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mali:Les obstacles rebutants de l’option militaire

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  • mali:Les obstacles rebutants de l’option militaire

    Le Mali est à la croisée des chemins. Les difficultés qui se dressent sur le chemin du succès de l’option militaire « incontournable ? » sont tenaces. Elles se traduisent par le désaccord des Etats-Unis, de l’Algérie, des risques de dislocation de la société malienne et d’aggravation de la crise humanitaire sur fond de faiblesse de l’unité intérieure.
    Après des mois de tergiversations les contours d’une intervention militaire se dessinent au niveau de la CDEAO (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest). Les détails en termes de coût et de troupes à engager dans la bataille restent à élucider. Les réticences de l’organisation des nations unies à une intervention militaire ont été, en partie, longtemps motivées par cette absence de clarté. L’Onu a, à plusieurs reprises, demandé à la CDEAO d’être plus précise sur ce point avant de donner son feu vert. A cet obstacle s’ajoutent les mises en garde alarmantes voire alarmistes contre une intervention militaire qui risque d’exacerber davantage la crise humanitaire. L’Onu International Crisis Group (ICG), les organisations humanitaires ne cessent aussi de s’alarmer d’un conflit généralisé qui risque de rompre l’équilibre précaire qui prévaut au Mali.Le Secrétaire général de l’Onu Ban Ki-Moon n’a pas manqué de mettre en garde contre les conséquences humanitaires d’une intervention militaire au Mali. Dans son rapport du 18 juillet, International Crisis Group insistait sur la nécessité d’éviter une intervention militaire qui serait le début d’un embrasement et de la désintégration du Mali qui pourrait s’étendre sur toute la région ouest africaine. Avec la demande officielle du Mali auprès de l’Onu pour une intervention militaire, ICG indique dans son rapport du 24 septembre que pour restaurer l’intégrité territoriale de l’Etat malien, « le recours à la force sera vraisemblablement nécessaire pour neutraliser les groupes armés à vocation transnationale qui combinent terrorisme, jihadisme, trafics de drogue et d’armes ».

    Après 20 ans de transition démocratique, la profonde division géographique du Mali entre la partie sahélienne du nord et la partie saharienne du sud a eu raison de tous les efforts d’unification du pays. La discontinuité territoriale et ethnique du Mali aggravée par les problèmes économiques nés de la partition du pays risque d’être le lit d’une éventuelle conflagration. Plus qu’une crise humanitaire, la situation au Mali est une « poudrière » que la « communauté internationale ne peut pas payer le luxe d’ignorer » selon la Secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton.

    Le président Macky Sall dans son discours devant l’assemblée générale de L’Onu a évoqué les risques de déstabilisation de la sous-région si les ambitions de rébellion se concrétisent. « Le Nord Mali est devenu une zone de non droit, un sanctuaire pour le recrutement et l’entrainement de la nébuleuse terroriste internationale qui, prenant abusivement l’Islam comme prétexte pour masquer ses activités criminelles, se donne pour ambition de s’attaquer à des intérêts étrangers et d’atteindre d’autres pays de la sous région et du monde », a affirmé le président sénégalais. Il ajoute que le « le Conseil de Sécurité a l’obligation d’agir pour mettre fin à cette situation ».

    Mais les instruments de la victoire sont-ils encore en place ? En tous les cas, selon ICG, la CDEAO n’est pas outillée « à intervenir dans un Nord-Mali immense et désertique, face à des groupes armés qui maitrisent parfaitement ce terrain ».Non plus « ce n’est pas l’armée malienne et les forces de la CDEAO qui pourront s’attaquer aux flux de combattants et d’armes entre la Libye fragmentée et le Nord-Mali à travers le Sud algérien et/ou le Nord du Niger ». Par conséquent l’Onu doit prendre acte de « l’incapacité » de l’institution sous régionale à « assumer le rôle de chef de file qu’elle entendait jouer ». S’y ajoutent les divisions au sein du Conseil de sécurité. Pour la Secrétaire d’Etat américain Hillary Clinton, le retour à l’ordre constitutionnel à travers des élections libres doit être la priorité. « Seul un gouvernement démocratiquement élu aura la légitimité de réaliser un règlement politique négocié au Nord mali, de mettre fin à la rébellion et restaurer la légalité ». En réponse à cette position américaine, le président reste dubitatif et s’interroge : « Comment organiser des élections avec un Nord Mali occupé par des organisations terroristes, qui appliquent une loi qui n’est pas celle de la démocratie ? » Selon le rapport de ICG, « de l’avis même de hauts responsables civils et militaires maliens, une des conséquences de la mauvaise gestion des recrutements dans l’armée depuis des années, caractérisée par le laxisme et le clientélisme, est qu’un grand nombre de soldats n’ont jamais imaginé qu’ils pourraient se retrouver un jour sur un champ de bataille » Et d’ajouter : « Une partie des militaires seraient prêts à aller combattre au Nord, une fois rééquipés, mais rien n’indique qu’ils soient majoritaires ».

    Hormis les divisions entre les puissances occidentales sur la question et les risques majeurs de crise humanitaire, les dissensions internes au sein de la classe politique et de l’armée sont susceptibles d’affaiblir les efforts pour venir à bout de la rébellion. Le capitaine Sanogo - resté longtemps opposé à l’intervention des forces de la CDEAO - s’est finalement résolu, sous la pression, à concéder à l’institution régionale des tâches subalternes. Le président Diocounda Traoré ne s’y trompait pas en faisant sienne la position de Sanogo. Il y a deux semaines, le chef de l’Etat réitérait qu’il n’a que trois options qui se résument à deux mots : « dialogue » et « paix ». Reste à savoir comment dialoguer avec les islamistes aux commandes dans le nord qui continuent de profaner les tombes, de démolir des sites historiques, d’estropier des présumés voleurs, de tuer des présumés auteurs d’adultère en public au nom de la Charia en l’absence et en dehors de toute procédure judiciaire. Des exactions et un climat de terreur qui ont contraint plus de 40 000 Maliens à se réfugier au Niger. Le Mali ne pouvait pas éviter indéfiniment le conflit avec les islamistes sous peine de perdre définitivement sa partie nord. « Il ne peut être imaginable de différer la solution », d’après le président français François Hollande lors de la Conférence sur le Sahel en marge de la 67ème assemblée générale des Nations Unies. Il ajoute : « J’ai moi-même insisté sur le fait que toute perte de temps constituerait une complication supplémentaire ».

    International Crisis Group reconnait que « l’usage de la force doit être impérativement précédé d’un travail politique et diplomatique visant à isoler les questions qui concernent les antagonismes communautaires entre Maliens, le mode de gouvernance politique et économique du Nord, la gestion de la diversité religieuse, de celles qui relèvent de la sécurité collective de l’espace sahélo-saharien ».

    Il relève aussi par ailleurs que « la ville-garnison de Kati, à une quinzaine de kilomètres de Bamako, qui abrite ce qui reste d’armes, de munitions et d’équipements des forces maliennes après la débâcle militaire dans le Nord, est un pôle incontournable du pouvoir qui échappe aux autorités civiles de transition. »

    L’Algérie est aussi incontournable dans la résolution de la crise en raison de ses liens avec les mouvements islamistes d’Ansar Din. Pour le moment, elle manque à l’appel des sirènes, aux côtés des Etats-Unis et dans une moindre mesure de l’Onu, pour une intervention militaire. De quoi jeter de sérieux doutes sur l’opérationnalité d’une reconquête du nord Mali.

    Aliou NIANE
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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