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En Algérie, impossible de savoir qui gouverne

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  • En Algérie, impossible de savoir qui gouverne

    Les cercles de décision en Algérie se croisent sans jamais se rapprocher. Pourtant les uns dépendent des autres. Ce qui rend très opaque la gestion des affaires publiques.

    Question de fond qui interpelle les Algériens des cafés, les journaux, les ambassadeurs qui viennent de se faire accréditer et les historiens: qui gouverne vraiment l’Algérie?

    La question se (re)pose. Car, aujourd’hui, il s’agit de commenter la désignation d’un nouveau Premier ministre (Abdelmalek Sellal) et d’une nouvelle (vieille) liste de ministres.

    Sitôt nommé, sitôt commenté: Sellal a-t-il de la marge entre un président monarchiste, des ministres (Intérieur, anciens moudjahidines, Affaires étrangères, Affaires religieuses et Pétrole) qui ne dépendent pas de lui, sauf par politesse? Qu’est-ce le pouvoir d’un Premier ministre et qu’est-ce que le pouvoir?

    En général, la perception algérienne, marquée par le syndrome de la clandestinité post-guerre de libération (une idée chère à l'historien français Benjamin Stora) voit dans l’Etat une société-écran qui cache le pouvoir.

    Les ministres dépendent des colonels du DRS (services de renseignement algériens) qui les «flanquent» éternellement. Le Premier ministre dépend du président qui le nomme. Le président lui-même dépend de l’armée et des cercles qui l’ont ramené. Mais ces cercles dépendent du premier cercle du président lui-même.

    Compliqué pour un ambassadeur japonais, mais clair pour un fin rusé Algérien: le pouvoir est un ensemble de cercles (conseils d’administrations), mais aussi ce que le sociologue algérien Addi Lahouri appelle «une geste nationaliste», avec le mythe du tutorat sur le pays: («sans nous, c’est le chaos et la ruine et nous sommes propriétaires du pays parce que nous l’avons libéré et nous en sommes responsables et gardiens»).

    Mystique du tutorat et interdépendance entre centres de décisions. La conjonction des deux, vous donne la première clef pour comprendre le cas algérien.

    En second? L’architecture des cercles. En mode «couches d’oignons».

    Pépinière pour indics

    Premier cercle (cercle D), celui des agitateurs, militants, affidés, clients, etc. C'est un peu le corps des appareils des partis de soutien, des associations affidées, des syndicats du régime, des micro-partis, etc.

    C’est un corps poreux qui fournit les électeurs dociles, les candidats «garantis», remplit les bus et les salles et pèse sur la ruralité algérienne et ses choix conservateurs. Ce corps donne aussi les députés, les majorités, les sénateurs (issus de la bourgeoisie rurale ou des appareils urbains), la société civile, etc. C’est là que le régime puise ses indicateurs et ses clients et s’habille de populisme et de popularité.

    Ensuite vient le cercle «plus initié» des hauts cadres, secrétaires généraux de ministères, walis (préfets) et, surtout, chefs de daïra (sous-préfets), fonctionnaires de secteurs stratégiques, patrons d’appareils, patrons de confréries, patrons d’affaires. C’est le cercle «C».

    Là, c’est la première interface entre le pouvoir et son corps visible: on y retrouve des directeurs de banques et agences nationales, des patrons de caisses, des ministres connus pour leur servilité et leurs prudences, des listes de walis. Certains patrons et hommes d’affaires algériens de grande importance.

    Dans ce corps, les vocations sont doubles: exécutives et politiques. Aux uns est donnée la mission de jouer les patrons «politiques», porte-paroles des tendances et des choix du régime, aux autres celle de servir de prête-noms à des patrons occultes (depuis une décennie).

    C’est un peu une nouveauté que cette collusion patronats fictifs et vrais patrons occultes. Tel conseiller à la présidence est alors patron d’un groupe de presse et d’une filière d’importation et d’une chaîne TV, mais c’est un autre qui le représente dans le monde des affaires et des facilités bancaires et foncières.

    Le Cercle «C» est maffieux, rentier, à moitié public, dangereux pour les siens (les purges et poursuites judiciaires y sont nombreuses), mais rentable.

    Ensuite vient le cercle des représentants des représentants. Le cercle «B». Un peu la chambre des lords inconnus. Là, on retrouve les plus proches conseillers, la fratrie de la présidence, des ministres «éternels», mais qui ont leur entrée, deux ou trois chefs de partis, d’anciens généraux, quelques ambassadeurs de la vieille heure d’autrefois. C’est le dernier cercle visible à l’œil nu avant le noyau dur, impossible à voir: celui du conseil d’administration de l’Algérie.


    La théorie de l'oignon

    Le Cercle «A». Là, il ne s’agit pas d’une personne ou de deux. Pas uniquement le DRS ou la présidence, mais d’une sorte de jeu d’équilibres, de cotations, de portefeuilles, de porteurs de fonds et de projets.

    Le Conseil n’est pas uniquement gouverné par la cupidité basse mais aussi par une vision pervertie de l’intérêt haut. On y retrouve des prénoms et un seul nom, «au nom de l’Algérie».

