Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Le Moyen-Orient, nouveaux Balkans du XXIe siècle ? Une logique d’embrasement ?

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Le Moyen-Orient, nouveaux Balkans du XXIe siècle ? Une logique d’embrasement ?

    début du XXIe siècle sera-t-il aussi chaotique comme l’a été le début du siècle précédent avec le premier conflit mondial ? Le monde aujourd’hui avance vers l’inconnu et le réveil risque d’être brutal.

    Un rappel de 1914


    Depuis une douzaine d’années, le risque d’un embrasement généralisé dans la région du Golfe persique est de plus en plus perçu comme inévitable. A l’évidence, il y a une confrontation de grande ampleur, une logique implacable en route, et tout paraît s’imbriquer, chaque acteur a sa propre partition à jouer. Qu’en est-il exactement de cette partition qui se joue autour de cet îlot central qu’est le Moyen-Orient ? De plus, la situation géopolitique et géostratégique mondiale est en train de reproduire, «à s’y méprendre» la situation qui a prévalu à la veille du premier conflit mondial, en 1914.

    Pour rappel, à l’époque, deux blocs se faisaient face. L’Entente et la Triplice. La première était constituée par les trois empires de France, d’Angleterre et de Russie, la seconde par les empires d’Allemagne, d’Autriche et d’Italie. L’Italie sortira de la Triplice et rejoindra les Alliés en mai 1915. La Turquie entra en guerre en novembre 1914 aux côtés de l’Autriche et de l’Allemagne.
    Deux grandes questions se soulevaient, à cette époque, et divisaient les grandes puissances : la question de l’Orient et la question de l’Extrême-Orient. Pour la première, depuis Lépante, Kahlenberg et la décadence de l’empire ottoman, les empires occidentaux, ambitieux et déterminés, ont été poussés dans la course les uns contre les autres dans le dépeçage de celui considéré, comme l’«homme malade» de l’Europe. La question d’Orient se compliquait des aspirations à l’indépendance des peuples chrétiens balkaniques asservis aux Turcs.

    La deuxième se jouera de la même façon en Extrême-Orient entre les empires européens. En plus de la France, l’Angleterre, l’Allemagne, le Japon faisait prévaloir ses ambitions impériales pour ses débouchés économiques et ses besoins en matières premières. Les Etats-Unis, hostiles à toute occupation territoriale, n’entendaient pas laisser à l’Europe et au Japon le monopole de l’exploitation économique de la Chine. Leur principe était celui de la «porte ouverte». Comme dans la question d’Orient, le sort des populations asiatiques et leurs aspirations à l’indépendance n’étaient pas pris en considération, les peuples étaient systématiquement réprimés dans le sang(1).

    C’est ainsi que cet antagonisme entre les puissances aura une influence considérable sur les opinions publiques de chaque camp qui deviennent de plus en plus hostiles. La presse et l’opinion publique menaient des campagnes violentes contre l’Allemagne dénonçant ses visées expansionnistes.

    La presse allemande de son côté contestait l’hégémonie de l’Angleterre. Lorsque, dans cette situation de ni guerre ni paix, le 28 juin 1914, de jeunes terroristes serbes, liés aux services secrets, perpétrèrent un attentat contre l’archiduc héritier du trône d’Autriche, un acte dont ils étaient loin d’en imaginer les conséquences. L’attentat servit de prétexte à la Triplice pour déclencher le premier conflit mondial dont les conséquences entraîneront, vingt ans plus tard, un deuxième conflit mondial encore plus meurtrier.



