Le village et la société rurale
Le village, d'abord rassemblement provisoire de familles, puis
agencement de groupes et d'institutions et noeud de tensions et de
rivalités, est le mode de spatialisation d’une société rurale faite d'au-
‘tosubsistance où l’autonomie dépend d'un équilibre entre des res-
sources naturelles et une population; société relativement close sur
elle-même, entretenant des rapports de voisinage entre semblables
et d’échange entre collectivités voisines visant à empêcher l'intrusion
d’une sociéte englobante (qui cherche à s’imposer à elle et à lui pré-
lever une partie de ses produits); le village fonctionne sur une territo-
rialisation de l'altérité où le «ils» s'oppose au «nous» à deux niveaux,
celui des rapports aux voisins, d'une part, celui des rapports à l'étran-
ger (qui est d'abord l'étranger de la ville), d'autre part.
Si le village est un groupement qui par la permanence d'une mé-
moire et d'un lieu s’oppose à l'instabilité et à la dispersion, il se défi-
nit aussi par le rejet (du non héritier comme de l'étranger de passa-
ge) assurant un bilan positif des ressources eu égard à la populacion
(et la première ressource dans une société rurale est la terre); c'est
une forme de reproduction sociale de l'espace dans une distribution
° P. Pellegrino et alii, La théorie de l'espace humain, Génève-Paris, 1986.
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parcellaire ayant comme base la propriété de la terre et comme fin
son accumulation; cette forme identifie l'homme et sa propriété, elle
se dégage dans l’image que le groupe se fait de lui-même comme
principe d'un rapport stable entre ses membres, garantie de liberté
individuelle que d'existence collective.
Le groupe, au-delà des rivalités entre parentèles, contrôle ainsi
une juxtaposition d’espaces agricoles s'étendant en dehors des murs
du village, faisant le pendant à la juxtaposition des espaces domesti-
ques à I’intérieur; l'espace agricole est approprié selon le même
mode que l'espace domestique, en une familiarité dans laquelle se
fonde le sentiment de l'avoir fait et de bien le conaître, dans ses con-
textures autant que dans ses couches profondes, d’un endroit à l'au-
tre; c’est un espace que l'on ne délaisse jamais, que l'on entretient et
que I’on nettoye; il s'oppose à la friche apotropa'ique qui l'entoure
comme une marge, réserse commune et frontière d’un territoire
marqué
Le village, d'abord rassemblement provisoire de familles, puis
agencement de groupes et d'institutions et noeud de tensions et de
rivalités, est le mode de spatialisation d’une société rurale faite d'au-
‘tosubsistance où l’autonomie dépend d'un équilibre entre des res-
sources naturelles et une population; société relativement close sur
elle-même, entretenant des rapports de voisinage entre semblables
et d’échange entre collectivités voisines visant à empêcher l'intrusion
d’une sociéte englobante (qui cherche à s’imposer à elle et à lui pré-
lever une partie de ses produits); le village fonctionne sur une territo-
rialisation de l'altérité où le «ils» s'oppose au «nous» à deux niveaux,
celui des rapports aux voisins, d'une part, celui des rapports à l'étran-
ger (qui est d'abord l'étranger de la ville), d'autre part.
Si le village est un groupement qui par la permanence d'une mé-
moire et d'un lieu s’oppose à l'instabilité et à la dispersion, il se défi-
nit aussi par le rejet (du non héritier comme de l'étranger de passa-
ge) assurant un bilan positif des ressources eu égard à la populacion
(et la première ressource dans une société rurale est la terre); c'est
une forme de reproduction sociale de l'espace dans une distribution
° P. Pellegrino et alii, La théorie de l'espace humain, Génève-Paris, 1986.
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parcellaire ayant comme base la propriété de la terre et comme fin
son accumulation; cette forme identifie l'homme et sa propriété, elle
se dégage dans l’image que le groupe se fait de lui-même comme
principe d'un rapport stable entre ses membres, garantie de liberté
individuelle que d'existence collective.
Le groupe, au-delà des rivalités entre parentèles, contrôle ainsi
une juxtaposition d’espaces agricoles s'étendant en dehors des murs
du village, faisant le pendant à la juxtaposition des espaces domesti-
ques à I’intérieur; l'espace agricole est approprié selon le même
mode que l'espace domestique, en une familiarité dans laquelle se
fonde le sentiment de l'avoir fait et de bien le conaître, dans ses con-
textures autant que dans ses couches profondes, d’un endroit à l'au-
tre; c’est un espace que l'on ne délaisse jamais, que l'on entretient et
que I’on nettoye; il s'oppose à la friche apotropa'ique qui l'entoure
comme une marge, réserse commune et frontière d’un territoire
marqué
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