- Pardon...
- Je vous en prie.
- Tiens ! Je ne t'avais pas reconnu... Bonjour !
- Bonjour...
- Tu ne me reconnais pas ? Alphonse... Ça te revient ?
- Lentement...
- Sacré toi !
- Hé oui !
- Et la santé ?
- Ça va.
- Pas de petits ennuis ?
- Non.
- Et la famille ?
- Je ne suis pas marié.
- Je sais... je pensais à tes parents...
- Ils sont morts.
- Les pauvres ! Depuis quand ?
- Une vingtaine d'années.
- Le temps passe vite. Et... les affaires ?
- Ça va.
- Tant mieux...
- Dites-moi...
- On se tutoyait...
- C'est vrai.
- Sacré toi !
- Hé oui !
- Toujours le même...
- Il le faut bien !
- Je n'en reviens pas !
- D'où ?
- Pardon ?
- Tu n'en reviens pas... d'où ?
- Sacré toi !
- Hé oui !
- Et puis ?
- Et puis quoi ?
- A part ça ?
- A part quoi ?
- Le reste ?
- Ah ! ça va.
- Hé bien, bravo.
- Hé oui, bravo.
- Tu te souviens...
- Pas très bien.
- ... le jour où elle a...
- Avec le grand ?
- Non. Avec l'autre !
- Ah ! oui...
- Et toi, tu...
- Oui, bien sûr, mais depuis le temps...
- La vie étant ce qu'elle est !
- Très juste !
- Comment faire autrement ?
- C'est difficile.
- Et puis, il y a la guerre !
- Laquelle ?
- Toutes. Et les entre-guerres...
- Dis-moi...
- Oui.
- Tu es bien sûr d'être Ernest ?
- Ah ! je ne suis plus sûr de rien.
- Comment t'appelles-tu ?
- Albert. Mais je ne le jurerais pas.
- Alors, ce n'est pas toi !
- C'est affreux !
- Excusez-moi. Je vous ai pris pour un autre.
- Hep !
- Quoi ?
- Si ce n'est pas moi...
- Oui ?
- Qui suis-je ?
Jacques LANGUIRAND
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