    2. La guerre au regard de la finalité du devenir du monde


    Après ce bref rappel, que peut-on dire aujourd’hui de la situation du monde ? Force est de constater que, malgré toutes les nuances diplomatiques entre les grandes puissances et la dissuasion que représente la menace apocalyptique d’une guerre thermonucléaire, la situation mondiale n’inspire aujourd’hui aucun optimisme sur les événements à venir. Comme dans la période 1900-1914, de nombreux points comparables prévalent avec ce qui a existé avant le premier conflit mondial entre les Puissances sur les plans géopolitique, géostratégique, économique, diplomatique et médiatique. Deux blocs se font face aujourd’hui : d’un côté les Etats-Unis, l’Europe et le monde arabo-musulman aligné à l’Occident (pétromonarchies, Turquie, Egypte, Jordanie, Maroc), de l’autre, la Russie, la Chine et le reste du monde arabo-musulman qui leur est solidaire (Iran, Syrie, Hezbollah du Liban, Hamas de Palestine…) Etrangeté de l’Histoire, l’Allemagne qui perturbait l’ordre mondial au début du siècle précédent est remplacée aujourd’hui par les Etats-Unis qui, en plein déclin, ne renoncent pas à la domination héritée après le deuxième conflit mondial. Quant à la Russie et la Chine, plus conciliantes, elles essaient de faire contrepoids à la volonté hégémonique de la superpuissance. Nous avons ainsi deux blocs face à face. Les Alliés d’un côté, groupés autour des Etats-Unis, i.e. l’«Entente des années avant 1914», de l’autre, ce qu’on peut assimiler à la «Triplice» (Russie, Chine et monde arabo-musulman solidaire), avec une différence de taille cependant dans l’antagonisme, les rôles sont inversés. Ce n’est plus la Triplice qui menace comme naguère avec l’Allemagne impériale qui avait poussé au premier conflit mondial mais l’Entente «impériale» qui, par la «propagande de guerre» du pays-phare, les Etats-Unis, et Israël, ne cesse de menacer la paix mondiale.

    Le problème qui se pose ne porte pas tellement sur les motivations des uns et des autres qui sont certes importants au regard de l’Histoire, mais insuffisants au regard de la finalité du devenir du monde. Les motivations des parties en jeu sont connues. Qu’il s’agisse du déclin américain et de l’Europe, de l’unilatéralisme américain ou de cette volonté hégémonique américaine et d’Israël, et par là, l’Occident tout entier qui s’investit dans cette donne, cela entre dans l’ordre naturel des choses. Aucune puissance n’aimerait régresser et ferait tout pour retarder le déclin. Et cette volonté de retarder le déclin entre dans les «Lois de la Nécessité et du Devenir». Il en va de même pour une montée en puissance d’une nation, aujourd’hui l’ascension de la Chine, ou encore la Russie qui est en train de renaître de ses cendres, ou de l’Iran et son programme nucléaire, entrent aussi dans l’ordre naturel des choses. La même situation pour le régime syrien qui fait face à la fois à la remise en cause du régime politique par son peuple et à l’agression étrangère qui cherche aussi à changer le cours de son histoire. Autant d’événements qui ont tous un sens dans l’Histoire. Le Moyen-Orient, par les conflits aux guerres larvées, et la violence que vit cette région depuis plus d’un demi-siècle, n’est-il pas devenu les Balkans du XXIe siècle ? Ne repose-t-il pas de nouveau cette architecture qui a existé au début du siècle précédent ? L’Histoire n’est-elle pas un éternel recommencement ?

  • #2
    . Un nouveau cycle historique en ce début du XXIe siècle ?


    L’avenir n’est jamais écrit, qu’il y a un destin que les Hommes doivent emprunter. Et tout au long de l’Histoire, ils ont eu l’occasion d’affronter le pire et le meilleur. Aujourd’hui encore, le flot d’informations qui s’agite, évolue dans un contexte de profondes inquiétudes. La situation est réellement dangereuse pour le monde depuis l’irruption du Printemps arabe en 2011 et la guerre déclarée en Syrie. Trois doubles veto contre la répression en Syrie et demandant le départ du président syrien, (4 octobre 2001, 4 février et 19 juillet 2012) ont entraîné des crispations dans les chancelleries, le ton monte de part et d’autre. La guerre est désormais dans la bouche de tous.

    Personne ne veut déclarer la guerre, mais tout le monde s’y prépare.

