Farid Alilat | DNA-Algérie
(D’Alger) Pour Washington, cet homme demeure une énigme, un mystère. Secret mais puissant, effacé mais omniprésent, discret mais influent, Said Bouteflika, le jeune frère du président algérien, intrigue les Américains, comme en atteste un télégramme diplomatique révélé par Wikileaks.
Qui est-il ? Quel rôle joue-t-il auprès de son frère ? Quelles sont ses ambitions politiques ? Quel crédit accorder au parti politique dont on dit qu’il ambitionne de lancer ? Son frère Bouteflika nourrit-il l’espoir de lui assurer sa succession en lui confiant le poste de vice-président ?
Pour percer le mystère, le Département d’Etat a donc réclamé de ses diplomates en poste en Algérie, en Tunisie, en France et au Maroc des informations sur Said Bouteflika. Ils veulent dresser un portrait aussi détaillé que possible de celui qu’on considère comme l’œil du président.
Dans un câble envoyé mardi 8 décembre 2008 à Alger, Paris, Tunis et Rabat, le Département d’Etat américain transmet un questionnaire en huit points pour obtenir un véritable feedback sur Said Bouteflika.
Ses accointances au sein de l’armée, ses alliés politiques, ses ennemis, son éventuelle implication dans des affaires de corruption, ses liens avec le FLN, avec le RND, sa relation avec son frère président. Les Américains veulent tout savoir.
Mieux encore, des informations personnelles sur sa carrière, son éducation, ses habitudes, son statut marital, son tempérament, ses centres d’intérêts, sont également les bienvenues. Bref, tout sur Said Bouteflika.
Un successeur potentiel ?
L’intérêt pour Said, 54 ans, ancien universitaire, est d’autant plus important que les Américains manquent cruellement de données sur cet homme qu’on présentait alors -et qu’on présente encore-, comme un successeur potentiel du président Bouteflika.
Si Said est aussi discret qu’un moine reclus, s’il fuit les lumières préférant le confort de l’ombre, il n’est pas moins craint pour les pouvoirs réels ou supposés que lui confèrent son nom - Bouteflika- et sa proximité avec son frère chef de l’Etat.
De lui, on dit tout. Mais de lui on sait vraiment peu. Avant l’élection d’Abdelaziz Bouteflika en avril 1999, Said exerçait les fonctions de professeur d’informatique à l’université de Bab-Ezzouar. A l’époque, il fut membre du CNES, le syndicat des enseignants, et fréquentait même les cercles de l’extrême gauche.
Depuis l’intronisation d’Abdelaziz, Said est officiellement conseiller à la présidence, nommé par décret non publiable.
Et ces onze années passées au cœur du pouvoir ont fait de lui un autre homme. Un vizir qui fait et défait les carrières, un personnage qui aurait jeté ses tentacules sur divers secteurs d’affaires, un homme qui fraye avec industriels, importateurs et businessmen de tous acabits, un intriguant qui agit derrière le grand frère.
C’est que sa discrétion autant que celle de ces autres frères contribue à alimenter la légende.
Ce câble de l’ambassade US à Paris, émis le 16 décembre 2009, et révélé par le site Wikileaks, dresse un portrait toutes en nuances de Said Bouteflika.
S’il ne perce par les mystères qui entourent le frère, ce mémo permet néanmoins de saisir la température ambiante en Algérie un mois après la révision de la constitution de novembre 2008 qui autorise Bouteflika à briguer un troisième mandat.
Document : le câble de l’ambassade US à Paris sur Said Bouteflika
« Résumé : Les Français ont peu d’informations sur la vie privée, les opinions personnelles et les ambitions politiques de Said Bouteflika, selon Anne-Claire Legendre, chef de bureau Algérie au ministère français des Affaires étrangères.
Néanmoins, Legendre a déclaré à Poloff [diplomate américain à Paris, ndlr] le 14 décembre, sur la base de sources et d’analyses françaises, qu’elle croit savoir que Said a commencé a jouer un rôle significativement important dans la vie politique algérienne, culminant dans son rôle décisif dans la gestion de la compagne 2008 pour la réélection de son frère, le président Bouteflika.
Comme directeur de champagne, Said a travaillé étroitement avec les dirigeants du RND, a rapporté Legendre : elle a décrit le groupe avec lequel il a collaboré comme “ des technocrates laïques et des businessmen ”, et s’est demandé si cette relation étroite pouvait donner un aperçu sur la vision du monde de Said.
Plus loin, Legendre s’est demandée si les frères Bouteflika ne dissimulent pas leurs plans pour la succession pour bâtir un soutien parmi l’élite algérienne, qui demeure défiante à toute tentative de “ personnaliser ” la présidence à travers la création d’une dynastie familiale.
Elle a également abordé l’opposition parmi cette élite à la création d’un nouveau parti politique par Said, et les tentatives supposées de Abdelaziz en 2008 de créer pour Said un poste de vice-président.
