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Algérie, les gaz de la fuite en avant !

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  • Algérie, les gaz de la fuite en avant !

    De toutes les questions que le gouvernement Sellal aura à traiter la plus stratégique est sans conteste celle de l’exploitation du gaz de schiste. Le gouvernement aborde cette question comme un simple jalon de la mise en valeur des ressources algériennes en hydrocarbures.

    Le Matin DZ

    Le communiqué du Conseil des ministres l’insère parmi d’autres mesures qui visent à élever le niveau de prospection du domaine minier national, et de relèvement des capacités de production du secteur des hydrocarbures. Choix "normal" d’une gestion "ordinaire" devrions-nous dire ? Mais quelle est la portée réelle de ce choix ? Quelles en sont les implications et les répercussions ?
    Vers l’instabilité des marchés gaziers
    L’exploitation du gaz de schiste en Amérique du nord a anéanti les ambitions algériennes d’exportation de GNL vers ce marché. Les Etats-Unis s’apprêtent à concurrencer le GNL algérien et russe sur le marché européen. L’offre excédentaire, grandissante sur le marché Nord-Américain, déstabilise les autres marchés gaziers régionaux. Elle entraîne l’effondrement des prix du gaz sur les marchés spot, et condamne à la déchéance les contrats à longs termes. Le différentiel de prix, entre les marchés spots et ceux pratiqués dans le cadre des contrats à longs termes, amène les pays européens à ne prélever que les quantités minimales auxquelles ils sont contraints par leurs engagements contractuels. L’éventualité de l’exploitation des gaz non-conventionnels en Europe ou en Afrique du Nord, est annonciatrice non seulement d’une instabilité durable des marchés gaziers, mais aussi d’une grande volatilité des prix.
    Le rôle stabilisateur des contrats à long terme qui garantissaient les intérêts des pays producteurs et ceux des pays consommateurs semblent arriver à son terme. Dans le cas de l’Algérie, les pouvoirs publics réagissent à cette évolution défavorable en programmant l’exploitation du potentiel algérien en gaz non-conventionnel.
    Refus de débat, refus de bilan
    Obstinément le pouvoir algérien se refuse à tout débat sur la question. Il se soumet à des intérêts étrangers qui entrechoquent ceux du pays. Pris en flagrant délit d’échec, il s’empresse à semer l’illusion d’une solution miracle par l’engagement, maladroit et dangereux, d’une option aventureuse, à laquelle nombre de nations ont renoncée. Seul lui importe de sauver l’apparence. Il s’enfonce et enfonce le pays avec lui.
    La série de plans pharaoniques de "développement" qu’il a engagée à la faveur du pactole amassé avec l’envolée des prix du pétrole n’ont rien changé à la situation du pays. Nous en sommes toujours au même point qu’en 1986. Grande fragilité du pays, extrême dépendance à l’exportation des hydrocarbures, absence de diversification l’économie, poids exorbitant des importations en bien de consommation. Un fiasco, un échec patent.
    Mais il n’est pas question pour le pouvoir en place d’envisager une évaluation critique, d’élargir la sphère de concertation et de consultation afin de mobiliser les compétences nationales et d’affiner le diagnostic. Sauver les apparences et maintenir l’illusion d’une gestion, voilà tout ce qui semble compter. De la poudre aux yeux !
    Alors que l’Algérie endure déjà les répercussions de l’exploitation nord-américaine des Shale gaz, voilà qu’elle s’apprête à son tour à les exploiter. Certes, en comptabilisant cette ressource, l’Algérie quadruple ses réserves de gaz. Seulement dans le même élan, elle renforce la tendance baissière des prix du gaz, et contribue à affaiblir les contrats à longs termes. Au bout du compte, l’Algérie doit composer avec le fait que, quels que soient ses choix elle ne pourra pas maintenir le niveau actuel de ses rentrées gazières. Et, cela même au prix du sacrifice des ressources hydriques du Sahara.
    L’exploitation du gaz de schiste ne permettra pas de maintenir les revenus gaziers, mais elle va aussi contribuer à les précipiter vers le bas, si ce n’est vers zéro (au cas où les Européens aussi se mettaient à exploiter leurs gisements de gaz de schiste).
    Un partenariat stratégique avec l’Europe
    Il semble donc impossible de maintenir les échanges gaziers avec l’Europe dans le cadre des contrats à longs termes. L’effondrement prévisible de ces cadres équilibrés semble pousser l’Algérie à considérer le gaz comme la seule richesse de son Sahara. De ce fait elle emboîte le pas aux Nord-Américains et s’empresse d’exploiter son potentiel de gaz de schiste au détriment de la préservation des gigantesques réserves en eau de la nappe aquifère albienne. Or, l’effondrement du partenariat gazier n’est pas la seule donne géostratégique, ou géo-énergétique, à prendre en compte. Dans la phase énergétique actuelle, qui est une quête d’une transition vers un mix énergétique dominé par les sources durables, le pari n’est-il pas propice à la conclusion d’un nouveau partenariat stratégique basé sur le développement des énergies renouvelables ?
    N’y a-t-il pas un intérêt commun, Algéro-Européen, de se prémunir de l’offensive gazière américaine ? Un intérêt à une gestion rationnelle, mutuellement avantageuse des mutations rapides du marché gazier ? Aborder à l’échelle méditerranéenne la question gazière en l’intégrant à la problématique globale de la transition énergétique peut s’avérer porteur de nouveaux équilibres durables. L’Algérie peut y gagner un maintien relatif du prix de son gaz, et l’Europe y gagnera la garantie de l’établissement d’un partenariat en matière d’approvisionnement en électricité, et l’assurera de bénéficier des avantages exceptionnels dont dispose l’Algérie en matière d’énergies nouvelles.
    Un tel projet est colossal. Il est à mener sur plusieurs décennies. Il touche à de très nombreux domaines : celui de la formation universitaire et professionnelle, de la recherche scientifique et du partenariat technologique, de la diversification et à de la densification des tissus industriels, de la qualité et de la fiabilité des réseaux de transport électrique, de la diversité et de la complémentarité des sources énergétiques à développer,….
    Générations maudites, ou fondatrices ?
    L’exploitation du gaz de schiste par l’Algérie tient plus des logiques rentières de monétisation des réserves en hydrocarbures que d’une véritable stratégie nationale. Si l’exploitation des gaz de schistes se concrétise, le parasitisme des générations actuelles sera définitivement établit au dépend des générations futures. Les générations actuelles auront couronnés leur penchant à vivre au-dessus des moyens qui leurs reviennent du patrimoine national. Elles auront dilapidé la part de capital qui devrait servir à préparer aux générations à venir les bases d’une vie décente.
    Mohand Bakir
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