    Il y a une place pour la diplomatie, mais elle ne peut être éternelle. Les relations internationales n’ont pas connu depuis longtemps une telle montée en pression. Aussi on peut dire qu’il viendra, comme dans les temps historiques passés, un événement qui plongera la région dans le chaos et entraînera le monde dans la redéfinition d’un nouvel équilibre stratégique comparable à ce qui a prévalu après le premier conflit mondial.
    Il faut dire que si la guerre n’est pas une fatalité, elle peut néanmoins être une finalité à un processus historique. Mais qu’en est-il de cette finalité qu’ouvre ce nouveau cycle historique ?

    Pour comprendre, il faut citer un passage de Hegel dans son célèbre ouvrage La Raison dans l’Histoire : «De même que l’homme meurt dans l’habitude de la vie, de même l’esprit d’un peuple meurt dans la jouissance de lui-même. Lorsque l’esprit d’un peuple a imposé son activité, alors disparaît l’intérêt et il cesse d’être en éveil : le peuple passe d’un âge viril à la vieillesse, à la jouissance de l’accomplissement. Les besoins qu’il éprouvait auparavant ont été satisfaits par quelque institution et ils n’existent plus (…) Il peut encore faire quantité de choses dans la guerre et dans la paix, à l’intérieur et à l’extérieur ; pendant longtemps, il peut continuer à végéter. Il reste certes remuant, mais cette agitation n’est plus que celle des intérêts privés : elle ne concerne plus l’intérêt même du peuple. L’intérêt majeur, suprême s’est retiré de la vie. Car il n’y a d’intérêt que là où il y a opposition. La mort naturelle de l’esprit d’un peuple peut se manifester par la nullité politique. C’est ce que nous appelons l’habitude. L’horloge est remontée et marche d’elle-même(2)».

    La guerre en 1914 a été le fait des empereurs européens et non des peuples. Tous ces monarques rivalisaient d’ingéniosité pour mettre la main sur les gisements de minerais et d’énergie nécessaires à leur industrie et à la conquête de colonies.
    L’Allemagne s’était laissée devancer dans le partage de l’Asie et de l’Afrique et de débouchés pour ses exportations. Les peuples européens étaient chauffés à blanc et la guerre a fini par éclater, mais les résultats ont été tout autres que ceux qui ont été visés dans les objectifs impériaux. Si l’Allemagne a été occupée, des empires démembrés, c’est parce que la première Guerre mondiale s’inscrivait finalement comme un «Contingent» ou une «ruse de l’Histoire». Elle entrait dans les «Lois de la Nécessité». Cette guerre a permis de libérer les peuples européens des Balkans de la tutelle des empires : Pologne, Yougo-slavie ou royaume des Serbes, Tchéco-Slovaquie, Hongrie détachée de l’Autriche, et les pays baltes (Estonie, Lituanie, Lettonie), Finlande(3)…



    4. On recommande aux rois, aux hommes d’état de s’instruire de l’Histoire



    Pareillement, aujourd’hui, l’Histoire se répète. «On recommande aux rois, aux hommes d’Etat, aux peuples de s’instruire principalement par l’expérience de l’histoire. Mais l’expérience et l’histoire nous enseignent que peuples et gouvernements n’ont jamais rien appris de l’histoire, qu’ils n’ont jamais agi suivant les maximes qu’on aurait pu en tirer. Chaque époque, chaque peuple se trouve dans des conditions si particulières, forme une situation si particulière que c’est seulement en fonction de cette situation unique qu’il doit se décider : les grands caractères sont précisément ceux qui, chaque fois, ont trouvé la solution appropriée(4)».

    Précisément, il faut répondre à Hegel, c’est parce que les rois et les hommes d’Etat n’ont rien appris de l’Histoire que les peuples soumis trouvent dans les «guerres que les Puissances provoquent» une lucarne pour la «Liberté». La France et l’Angleterre, après avoir détruit et dépecé l’empire turc par les traités, et comptaient exercer, après le premier conflit mondial, un contrôle sur la Syrie, le Liban, l’Irak…, ne savaient pas que ce contrôle serait de courte durée et que le réveil des peuples colonisés allait bientôt les en chasser. Ce qui nous amène à dire que l’«aveuglement des Puissances et leurs lobbys» comme aujourd’hui s’inscrivent aussi dans les «Lois de la Nécessité». Si toutes les grandes Puissances s’entendaient, telle entente ne pourrait se faire qu’au détriment des peuples.

