Par Laurent Joffrin
Directeur du Nouvel Observateur
Créé le 27-09-2012 à 16h40 -
Première partie
Ce concept hérité du FN vise à établir une symétrie entre les brimades dont seraient victimes les "Français de souche" et les minorités. Or il n'y a pas d'équivalence.
La dénonciation par Jean-François Copé d’un "racisme anti-blanc" mérite plus qu’un simple anathème, tel qu’on l’a entendu de la part de certains militants ou commentateurs. Certes le président-candidat de l’UMP a consciemment repris une formule depuis longtemps utilisée par le Front national. Cette tactique doit être décryptée et dûment critiquée. Encore faut-il dire pourquoi. Après tout, si le Front national dit qu’il fait jour à midi, on ne va pas proclamer qu’il fait nuit par souci de se distinguer. Qu’y a-t-il donc sous ce vocable connoté et contestable de "racisme anti-blanc" ?
Jean-François Copé se justifie en expliquant qu’il a été lui-même le témoin, dans sa ville de Meaux, de cas d’intolérance ou d’agression verbale envers ces citoyens qu’on appelle couramment "gaulois" au sein de certaines cités. La chose paraît vraisemblable. Les préjugés raciaux ou ethniques sont largement partagés entre les communautés et il est fréquent de voir certaines minorités victimes de racisme user à leur tour de clichés du même genre. L’"Obs" a publié récemment une enquête sur l’antisémitisme en France qui démontrait que, souvent, cette attitude était le fait d’individus ou de groupes de culture musulmane (même si la majorité des musulmans en est exempte). On peut être à la fois victime et coupable…
Une symétrie qui n'en est pas une
Là où commence la difficulté, c’est que le Front national utilise depuis toujours le thème du "racisme anti-blancs" pour établir une symétrie artificielle. Au lieu de dénoncer le racisme qui frappe les minorités en France, les frontistes veulent renvoyer dos à dos les uns et les autres de manière à minimiser le racisme qu’ils contribuent à encourager en agitant l’épouvantail d’un racisme en sens contraire. L’accusation de discrimination est ainsi retournée contre les antiracistes, qui défendraient les minorités d’origine étrangère en ignorant volontairement le sort fait aux "Français de souche".
Il faut dire hautement que cette équivalence supposée, que Copé avalise implicitement, n’en est pas une. Chacun peut constater que les préjugés ethniques ou religieux en France touchent en priorité les citoyens d’origine maghrébine ou africaine. On ne connaît pas de cas où l’on aurait refusé un logement à une personne sous le prétexte avoué ou caché qu’elle serait "blanche", alors que les cas inverses sont très nombreux. Même chose pour les CV soumis aux entreprises lors des recherches d’emploi : entre Mohamed et Jean-Christophe, c’est le premier qui souffre de discrimination et non le second.
Aussi bien, on ne connaît pas de boîte de nuit qui écarterait sans le dire les clients "blancs" au profit des autres. Le sophisme des deux racismes croisés, utilisé par le FN et maintenant par Jean-François Copé, est évidemment de mauvaise foi dans ces domaines cruciaux que sont le logement et l’emploi. On remarquera aussi que si les synagogues ou les mosquées sont régulièrement souillées ou vandalisées, c’est rarement le cas des églises ou des cathédrales. Là aussi, la symétrie supposée par Copé n’existe pas. ......
Directeur du Nouvel Observateur
Créé le 27-09-2012 à 16h40 -
Première partie
Ce concept hérité du FN vise à établir une symétrie entre les brimades dont seraient victimes les "Français de souche" et les minorités. Or il n'y a pas d'équivalence.
La dénonciation par Jean-François Copé d’un "racisme anti-blanc" mérite plus qu’un simple anathème, tel qu’on l’a entendu de la part de certains militants ou commentateurs. Certes le président-candidat de l’UMP a consciemment repris une formule depuis longtemps utilisée par le Front national. Cette tactique doit être décryptée et dûment critiquée. Encore faut-il dire pourquoi. Après tout, si le Front national dit qu’il fait jour à midi, on ne va pas proclamer qu’il fait nuit par souci de se distinguer. Qu’y a-t-il donc sous ce vocable connoté et contestable de "racisme anti-blanc" ?
Jean-François Copé se justifie en expliquant qu’il a été lui-même le témoin, dans sa ville de Meaux, de cas d’intolérance ou d’agression verbale envers ces citoyens qu’on appelle couramment "gaulois" au sein de certaines cités. La chose paraît vraisemblable. Les préjugés raciaux ou ethniques sont largement partagés entre les communautés et il est fréquent de voir certaines minorités victimes de racisme user à leur tour de clichés du même genre. L’"Obs" a publié récemment une enquête sur l’antisémitisme en France qui démontrait que, souvent, cette attitude était le fait d’individus ou de groupes de culture musulmane (même si la majorité des musulmans en est exempte). On peut être à la fois victime et coupable…
Une symétrie qui n'en est pas une
Là où commence la difficulté, c’est que le Front national utilise depuis toujours le thème du "racisme anti-blancs" pour établir une symétrie artificielle. Au lieu de dénoncer le racisme qui frappe les minorités en France, les frontistes veulent renvoyer dos à dos les uns et les autres de manière à minimiser le racisme qu’ils contribuent à encourager en agitant l’épouvantail d’un racisme en sens contraire. L’accusation de discrimination est ainsi retournée contre les antiracistes, qui défendraient les minorités d’origine étrangère en ignorant volontairement le sort fait aux "Français de souche".
Il faut dire hautement que cette équivalence supposée, que Copé avalise implicitement, n’en est pas une. Chacun peut constater que les préjugés ethniques ou religieux en France touchent en priorité les citoyens d’origine maghrébine ou africaine. On ne connaît pas de cas où l’on aurait refusé un logement à une personne sous le prétexte avoué ou caché qu’elle serait "blanche", alors que les cas inverses sont très nombreux. Même chose pour les CV soumis aux entreprises lors des recherches d’emploi : entre Mohamed et Jean-Christophe, c’est le premier qui souffre de discrimination et non le second.
Aussi bien, on ne connaît pas de boîte de nuit qui écarterait sans le dire les clients "blancs" au profit des autres. Le sophisme des deux racismes croisés, utilisé par le FN et maintenant par Jean-François Copé, est évidemment de mauvaise foi dans ces domaines cruciaux que sont le logement et l’emploi. On remarquera aussi que si les synagogues ou les mosquées sont régulièrement souillées ou vandalisées, c’est rarement le cas des églises ou des cathédrales. Là aussi, la symétrie supposée par Copé n’existe pas. ......
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