Avons-nous le droit d'élire les chefs de Daïra ?
La campagne électorale pour les nouveaux maires algériens a commencé. Sur LCP, la chaine française avec, l'ex-ministre de la défense français, et son bras d'honneur. Vraie ? A peine, mais une théorie qui circule y tient. Le 10 Mai dernier, la campagne pour pousser les algériens à voter, a été bâtie sur la paranoïa de la menace extérieure : si vous ne votez pas, l'Otan le fera pour vous. Bouteflika poussera la recette jusqu'au trémolo de son discours de Sétif : le fameux « aidez-moi » sur le mode « Votez-moi ». Et pour cette fois ? Peut-être la recette Ben-Longuet et son attentat, assis à la dignité de l'Algérie. Une explosion qui pousserait les algériens à l'union sacrée et au vote massif pour répondre à la France coloniale. Surtout dans l'Algérie rurale, meilleure mémoire biologique du FLN, gisement de sympathisants acquis, géographie du vieux mythe. Longuet pousserait donc à voter FLN et y réussira autant que la fausse menace par l'OTAN.
Ainsi, ce vieux parti qui a sept vie, va finir par sortir vainqueur, auréolé, investi par une nouvelle émotion, enfiévré par l'indignation épique. Ainsi, autant que le couple Bush Ben Laden,on aura ici Longuet-caciques du FLN. Le vieux motif des antagonismes complémentaires. Ainsi, les algériens vont voter pour répondre à la France et pas pour élire des maires. Nouvelle tradition algérienne où l'on vote toujours pour autre chose que l'objet du vote. Et peut-être que, faute d'enjeux locaux et de démocratie réelle, toutes les élections algériennes sont une réédition du référendum de 62 : « pour ou contre le FLN ? ». « Pour ou contre l'Algérie française ? » A chaque fois. Sans fin. Jouant sur le même traumatisme puisqu'il s'agit de la même histoire, avec la même équipe et les même vieillards vétérans ou colons.
Car mise à part cela, on ne sait pas comment attirer les algériens aux urnes pour le vote des maires que le régime ne cesse d'insulter, de déshabiller, de réduire à des semelles, d'écraser et de réduire à des assistants de chefs de Daïra. Les maires n'ont plus rien à promettre et leurs partis ne peuvent compter que sur leurs clients. D'ailleurs, selon les comptables, il est plus économique de désigner un élu que de le faire élire. Autant donc, désigner des maires directement ou nous laisser élire les chefs de Daïra. Cela aura le mérite d'être clair. Comme un bras d'honneur.
par Kamel Daoud
Le Quotidien d'Oran
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