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La Régence d'Alger et le monde Turc.

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  • La Régence d'Alger et le monde Turc.

    LA RÉGENCE D 'ALGER
    ET LE MONDE TURC
    L’EMPIRE OTTOMAN

    INTRODUCTION

    On pourrait s'étonner de l'importance accordée au monde turc dans le présent travail : ce serait oublier que trois siècles durant, la plus grande partie du Maghreb fut colonie turque, et que ce phénomène colonial reste peu intelligible si on ne le replace dans la société qui l'a engendré.

    Comme le remarque un historien (GRENARD - Grandeur et décadence de l'Asie Colin 1939.), « Si les convenances de notre enseignement public nous obligent à concentrer nos regards sur notre histoire particulière, nous ne jetons qu'un coup d'œil rapide sur le reste du monde sans marquer suffisamment les synchronismes qui permettent des comparaisons utiles. Aussi, nous rendons-nous mal compte des forces relatives qui s'exercent dans un même temps et nous ne réfléchissons pas assez qu'à côté des empires de Charles-Quint et de Louis XIV, régnaient en Asie des dominations plus vastes ».

    On constate par exemple, qu'en plein XVIIème siècle, tel puissant monarque, particulièrement jaloux des prérogatives de son représentant auprès du Saint-Siège, devait souffrir que son ambassadeur à Constantinople fût emprisonné par ordre du « Grand Seigneur ».

    Faut-il rappeler que Ferdinand, frère de Charles-Quint, Empereur d'Allemagne, roi de Bohême et de Hongrie, dut payer tribut au Sultan de Constantinople pour le morceau de Hongrie qu'il détenait ? Installés au cœur de l'Europe, à mi-chemin entre Constantinople et Paris, les Ottomans tinrent la Hongrie sous le joug durant Lui siècle et demi, et le flot de leurs armées vint par deux lois battre les murs de Vienne. L'Europe dut attendre jusqu'en 1699, au Traité de Carlowitz, pour que le Sultan reconnût au souverain autrichien ce titre d'Empereur que Solman le Magnifique avait refusé à Charles-Quint.
    Comment les Turcs, ces nomades venus des steppes de l'Asie Centrale où naquirent. Attila, Gengis Khan et Tamerlan, sont ils parvenus à fonder un vaste empire, héritier des Empires byzantin et arabe.
    A la suite de quelles circonstances le, Ottomans sont-ils devenus, pour quelques siècles, les champions de l'Islam orthodoxe.
    Pourquoi et comment le Maghreb fut-il entraîné dans l'orbite de l'Empire Ottoman ?.

    Ces questions intéressent autant l'Histoire de l'Europe que celle de l'Afrique du Nord, c'est pourquoi il a paru intéressant de les évoquer en manière de préambule à l'Histoire de la Régence d'Alger.


    §§


    La période turque de l'Histoire du Maghreb Commença à la suite de l'action espagnole contre les principaux ports nord-africains.
    Les frères Barberousse, authentiques héros du monde musulman du XVIème siècle, furent alors appelés comme des sauveurs par les Maures d'Alger. Peut-être ne met-on pas assez en relief que le grand mérite d'un Kkaïr ed-Din fut bien cette transformation d'un repaire de corsaires en État organisé, celui de la Régence d'Alger. Les principaux rouages de cet État ne furent qu'une transplantation africaine d'institutions ottomanes séculaires : Divan, Beylerbey, Janissaires, etc. Ses principes politiques eux-mêmes s'identifient à ceux que les Turcs appliquaient dans le reste de leur Empire : indifférence à l'égard des populations, pourvu qu'elles paient l'impôt, laissent passer les troupes et ne se mêlent pas des affaires de l'État.
    Une justice expéditive aux sentences redoutables, visait certes à punir les coupables, mais surtout à inspirer la terreur et le respect de l'État : l'Etat ottoman ne disposait évidemment pas des moyens de persuasion d'un État moderne. Pour la première fois depuis longtemps, le Maghreb joua un rôle dans le « concert européen » comme vassal de l'Empire Ottoman et allié de François 1er ; et les corsaires algériens tinrent comme un « second front contre l'Empire hispano-allemand harcelé en Europe centrale et en Méditerranée .A plus d'un titre, le XVIème siècle apparaît comme décisif. Quand il prend fin, les nombreuses principautés qui se partageaient le Maghreb ont disparu. Les vieilles dynasties se sont effondrées. Les Turcs règnent de la frontière marocaine à Tunis. Le Maghreb est sorti de son Moyen Age, et les trois « entités politiques »actuelles commencent à se dessiner, cependant que sur le plan économique. social et technique, il demeure à peu près tel qu'il était depuis le XIIème nu le XIIIème siècle.Le XVIIème siècle appelé encore « l'age d'or de la course » est sans doute la période qui a le plus contribué à établir la fâcheuse réputation des Turcs d'Alger. Cependant, les Turcs ont-ils été les seuls corsaires et les seuls trafiquants d'esclaves de la fin du Moyen Age et des Temps Modernes ? On doit reconnaître que « les Raïs furent à l'Islam ce que les Chevaliers de Malte étaient à la Chrétienté ». La course, d'abord justifiée par des mobiles religieux devint rapidement une simple entreprise de brigandage ; et si les Raïs ramenaient leurs prises vers Alger, c'est vers Livourne que les Chevaliers expédiaient leurs captifs turcs. Ce trafic de chair humaine, particulièrement prospère au XVIIème siècle, se pratiquait donc à une échelle internationale, D'ailleurs, l'usage des galères posait à toutes les marines méditerranéennes des problèmes identiques ; il s'agissait en effet, de recruter et de renouveler sans cesse « le monde concentrationnaire » des chiourmes. Quant aux populations du Maghreb, à l'abri des incursions européennes derrière l'écran protecteur des corsaires, elles vécurent comme repliées sur elles-mêmes, tandis que sous l'égide de l'Islam se multiplièrent mosquées, medersas, zaouïas et confréries religieuses. On doit constater que l'influence des Turcs d'Alger sur les populations arabo-berbères a été en définitive insignifiante. Nous ne saurions cependant oublier qu'Alger leur doit son premier port, c'est-à-dire le commencement de sa prodigieuse carrière. En Tunisie, les Turcs se sont finalement fondus aux autochtones auxquels ils ont donné l'actuelle dynastie beylicale.

    §§§

    L'empire Ottoman a été disloqué au profit de l'Europe et des États arabes du Moyen Orient, sortis de son démembrement. Alors que le monde turc vivait dans la stagnation sociale et la sclérose des techniques, l'Europe, de l'Atlantique à l'Oural, n'avait cessé d'accroître sa puissance économique, militaire et maritime. Ce déséquilibre qui, au début du XIXème siècle, fit de Constantinople une colonie européenne, ne peut manquer de frapper l'esprit. S'il était nécessaire de rechercher une explication, il faudrait peut-être remonter vers « cette explosion de dynamisme intellectuel et moral désignée sous le nom impropre de Renaissance ». L'exemple des Humanistes exerçant leur esprit critique sur des textes, fut repris et renouvelé ; en marge de la pensée religieuse, prit naissance un nouveau courant de pensée, caractérisé par une laïcisation des connaissances humaines. Dès 1637, Galilée, Kepler, Descartes avaient ouvert la voie à cet effort continu vers t'étude de du monde basée sur l'observation exacte des faits. Les forces nouvelles ainsi libérées devaient donner à l'Europe une incontestable avance dans le domaine du progrès, et de nouveaux moyens d'expansion.


