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Psychologie Quand les erreurs deviennent héréditaires

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  • Psychologie Quand les erreurs deviennent héréditaires

    Les parents se comportent généralement de manière naturelle devant leurs enfants. Ils oublient que leur comportement peut parfois impacter négativement leurs bambins. En effet, un enfant exposé aux violences conjugales, à la violence d’un parent en particulier, à un comportement agressif… a de fortes chances de devenir un jour comme eux. «Mon mari m’aime beaucoup, il est très gentil avec moi, attentionné… mais il a malheureusement un vilain défaut : quand il s’énerve, il peut devenir violent (violence verbale et physique parfois). Au début, j’étais très surprise par ce type de comportement, mais maintenant que je connais les raisons je suis un peu plus compréhensive. Ma belle sœur m’a confié que leur père qui est décédé deux ans avant notre mariage était également très violent avec ma belle mère, il la frappait souvent. Je me suis donc dit c’est peut-être pour cela qu’il agit ainsi, même si ce n’est pas vraiment une excuse. J’espère qu’il saura se contrôler et que ça ne va pas s’aggraver», raconte Houda.
    Certes, la violence n’est pas héréditaire en tant que telle puisqu’il n’y a pas un gène qui en est responsable. Par contre, il existe un risque de reproduire la violence que l’on a vécue. En effet, il s’agit du modèle qu’on a côtoyé pendant plusieurs années, c’est celui qu’on connait le mieux. Plusieurs études scientifiques s’accordent à dire que beaucoup d’enfants reprennent inconsciemment les erreurs et les comportements négatifs de leurs parents à l’âge adulte. «Les adultes reproduisent souvent le modèle parental quel qu’il soit, ainsi on remarque paradoxalement que les enfants battus seront souvent des parents violents avec leurs enfants. Dans le même sens, la transmission intergénérationnelle peut toucher le comportement comme le divorce», explique Ghizlane Benjelloun, pédopsychiatre.
    En effet, il n’est pas rare que le spectre du divorce sévisse à l’âge adulte. Plusieurs personnes issues de couples divorcés finissent par reproduire le modèle parental. «Le divorce constitue en théorie une séparation tacite entre deux adultes consentants, mais dans la majorité des cas la pratique nous montre que ce phénomène de société, de plus en plus en vogue, est le résultat d’une vraie mésentente dans le couple, mais aussi celui de processus liés aux interactions précoces. Un enfant qui développe un modèle d’attachement «insécure» par opposition à l’attachement «sécure» aura une tendance certaine à présenter des troubles dans ses relations sociales adultes», explique la pédopsychiatre. Et d’ajouter : «On retrouve des parents divorcés chez le couple qui le désire ou encore de séparation précoce. On retrouve une défense psychique prévalente qui est l’identification à l’agresseur qui explique cette répétition du traumatisme originel».
    De même, les enfants de parents alcooliques courent un risque plus grand de développer eux-mêmes plus tard des problèmes de dépendance à l’alcool. On estime que ce risque est jusqu’à six fois plus élevé que pour des enfants vivant dans une famille sans problème d’alcool, selon une étude suisse. «Après dix ans de mariage, j’ai fini par me séparer de ma femme. Je me suis rendu compte que je la rendais aussi malheureuse que l’a été ma mère avec feu mon père.
    D’ailleurs ce que je détestais le plus chez lui c’était son addiction à l’alcool et après sa mort je me suis retrouvé à devenir sa copie conforme. Je ne peux pas m’empêcher de rentrer très tard dans la nuit, totalement ivre. Mon fils se réveillait toutes les nuits en sursautant et était devenu trop nerveux. C’est surtout pour son bien que j’ai décidé de m’éloigner», confie Ahmed. Heureusement, ce n’est pas une règle générale. Certaines personnes, bien qu’elles aient vécu avec les erreurs de leurs parents, essayent de travailler sur eux-mêmes ou arrivent à résoudre les conflits intra-psychiques qui les tiraillent sans développer de comportement pathologique.
    Éclairage par Jay Jawad Hamdouch,psychologue
    «C’est le milieu où se déroulent les deux ou trois années de l’existence qui constitue le facteur décisif»

    Refaire les erreurs de ses parents, est-ce génétique ou psychologique ? La question taraude toujours les scientifiques : sur l’arène des débats, les psychologues, les anthropologues, les sociologues et les ethnologues, n’arrivent pas encore à affirmer ou confirmer si nos comportements sont innés ou acquis «Nature versus Nurture». Une chose est sûre, nous sommes tous nés avec deux «atouts». D’après Freud, tout être vivant est né avec l’agressivité et la sexualité. Nous possédons tous 46 chromosomes dans la plupart de nos cellules, un jeu de 23 chromosomes hérité du père et un autre jeu de 23 chromosomes de la mère.
    Puisque les chromosomes sont formés de gènes, nous héritons deux copies de chaque gène de nos deux parents. Il existe des maladies et des comportements dans lesquelles être porteur d’une mutation qui peut résulter en une maladie génétique de nos enfants, à savoir une maladie autosomique récessive, maladies liées à l’«X», les remaniements chromosomiques et les maladies mentales comme la schizophrénie, les maniaco-dépressions, la consommation de drogues, les dépressions majeures, et l’alcoolisme. L’importance du milieu : les gênes que nous héritons de nos parents et grands-parents peuvent jouer certains rôles dans la formation de notre personnalité.

