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Les plages de Gouraya désertées

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  • Les plages de Gouraya désertées

    L'insularité revient et domine les plage, c'est le cas en tous cas a Gouraya....les plages de Gouraya qu’étaient surpeuplées et vivante …

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    Plus que l’attentat terroriste du 11 juillet dernier, qui a coûté la vie à cinq hommes, c’est la décision de faire évacuer le jour même les camps de Naftal et celle de revoir le mouvement des gendarmes dans certaines plages et leur proximité qui semblent avoir fait le plus de mal à la région et à ses habitants. Notamment les femmes rurales sans revenu, qui, comme les cigales, ont l’été pour se prémunir de l’hiver. Pour les jeunes qui «naviguent» très bien durant la saison estivale, c’est la désillusion. Leurs déboires, ils les imputent aux autorités locales, coupables de n’avoir rien fait pour sauver l’été dans cette région au charme particulièrement prenant où les clairières côtoient d’immenses plages de sable et de galets. Désertes ce mercredi 19 juillet.
    «Au lieu de renforcer la sécurité, mettre un dispositif de dissuasion, rassurer la population et les estivants, c’est la fuite en avant. Résultat des courses, une saison estivale compromise pour notre village, et pour toute notre région (…)» C’est là la déclaration liminaire de “ammi” Ahmed, un retraité que nous avons rencontré mercredi dernier dans un des cafés maures à Larhat, dans la wilaya de Tipasa. Un village où nous sommes retournés une semaine après l’incursion terroriste au camp de toile de Naftal, où séjournaient 32 familles. L’attaque avait fait cinq morts, quatre gardes communaux et un patriote. Trois des victimes étaient originaires de cette localité distante de Gouraya de 10 km. Leur courage alimente encore les discussions dans ce village où l’on nous sert en kabyle des proverbes gourayens pour nous raconter la détresse de toute une communauté qui ne comprend pas la précipitation des autorités à faire évacuer le second camp de toile de Naftal, situé à l’entrée de Gouraya, bien qu’il n’ait pas été ciblé par l’attaque terroriste. Inutile de tenter de justifier la décision par un mieux vaut prévenir. La sentence des habitants est sans appel. La décision «est irréfléchie», “ammi” Ahmed la résume par ce dicton «Yakèn issèmna bla yighiydhen». C’est que dans cette région, l’été est la seule saison où les commerçants travaillent bien. La rater n’augure rien de bon pour de nombreuses familles qui vivent de produits de ferme, de pain et d’artisanat que les enfants vendent aux estivants et autres voyageurs. Pour cet homme natif de Gouraya, l’Etat a abdiqué. En premier lieu les autorités locales. «Il ne sert à rien d’enjoliver le village avec des fanions de toutes les couleurs, de tracer des pistes vers les plages, d’encourager les jeunes à louer des parkings, à ouvrir des gargotes et à vendre à même le sol, le long de la route, des effets et accessoires de plage, si on n’est pas capable d’assurer en plein jour la sécurité du citoyen.» L’intransigeance de cet ex-élément des corps de sécurité est motivée par le fait que depuis l’attentat terroriste, les gendarmes ont réaménagé les horaires de leur présence dans certaines plages.
    A Sidi Braham, le poste de gendarmerie ferme à 18 h
    C’est le cas de Sidi Braham El Khaouass, une plage qui, des années durant, même les plus sanglantes, affichait complet au grand bonheur des jeunes qui la louent pour trois mois. Cette année, elle leur a été cédée pour 360 000 DA. Un «investissement » qu’ils auront du mal à amortir si l’on en juge par l’image que «dégage» ce 19 juillet cette plage qui porte le nom d’un saint de la région et dont le tombeau surplombe l’étendue de sable fin coincé entre deux grands rochers. L’endroit est désert. Il nous renvoie à une tout autre saison que l’été, si ce n’est cette chaleur suffocante de cette fin de matinée de la mi-juillet, le drapeau orange qui flottille pour autoriser la baignade, le mouvement de quelques maîtres nageurs tout de rouge vêtus, les deux ou trois parasols plantés, et les gamins de colonies de vacances qui s’amusent dans l’eau. Seul signe de vie. L’image qu’offre Sidi Braham nous la découvrons à partir de la route nationale qui relie Cherchell à Ténès où ce mercredi matin nous n’avons rencontré aucun barrage sinon celui permanent des militaires. Aucune patrouille non plus. L’entrée de la plage est nettement signalée, juste devant, un jeune vendeur de cigarettes s’est installé dans l’espoir de voir des automobilistes s’arrêter. Il a déserté le rivage où il espérait faire «fortune », l’espace d’un été. Nous y accédons par une piste soigneusement tracée. D’ailleurs, toutes les plages de Gouraya sont accessibles en voiture et possèdent des aires de stationnement. C’est l'œuvre de Noria Zerhouni, ex-wali de Tipasa, nous a-t-on dit. Notre descente vers le rivage terminée, un poste de gendarmerie nous accueille. Le parking est vide, un jeune nous propose un ticket d’accès à 50 DA, dès que l’on éteint le moteur de notre véhicule. Au bord de l’eau «klash» à la main, un gendarme en tenue de combat scrute l’horizon. Une femme, la quarantaine passée, assise au bord de l’eau, surveille ses deux enfants, qui ont à eux seuls une grande partie de la plage. Elle