    A. BENSIMON. Instituteur à Alger en 1950.

  • #2
    LE PASSÉ LOINTAIN DES TURCS DU Xe AU XIIIe SIÈCLE

    « Les temps modernes s'ouvrent sur une puissante avance de l'Asie sur le domaine européen, que marque la substitution d'un grand Empire musulman, celui des Ottomans, à l'ancien Empire romain d'Orient. »
    F. Grenard
    Grandeur et Décadence de l'Asie — A. Colin


    LE PASSÉ LOINTAIN DES TURCS ET LES CONVULSIONS DE L'ASIE AU XIIE SIÈCLE

    DES NOMADES ASIATIQUES


    — Les Turcs étaient des nomades effectuant leurs migrations sur les steppes de l'Asie centrale.
    — Limites approximatives de leur domaine :
    - Le Pamir au Sud,
    - Le désert de Gobi. L’Ienisseï à l'Est,
    - La Caspienne et la Volga à l'Ouest .


    LES TURCS SELDJOUKIDES

    — Vers 985, un clan turc ayant pour chef un certain Seldjouk, quitte les environs du lac Balkhach, à l Est de la Mer d'Aral. (Actuel Turkestan soviétique) et vient camper en Iran.
    — Récemment islamisés, les Seldjoukides entrant au service du calife de Bagdad comme mercenaires et deviennent bientôt les maîtres du pays.
    — Ils prennent Bagdad, en 1055, et Jérusalem, en 1078.
    — Leur Empire qui s'étend d'abord de la Perse à l'Asie Mineure, se réduit finalement à l'Anatolie.
    — Héritiers des visées musulmanes sur l'Occident, ils se préparaient à envahir l'Europe et à conquérir Constantinople, mais les Croisades retardèrent de quelques siècles la réalisation de ces projets.
    — A leur actif : La substitution d'un peuplement turc aux anciennes populations grecques fixées depuis des siècles sur le plateau d'Anatolie devenu un nouveau Turkestan.




    L'OURAGAN MONGOL S'ABAT SUR L'ASIE AU XIII SIÈCLE.

    Les Mongols : frères de race et de langue des Turcs, leurs voisins de l'Est.
    — Conduits par Gengis Khan (1155-1227) et ses successeurs, ils s'abattent sur
    - la Chine et prennent Pékin (1215),
    - la Russie, brûlent Moscou (1237) ; les Princes russes deviennent leurs vassaux.
    - l'Europe centrale (Hongrie 1241), et orientale (Lituanie et Pologne, en 1259).
    — Ils s'emparent de Bagdad en 1258 et mettent fin au califat abbasside :
    - le dernier calife meurt enfermé dans un sac, foulé aux pieds d'un cheval.
    - l'un de ses parents s'enfuit au Caire où règnent les Mamelouks ; en 1517, un de ses descendants cédera le titre de calife au Sultan Sélim.
    - le Sultan Hafside de Tunis, Abdallah el-Mostancer (l'adversaire de Saint Louis) est nommé calife sunnite.
    — En 1260, les Mongols prennent Alep, Damas, Gaza : Les Sultans seldjoukides deviennent leurs vassaux.
    — De la Perse et de l'Oural à la Chine, les Mongols fondent un vaste Empire qui unifie la steppe asiatique. Et permet la reprise des relations commerciales entre l'Occident et l'Extrême Orient, par la réouverture des routes de la soie et des épices, fermées depuis la fin de l'Antiquité.
    — Le voyage de Marco Polo (1271-1292) permet d'évoquer cette activité économique de l'Asie du XIIIème siècle sous les dynasties mongoles.


    APPARITION DES TURCS OTTOMANS

    — Vers 1221, une tribu seldjoukide qui nomadisait au Sud-est de la Caspienne - dans le Khorassan - s'enfuit vers l'Anatolie conduite par son chef Ettoghroul.
    — Osman, son fils lui succède en 1288. Selon l'usage, la tribu prend le nom de son chef : les Turcs d'Osman deviennent les Turcs Ottomans.
    — Le nom d'Osman - qui fut porté par le troisième successeur du Prophète - souligne l'influence musulmane. Ce nom de … transcrit Osman, Othmân, etc. ... a donné les deux formes françaises ottoman et osmanli.
    — Au début du XIVème siècle, lors de l'éclatement de l'Empire Seldjoukide, en une dizaine de principautés, les Ottomans reçoivent, au Nord-Ouest de l'Anatolie, face à Constantinople, une mince bande de territoire de 60 km de long c’est la première cellule de ce qui sera l'Empire Ottoman.




    AU XIVe SIÈCLE UNE ARMÉE PUISSANTE PERMET A L'EMPIRE OTTOMAN DE PRENDRE PIED EN EUROPE

    NAISSANCE DE L'ÉTAT MILITAIRE OTTOMAN

    — Orkhan (1326-1360), fils et successeur d'Osman, jette les bases de la puissance militaire ottomane par la création d'une armée nouvelle qui comporte
    - une infanterie : les janissaires.
    - une cavalerie : les Spahis.

    LES JANISSAIRES : (YENI-TCHERI : nouvelle troupe).

    — Recrutés d'abord parmi les enfants trouvés ou enlevés à leur famille dans les pays conquis, formés par une éducation appropriée, isolés du reste de la société, ils acquièrent un esprit de corps très puissant.
    — Ils n'ont qu'une religion : l'Islam ; qu'une famille : leur régiment.
    L'ensemble des Janissaires constitue la Garde personnelle du Sultan.
    — Ils étaient 1000 au XIVème siècle, 5000 au. XVème, 24 000 à la fin du XVème siècle.

    LES SPAHIS : du Persan sipah : arme ; sipahi : homme d'arme.

    —A la différence des Janissaires, ce sont des Turcs.
    – Des cavaliers équipés et entretenus sur les revenus des grands domaines confisqués aux ennemis, mais demeurés propriété d'État. On en comptait 30 000 au début du XVème.
    — Il faut y ajouter les irréguliers et les auxiliaires non payés et vivant de butin, les soldats du train et une foule d'artisans tels que corroyeurs, cordonniers, armuriers, drapiers, boulangers, etc., qui entretenaient et renouvelaient le matériel.

    CONCLUSION

    — Le Sultan dispose - à peu de frais - d'une armée puissante d'environ 200000 hommes, alors qu'en Occident, les souverains doivent recruter de nouveaux mercenaires pour chaque campagne.

    A LA CONQUÊTE DES DÉTROITS ET DES BALKANS

    L'histoire de 1’Empire, Ottoman, c'est d'abord celle de ses conquêtes.
    — Après avoir pris Brousse (1326), Nicée (1331), les Ottomans dirigent leurs coups vers 1'Europe.
    — Ils prennent pied à Gallipoli (1356) et contrôlent ainsi les Détroits.
    - Andrinople (1362) devient leur capitale européenne.
    - La défaite des Serbes à Kossovo (30 Juin 1389) assure leur domination sur les Balkans.
    — Les Hongrois inquiétés par le voisinage des Turcs en appellent à l’Occident, affaibli par la guerre de Cent Ans.
    — La « Croisade » à laquelle participent les franco-bourguignons de Jean sans Peur se termine par le désastre de Nicopolis (13 Septembre 1396), « Pour 4 siècles, la Péninsule des Balkans est rayée de l'appartenance européenne. »
    A LA FIN DU XIVème SIÈCLE :
    — Bayazid, surnommé Yldirim, l'Éclair, par les Turcs, et Bajazet par les Européens, règne sur l'Anatolie, et la Péninsule balkanique.
    — Il lui manque Constantinople, désormais entourée de possessions ottomanes.
    — Pour accélérer la turcisation des peuples conquis, il déporte de nombreux Grecs en Anatolie et installe des Turcs en Grèce.