    On peut y être un moment et «échouer» et donc y être disgracié. On peut en sortir pour maladie, pour usure, pour lassitude. Le conseil d'administration est solidaire des siens, peut les mâcher, mais jamais les avaler, selon le proverbe algérien. Peut se plier aux volontés d’un président, mais aussi le faire plier.

    En fait, ce cercle ultime apparaît surtout comme un «code de conduite», un cahier de charge, une vision, un mode d’être, une mystique mais aussi une appropriation.

    On y a conscience d’un intérêt collectif de groupe et le pouvoir de chacun s’y décide en fonction de sa capacité et de son aptitude à défendre cet intérêt et à se conformer à la vision mythologique que l’on s’y fait du pouvoir et du tutorat. Historiquement, on peut rapprocher ce cercle de l’identité des janissaires turcs, avant l’arrivée de la France et avec le pétrole en moins. Son culte est la légitimité de chacun, pas la légitimité de l’Etat. Paradoxalement.

    Ce cercle est-il libre et absolu? Non, lui-même dépend, sans le dire ni se l’avouer de cercles internationaux plus larges, d’amis d’ailleurs, de tuteurs et de régions et zones d’influence.

    La quadrature des cercles concentriques

    On comprend alors pourquoi les Algériens ont regardé avec scepticisme le remplacement d'Ahmed Ouyahia par Sellal. Pourquoi ils se reposent la question «A quoi sert un gouvernement, vieux ou nouveau?».

    Car les Algériens ont l’obscure intuition de cette topographie du pouvoir en Algérie. Du point de vue alimentaire, pour avoir un salaire et de la notabilité, il faut faire partir du cercle D. Pour avoir une assiette et un lot de terrain, il faut connaitre le cercle «C». Pour avoir un monopole d’importation, un gros crédit, une banque, se faire financer un projet par l’ANDI (Agence nationale de développement de l'investissement), il faut se rapprocher du cercle «B». Pour avoir un contrat international stratégique, il faut avoirs des entrées au cercle «A».

    Sauf que les cercles ne sont pas hiérarchisés: les walis ne dépendent pas des ministres qui eux-mêmes ne dépendent pas tous de la présidence. Un député peut être élu par le cercle «D», mais aussi désigné par le Cercle «B» ou soutenu par le cercle «C». C’est un peu flou. C’est une dictature molle et décentralisée avec un pouvoir hyper-centralisateur, dans les formes.

    Kamel Daoud

  • #2
    Question de fond qui interpelle les Algériens des cafés, les journaux, les ambassadeurs qui viennent de se faire accréditer et les historiens: qui gouverne vraiment l’Algérie?
    Mais les "Décideurs" pardi! Tout le monde sait ça!
    "La chose la plus importante qu'on doit emporter au combat, c'est la raison d'y aller."

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    • #3
      En Algérie, impossible de savoir qui gouverne
      c'est normal, car l'algérie n'a jamais connu de gouvernance, aucun fiancé sérieux ne s'est présenté légitiment . Elle était et encore aujourdhui entrain de la violer.

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      • #4
        c'est normal, car l'algérie n'as jamais connu de gouvernance, aucun fiancé sérieux ne s'est présenté légitiment . Elle est violée je dirai.
        J'ai remarqué que tu interviens toujours pour écrire n'importe quoi. On est pas censé être d'accord certes mais un peu de bons sens ne fera de mal à personne.

        Il n'y a pas plus pire pour un pays que de sortir d'une guerre. A ce moment là, tous ceux qui ont participé à la dite guerre se sentent légitimes pour prendre les commandes. Une situation dangereuse car elle est synonyme de lutte et de liquidations fratricides. C'est ce qui s'est passe pour l'Algérie et c'était le clan d'Oujda qui a réussi à avoir le dernier mot. De Ben Bella à Bouteflika, ils font tous partie de ce clan. Le pouvoir se désigne donc parmi cette nébuleuse qui s'est bien installée au sommet. A chaque échéance électorale, le président est désigné après consensus de tous les caciques. Le président a son propre mot à dire mais il reste quand même redevable à ceux qui l'ont désigné. Seul Boumedienne a réussi à s'en affranchir et a régné en maître absolu.
        Même après une révolution en Algérie, on retournera toujours au cas du départ à savoir une lutte fratricide pour prendre les commandes parmi ceux qui enclenché la révolution. Amirouche de son vivant a fait le voeu de ne pas survivre à l'indépendance de l'Algérie car il a deviné ce qui allait se passer.

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        • #5
          Est-il important de savoir qui alors que c'est le comment qui intéresse !

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          • #6
            En Algérie, impossible de savoir qui gouverne
            Normal !

            Y a pas de commandant à bord !

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            • #7
              En Algérie, impossible de savoir qui gouverne
              .
              c est le point fort de la politique algérienne :
              Ki commande ki : secret contre le mal extérieur
              Parait un cafouillage , mais ça marche !!
              A qui sait comprendre , peu de mots suffisent

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