    Précisément, c’est là qu’entre l’Esprit des peuples dans l’Histoire. En ce début de XXIe siècle, les Etats-Unis ne savent pas que, depuis le 11 septembre 2001, leur «aveuglement» a ouvert un nouveau cycle historique. Quatre années sont passées, et ce cycle n’est qu’à son début, que témoigne toujours l’absence de sortie à la crise économique mondiale depuis 2008 malgré tous les remèdes apportés par l’Occident et les pays émergents. Quant à la crise de la dette souveraine en Europe, elle n’est qu’un épiphénomène de l’évolution économique mondiale. Le phénomène essentiel aujourd’hui qui va battre les cartes du monde repose essentiellement sur le découplage en cours entre les grands pays émergents et l’économie occidentale. Cela aura des conséquences considérables sur l’Occident. Précisément, la politique occidentale au Moyen-Orient tente de contrecarrer à cette évolution.

    Commentaire


    • #3
      . Cycles historiques et « Contingents dans l’Histoire »


      Pour comprendre la situation aujourd’hui et surtout la politique américaine menée au Moyen-Orient, un autre passage de Hegel dans son ouvrage La Raison dans l’Histoire est à bien des égards révélateur des phénomènes qui peuvent survenir dans un proche avenir. «Dans l’histoire universelle, il résulte des actions des hommes quelque chose d’autre que ce qu’ils ont projeté et atteint, que ce qu’ils savent et veulent immédiatement. Ils réalisent leurs intérêts, mais il se produit en même temps quelque autre chose qui y est cachée, dont leur conscience ne se rendait pas compte et qui n’entrait pas dans leurs vues. Comme exemple analogue, nous pouvons citer un homme qui, par vengeance peut-être juste, c’est-à-dire due à une offense injuste, met le feu à une maison d’un autre. Cet acte immédiat entraînera d’autres faits qui lui sont extérieurs et ne se rapportent pas à l’acte tel qu’il se présente en soi dans l’immédiat. En tant que tel, celui-ci se réduit, si l’on veut, au simple fait d’allumer une petite flamme à un certain endroit d’une poutre. Mais voilà comment ce qui n’a pas encore été fait se produira de lui-même par la suite : la partie enflammée de la poutre se rattache au reste ; la poutre, à la charpente de toute la maison ; celle-ci, à d’autres maisons, et un immense incendie se produit qui détruit la propriété, coûte même la vie à beaucoup de gens qui ne sont pas visés par la vengeance. Cela n’était compris ni dans l’acte tel qu’il se présente immédiatement ni dans l’intention de celui qui avait déclenché l’affaire. Mais l’opération contient aussi une autre détermination générale qui se manifestera par la suite : le but de l’auteur n’était qu’une vengeance contre un individu dont il s’agissait de détruire la propriété ; mais son acte devient un crime qui entraîne un châtiment»(5).

      Il y a quelque chose de prophétique dans la Philosophie de l’Histoire de Hegel. En rappelant ceux qui ont amené les guerres dans la première moitié du XXe siècle, l’analogie émise par Hegel nous fait assimiler la Triplice en 1914 et Hitler en 1939 à cet «homme». Pour la première, les empires allemand et austro-hongrois ont voulu disputer les territoires coloniaux de la France et de l’Angleterre. Pour Hitler, il cherchait à prendre la revanche de l’Allemagne sur la France et l’Angleterre sortis vainqueurs du premier conflit mondial et à «germaniser un espace qu’il considéra vital pour la race aryenne» et qui aurait été opéré au détriment de la Pologne, des pays Baltes et de l’URSS. Ces visées qui ont provoqué deux Guerres mondiales ont eu des conséquences tout autres après la fin des conflits. Après 1918, les peuples européens des Balkans libérés par les traités ont édifié leurs nations. Après 1945, les peuples d’Afrique et d’Asie, en chassant des empires affaiblis, ont rejoint les nations libres.

