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"Le 'coup de tête' de Zinedine Zidane continue de renverser l'Histoire"

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  • "Le 'coup de tête' de Zinedine Zidane continue de renverser l'Histoire"


    ARTS - Le "coup de boule" de Zinedine Zidane en finale de la Coupe du monde de 2006 a sa statue, signée par l'artiste Adem Abdessemed.
    On dit que l'histoire est écrite par les vainqueurs. A cette phrase on peut ajouter: "Malheur aux vaincus". On peut ainsi multiplier les exemples où le vainqueur dicte sa loi à l'Histoire. Par exemple, dans l'Histoire de France, on peut choisir 1515 et Marignan ou 1525 et Pavie. Les premiers renvoient à un François 1er vainqueur en Italie. Les seconds renvoient au même roi vaincu dans cette même Italie.
    Ce "coup de tête" a dépassé les deux hommes
    Aux premiers vont la gloire de la victoire, aux seconds l'humiliation de la défaite et de l'exil. En artiste exilé, Adel Abdessemed sait choisir son Histoire, refusant que d'autres lui imposent la leur. C'est ce droit à choisir notre propre Histoire que l'artiste nous offre dans cette statue monumentale appelée le "coup de tête" qui revisite le coup de boule de Zinedine Zidane en finale de la Coupe du monde de football en 2006.
    Cette statue réunissant deux hommes dans l'action est monumentale, 5 mètres de haut. En démesurant ainsi les proportions, Adel Abdessemed nous dit que cet événement, ce "coup de tête" a dépassé ces deux hommes. En le figeant dans l'airain, il transforme une faute de match en un moment de l'Histoire d'un pays, de notre pays. Comme la statue de Laocoon assaillie de serpents l'empêchant de révéler la terrible prophétie du Cheval de Troie, le "coup de tête" est à un moment où victoire et défaite choisissent leur camp.
    L'histoire est connue. Zinedine Zidane quitta le match et l'Italie gagna la Coupe du monde. Tous ceux qui furent derrière leur écran ou dans le stade voudraient que l'Histoire fut autre. Terrible souvenir que l'on voudrait oublier. Alors quel vice de l'Histoire veut exposer en place publique une tête qui frappe pas très loin d'où d'autres tombèrent si nombreuses sous la guillotine? Pourquoi Adel Abdessemed veut nous rappeler ce moment et pourquoi le Centre Pompidou l'expose ainsi en place publique. La France est-elle si masochiste qu'elle veuille ainsi glorifier ce moment d'un match où la défaite alourdie de ce "coup de tête" fut si difficile à porter?
    Une victoire
    C'est parce qu'Adel Abdessemed ne nous offre pas une défaite, mais une victoire qu'elle mérite sa place publique. Il nous offre de regarder un homme victorieux allant de l'avant, les poings serrés face à un autre, chancelant en arrière la bouche ouverte dans un cri inaudible, en rappelant un autre sur un pont. Ses mains sont ouvertes ne trouvant dans sa chute que du vide. Ce "coup de tête" est aussi un coup de la tête, siège du cerveau et de la pensée.
    La pensée devient ainsi victorieuse sur les cris inarticulés d'une force brutale. La pensée mène l'homme qui avance renversant celui qui s'oppose à lui, qui s'oppose à la pensée. Ce n'est pas une de ces pensées structurées, complexes, d'universitaire ou d'orateur. Non, c'est la pensée instinctive, celle du peuple qui dans un éclat de colère renverse l'Histoire écrite par d'autres.
    Au pays de la Révolution française, d'un homme venant d'un continent où un printemps renversa des dictateurs il y a peu, ce "coup de tête" continue de renverser l'Histoire. Ce "coup de tête" est celui d'une victoire, oui, mais malheureusement pas celle d'un homme sur ses instincts. Il est aussi la victoire de la colère sur la raison. Il est la victoire de la violence débridée dans un match où les règles doivent nous aider à tenir une paix si fragile. Il oppose aussi deux hommes des deux rives de la Méditerranée, à un moment où on voudrait tant que ces deux rives se tendent la main et se la serrent.
    Quel est le message d'Adel Abdessemed avec cette oeuvre? S'il s'exprime, sa langue dira une chose, sa pensée pensera et son instinct... Que fera son instinct?

    L'express
    "Tout ce que je sais, c'est que je ne sais rien."
    Socrate.
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