    Il en est de même des circonstances de notre naissance : quand l’accouchement d’un bébé a été particulièrement difficile, l’enfant pourra en ressentir longtemps les effets. Mais c’est le milieu où se déroulent les deux ou trois années de l’existence qui constituent le facteur décisif. C’est à ce moment-là que se forment les caractéristiques essentielles de notre personnalité. L’enfant est alors trop jeune pour en être affecté, nous parlons du climat affectif et bienveillant, ou par leur absence, tels sont les facteurs importants.
    Témoignages…
    «J’ai fini comme ma mère… divorcée»
    «Même si je n’appréciais pas du tout le comportement de ma mère qui était très râleuse à la maison, je me suis retrouvée à reproduire les mêmes gestes qu’elle, faire les mêmes remarques, étouffer mon mari tout autant qu’elle le faisait avec mon père. Malgré toute ma vigilance et toute la compréhension de mon mari, je retombais dans le même scénario. Il m’a supporté pendant sept ans et jour après jour ça empirait. On a fait un mariage d’amour et on a tout tenté pour le réussir. On a même suivi une thérapie de couple et ça n’a rien donné. Le jour où j’ai compris que c’est plus fort que moi et que je rendais la vie des miens impossible, j’ai moi-même poussé mon mari au divorce pour le bien de tous. On s’est alors mis d’accord pour se séparer et limiter les dégâts. Et vu que j’ai été élevée par ma mère après le divorce de mes parents jamais je ne priverai mes filles de leur père. On se sépare à l’amiable et il sait qu’il sera toujours le bienvenu chez nous» Yasmine, 34 ans
    «Je ne veux pas devenir comme lui»
    «Mon père est un alcoolique avéré.
    Chaque soir, aussi longtemps que je me souvienne, il rentre à la maison dans un état lamentable porté par des amis ou des voisins. Chaque nuit, il nous fait un scandale devant tout le monde. Une fois, il nous a même tous mis à la porte : ma mère, mes frères et moi et le lendemain, il a crié sur nous parce qu’on avait dormi chez les voisins.
    Bien sûr, il ne se souvenait plus de rien. Cette situation m’exaspère au plus haut point et je ne le respecte plus. Je dirais même que je le déteste.
    Le problème est que j’ai entendu dire que les enfants ont beaucoup de chance de refaire les erreurs de leurs parents, ce qui m’angoisse énormément. J’ai très peur de devenir comme lui et que mes enfants me haïssent».
    Yassine, 16 ans.
    «Il est devenu comme son père»

    «Je ne comprends pas ce qui a changé. Est-ce que la violence est génétique ou héréditaire ? Mon mari m’a toujours raconté avec effroi les scènes de ménage auxquelles il assistait quand il était petit et comment son père battait sa mère. Des scènes qu’il n’a jamais réussi à oublier et qui l’ont terriblement traumatisé. Au début de notre mariage, on s’était promis de ne jamais faire vivre ce genre de traumatisme à nos enfants et il m’avait juré que contrairement à son père, il ne lèverait jamais la main sur moi. Cependant, voilà qu’après dix ans de vie commune, il reprend subitement le même chemin que son père et en pire. Aujourd’hui, il ne rate aucune occasion pour me crier dessus devant les enfants et n’hésite plus à me coller une baffe. Quand je lui rappelle sa promesse, il prétend qu’aujourd’hui, il comprend le comportement de son père et qu’il était stupide en me faisant cette promesse. Je ne le reconnais plus. Au début, il essayait de contrôler ses pulsions et s’excusait après avoir dérapé, mais avec le temps il s’est habitué à sa violence et même les enfants ne sont plus épargnés».
    Hakima, 38 ans.















    L’ambiance familiale joue un rôle important

    La vie en famille est la première expérience relationnelle de l’enfant. Le sujet tout au long de sa vie reproduira, à des degrés variables, le style relationnel de son premier milieu de vie. Les premières figures parentales (le père et la mère) incarnent plus tard le modèle de base de la relation que le sujet va avoir avec les hommes ou les femmes qu’il aura à rencontrer. L’enfant qui évolue dans une «vraie bonne ambiance» où chaque membre de la famille trouve son compte dans le respect de la place de l’autre ne peut que s’épanouir et s’appuyer sur ce modèle pour ses relations futures. En effet, l’enfant se nourrit de l’affection qu’on lui donne, mais aussi, et surtout du respect qu’on lui accorde, comme à une grande personne. Il ne faut donc jamais dévaloriser un enfant, le blesser, l’invalider, l’insulter... et encore moins le battre ou le punir, mais plutôt le valoriser encore et encore. C’est la condition d’une sécurité affective, qui l’accompagnera et l’aidera à s’épanouir jusqu’à l’âge adulte.

    Publié le : 7 Décembre 2012 - Hajjar El Haiti, LE MATIN ma
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