    Au XVe SIÈCLE. APRÈS UNE PAUSE DE 50 ANS L'EMPIRE OTTOMAN REPREND SA POLITIQUE DE CONQUÊTES

    TAMERLAN CONTRE BAYAZID

    TAMERLAN : Timour-Leng : Timour le Boiteux. C'est un Turc (non ottoman) de petite noblesse. Fanatique, et d'une cruauté calculée, il s'est taillé un Empire qui,
    - s'étend de l'Indus à l'Euphrate, du Caucase au Golfe Persique, et
    - avoisine celui de Bayazid à l'Ouest.
    —Le choc des deux Empires se produit à Ankara (20 Juillet 1402). La défaite de Bayazid brise pour un demi-siècle l'élan des Ottomans vers Constantinople.
    — Tamerlan, absorbé par d'autres conquêtes, regagne sa capitale Samarkand
    — Cependant, l'Occident, dont le sort se joue sur le Bosphore,
    - est toujours, en proie à la guerre de Cent Ans,
    - divisé par le Grand Schisme qui dresse le Pape d'Avignon contre celui de Rome,
    - ébranlé par les guerres hussites en Europe Centrale.
    —D'ailleurs, Byzance a depuis longtemps cessé d'inquiéter les Ottomans.
    Elle est en effet affaiblie par les querelles de clans, coupée du reste de la Chrétienté par la haine farouche du clergé orthodoxe pour l'Église latine.
    — Ni Byzance, ni l'Europe, ne peuvent exploiter le répit laissé par la défaite d'Ankara : 1453 verra la fin de la guerre de Cent Ans et la fin de Byzance.

    LA PRISE DE CONSTANTINOPLE : 29 Mai 1453 :
    — C'est l'œuvre du Sultan ottoman, Mohammed II Fatih (le Conquérant). A la tête de 160 000 guerriers partis d'Andrinople, il investit la « Rome d'Orient », qui, à l'abri de sa triple enceinte de remparts, avait défié tant d'invasions.
    — La défense de la ville est assurée par 3000 résidents vénitiens, génois, catalans et 3000 marins de différentes nationalités.
    — Après 2 mois de siège (6 Avril-29 Mai 1453), l'infanterie ottomane s'engouffre dans une brèche ouverte par l'artillerie dans les remparts. Pour la première fois dans l'Histoire, une grande cité tombe sous les coups de l'artillerie. Les Ottomans disposaient en effet d'énormes canons de bronze qui projetaient des boulets de pierre. La ville est mise à sac pendant 3 jours et 3 nuits
    — Constantinople, désormais Istamboul, devient pour 500 ans la capitale de l'Empire Ottoman.
    — Pour les historiens, cet événement marque la fin du Moyen Age et le commencement d'une nouvelle période de l'Histoire : les Temps Modernes.

    L'ORIENT MUSULMAN CAUSE INDIRECTE DES GRANDES DECOUVERTES ?

    — Au XVème siècle, les routes maritimes des épices aboutissent à Beyrouth et Alexandrie. D'autre part, Trébizonde, Caffa (Mer Noire) et Constantinople sont les points d'arrivée ces routes continentales venant d'Asie :
    Le ravitaillement de l'Europe en poivre est donc tributaire des Sultans d'Égypte et de Syrie, ainsi que de Venise ; ils ne manquent pas d'en abuser.
    Cette situation contraint les marins d'Extrême-Occident à rechercher par delà le Cap de Bonne-Espérance, le contact direct avec les Indes.
    - C'est en recherchant la route des Indes que Christophe Colomb découvre l'Amérique,
    - C'est après trois quarts de siècle d'efforts opiniâtres que les Portugais abordent à Calicut en 1498 avec Vasco de Gama.
    — En prenant à revers les positions ottomanes, ils établissent la liaison directe avec l'Asie, puis tentent de bloquer les voies maritimes qui aboutissent à Ormuz et Aden, afin de s'approprier le monopole du poivre.
    — Il convient cependant de souligner que « l'expansion européenne qui désormais va constituer le point essentiel de l'histoire des hommes, ne saurait cependant se réduire à une aventure portugaise et espagnole
    Les tentatives anglaises, françaises, hollandaises et surtout russes, telles que l'exploration de la Sibérie par les Cosaques et la conquête de la route des steppes vers le Pacifique, n'en ont pas moins eu des conséquences importantes. » (Dumoulin de la Plante - Histoire Synchronique. p. 297 - Gallimard.).

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    • #3
      A LA FIN DU XVe SIÈCLE.

      — Après Constantinople, Mohammed II pousse les frontières de son Empire jusqu'à la Save, les Carpates, la Crimée, en installant son protectorat sur la Moldavie, la Valachie et le Khanat des Tatars de Crimée.
      — En Méditerranée : il enlève aux Vénitiens l'île d'Eubée (1471) et les places de Coron, Modon et Lépante (1502).
      — Venise conserve encore les îles Ioniennes, Chypre, la Crête.
      — Cependant, à partir de Rhodes, les Chevaliers de Saint-Jean écument la Méditerranée orientale.




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      • #4
        Au XVIe SIÈCLE. APOGÉE DE L'EMPIRE OTTOMAN


        Alors que Charles-Quint devient Empereur, Luther rompt avec le Pape (1519).
        L'unification de l’Europe à se heurter :
        - à la Réforme qui brisera l'unité spirituelle de la Chrétienté,
        - à la résistance des Rois de France, attachés à sauvegarder leur indépendance,
        - aux Turcs qui vont reprendre leur marche en avant.


        CONQUÊTE DES LIEUX SAINTS DE L'ISLAM.

        En 1516-1517, Selim, successeur de Mohammed II Fatih s'empare de l'Égypte et de la Syrie.
        Conséquences :
        — L'Empire Ottoman étend désormais sur trois continents.
        — Selim se fait céder par le dernier descendant des Califes abbassides de Bagdad réfugié au Caire, le titre de « Commandeur des Croyants » ou « Amir el-Mouminîn ».
        — Il devient aussi le Protecteur des Lieux Saints de l’Islam ( La Mecque, Médine) et maître des grandes capitales historiques : Damas, Le Caire. Bagdad (1534).
        — Face à la Chrétienté, le Sultan de Constantinople est désormais le champion de l'Islam Orthodoxe.

        EXPANSION TURQUE EN AFRIQUE DU NORD


        — En 1518, Khaïr ed-Dîn, maître d'Alger, se place sous la suzeraineté du Sultan : Le Maghreb (moins le Maroc), devient l'aile gauche d'un vaste dispositif dont la Crimée constitue la droite.
        — En Méditerranée occidentale la prise du Pegnon par Khaïr ed-Dîn (1529) donne à la piraterie un nouvel essor. A partir d'Alger, les corsaires ravagent périodiquement les côtes d'Espagne, d'Italie, de Sicile et de Sardaigne.
        — La lutte contre les Turcs d'Alger devient une des préoccupations importantes de Charles-Quint ; son expédition de 1541 s'inscrit dans ce cadre.
        — La maîtrise du bassin occidental appartient cependant aux marines chrétiennes.


