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La leçon algérienne contre le terrorisme

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  • La leçon algérienne contre le terrorisme

    La région du Sahel s'embrase et s'engage dans un marécage qui risque de s'éterniser.

    Des experts parlent d'un risque réel d' ''afghanisation'' de ce long couloir qui va de la Mauritanie à la Somalie. L'Algérie, dont la plus grande partie du territoire et des richesses du sous-sol est située sur ce passage, devient aujourd'hui victime d'une situation dont les éléments explosifs se sont agrégés depuis longtemps. Victime collatérale ou principale? Apparemment, tout converge pour conclure à des calculs hautement sophistiqués faisant de notre pays une des cibles principales. L'objectif serait-il de faire subir à l'Algérie un ''printemps arabe'' d'une manière détournée et pernicieuse, après avoir échoué à l'y entraîner par la voie des révoltes dites populaires? Le dessein paraît même plus grave lorsqu'on considère le risque qu'aurait engendré l'éventuelle explosion de la plate-forme gazière de Tiguentourine, à In Amenas. Outre les dégâts humains et matériels immédiats, le pays perdrait 18 % de ses exportations gazières, représentant trois milliards de dollars par an. En tout cas, ce qui était appréhendé depuis des années dans ce territoire sahélien, bien avant l'actuelle guerre du Mali, vient d'advenir et d'une manière spectaculaire. Ce territoire, dont la plupart des pays le composant vivent dans une misère couplée à la sécheresse et aux invasions acridiennes, est devenu le port d'attraction et le réceptacle de tous les aventuriers que l'intégrisme islamiste a agrégé dans la grande nébuleuse d'Al Qaïda. La preuve la plus immédiate de l'internationalisation du terrorisme islamiste est cette composition hétéroclite, formée de plusieurs nationalités, sous la coupe de l'Algérien Belmokhtar, du groupe qui a attaqué mercredi dernier le site gazier de Tiguentourine. Au-delà des déchirements politiques et du délabrement économique et social charriés par la partition du Mali par les différents mouvements terroristes qui l'on investi, un tel "voisinage'' de l'Algérie, sur son flanc sud, encombrant et menaçant, pose une multitude d'interrogations aussi cruciales les unes que les autres.

    Même si la question de l'Azawad (Touaregs du Mali) demeure pendante depuis l'indépendance de ce pays, le nouveau contexte de la subversion intégriste, goulûment sustentée par l'internationale islamiste, depuis l'Afghanistan jusqu'à l'Algérie, en passant par le Yémen, le Soudan et la Libye, donne à cette ancienne voie ''irrédentiste'' un autre contenu (autre que celui d'une revendication berbère à tendance autonomiste) et, surtout, une autre dimension militaire qui noie cette vieille revendication dans un conflit transnational dont la finalité est le chaos de la région.

    C’est à un volet de la géostratégie régionale et mondiale très complexe que l’on a affaire ici. Que l'on se souvienne du fol humour et du saugrenu délire de Kadafi, ''roi des rois d'Afrique", au cours des années quatre-vingts du siècle dernier, lorsqu'il projetait la création d’un État sahélo saharien ayant pour nom ''Touarguistan'', lui qui était à mille lieues de porter les Touaregs et la culture berbère dans son cœur. C'est là une des ruses de guerre et un des actes de diversion d'un ancien despote par qui est advenu le maudit ''printemps arabe''. Les puissances occidentales ont subodoré l’évolution chaotique à laquelle était promise la région, bien qu’elles aient une partie de responsabilité dans l’éclosion et la sustentation des mouvements islamistes qui encerclent aujourd’hui la région.

    De l’exemple de la lutte anticoloniale

    On peut épiloguer à souhait sur l'autorisation de survol de son territoire que l'Algérie a accordée à la France pour intervenir au Mali. L'éventualité contraire ne prémunirait pas du tout notre pays contre des incursions qui viendraient du Nord du Mali ou de la Libye, et ne ferait pas de lui une "zone neutre" à quelques kilomètres du théâtre des combats. Donc, ce point de ''discorde'' est artificiellement monté en épingle pour justifier ce qui vient de se passer au sud algérien.

    Mais, on oublie trop rapidement que les deux derniers attentats contre les gendarmes à Tamanrasset et à Ouargla étaient commis en dehors de ce contexte de l'intervention française. Non. L'ignoble attentat de Tiguentourine, fait bien partie de cette logique intrinsèque des groupes terroristes islamistes de s'attaquer particulièrement à des ressortissants occidentaux, pour mieux médiatiser leurs actes, et à des cibles hautement stratégiques sur le plan économique et des infrastructures.

    En la matière, les Algériens ne découvrent rien de nouveau. En effet, quel pays mieux que l’Algérie peut se prévaloir d’avoir bu le calice jusqu’à la lie en matière d’atteinte à l’intégrité physique de ses populations, entreprise qui a pris les dimensions d’un génocide, mais aussi en matière de destructions des infrastructures qui se chiffrent en milliards de dollars ?

    Un laboratoire grandeur nature est là. Ses plaies et stigmates, malgré un reflux remarquable du terrorisme dû à l’action de l’armée et des forces républicaines issues de la société civile, parlent d’elles-mêmes. Au milieu des années 1990, beaucoup de pays qui auraient pu aider l’Algérie d’une façon ou d’une autre (renseignement, armement, finances) n’avaient pas bougé le petit doigt. Cela dans le meilleur des cas. Car, ceux qui ont déroulé le tapis rouge aux cerveaux de la subversion islamiste, aux commanditaires et autres criminels, il y en a eu. Ils nourrissaient sans doute le secret espoir de voir s’effondrer l’un des meilleurs exemples de la lutte anticoloniale du 20e siècle. Le terrorisme a réellement acquis son ''statut'' transnational.

    Des motivations économiques, sociales et politiques peuvent, théoriquement, expliquer la dérive terroriste. Mais, encore une fois, le "laboratoire" algérien est capable de certifier que le terrorisme est principalement nourri et actionné par une idéologie rétrograde, ultraconservatrice, faisant valoir un messianisme qui s'alimente de l'analphabétisme et de la misère des populations.

    Bref, une mouvance d’essence antinationale. Mostefa Lacheraf, en utilisant ce terme à propos des intégristes algériens, sait de quoi il parle, lui, le patriote que les islamistes ont déclaré apostat. Certains milieux ont beau essayer de dépouiller le terrorisme de ses objectifs politiques et de sa matrice idéologique qui est l’islamisme, ce discours a été justifié un certain moment par la jonction réalisée entre les organisations terroristes en état de déconfiture et le banditisme mafieux, la réalité du terrain et le bon sens populaire nous jettent continuellement à la face cette vérité têtue: les groupes armés sont une lugubre entreprise qui travaille pour un projet politique idéologiquement identifié comme étant une théocratie moyenâgeuse à laquelle le peuple, les institutions républicaines et les démocrates algériens ont barré la route au prix de sacrifices inouïs.

    Pour continuer cette lutte et la rendre viable et porteuse dans le temps, il faudra s'attaquer à la racine du mal, comme ne cessent d'y appeler les forces du progrès de notre pays. Liberté politique et associative, liberté d'expression, justice sociale, libération des programmes scolaires de leur contenu idéologiquement désuet, indépendance de la justice, sont autant d'axes et de chantiers urgents qui pourront éloigner l'Algérie des risques d'un barbare ''printemps arabe''.

    Par Amar Naït Messaoud - La Dépêche de Kabylie.
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