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    Un Forum arabe sur le recouvrement des avoirs a été récemment tenu à Doha, au Qatar, du 11 au 13 septembre courant. Co-organisée par le Qatar et la présidence du G8, avec l'appui technique de l'Initiative StAR, la réunion prétendait contribuer à la mise au point de mesures efficaces de recouvrement d'avoirs.

    Elle s’inscrit en droite ligne de ce qu'on appelle le Partenariat de Deauville. Le nouveau cadre juridique des initiatives en cours autour du recouvrement des avoirs transférés à l’étranger par les dictateurs déchus ou leurs familles est le Partenariat de Deauville avec les pays arabes en transition, une initiative internationale lancée par le G-8 à la réunion tenue en France en 2011, dans la ville du même nom, pour aider cette région du monde à réussir son atterrissage dans des «sociétés libres, démocratiques et tolérantes» — objectifs majeurs théoriquement assignés au «Printemps arabe».

    Plus récemment, à Camp David, le 21 mai 2012, le G8 a adopté un nouveau plan d'action sur le recouvrement des avoirs dans ce même cadre global du Partenariat de Deauville. Au Sommet de Camp David, les dirigeants du G8 ont recensé les progrès importants accomplis dans un certain nombre de pays en transition et se sont engagés à poursuivre leur soutien à la transition en cours dans quatre domaines prioritaires: la stabilisation, la création d'emplois, la participation/gouvernance et l'intégration – moyens idoines pour parvenir aux objectifs, au demeurant bien théoriques, de liberté, de démocratie et de tolérance assignés après coup au «Printemps arabe». La Banque mondiale semble être la mieux outillée pour y arriver (*). Elle entend aider les nouveaux régimes issus du «Printemps arabes» à restaurer une justice, souvent réduite à sa parodie, et à recouvrer les fonds détournés par les responsables politiques, pendant des décennies de corruption, au plus haut niveau de l'État. «L'actualité récente montre que, dans toute la région, l'opinion s'impatiente de la lenteur des progrès sur ce front.

    La réalité, cependant, est que ce processus de restitution demande du temps, qu'il est souvent complexe et qu'il se prolongera bien après la fin de l'euphorie née du changement de régime.» Au jour d’aujourd’hui, un des instruments usités est le dispositif StAR par lequel l’action engagée pour le recouvrement de la fortune du dictateur philippin Ferdinand Marcos, renversé en 1986, se poursuit encore. Il en est de même pour le président nigérian déchu Sani Abacha, décédé en 1998, contre lequel pèsent encore des soupçons de détournement de fonds placés au Luxembourg. StAR – pour Watch Star Asset Recovery - est un nouveau projet destiné au recouvrement des biens volés, monté en partenariat entre la Banque mondiale et l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC). Il collecte, organise et diffuse les informations sur ces actifs et assiste à leur recouvrement dans le monde entier. Cette assistance porte sur le soutien aux réformes politiques et juridiques dans le domaine du recouvrement d'avoirs international.

    En résumé, l'initiative poursuit les objectifs suivants :

    • l’identification des voies et moyens pour faire le meilleur usage des lois, institutions, cadres réglementaires et voies de coordination existantes et les optimiser, afin de doter les enquêteurs et les procureurs des pays concernés des outils nécessaires pour faire progresser les dossiers et de veiller à ce qu'ils disposent de toutes les informations nécessaires ;

    • L’identification des besoins des pays sur le plan de l'aide technique et de la formation, afin que l'ensemble des acteurs puisse se mobiliser de manière coordonnée ;

