Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Emprunt : entre le justifié et l’injustifié

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Emprunt : entre le justifié et l’injustifié

    Nous sommes dans une ambiance universelle très dynamique et où les paysages linguistiques se trouvent fortement bouleversés. Les hommes se rencontrent, les langues et les cultures aussi. Les mots voyagent vite et en nombre entre deux langues. Il est évident que cette ouverture est indispensable. Toute langue qui se renferme sur elle-même est vouée à la disparition. Mais si cette interconnexion linguistique est utile, il n’en demeure pas moins qu’elle peut donner objet à critique. Elle pose la question de l’emprunt justifié et de l’emprunt injustifié. En effet un usage excessif d’emprunts injustifiés peut menacer la langue emprunteuse. Il est démontré scientifiquement que lorsque, dans une langue, le taux d’emprunt dépasse 10% on n’est plus en face d’une seule langue mais de deux langues distinctes. De plus il est établi qu'une langue est un système qui ne connaît que son ordre propre. Ainsi, lorsqu’un discours est chargé d'emprunts injustifiés le sujet parlant reste persuadé qu'il n'a pas été au fond de sa pensée. Il est empêché d'être en situation de libre expression.

    Pour exemple, dans la phrase : « ur d-yegwri lmenteq » le mot « lmenteq » est un emprunt à la langue arabe qui ne se justifie pas et dont la signification est limitée à la seule idée de prononciation sans anticipation ni indication précise sur le sens. Il ne réalise pas la portée expressive recherchée. Il n'établit pas d'unité, de liaison, de complicité voir de réciprocité avec le reste de la phrase ur d-yegwri. Il se produit plutôt une rupture.

    On peut donc largement mesurer les risques d'asphyxie que produisent les mots d'emprunt injustifiés sur une langue. En redressant l’emprunt lmenteq par le mot naturellement existant « awall » on dira: - ur d-yegwri wawal. Ici awal suggère plus qu'il n'évoque. Il produit et établit une relation profonde et charnelle avec le reste de la phrase. Ce qui forme alors l'harmonie, le rythme et la symbiose dans la pensée. Il s’établit une restitution de la libre expression. Il ne faudrait donc pas hésiter à s'écarter de certains emprunts injustifiés, sous prétexte qu'ils permettent une ouverture sur l'universalisme. L'ouverture sur l'universalisme suppose d'abord assurance et consolidation dans la connaissance la plus parfaite que possible de la langue naturelle.

    Ainsi pour Dahbia Abrous du département de langue amazigh de Bgayet « Il ne faut envisager d’autres recours (nouveaux emprunts et néologismes…) que lorsqu’auront été épuisées toutes les potentialités de la langue usuelle… Cette position de principe un peu tranchante ne signifie pas qu’il faut fermer la porte à toute innovation ; l’innovation et la créativité sont des signes de vie et tout ce qui est figé est menacé de mort ; mais il est indispensable, si l’on veut assurer la continuité, de maîtriser ce à partir de quoi on crée et on innove, de se la réapproprier…). L’emprunt injustifié ne doit donc pas envahir la langue emprunteuse.

    Par Abdennour Abdesselam ,La Dépêche de Kabylie.
Chargement...
X