      Aujourd’hui encore, les Etats-Unis soutenus par l’Europe cherchent à imposer par la guerre l’ordre occidental au monde par le biais du maillon faible, les pays arabo-musulmans (Iran, Syrie…) réfractaires à leur hégémonie. C’est ainsi qu’en utilisant tous les prétextes possibles (programme nucléaire de l’Iran, diffusion de la démocratie, etc.), ils cherchent par la force à les ramener dans leur sphère d’influence. Mais les Puissances occidentales ne savent pas qu’elles sont en train de prendre les habits de l’«homme hégélien», qui se traduira forcément par des conséquences complètement différentes à celles qu’elles auraient visées. Ces Puissances ne savent pas que, dans leur fuite en avant, elles seront «utilisées par l’Esprit des peuples dans l’Histoire». Et que les guerres constituent des «Contingents dans l’Histoire».



      6. Un regard sur le «monde à venir»



      Aujourd’hui, on ne peut définir la situation du monde arabo-musulman seulement comme grave, il faut plutôt dire «irréversible». Il y a réellement une logique d’embrasement au Moyen-Orient.
      Depuis leurs indépendances, les régimes politiques arabo-musulmans ont échoué dans leur tentative d’être des parties à part entière dans la résolution de leurs problèmes internes comme des grands problèmes de leur région qui divisent les puissances. Repliés sur eux-mêmes, divisés, les uns jouant la carte de l’Occident, les autres la carte de la Russie et de la Chine, ces pays sont devenus un terrain privilégié d’affrontement entre les puissances dont les enjeux, ils sont évidents, sont les grands gisements de pétrole que renferme cette région centrale du monde. Dans ces pays, le fossé s’élargit entre gouvernants et gouvernés au point que les peuples se sentent de plus en plus livrés à eux-mêmes. Ni idéologie porteuse, ni situation économique qui donne espoir aux générations présentes et à venir. Des économies entièrement dépendantes des cours du pétrole et qui n’esquissent aucune visibilité d’avenir si les cours de pétrole viendraient durablement à chuter. Ce qui peut arriver en cas de perte de la suprématie du dollar sur les marchés financiers internationaux, où les Américains comme le souhaiteraient l’Europe et la Chine, importateurs de pétrole, seraient amenés à changer de politique et chercher désormais un pétrole bon marché. Aujourd’hui, l’Occident est à la croisée des chemins.

      Deux éléments majeurs bloquent le cours de son Histoire. Ce sont l’Iran et la Chine. Précisément, depuis 1979 avec la chute du shah et le remplacement du régime monarchique par un régime islamiste hostile à la superpuissance américaine et, à cette même date, la Chine a commencé à changer de cap sous la pression de la conjoncture – le communisme pur et dur n’était plus porteur, il a fait son temps –, l’Occident n’a cessé de décliner malgré toutes les politiques économiques mises en œuvre. Se rappeler la crise de l’endettement du reste du monde dans les années 1980 suite aux manipulations monétaires par la Réserve fédérale américaine. Aujourd’hui, le processus s’est inversé, c’est l’Occident qui est endetté et les opérations subversives et les guerres qu’il mène contre les pays arabo-musulmans n’ont constitué qu’une suite continue de débâcles sans réelle contrepartie, avec son cortège de centaines de milliers voire de millions de morts. Aujourd’hui encore, l’Occident cherche à promouvoir dans ces pays la démocratie et l’état de droit qui ne sont que des prétextes pour renforcer son hégémonie sur la région, alors que, contrairement à ces discours, il existe entre lui et les pétromonarchies très «intégristes» du Golfe des convergences d’intérêts stratégiques. Israël, de son côté, ne cesse d’avertir l’opinion mondiale d’attaques ciblées sur les sites nucléaires de l’Iran.