        CONQUÊTE DE LA HONGRIE

        — Les Turcs, installés en Europe Centrale reprennent leur marche sur l'ouest. Ils s'emparent de Belgrade en 1521.
        — La succession de Hongrie laissée vacante par le décès de son souverain mort sans enfant, oppose irréductiblement l'Empire Germanique et la Puissance Ottomane.
        — Les `Hongrois écrasés à Mohacs (1526) sur le Danube, passent pour un siècle et demi sous la domination turque. Soliman entre à Bude la même année ; il contrôle les deux tiers de la Hongrie.
        — En 1530, il assiège Vienne, sauvée par l'indiscipline des Janissaires.
        Ferdinand, frère de Charles-Quint, doit bientôt verser au Sultan un tribut annuel de 30.000 ducats pour le morceau de Hongrie qu'il a pu conserver.



        EN MÉDITERRANÉE ORIENTALE

        Le même duel se poursuit entre la Chrétienté et l'Islam.
        Quelques étapes de l'établissement de l'hégémonie ottomane :
        — 1522. Les Turcs délogent de Rhodes, les Chevaliers de Saint-Jean que Charles-Quint installe à Malte. Devenus désormais les Chevaliers de Malte, ils poursuivent la lutte contre les Ottomans, les rançonnent et les vendent comme esclaves aux chiourmes européennes.
        — 1537. Les Ottomans enlèvent aux Vénitiens leurs possessions de Mer Égée (Cyclades), et attaquent Corfou l'année suivante.
        — 1535. Le corsaire turc Dragut occupe Tripoli et connaît une fortune semblable à celle des Barberousse ; il finit même par s'emparer du Sud tunisien.
        — Le désastre espagnol devant Djerba en 1560, le siège de Malte par les Turcs en 1565 évoquent la continuité et l'âpreté de la lutte.
        — Un fait essentiel à mettre en relief : l'intérêt constant porté par Charles-Quint et ses successeurs à La Goulette (sur le lac de Tunis),
        - poste de guette à la sortie du bassin occidental de la Méditerranée,
        - complément nécessaire de Naples, la Sicile, Malte, sentinelles avancées de l'Empire.
        Ainsi s'explique le protectorat espagnol sur les Hafsides, « clients » des Rois Catholiques
        — Dans le tiers du XVIème siècle, le même combat se poursuit d'un bout à l'autre de la Méditerranée
        - 1569-70. Les Maures de Grenade, poussés à bout par l'Inquisition se révoltent.
        - 1570. Les Ottomans prennent Chypre aux Vénitiens.
        - Sur l'initiative eu Pape, une Ligue contre le Turc se constitue avec l'Espagne et Venise.
        -La coalition détruit la flotte Turque dans le golfe de Lépante (1571) :
        Cette victoire eut un retentissement considérable dans la Chrétienté ; mais elle ne fut pas exploitée. L'Empire Ottoman ne subit aucune diminution territoriale et reconstruisit bientôt sa flotte.
        - 1573. Don Juan d'Autriche - le vainqueur de Lépante - s'empare de Tunis. Succès éphémère : Les Turcs enlèvent définitivement la ville en 1574.


        CONCLUSION :

        L'Empire Ottoman est devenu l'héritier de l'Empire Arabe, et de l'Empire Byzantin.
        — L'autorité du Sultan de Constantinople s'étend du Danube aux rives du Don, de la Moulouya(Maroc), à la première cataracte du Nil et à l'Euphrate.
        — La Mer Noire, la Mer Égée, le bassin oriental de la Méditerranée, sont des lacs turcs.
        — Venise conserve encore la Crête, mais son éviction marque le triomphe de l'Islam, et la ruine de la marine chrétienne en Méditerranée orientale.
        — En Méditerranée occidentale, l'Espagne qui a perdu la plupart de ses places fortes, conserve seulement Melilla, Mers el-Kébir : la fin du XVIème siècle consacre la faillite de sa politique africaine.
        — En Europe centrale, les Ottomans installés à mi-chemin entre Constantinople et Paris demeurent des voisins inquiétants pour la Maison d'Autriche.

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        • #5
          SOLIMAN LE MAGNIFIQUE ET FRANÇOIS 1er
          LES CAPITULATIONS

          — Après le désastre de Pavie (1525), François 1er, surmontant les préjugés de ses contemporains, inspiré par la nécessité de s'appuyer sur une flotte capable de lutter contre les Espagnols en Méditerranée, recherche l'alliance turque.
          « En l'an de Jésus 1535 », et de « Mahomet 941 », Soliman concède à la France un certain nombre d'avantages commerciaux, dont le texte a reçu le nom de « Capitulations ».
          - Des articles concernant :
          - les prérogatives commerciales des négociants français au Levant,
          - des garanties d établissement telles que,
          - le droit de pratiquer librement leur religion,
          - d'être jugés par leurs consuls - au civil et au criminel,
          - de rentrer en France et de léguer leurs biens à leurs parents.
          — Ces garanties pouvaient s'appliquer aux autres Chrétiens désireux de commercer avec les Turcs et qui acceptaient de se placer « sous la bannière du Roi de France ».
          — De plus. le Sultan autorisait « l’empereur de France » à châtier les pirates d'Alger et de Tunis qui attaqueraient les navires français.

          RÉSULTATS DES CAPITULATIONS

          Les historiens en discutent :
          — François 1er s'aliéna l'opinion du monde chrétien, sans aboutir à une authentique collaboration franco-turque contre Charles-Quint.
          — A noter cependant en 1543 l'intervention de la flotte algérienne de Khaïr ed-Dîn aux côtés des escadres de François 1er, contre Nice, possession du Prince de Savoie, allié de Charles-Quint, et son séjour de 6 mois à Toulon.
          — L'exterritorialité accordée aux sujets français dans l'Empire Ottoman se justifiait par le fait que la loi coranique n'était pas applicable aux non musulmans, les Turcs abandonnaient l'administration des communautés étrangères à leurs chefs religieux, responsables devant eux.
          — La situation privilégiée de la France dans l'Empire Ottoman contribua à la prospérité de Marseille.
          — Quoi qu'il en soit, l'intérêt que les successeurs de François 1er porteront au renouvellement des Capitulations, montre assez l'importance qu'ils accordaient à ces traités.

          Commentaire


          • #6
            AUX XVIIe et XVIIIe SIÈCLES.
            PREMIÈRES DIMINUTIONS TERRITORIALES : La Hongrie et le Littoral de la Mer Noire
            UNE COMPENSATION : La Conquête de la Crête

            De la mort du Soliman à la fin du XVIIème siècle, les Ottomans sont en lutte,
            - avec l'Autriche qui leur dispute la Hongrie et
            - avec la Russie. pour la possession du littoral de la Mer Noire.