    • l’animation des discussions bilatérales sur les dossiers de coopération internationale, afin que les pays puissent décider de priorités et prendre des mesures énergiques pour la restitution des avoirs volés.
    L’expérience accumulée témoigne que «les responsables politiques corrompus et leurs complices dans le crime excellent dans la constitution de couches de réseaux où s'entremêlent les comptes bancaires ouverts à l'étranger ou dans leur pays ainsi que de multiples mandataires et sociétés». Pistes occultes, sociétés écrans et autres constructions transnationales parasitent les structures juridiques. Les cloisons que forment les entreprises, les fondations et les trusts concourent à dissimuler la propriété et le contrôle des actifs contaminés. «Même s'ils disposent d'un cadre judiciaire opérationnel, les pays arabes en transition qui s'emploient à débrouiller cet écheveau doivent être dotés des instruments, capacités et savoir-faire nécessaires — avec ce qu'il faut aussi de coopération internationale, de ténacité et de patience — pour parvenir à identifier, localiser et recouvrer les sommes spoliées. Et s'il incombe à ces pays d'apporter la preuve des malversations, de demander un appui international et de présenter des dossiers irréprochables, ils ne peuvent pas tout.

    Les centres financiers et les pays occidentaux doivent en faire davantage, en adoptant une approche proactive pour lancer les procédures, tendre la main aux pays en transition, mener des investigations et suivre le cheminement des avoirs spoliés.» Au-delà des bonnes intentions, les transferts de fonds acquis à la faveur de la conclusion de marchés vers des espaces supposés plus protecteurs des richesses volées à nos peuples continuent de plus belle. Leurs montants affichent parfois des chiffres qu’aucune peine ne suffirait à sanctionner.

    L’Algérie ne fait malheureusement pas exception à ce fléau.
    Bien au contraire, nombre d’affaires, défrayant la chronique judiciaire, indiquent que nous ne sommes pas loin de rivaliser avec les pires… républiques (elles ne méritent pas la majuscule) bananières. La presse rapportait récemment, à la faveur du procès en cours de l’ex- P-dg de notre compagnie pétrolière, l’acquisition par ce dernier d’une maison d’une valeur de 560.000 euros, offerte à son épouse par un partenaire étranger pour lui permettre de s’y installer lors de ses soins en France (**). Les fuites de capitaux sont par ailleurs banalisées au point de toucher le commun des mortels. La Banque d’Algérie annonçait récemment, en des termes plutôt jubilatoires que les transferts nets en devises vers l’Algérie ont atteint 1,5 milliard de dollars au premier semestre 2012, en augmentation de 50% par rapport à la même période de 2011. Le montant en question couvre principalement les pensions de retraite des travailleurs émigrés rentrés terminer leur vie au pays. Il est loin de refléter l’ensemble des flux générés par notre communauté à l’étranger qui empruntent d’autres circuits et estimés, selon l’espace financier euro-méditerranéen, piloté par l’Institut de Prospective économique du monde méditerranéen, les transferts empruntant[B] les voies informelles sont estimés au total à plus de 7 milliards d’euros (***). Cette même source impute les causes du recours aux voies informelles aux marges, importantes (5 à 10%) que pratiquent les banques sur les transferts de compte à compte et à la différence astronomique entre le taux de change officiel (100 dinars pour un euro) et le taux de change sur le marché parallèle (un peu plus de 145 dinars pour un euro). Plus globalement, les infractions au change peuvent être mesurées à l’aune des pénalités qu’appliquent les douanes : 64 milliards de dinars de pénalités relevés jusqu’à fin 2011. Un chiffre effarant révélé récemment par la direction des Douanes algériennes qui retient 2010 comme année de référence au crime avec 85 milliards de dinars de pénalités. Celles-ci se rapportent pour 75 % des infractions aux opérations de commerce extérieur. La technique est connue de tous : elle consiste à gonfler les factures des importations pour transférer illicitement de l’argent vers l’étranger. Autres infractions inscrites au même registre : le détournement d’avantages fiscaux (pour un montant de 4,8 milliards de dinars), les fausses déclarations de valeurs (1,9 de milliard de dinars) et les fausses déclarations d’origine (301 millions de dinars).

    PAR Ammar Belhimer, le soir
    (*)[worldbank.org/ ces/fr/agir-pour-la-restitution-desavoirs voles?cid=EXT_BulletinFR_W_EXT
    (**) Le Jeune Indépendant, édition du mercredi 29 août 2012, page 3.
    (***) Maghreb Emergent, 11 septembre 2012.
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