      L’Occident, en portant la guerre en Syrie par des éléments étrangers musulmans «trompés» ou «acquis à l’Occident», en cherchant à l’étendre au Hezbollah, deux maillons pour ainsi dire faibles en regard des vrais objectifs à atteindre, l’Iran et la Chine, ou à pousser la Turquie dans le conflit syrien par un quelconque stratagème (zones d’exclusion aériennes sur la Syrie, entité autonome créée en Syrie pour les rebelles kurdes), ne sait pas qu’il va provoquer – et il va le faire, il n’a pas d’autres solutions – la plus grave guerre de son existence, peut-être bien plus grave que le deuxième conflit mondial. Non par son extension, le conflit sera toujours limité aux nouveaux Balkans, le Moyen-Orient, mais par ses conséquences. Ce sera un incendie qui entraînera la fin de la plupart des régimes politiques arabo-musulmans. Quant à la Russie, qui n’est pas un véritable ennemi pour l’Occident, elle «attendra» comme la Chine les effets qui sortiront de cette guerre «à la fois juste et injuste» au regard de l’Histoire. Ni les pétromonarchies ni les dictatures militaires ni le régime islamique d’Iran ni même les régimes islamistes installés aujourd’hui ne seront épargnés par le vent de la guerre à venir. Des régimes politiques qui s’avèreront peu viables ne pourront que quitter le champ de l’Histoire.

      On comprend pourquoi l’Arabie Saoudite et le Qatar, instruits par les Occidentaux que cette guerre à venir aura à jouer leur destin, usent aujourd’hui de tous leurs moyens pour contrecarrer l’Histoire. Il est évident qu’à l’issue de cette guerre, les Etats-Unis et l’Europe auront le même destin que la Triplice en 1918, non qu’ils auront à «payer des Réparations de guerre» comme ce fut le cas pour l’Allemagne en 1921, mais à sceller la fin à leur hégémonie sur le monde. Les Etats-Unis et l’Europe n’auront été, au final, que les instruments de l’Esprit des peuples. Des «artisans», par leur fuite en avant, à la fois d’une nouvelle histoire pour leurs peuples et pour les peuples arabo-musulmans qui auront à prendre réellement leur destinée en main. Et pourquoi pas, après que les obstacles fussent tombés (faux préjugés alimentés par ceux qui trament contre les peuples, fin du sionisme, de l’islamophobie et autres maux qui divisent les peuples), une nouvelle ère pourrait s’ouvrir entre l’Occident et le monde arabo-musulman. Une ère qui serait cimentée par la géographie et le monothéisme communs aux trois peuples.

      La crise économique mondiale n’aura finalement été qu’une «crise des peuples». Et la guerre à venir comme d’ailleurs le «sionisme» qui entre dans les «Lois de la Nécessité» n’auront qu’à puiser de leurs fins pour extirper le mal du «mal». Et l’Histoire, comme toujours, va par-delà le bien et le mal. «Il vient toujours un moment : c’est le moment où l’ordre existant est détruit parce qu’il a épuisé et complètement réalisé ses potentialités, parce que l’Histoire et l’Esprit du monde sont allés plus loin. (…) C’est le moment justement où se produisent les grands conflits entre les devoirs, les lois et les droits d’existence reconnus, et les possibilités qui s’opposent à ce système, le lèsent, en détruisant le fondement et la réalité, et qui présentent aussi un contenu pouvant paraître bon, profitable, essentiel et nécessaire. Ces possibilités deviennent dès lors historiques ; elles contiennent un universel d’une autre espèce que celui qui est à la base de l’existence du peuple ou de l’Etat. Cet universel est un moment de l’Idée créatrice, un moment de l’élan de la vérité vers elle-même»(6). Cette conclusion est révélatrice du cours, du choix et du devenir des peuples dans le champ de l’Histoire universelle.

      Notes de renvoi :
      -1) L’Europe, une «humanité dans l’Humanité», [sens-du-monde.]
      -2) La Raison dans l’Histoire, G. W. F. Hegel, traduit par Kostas Papaionnou. Pp 90-91
      -3) L’Europe, une «inhumanité dans l’Humanité» — La «Nature» était-elle contre l’Europe ? .sens-du-monde
      -4) La Raison dans l’Histoire, G. W. F. Hegel, traduit par Kostas Papaionnou. Page 35
      -5) ibid. Pp 111-112
      -6) ibid. Page 120


      par Medjdoub Hamed. Chercheur, El watan

      Commentaire

      Chargement...
      X