            LES AUTRICHIENS EN HONGRIE :

            — Cent ans après Lépante. Autrichiens et Polonais vivent sous la menace ottomane ; en Allemagne on sonne chaque jour le tocsin aux Turcs.
            — 1664 : Défaite des Ottomans au Saint-Gothard, (sur le Raab, affluent du Danube), la victoire la plus importante des Chrétiens sur les Turcs depuis 300 ans ; un contingent français y participe.
            — Le potentiel turc n'est cependant pas entamé ; et dix neuf ans plus tard. Mohammed IV vient encore assiéger Vienne (1683).
            — 1684 : Une coalition groupe l'Autriche, la Pologne, la Russie, Venise contre le Turc.
            — 1686 : Les Ottomans abandonnent Bude.
            — 1688 Ils perdent Belgrade et se retirent jusqu'à la Save et au Danube.

            CONSÉQUENCES :

            Libérée des Ottomans, la Hongrie passe aux Autrichiens.
            Pour les Habsbourg, c'est ici fin du cauchemar turc.
            — Les traités de la fin du XVIIème siècle et du début du XVIIIème siècle consacrent cette rupture d'équilibre au profit de l'Europe :
            — Karlowitz (1699) : Hongrie et Croatie sont annexées par l'Autriche.
            - Le tribut payé par l'Empire germanique et la Pologne est supprimé.
            - Le Sultan reconnait au souverain autrichien le titre d'Empereur que ses prédécesseurs avaient toujours refusé à Charles-Quint.
            - Pour la première fois, deux puissances chrétiennes ont servi de médiatrices : l'Angleterre et la Hollande.
            - Passarowitz(1718) : l'Autriche poursuit son expansion aux dépens de l'Empire Ottoman.
            - Elle annexe : la Valachie occidentale ;
            - Une bande de territoire serbe.
            - Belgrade devient autrichienne.

            LES RUSSES EN MER NOIRE

            — Dès le XVIème siècle, le prince Ivan (le Terrible) ouvrait à son pays la route de la Caspienne, par la prise de Kazan, Astrakhan.
            — Cependant la Baltique restait fermée par la Suède et la Pologne ; la Sibérie n'aboutissent qu'aux mers arctiques, la Mer Noire était contrôlée par les Turcs.
            — Pierre le Grand occupa Azov pendant quelques années (1696-1711).
            — Catherine II, poursuivant la même politique, obtint du Sultan Adbul-Hamid le littoral de la Mer d'Azov (traité de Kaïnardji 1774).
            — Le successeur d'Abdul-Hamid, Selim III dut abandonner aux Tsars toute la côte septentrionale de la Mer Noire, du Dniestr au Kouban (traité de fassi 1792) ; ces deux fleuves servant de frontières aux deux Empires.


            EN MÉDITERRANÉE ORIENTALE :

            Les Ottoman compensent leurs échecs sur le continent par la conquête de la Crête, dernière position de Venise dans le bassin oriental.
            — La prise de sa capitale Candie en 1669 mit fin à un siège de 25 ans. C'est l'un des événements importants du siècle.
            — Mazarin, puis Louis XIV avaient envoyé un contingent français et une flotte qui participèrent à la défense de l'île.

            CONCLUSION :

            — A la fin du XVIIIème siècle, l'Empire Ottoman est toujours une très grande puissance ; mais il a cessé d'être un péril pour l’Europe. Le Grand Turc devient « l'Homme malade » ont chacun convoite l'héritage. De plus, l’État Ottoman dont la structure n’a guère varié, donne des signes de faiblesse.

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            • #7
              LOUIS XIV ET L'EMPIRE OTTOMAN

              Après la mort de François 1 er, les guerres de religion paralysent la politique orientale de la France. Henri IV, puis Richelieu et le Père joseph, songent à l'union de l'Europe contre le Turc. Louis XIV, partagé entre l'esprit de croisade et les projets plus réalistes de Colbert, a d'abord été séduit par ce rôle de libérateur que lui prêtait le catholicisme militant. L'ouvrage du Père Dan que nous citons, traduit ce courant d'opinion.
              La Paix entre Venise et la Porte, signée le 6 Septembre 1669, mettait fin à la guerre de Crête. Elle permit au Roi d'amorcer un rapprochement avec « le Grand Seigneur » de Constantinople. D'autre part, les vues de Colbert touchant le développement du commerce avec les Échelles du Levant.
              Son désir de détourner vers la Mer Rouge et Alexandrie le commerce de l’Inde qui enrichissait Anglais et Hollandais, impliquaient un accord ottoman. Quant aux Turcs, ils avaient assez peu apprécié la participation française à la bataille du Saint-Gothard à la défense de Candie (Crête) et l'activité des Chevaliers de Malte, Français en majorité. Un envoyé du Sultan est reçu à la Cour en 1669, sans résultat. Cependant, le cérémonial quelque peu fantaisiste de sa réception par M. de Lyonne aurait inspiré à Molière les « Turqueries » du Grand Mamamouchi dans le Bourgeois gentilhomme.
              En 1673, le Sultan renouvelle les Capitulations. Leurs clauses sont particulièrement avantageuses pour la France ; elles stipulent en effet :
              - une diminution des taxes de douane, ramenées de 5 à 3% pour les marchandises importées par l'Empire Ottoman,
              - la reconnaissance à la France de la protection des religions des autres nations.
              A partir de 1688, début de la guerre de la Ligue d'Augsbourg, les preuves de la fin du règne contribuèrent à rapprocher le Roi de France et le Sultan de Constantinople qui trouvait de nombreux sujets d'inquiétude tant en Europe Centrale qu'en Mer Noire.

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              • #8
                ORGANISATION ADMINISTRATIVE DE L'ÉTAT OTTOMAN AU XVIII SIÈCLE

                Le type du gouvernement absolu.
                Tout était entre les mains du souverain : la vie et les biens de ses sujets.

                LE GOUVERNEMENT :

                LE SULTAN était à la tête de l’État. C’était un chef à la fois religieux et militaire. Il vivait à Constantinople au milieu d’une Cour nombreuse et brillante, semblable à celle des empereurs byzantins.

                LE GRAND VIZIR et ses auxiliaires assistaient le souverain. Le Grand Vizir exerçait 1e pouvoir effectif. Il était le dépositaire des sceaux. A ce poste périlleux, le Vizir ne survivait pas à un échec, et le Sultan pouvait prendre ombrage de ses réussites. En deux siècles, sur 66 vizirs, 15 ont péri de mort violente.
                LE DIVAN, aux côtés du Sultan et du Grand Vizir, était une Assemblée de hauts dignitaires, présidée soit par le Sultan dissimulé derrière une fenêtre grillagée, soit par le Grand Vizir.

                Le Divan était à la fois :
                - un Conseil des Ministres,
                - un Conseil d'État,
                - une Haute Cour de Justice.

                Après le Grand Vizir, le Mufti était le second personnage de l’État, interprète suprême de la loi religieuse.
                Le siège du Gouvernement s'appelait : al-Bâb al-‘Ali la Sublime Porte pour les Français, l'Excelse Porte pour les Anglais.
                Quant au Sultan, il était pour les Occidentaux, le Grand Seigneur ou le Grand Turc.

                L'ADMINISTRATION
                COMMENT ELLE ÉTAIT CENTRALISÉE.

                L'Empire était divisé en provinces administrées par des Beylerbeys, (Beys des beys), sortes de gouverneurs généraux. On comptait les Beylerbeys d'Anatolie pour l'Asie, de Roumélie pour l'Europe (Roum Ili, pays des Grecs), et enfin un Beylerbey pour l'Afrique du Nord. Khaïr ed-Din fut le premier titulaire de ce poste, et ‘Euldi ‘Ali le dernier.
                Chaque province était divisée en unités administratives plus petites, administrées par des Beys (du vieux turc Beg). Beylerbeys et Beys portaient également le titre de Pachas. Ils achetaient leur charge pour un an : cette mesure, peu favorable à une bonne administration, stimulait chez les hauts fonctionnaires le désir de s'enrichir rapidement.