(D’Alger) Pour Washington, cet homme demeure une énigme, un mystère. Secret mais puissant, effacé mais omniprésent, discret mais influent, Said Bouteflika, le jeune frère du président algérien, intrigue les Américains, comme en atteste un télégramme diplomatique révélé par Wikileaks.
Qui est-il ? Quel rôle joue-t-il auprès de son frère ? Quelles sont ses ambitions politiques ? Quel crédit accorder au parti politique dont on dit qu’il ambitionne de lancer ? Son frère Bouteflika nourrit-il l’espoir de lui assurer sa succession en lui confiant le poste de vice-président ?
Pour percer le mystère, le Département d’Etat a donc réclamé de ses diplomates en poste en Algérie, en Tunisie, en France et au Maroc des informations sur Said Bouteflika. Ils veulent dresser un portrait aussi détaillé que possible de celui qu’on considère comme l’œil du président.
Dans un câble envoyé mardi 8 décembre 2008 à Alger, Paris, Tunis et Rabat, le Département d’Etat américain transmet un questionnaire en huit points pour obtenir un véritable feedback sur Said Bouteflika.
Ses accointances au sein de l’armée, ses alliés politiques, ses ennemis, son éventuelle implication dans des affaires de corruption, ses liens avec le FLN, avec le RND, sa relation avec son frère président. Les Américains veulent tout savoir.
Mieux encore, des informations personnelles sur sa carrière, son éducation, ses habitudes, son statut marital, son tempérament, ses centres d’intérêts, sont également les bienvenues. Bref, tout sur Said Bouteflika.
Un successeur potentiel ?
L’intérêt pour Said, 54 ans, ancien universitaire, est d’autant plus important que les Américains manquent cruellement de données sur cet homme qu’on présentait alors -et qu’on présente encore-, comme un successeur potentiel du président Bouteflika.
Si Said est aussi discret qu’un moine reclus, s’il fuit les lumières préférant le confort de l’ombre, il n’est pas moins craint pour les pouvoirs réels ou supposés que lui confèrent son nom - Bouteflika- et sa proximité avec son frère chef de l’Etat.
De lui, on dit tout. Mais de lui on sait vraiment peu. Avant l’élection d’Abdelaziz Bouteflika en avril 1999, Said exerçait les fonctions de professeur d’informatique à l’université de Bab-Ezzouar. A l’époque, il fut membre du CNES, le syndicat des enseignants, et fréquentait même les cercles de l’extrême gauche.
Depuis l’intronisation d’Abdelaziz, Said est officiellement conseiller à la présidence, nommé par décret non publiable.
Et ces onze années passées au cœur du pouvoir ont fait de lui un autre homme. Un vizir qui fait et défait les carrières, un personnage qui aurait jeté ses tentacules sur divers secteurs d’affaires, un homme qui fraye avec industriels, importateurs et businessmen de tous acabits, un intriguant qui agit derrière le grand frère.
C’est que sa discrétion autant que celle de ces autres frères contribue à alimenter la légende.
Ce câble de l’ambassade US à Paris, émis le 16 décembre 2009, et révélé par le site Wikileaks, dresse un portrait toutes en nuances de Said Bouteflika.
S’il ne perce par les mystères qui entourent le frère, ce mémo permet néanmoins de saisir la température ambiante en Algérie un mois après la révision de la constitution de novembre 2008 qui autorise Bouteflika à briguer un troisième mandat.
Document : le câble de l’ambassade US à Paris sur Said Bouteflika
« Résumé : Les Français ont peu d’informations sur la vie privée, les opinions personnelles et les ambitions politiques de Said Bouteflika, selon Anne-Claire Legendre, chef de bureau Algérie au ministère français des Affaires étrangères.
Néanmoins, Legendre a déclaré à Poloff [diplomate américain à Paris, ndlr] le 14 décembre, sur la base de sources et d’analyses françaises, qu’elle croit savoir que Said a commencé a jouer un rôle significativement important dans la vie politique algérienne, culminant dans son rôle décisif dans la gestion de la compagne 2008 pour la réélection de son frère, le président Bouteflika.
Comme directeur de champagne, Said a travaillé étroitement avec les dirigeants du RND, a rapporté Legendre : elle a décrit le groupe avec lequel il a collaboré comme “ des technocrates laïques et des businessmen ”, et s’est demandé si cette relation étroite pouvait donner un aperçu sur la vision du monde de Said.
Plus loin, Legendre s’est demandée si les frères Bouteflika ne dissimulent pas leurs plans pour la succession pour bâtir un soutien parmi l’élite algérienne, qui demeure défiante à toute tentative de “ personnaliser ” la présidence à travers la création d’une dynastie familiale.
Elle a également abordé l’opposition parmi cette élite à la création d’un nouveau parti politique par Said, et les tentatives supposées de Abdelaziz en 2008 de créer pour Said un poste de vice-président.
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