vient de Médéa, elle a loué comme chaque année une maison à Gouraya. Ils sont nombreux à avoir recours à ce système pour profiter de la mer. Elle y vient chaque année. Cette saison sa déception est grande. «Je suis obligée de descendre mes enfants tôt à la plage, je quitte tôt aussi.» Dès que les gendarmes se retirent. Sa crainte de voir débarquer «el irhab» (terroristes) elle ne la cache pas. Elle nous la raconte en regardant les montagnes qui font face à la plage. «Il paraît qu’ils y sont encore.» C’est ce qu’elle a cru comprendre des conversations qu’elle a surprises entre un estivant et un gendarme. «L’opération de ratissage n’a rien donné, ils ne les ont pas attrapés (…)» Elle nous raconte alors tout ce qui a été dit au lendemain de l’attaque du camp de toile de Larhat, où campaient avec leur famille des travailleurs de Naftal. La dame, qui brave la journée «l’interdiction» d’aller à la plage, ne cache pas sa peur de découvrir un matin la plage piégée. Hantise d’une autre jeune femme qui a décidé de ne pas se baigner de crainte de «les voir arriver». Ses motivations, elle nous les explique sans trop de conviction. Des jeunes qui ont loué la plage pour l’été sont très peu bavards, même très méfiants. Il refuse de nous parler de la situation sécuritaire dans la région. Eux sont convaincus que c’est la faute aux médias si la peur règne. «Vous en avez trop fait. Les gens ont eu peur.» Un point de vue que partage un autre jeune venu d’Alger pour camper à la plage de Messlmoun Ouest, déserte cet après-midi du 19 juillet. Une très belle plage, où un camping privé cherche désespérément des clients. Un endroit où, nous dit-on, la sécurité est assurée. Comme dans toutes les plages où nous avons fait escale mercredi dernier, mille et un exemples nous sont donnés pour nous faire ressentir les retombées économiques de la «psychose» que les médias ont provoquée sur la région. Une remontrance qu’on nous fera après nous avoir fait le reproche de ne pas avoir fait «un tapage» quand, en avril dernier, les militaires ont mis hors d’état de nuire deux terroristes de katibet Essahel, une phalange du GIA qui a longtemps sévi dans cette région côtière, aujourd’hui fuie par les estivants et boudée par les habitants des villages de cette daïra de Tipasa. Des villages qui on vu défiler, l’an dernier, un nombre record d’estivants et de voyageurs qui ralliaient l’ouest du pays par Cherchell, Ténès et Mostaganem pour la beauté de cette corniche.
    Même les enfants vendeurs de pain, de figues et d’objets d’artisanat ont déserté les routes
    Un flux dont les Gourayens ont largement profité. Certains ont même réadapté leurs activités commerciales en fonction des besoins. Liès est de ceux-là. Il a mis toute sa fortune et s’est même endetté pour son fast-food, ouvert juste au début de l’été annoncé en grande pompe par les autorités locales en présence de deux ministres de la République. Par précaution, il avait constitué un stock de boissons et d’eau minérale et autres denrées alimentaires pour confectionner des pizzas. «Je vais devoir les manger !» lance-t-il d’un air pince-sans-rire. Son air dépité et abattu nous l’avons retrouvé chez tous ceux que nous avons approchés mercredi dernier pour les besoin de notre reportage. Un air que le garde communal, qui assurait la garde devant le camp de toile de Naftal de Larhat, avait du mal à cacher. Gêné par nos questions sur la situation sécuritaire et si davantage des informations ont filtré sur les noms ou l’appartenance des terroristes qui ont attaqué, dans la nuit du 11 juillet, le camp, le garde communal cherche du secours auprès du jeune militaire qui lui tenait compagnie. Muet comme une carpe, le soldat s’en ira chercher de l’aide chez le chef des gardes communaux qui nous prie de décamper. Nous entamons notre retour sur Alger, en ne quittant pas du regard ces plages plus belles les unes que les autres qu’effleurent des clairières d’une rare beautés. Elles sont désertes alors qu’à quelques kilomètres de là, les estivants sont les un sur les autres. C’est le cas de Chenoua- Plage que l’on atteint par la route de Nador. Les criques sont désertes. La beauté de notre pays accroche même dans les situations de pire désespoir. Tarek, un Blidéen qui avait pour habitude de camper à Sidi-Ghilès, se désole de ce qui arrive à «ce pays».Il vient de stationner sur le bord de la route, non loin d’un blindé de gendarmerie à un endroit où l’on découvre toutes les plages de Chenoua et une partie de sa montagne. Il s’y ressource. C’est aussi ce qui permet à Chahra, une gamine de 13 ans, de tenir le coup en attendant que des automobilistes daignent s’arrêter pour lui acheter du pain. Ce matin, sa maman en a fait 15, elle n’en a vendu aucun. La veille, après toute une journée passée sur le bord de la route, sous une hutte qu’elle squatte, elle est rentrée chez elle sans avoir vendu un seul pain. Elle confie que sa mère a décidé de ne plus faire de pain si elle rentre bredouille ce mercredi. Ils sont très nombreux à avoir pris cette décision en caressant l’espoir que les autorités vont reprendre les choses en main en sécurisant les plages et les routes secondaires et en faisant un travail de communication pour que les estivants retrouvent leurs plages préférées. Un vœu pieux ?


    - Le Soir d'Algerie
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