                SES MÉTHODES.

                La corruption était de règle à tous les étages : rôle important du «bakchich ». Aux populations , les Turcs laissaient leur religion, leur langue nationale, leurs coutumes particulières, leurs chefs élus. Ils avaient surtout des préoccupations d'ordre fiscal et militaire.

                RECRUTEMENT DU PERSONNEL DE L'ÉTAT.

                Le plus cosmopolite qui soit : il était recruté parmi toutes les nationalités de l'Empire : Grecs, Serbes, Croates. Bulgares, Albanais, Valaques, Transylvains, Hongrois, Tartares. Mongols. Circassiens, Géorgiens, Kurdes, Persans, Syriens, Arabes, Contes, Berbères, Nègres. Russes. Polonais, Bohémiens, Allemands, Italiens, Français, Espagnols. Fonctionnaires et soldats étaient levés parmi les jeunes gens des communautés chrétiennes par des commissions qui siégeaient à date fixe. Des établissements spéciaux leur donnaient la formation nécessaire. Privés de vie familiale ils étaient unis par un esprit de corps très puissant. La conversion venait avec la situation acquise : Ainsi s'est formée la classe des grands renégats, bâtisseurs de l'Empire.

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                • #9
                  LA RELIGION ET L'ARMÉE. BASES DE L'AUTORITÉ DU SULTAN

                  LA RELIGION.

                  Le Sultan est le Chef suprême de l'Islam Orthodoxe. Selim (1512-1520) avait pris le titre de « Khalîfa Rasûl Allah », Vicaire de l'Envoyé de Dieu, c'est-à-dire du Prophète, et aussi celui d'« Amîr el-Mouminîn » (Commandeur des Croyants). L'Islam Sunnite , c est-à-dire orthodoxe, forme bloc, d'une part face au Chi ' isu1e, et d'autre part face à la Chrétienté. Le spirituel et le temporel, le civil et le religieux sont étroitement liés. Les juristes interprètes la loi religieuse dont le Sultan n'est que l'exécuteur suprême. Il ne fait d'ailleurs que des règlements d'administration publique ou Kanouns (mot tiré du grec canon). Soliman (1520-1566), dit le Magnifique en Occident, est surnommé le Kanouni, le Législateur.

                  LE CLERGÉ.

                  Mot à ne pas prendre dans son sens occidental. Il s'agit des juristes et docteurs de la Loi ou Ulémas (de l'arabe ‘ulamâ pluriel de ‘âlim, docte, savant). Le clergé a la garde et l'interprétation de la Loi, ainsi que la charge de l'instruction et de l'assistance publiques. Il possède ses biens et ses ressources propres. A la tête des Ulémas dans chaque province, est placé un Mufti, « il ne prend pas lui-même de jugements, mais délivre des consultations juridico-religieuses, (fetoua), d'après lesquelles les juges rendent leurs sentences. »
                  Celui de Constantinople avait, depuis Mohammed II,la prééminence sur ceux des autres provinces, il donnait son avis dans certaines circonstances graves (guerre, punition d'un Ministre...) et il avait le privilège de ceindre le sabre d'Osman au nouveau souverain.

                  CONCLUSION.

                  Malgré leur importance et leur grande influence, les agents du culte n'ont pas d'autorité propre dans l'État, et ils ne peuvent jouer le rôle de l'Église en Europe à la même époque. On verra même un Grand Mufti mis à mort par le Sultan.

                  L'ARMÉE.

                  C'est « la religion en marche ». Elle fait corps avec l'État : Le Sultan en est le chef suprême, les Ministres y ont un grade, le Gouvernement la suit dans ses déplacements.
                  Cependant au XVIIIème siècle, Les Janissaires n'étaient plus exactement « les moines guerriers » d'autrefois, ils se mariaient, pouvaient ouvrir boutique, leurs rangs étaient ouverts à leurs enfants et aux éléments troubles de la population. Ils prétendaient régenter l'État et devinrent un obstacle à toute réforme.
                  En 1826 , le Sultan Mahmoud (1808-1830) les fit massacrer jusqu'au dernier. Les Spahis étaient entretenus sur les revenus de domaines concédés par l'État, au XVIIIème siècle, ces fiefs n'étaient pas toujours distribués à des soldats, mais à des courtisans et à des fonctionnaires. Les véritables spahis eux-mêmes pouvaient se racheter par une contribution.

                  L'Artillerie.

                  la meilleure d'Europe pendant longtemps, sous la direction de maîtres allemands et hongrois, était surclassée par celle des puissances européennes. La décadence de l'Empire Ottoman fut liée à l'affaiblissement de son armée, instrument de sa politique d'expansion permanente.

                  CONCLUSION :

                  L'État Ottoman, était un État militaire musulman. Son centralisme administratif très poussé lui a permis de durer malgré son immense étendue, la diversité des populations, et les convoitises européennes.

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                  • #10
                    XIX et XX° SIÈCLES.
                    LE DÉMEMBREMENT DE L'EMPIRE OTTOMAN EST ACHEVÉ PAR :
                    LES NATIONALITÉS DANS LES BALKANS,
                    LA COLONISATION EUROPÉENNE EN AFRIQUE,
                    LA RÉVOLTE DES PROVINCES ARABES AU MOYEN ORIENT.

                    Au Congrès de Vienne (1815), les Ottomans perdent la Bessarabie, déjà cédée au Tsar Alexandre depuis 1812, à la veille de la campagne de Russe.

                    LES NATIONALITÉS.

                    En Europe comme en Amérique, l'idée de l'indépendance et du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes se développe. Serbes, Grecs. Roumains. Bulgares, à qui les Turcs ont d'ailleurs laissé leur langue, leur religion et leur culture nationale, vont se constituer en nations indépendantes.
                    Les Serbes se révoltent en 1804 sous la conduite de Kara-Georges, ancien sous-officier de l'armée autrichienne. Ils sont écrasés par les Turcs, à la faveur de la trêve conclue avec Alexandre moyennant la Bessarabie. Un nouveau soulèvement (1815), dirigé par un porcher, Michel Obrénovitch, aboutit à une semi autonomie. Les Grecs secouent la tutelle ottomane en 1820. S' ils ont la sympathie de l'Europe, Metternich voit en eux des rebelles.

                    La flotte ottomane est défaite à Navarin (1827) par les escadres russe, française, anglaise. L'indépendance de la Grèce est proclamée à Andrinople (1829), ainsi que celle de la Serbie et des Provinces roumaines. La Roumanie unifiée, Bulgarie, le Monténégro conquièrent également leur indépendance, reconnue au Traité de Berlin (1878).

                    LA COLONISATION :

                    Le 5 juillet 1830, Alger est occupée par l'armée française, les Janissaires sont rembarqués quelques jours après pour l'Asie mineure. Dans la deuxième moitié du XIXème siècle, la Tunisie, l’Égypte, la Tripolitaine et les îles du Dodécanèse passent sous le contrôle de la France, de l'Angleterre et de l'Italie

                    LA RÉVOLTE DES PROVINCES ARABES

                    La première guerre mondiale achève cette désagrégation par la révolte des pays arabes qui donne naissance à de nouveaux États : Irak, Syrie, Liban. Palestine, Transjordanie (carte 9). Les deux protagonistes de la révolte armée sont l'émir Fayçal (plus tard roi d'Irak), et le fameux Lawrence.

