : Mais ce sont des salafistes, n’est-ce-pas ?
Yara Saleh : Quant ils sont entre eux, oui. Ils prient, lisent le Coran. L’un d’entre eux était juste un garde, pour nous empêcher de fuir. Il ne priait pas quant il était seul. Quant il a cru que l’armée approchait et qu’il allait mourir, là il a prié, pas le reste du temps. C’est celui qui a essayé de me violer. Mais je ne l’ai pas laissé faire.
Thierry Meyssan : Dans le texte qu’ils ont lu, ils exigent aussi que le gouvernement retire les barrages pour que les habitants de la ville puissent rentrer.
Yara Saleh : Je connais toutes les revendications.
Thierry Meyssan : Qu’est-ce que cela signifie ?
Yara Saleh : En fait, cela veut dire qu’ils attendaient pour avoir plus d’armes, parce qu’à un moment, ils manquaient d’armes. Ils attendaient des renforts.
Thierry Meyssan : Avaient-ils des contacts à l’extérieur ?
Yara Saleh : Ils avaient l’internet par satellite.
Réseau Voltaire
Plusieurs centaines de combattants de l’Armée syrienne libre, appartenant à des groupes salafistes et takfiristes distincts, ont convergé vers le bourg d’Al-Tal, le 20 juillet dernier. La plupart n’étaient pas Syriens. Quelques habitants, favorables à la démocratie, les ont accueillis pensant partager les mêmes objectifs. Les combattants ont attaqué le commissariat et fait prisonniers les policiers, dont certains ont été blessés. Ils n’ont accepté de transférer à l’hôpital que les fonctionnaires sunnites et ont refusé que les autres soient soignés. Rapidement, le nouveau Conseil révolutionnaire d’Al-Tal, imposa une loi sectaire. La population fuya la ville, à commencer par les gens qui avaient accueilli l’ASL en rêvant aux promesses occidentales.
Les combattants prirent en otage une trentaine de civils, y compris une équipe de la télévision Al-Akhbariya accourue sur les lieux, puis ils se retranchèrent dans le bourg. Les otages furent dispersés dans des bâtiments différents, et déplacés chaque jour. Alors que les combattants espéraient créer sur place un Émirat islamique, le Conseil révolutionnaire, commandé par un déserteur syrien, fut informé d’une attaque imminente de l’armée nationale. Dans une vidéo, il menaça de tuer les journalistes et exigea la levée des barrages autour du bourg pour pouvoir fuir. Ne parvenant pas à obtenir satisfaction, il reçut l’ordre par téléphone satellite de déplacer sa troupe vers une autre localité. Dans la nuit du 15 au 16 août, 500 à 700 hommes, emmenant avec eux leurs otages les plus précieux, sortirent en file indienne à travers la campagne. Lorsque soudain, plusieurs fusées éclairantes illuminèrent la nuit permettant à l’armée nationale d’ouvrir le feu et d’éliminer plus de 200 jihadistes en quelques minutes.
Yarah Saleh, journaliste d’Al-Akhbariya détenue depuis 6 jours, eut le réflexe de se jeter à terre pour se protéger. Les autres otages, restés emprisonnés dans le bourg, furent retrouvés au matin et libérés.
Voici le témoignage de Yara Saleh, recueilli quelques heures plus tard.
Thierry Meyssan : Comment vous ont-ils enlevée avec votre équipe TV ?
Yara Saleh : Nous étions allés à Al-Tal pour y faire un reportage. Je savais que c’était dangereux, mais j’espérais faire quelque chose sur les civils, ce qui leur arrivait, ce qu’ils pensaient de ces combats, comment les gens armés les traitaient. J’ai déjà été dans de tels endroits de nombreuses fois, et je sais que c’est très important du point de vue journalistique tout ce qui concerne les civils. D’abord, j’ai remarqué qu’il n’y avait pas de civils dans la ville. J’en ai juste vu 7 à l’entrée, seulement 7, tous les autres étaient des combattants.
Thierry Meyssan : Combien de combattants ?
Yara Saleh : Je ne sais pas. Lorsqu’ils nous ont enlevés, ils nous en emmenés dans un centre qui était censé être une école. La construction n’était pas finie. Ils l’occupaient. Ils étaient environ 700…, 500…, 700… J’ai appris qu’ils occupaient d’autres lieux.
Thierry Meyssan : Ils étaient de la ville ou venaient-ils d’ailleurs ?
