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Chirurgiens bénévoles pour malades sans ressources à Tamanrasset

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  • Chirurgiens bénévoles pour malades sans ressources à Tamanrasset

    Un groupe d’éminents professeurs en médecine s’est déplacé dans la capitale de l’Ahaggar, du 15 au 20 du mois en cours, à l’initiative de l’association SOS 3e âge en détresse Ihcène, présidée par Mme Chikhi Souad. Au menu de la mission, des consultations et des interventions chirurgicales ainsi qu’une journée de formation au profit des médecins de la région.

    Un riche programme a été élaboré pour l’occasion par l’association Ihcène qui a distribué, durant le séjour, des aides à des familles démunies. L’action humanitaire a été chaleureusement accueillie par les notables et les élus locaux, ainsi que les malades qui ont exprimé leur vœu de voir d’autres actions similaires à l’avenir tant la région a besoin de spécialistes dans différentes disciplines pour soulager les malades qui sont le plus souvent transférés au nord du pays, faute de moyens et d’effectifs.

    «L’association Ihcène, nous a dit Mme Chikhi, n’en est pas à sa première action puisque d’autres actions du genre ont été menées dans plusieurs régions du Sud comme Adrar et Naâma.» Deux wilayas qui souffrent tout autant d’un manque flagrant en matière de santé publique.

    La mission médicale a procédé dès son arrivée à des consultations à l’hôpital de Tamanrasset qui connaît une grande affluence car c’est le seul hôpital opérationnel mais qui ne répond, malheureusement, pas à leurs attentes. Nous accompagnons la mission médicale pour constater de visu leur travail. Le Soir d’Algérie va expérimenter pour la première fois le travail délicat auquel sont confrontés les personnels dans un bloc chirurgical. En effet, nous aurons l’occasion d’assister à une intervention chirurgicale d’une grande précision menée par le Dr Amar Korchi, arrivé avec la caravane de bienfaisance de l’association Ihcène.

    Opération de sauvetage


    Le visage buriné, le sourire aux lèvres, le jeune Brahim Toudj, dont le bras gauche atteint par une électrocution, montre un courage sans pareil pour un adolescent d’à peine 15 ans. Il souffre en silence depuis 15 jours et n’a pu être pris en charge car il n’y a pas de médecins spécialiste en chirurgie réparatrice pour le traiter. La mission médicale est une aubaine pour le jeune garçon qui va immédiatement le prendre en charge.

    En dépit des insuffisances du bloc opératoire, le service ne dispose que de trois salles, en consommables et médicaments, parcimonieusement acheminés par la PCH, l’équipe médicale sur place fait tout son possible pour préparer le malade et procéder à l’opération de sauvetage.

    Le Dr Korchi est assisté par une équipe de jeunes médecins spécialistes, motivés et pleins de bonne volonté qui travaillent, il faut le signaler, dans des conditions lamentables. Le Dr Korchi, qui avait repéré le malade durant la tournée de la mission médicale, tente avec son équipe de procéder à une opération de réparation du membre supérieur du jeune Brahim, sévèrement touché. Ce dernier, mis en confiance par son médecin traitant, est préparé au bloc et anesthésié par le Dr Benmadjkoune, médecin réanimateur — ils sont deux seulement — qui va faire le va-et-vient entre deux salles.


    Le Dr Korchi est entouré par le très dynamique Dr Sifour Nadir, assistant en chirurgie générale, le Dr Nabila Benghachi a suivi l’évolution du cas du jeune Brahim ainsi que le Dr Allache, médecin orthopédiste sans oublier l’anesthésiste et les infirmiers, présents tout au long de l’opération. Cette dernière dure plusieurs heures.

    Le cas traité est extrêmement difficile, selon les médecins. Dr Korchi procède minutieusement au nettoyage de l’avantbras du patient en prélevant par petite incisions les tissus en phase de nécrose avancée. Il explique la procédure aux médecins assistants qui, à leur tour, posent des questions et donnent leur avis. Cependant, à un certain moment, une certaine inquiétude se lit dans leurs yeux. L’heure devient grave. Les chirurgiens commencent alors à se concerter sur la démarche à prendre. Faut-il aller vers l’amputation ou faut-il, dans une dernière tentative, essayer de préserver le membre supérieur pour des raisons esthétiques.