                    LE CRÉPUSCULE DE L'EMPIRE - INSTAURATION D'UN ÉTAT NATIONAL TURC :

                    Tout au long du siècle, chacun prévoyait la fin prochaine de l' « homme malade », le jeu complexe des rivalités européennes autour de la succession porte le nom de « Question d'Orient. » L'Empire Ottoman, réduit à Constantinople et sa banlieue en Europe, et à l'Anatolie en Asie, par le Traité de Sèvres (1920), rompit alors avec son passé et s'engagea dans une voie nouvelle par:
                    - la proclamation de la République. (1923).
                    - la suppression du Califat (3 mars 1924),
                    - la laïcisation de l'État, l'abandon de l'alphabet arabe.
                    - et l'interdiction du voile.
                    La Turquie renonçait ainsi à la direction spirituelle du Monde Musulman.

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                    • #11
                      LE MAGHREB A LA FIN DU XVe Siècle

                      Les trois royaumes héritiers de l'Empire Almohade vont connaître des moments décisifs.

                      EN TUNISIE

                      Le Royaume Hafcide reste puissant. Cependant, le sud du pays, en proie aux nomades, échappe au Sultan de Tunis.
                      Dans le courant du XVIème siècle les Hafcides affaiblis vont devenir des clients ces Rois « Très Chrétiens ». Dynastie Hafcide et domination espagnole finiront en même temps sous les coups des Turcs.

                      A TLEMCEN

                      L'ancien Royaume Abd el-Wâdide connaît un sort à peu près semblable.
                      D'abord protectorat espagnol (1511), il passera aux Turcs en 1551.

                      AU MAROC

                      Émietté en une poussière de tribus, de nouvelles forces prennent naissance sur les débris du pouvoir : confréries, zaouïas. chérifs, marabouts, etc. .
                      Leur développement sera favorisé par l'exaltation du sentiment religieux, consécutive aux conquêtes portugaises et espagnoles.

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                      • #12
                        LA CROISADE ESPAGNOLE - SES CONSÉQUENCES

                        LES CONQUÊTES

                        Après la prise de Grenade (1492), les Espagnols ont pratiquement terminé la reconquête de leur pays sur les Musulmans qu'ils poursuivent en Afrique.
                        Dès 1497, ils s'emparent de Melilla et en 1505, le Cardinal Ximénès entre dans Mers el-Kébir. En 1509, ils sont à Oran et Pedro Navarro enlève Bougie et Tripoli en 1510.
                        Devant ces succès, Alger reconnaît la souveraineté de Ferdinand le Catholique et lui cède l'un des îlots situés au Nord Ouest de la ville et qui ont contribué à lui donner son nom arabe : El-Djezaïr : les îles.
                        Les Espagnols transforment cet îlot en forteresse : Le Peñon, et contrôlent ainsi le mouvement des navires. Les corsaires doivent alors haler leurs bateaux sur la plage de Bab el-Oued, à un mille à l’ouest d'Alger.



                        A LA MORT DE FERDINAND, ALGER APPELLE LE CORSAIRE AROUDJ (1516).

                        Les Algérois estiment en effet que la mort du souverain espagnol met fin à leur vassalité à l'égard de l'Espagne. Pour venir à bout du Peñon, « cette épine placée dans leur cœur » ils appellent le corsaire Aroudj ou Baba Aroudj. Selon les chroniqueurs, c'était le fils d'un spahi en retraite installé comme potier dans l'île de Mytilène (l'antique Lesbos). Ses exploits contre les Espagnols lui avaient valu une certaine célébrité :
                        - pratique de la piraterie au service du Sultan de Tunis, à partir de Djerba (depuis 1504 probablement), puis La Goulette,
                        - siège de. Bougie (1512).
                        - prise de Djidjelli d'où il ravageait les côtes d'Espagne et d'Italie,
                        - assistance aux Musulmans espagnols qui gagnaient l'Afrique du Nord.

                        ALGER TROUVE EN AROUDJ, UN MAÎTRE QUI VA COMMENCER SA PUISSANCE :

                        S'il ne parvient pas à s'emparer du Peñon, Aroudj s'installe solidement à Alger et procède à quelques exécutions. Il étrangle de ses propres mains le « Roi d'Alger » Selim qui l'avait appelé, puis exécute à Cherchell un de ses anciens camarades, corsaire comme lui ; un rival éventuel est ainsi supprimé. Aroudj s'empare ensuite de Tlemcen dont il chasse le souverain, fuyant la ville assiégée par les Espagnols et poursuivi par les troupes d’Oran, il meurt les armes à la main près de Rio Salado (1518). Il était parvenu à établir son autorité sur la Mitidja, la Vallée du Chélif, le Titteri (Province de Médéa), l'Ouarsenis.




                        L'ŒUVRE DE KHAÏR ED-DIN, CORSAIRE ET HOMME D'ÉTAT

                        L'oeuvre de Khaïr ed-Dîn, frère et successeur de Aroudj est caractérisée par :
                        — L'inclusion du Maghreb dans l'Empire Ottoman, et sa participation au « concert européen ».
                        — La prise du Peñon, la création du port d'Alger et le nouvel élan donné à la guerre de course.
                        — L'organisation administrative de la Régence.

                        LE MAGHREB INTÈGRE A L'EMPIRE OTTOMAN :

                        Pour venir à bout des résistances locales, et des intrigues espagnoles. Khaïr ed-Dîn, se place sous la suzeraineté du Sultan de Constantinople (1518).
                        Il en obtient le titre de Beylerbey, 2.000 Janissaires et de l'artillerie.

                        Rappelons que depuis 1517, l'Empire Ottoman' s'était déjà agrandi de l'Égypte et de la Syrie.

                        PRISE DU PEÑON ET CONSTRUCTION DU PORT (1529)

                        Le Peñon fut emporté après trois semaines de bombardement ; son gouverneur, Martin de Vargas, capturé, mourut sous le bâton. Une jetée relia les récifs d'El-Djezaïr à la côte : le port d'Alger était créé . Cet abri relativement sûr devait « donner une vive impulsion à la piraterie ». Pendant trois siècles, Alger allait défier l'Europe. Par sa position géographique il commande les communications dans le bassin occidental de la Méditerranée. De tous les corsaires, ceux d'Alger étaient les plus redoutés des bateaux navigant entre l'Espagne et l'Italie.

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                        • #13
                          UNE PUISSANTE RÉACTION ESPAGNOLE CONTRE ALGER
                          L'EXPÉDITION DE CHARLES-QUINT (1541)

                          Après avoir un moment guerroyé à Tunis (1534) et s'en être retiré devant l'intervention de Charles-Quint (1535). Khaïr ed-Dîn avait rejoint Constantinople (1541) avec le titre de Capitan Pacha, (Grand Amiral de la flotte ottomane).