Yara Saleh : Ils étaient de différentes villes et de différentes nationalités. Oui, j’en ai entendu parler libyen. J’ai entendu parler des gens qui nous entouraient, juste hurler, crier en nous frappant. L’un d’entre eux, quant ils nous ont laissés, parlait de Saoudiens parmi eux. Je ne parvenais pas à les distinguer parce qu’ils étaient tous pareils : avec une barbe sans moustache, comme les salafistes. L’un d’entre eux était même appelé Salafi, son nom et son groupe étaient « les Salafistes ». Ils portaient tous des armes à feu, des kalachnikovs, PKC. Je ne sais pas le nom des armes, mais ils m’en ont parlé. Ils ont arrêté la voiture lorsque nous sommes entrés dans la ville. Ils ont verrouillé les portes. 6 ou 7 civils criaient : « S’il vous plaît, laissez les, laissez les partir ». Ils ont posé une arme sur la tempe d’une femme : « Stop ! c’est notre business ». Ils nous ont emmenés avec eux. Ils étaient 10 ou 15 hommes armés. D’abord, ils nous on fait descendre de la voiture. Ils nous ont frappés. Ils m’ont giflée. J’étais au sol. Ils ont ligoté les mains de mes amis. Ils ne m’ont rien fait parce que j’étais une femme non voilée. Alors ils me trouvaient dégoûtante. Ils nous ont remis dans la voiture. Ils ont mis nos visages comme ça. Moi parce que mes amis étaient sur le plancher de la voiture, entre les sièges. Ils nous ont emmenés je ne sais où. Je ne sais pas quoi. J’ai vu un immeuble pas fini. Des murs, un toit, mais rien d’autre. Pas de portes, ni de fenêtres. Ils nous ont mis dans une pièce. Il y avait au moins 100 personnes avec nous dans la pièce. Peut-être 50…, 75…, je ne sais pas.
Thierry Meyssan : C’était tous des combattants ?
Yara Saleh : Oui des combattants. Au moins 75… ou 50, je ne sais pas. Je ne sais pas combien ils étaient. Ils tabassaient mes amis. Ils m’hurlaient au visage. Ils me crachaient dessus en proférant des jurons. « D’où êtes vous ? De quelle religion êtes-vous ? ». Les premières questions étaient à propos de nos origines, de notre religion. « Soutenez-vous Bachar ? Soutenez-vous le gouvernement ? ». Toutes les questions étaient comme ça.
Thierry Meyssan : Dans une vidéo qu’ils ont faite par la suite avec vous, ils disent que des civils ont été tués par les bombardements de l’armée. Ils disent aussi qu’un membre de votre équipe, auquel ils avaient demandé de filmer, a été tué par l’armée ?
Yara Saleh : Non. D’abord, ils nous ont arrêtés et enlevés. Ils ont pris nos téléphones portables et les ont fouillés. Ils y ont trouvé une vidéo montrant un entraînement de l’armée. Ils ont dit : « Vous soutenez l’armée ! l’armée syrienne ! ». Ils l’ont pris avec le chauffeur, l’assistant cadreur qui a été tué. Ils les ont pris tous les deux. J’ai entendu les coups de feu. Le chauffeur est revenu seul. Je lui ai demandé ce qui était arrivé à Hatem. Il a dit qu’ils l’ont tué. Quant ils l’ont pris, je hurlais : « Prenez-moi et laissez-le ! c’est avec moi que vous avez un problème, c’est moi qui faisais le reportage ». Ils ne l’ont pas fait. Ils ont dit qu’ils allaient me punir, à part. Ils l’ont pris et ils l’ont tué.
Thierry Meyssan : Comment vous ont-ils traités, vous et les membres de l’équipe ?
Yara Saleh : Si mal. Je suis désolé de dire ça. L’un d’entre eux a essayé de me violer.
Thierry Meyssan : Mais ce sont des salafistes, n’est-ce-pas ?
Yara Saleh : Quant ils sont entre eux, oui. Ils prient, lisent le Coran. L’un d’entre eux était juste un garde, pour nous empêcher de fuir. Il ne priait pas quant il était seul. Quant il a cru que l’armée approchait et qu’il allait mourir, là il a prié, pas le reste du temps. C’est celui qui a essayé de me violer. Mais je ne l’ai pas laissé faire.
Thierry Meyssan : Dans le texte qu’ils ont lu, ils exigent aussi que le gouvernement retire les barrages pour que les habitants de la ville puissent rentrer.
Yara Saleh : Je connais toutes les revendications.
Thierry Meyssan : Qu’est-ce que cela signifie ?
Yara Saleh : En fait, cela veut dire qu’ils attendaient pour avoir plus d’armes, parce qu’à un moment, ils manquaient d’armes. Ils attendaient des renforts.
Thierry Meyssan : Avaient-ils des contacts à l’extérieur ?
Yara Saleh : Ils avaient l’internet par satellite.
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