    L’équipe médicale, face à un dilemme, demande l’avis d’un spécialiste, Dr Boulakakez Chabane, chirurgien cardiovasculaire. Ce dernier, appelé en renfort, nous dit : «L’équipe m’a sollicité pour l’évaluation de la vascularisation et voir le degré d’irrigation au niveau du membre supérieur. Je constate une vascularisation très précaire et pauvre due au traumatisme de l’électrocution. Il faut savoir que celle-ci non seulement elle brûle les tissus de la peau mais occasionne également des obstructions vasculaires et rend tout acte thérapeutique aléatoire. Le cas présente une lésion très grave.»

    L’avis du spécialiste est pris en compte, et le Dr Korchi en consultant ses assistants décide d’éviter l’option radicale en tentant de limiter les dégâts en procédant à la réparation. II nous dit que «pour ce cas, ce n’est pas une opération très classique. Il présente une nécrose circulaire, ce qui est un gros problème pour la survie de son membre supérieur. Nous essayons de procéder à une opération de sauvetage sur un membre d’une vitalité très douteuse. Nous avons enlevé les tissus morts car ils menaçaient le pronostic vital. Nous allons faire une couverture par un lambeau, sous réserve de l’évolution du cas. Je me suis entendu avec mes collègues de garder le membre et attendre une semaine ou deux, cela dépendra de la réaction, si elle est positive, le jeune Brahim gardera son membre même s’il perdra sa fonction, si l’évolution est négative, ce sera l’amputation». En concluant :

    «Heureusement pour notre malade, le point de sortie du courant électrique a été le membre supérieur et non pas le thorax, sinon il serait mort sur le coup. Il faut dire que les médecins de l’hôpital l’ont bien pris en charge.»

    L’opération terminée, Brahim Toudj est aujourd’hui entre les mains de Dieu. Par ailleurs, si les blocs chirurgicaux sont chargés de travail, les salles de consultation le sont tout aussi. La mission médicale passe deux jours à donner un coup de main aux médecins de l’hôpital qui sont soulagés qu’on leur prête main-forte.

    Construire des ponts entre le Sud et le Nord

    Au programme de cette mission, des conférences et une journée de formation. A ce propos, Dr Hamidi Rachid, le modérateur des débats, nous dira que «la mission médicale, qui entre dans le cadre de la formation continue, a plusieurs objectifs, parmi eux l’établissement de relations avec les médecins du Sud afin qu’ils puissent avoir un vis-à-vis pour la prise en charge des malades qui ne peuvent être traités sur place, car il faut savoir que le transfert des malades se fait dans des conditions difficiles, le voyage est éreintant, et en l’absence de coordination, ces derniers se retrouvent livrés à eux-mêmes. C’est pour cette raison et afin de soulager les malades que ce travail de collaboration et de coordination doit être effectué». Et d’ajouter : «Des chefs de service et doyens dans leurs disciplines respectives, d’éminents professeurs sont venus à Tamanrasset pour construire des ponts entre le Nord et le Sud.» Pour ce qui est de la journée de formation en faveur des médecins locaux, la mission médicale est soucieuse de former la relève et de porter la santé à un niveau satisfaisant.

    Des communications sur des thèmes très pointus ont été présentées. Ainsi, le Pr Abdennabi Benaïssa parlera des tumeurs cérébrales, le Pr Rayan Tahar des maladies chroniques, le Pr Hamidani, des tumeurs osseuses. Quant aux professeurs Rahal, Bouraoui et Zerrouk sur la télémédecine, et à ce sujet, on apprendra que le projet de création d’un centre de télémédecine est en cours. Le séjour à Tamanrasset s’est achevé non sans une pointe d’émotion. Au retour, nous rencontrons deux malades sur le départ à Alger. Un vieil homme sur un fauteuil roulant visiblement fatigué et dépité, et un bébé de 11 mois accompagné par ses parents et présentant un problème cardiaque délicat répondant au non de Benabdelkrim Mohamed Badr. Il a été dirigé vers l’hôpital de Bou Ismaïl.

    Un exemple vivant de la souffrance des habitants de Tamanrasset, contraints de traverser 2 000 km pour accéder aux soins. Ce qui rend le travail des associations d’aide encore plus important pour peu qu’elles trouvent un soutien effectif des donateurs et des autorités publiques, loin des atermoiements bureautiques

    . Mme Chikhi, la présidente, ainsi que le secrétaire général, Tayeb Baïtar, de l’association promettent de revenir avec de nouvelles actions de bienfaisance au profit des démunis avec des membres pratiquement tous de jeunes bénévoles. La prochaine action, selon Mme Chikhi, «l’organisation d’un mariage collectif à Tamanrasset».

    Fatma Haouari, Le Soir
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