                          Charles-Quint, irrité par les incursion des corsaires sur les côtes d'Espagne et d'Italie, et leurs relations avec François 1er à la suite des « Capitulations », réunit une flotte et une armée considérables : 65 galères, 7.000 hommes d'équipage, 451 transports, 29.000 soldats (allemands, italiens, espagnols). Le débarquement s'effectue avec succès sur la plage du Hamma à l'est d'Alger. L'Empereur espagnol investit la ville et plante sa tente sur la colline dite depuis du Fort l'Empereur. Cependant, une violente tempête comme il en souffle en automne sur les côtes d'Algérie disperse la flotte oui se réfugie à l'extrémité de la baie (Cap Matifou), et mouille les poudres. Après l'échec d'un premier assaut, il ordonne l'embarquement des débris de son armée (8 octobre 1541) et fait voile sur Bougie. Il a perdu 140 navires et 10.000 soldats. Cette résistance victorieuse vaut à la ville une solide réputation d'invulnérabilité. Cependant la lutte des deux grands Empires se poursuivra durant tout le siècle. Alger, Tunis, Tripoli, vont jouer leur rôle aux côtés de l'Empire Ottoman, dans la lutte gigantesque qui l'opposera aux successeurs de Charles-Quint.

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                          • #14
                            ORGANISATION DE L'ÉTAT DE LA RÉGENCE

                            A l'image de l'État Ottoman, c'est un « État gendarme », appuyé sur une milice.

                            BEYS - BEYLERBEYS - PACHAS ET DEYS.

                            Ces mots, que l'on rencontre à chaque page de l'Histoire des Régences d'Alger et de Tunis, méritent une explication préalable.
                            Les dignités qu'ils désignaient étaient particulières à l'Empire Ottoman ; certaines, devenues purement honorifiques, lui ont même survécu jusqu'en juillet 1952 dans les pays du Moyen Orient. La fortune de ces titres a été liée aux succès de ceux qui les ont imposés à la suite de révolutions de palais. Finalement, un Dey a régné sur Alger à partir de 1671 ; un Bey règne encore à Tunis.

                            D'après l'Encyclopédie de l'Islam, et en simplifiant, on peut préciser que le mot Bey (Beg en langue turque), a fini par désigner « toute autorité au sens le plus large du mot, depuis le maire de village jusqu'au gouverneur de province ».
                            Les hauts gouverneurs de Roumélie (Turquie d'Europe). d'Anatolie (Turquie d’Europe) et d'Afrique du Nord portèrent le titre de Beylerbey (begler beg), équivalent de l'arabe Amîr al al-Umarâ ou Émir des Émirs :
                            Le premier Beylerbey d'Afrique septentrionale fut Khaïr ed-Dîn, et le dernier Euldj Ali (1587).
                            Le mot Dey, qui ;désigna les chefs de la Régence d'Alger, vers la fin du XVIIème siècle. « Semble avoir été appliqué à un officier subalterne de la Milice des Janissaires » .Quant au titre de Pacha, il était « le plus haut des titres officiels ». D'abord apanage des Beylerbeys et des Vizirs, il s'étendit aux fonctionnaires qu'on leur assimila, les gouverneurs de province en particulier Alger, Tunis, Tripoli, devinrent des Pachaliks lors de la suppression des Beylerbeys, et leur remplacement par des Pachas triennaux, à la fin du XVIème siècle. « Le titre de Pacha accompagnait obligatoirement le nom propre, comme les titres nobiliaires de l'Occident, mais à la différence de ceux-ci, il se plaçait après le nom ». Exemples : Bey Hassan Pacha ; Dey Ottoman Pacha.






                            LE GOUVERNEMENT : BEYLERBEY ET MINISTRES :

                            A la tête de la Régence, se trouvait une sorte de gouverneur (Beylerbey) nommé par le Sultan de Constantinople. Son autorité s'étendait sur Alger, Tunis. Tripoli, tandis que dans le reste de l'Empire Ottoman, deux autres Beylerbeys avaient la charge de l'Anatolie (Turquie d'Asie) et de la Roumélie (Turquie d'Europe).
                            C'est seulement en 1587, après la mort du Beylerbey Euldj Ali, devenu Grand Amiral de la flotte ottomane, que les Beylerbeys seront supprimés et remplacés par des Pachas triennaux.
                            Leurs attributions essentielles : la justice et les affaires de l'État. Le matin, le Beylerbey recevait les doléances de ses sujets, et tranchait les différends importants. L'après-midi, il s'entretenait avec les hauts fonctionnaires ou accordait des audiences aux représentants des puissances étrangères.
                            En politique étrangère, les Beylerbeys soutinrent la lutte contre les Espagnols, les Rois de Tlemcen et les Chérifs marocains, et appliquèrent les directives de Constantinople, même lorsqu'ils les désapprouvaient :
                            Exemples :
                            - Respect des navires français après les « Capitulations »,
                            - Concession à la France du monopole de la pêche du corail sur les côtes du Constantinois.
                            LES MINISTRES étaient choisis par le Beylerbey ; citons parmi les principaux :

                            Le Khasnadji ou préposé au Trésor,
                            L'Agha ou général en chef de l'Armée de terre,
                            L'Oukil el-Khardj ou Ministre de la Marine,
                            Le Beït el-Maldji, Intendant de sa Maison,
                            Le Khodjat el-Khayl. Receveur des Tributs, dit « Secrétaire des Chevaux ».

                            Le Bey réunissait rarement ses ministres et communiquait avec eux par l'intermédiaire de l'interprète du Palais. Ils étaient assistés de secrétaires (Khodjas) et d'huissiers (Chaouchs). Jusqu'au début du XIXème siècle, les chefs de la Régence vécurent à Alger, dans la « Djenina » vaste ensemble de bâtiments et de jardins, limité par Dar Aziza, (l'Archevêché), Dar Hassan (Palais d'Hiver) et Dar Mustapha Pacha (Bibliothèque Nationale) et dont l'entrée se, trouvait dans l'actuelle rue Bab el-Oued.

                            UN CONSEIL D'OFFICIERS : LE DIVAN :

                            Comme à Constantinople, une assemblée assiste le Chef de l'État. Elle est composée de dignitaires de l'Armée. C'est parmi eux que le Bey choisit ses ministres. il n'est pas lié par les décisions du Divan qui garde un rôle consultatif.

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                            • #15
                              L'ADMINISTRATION

                              Conçue pour la répression des troubles, l'exploitation des populations.

                              DIVISIONS ADMINISTRATIVES :

                              Alger et ses environs sont placés sous l'autorité directe du Beylerbey et constituent le « Dar es-Sultan ». Le reste du pays est divisé en trois provinces ou Beyliks, à la tête de chacune d'elles, une sorte de Préfet ou Bey, nommé par le Chef de la Régence.
                              On distingue :
                              - Le gouvernement (ou Beylik) de l'Est : Capitale Constantine.
                              - Le gouvernement du Centre (Titteri) Capitale Médéa.
                              - Le gouvernement de l'Ouest (Oranie) : Capitales successives : Mazouna, Mascara, Oran (après 1791).

                              Chaque Beylik est divisé en cantons, (outân) administrés par des Caïds, dépositaires de tous les pouvoirs : civil, militaire et judiciaire. Ils veillent également à la mise en valeur des terres pour déterminer l'assiette de l'impôt et participer à sa perception. Les attributs de leur autorité : un sceau et un burnous rouge.

                              En outre, des Cheikhs (chefs de tribus), choisis parmi les familles les plus fidèles, assistent les Caïds.
                              Remarques : Dans leur province, les Beys se comportaient comme des souverains indépendants, mais il leur arrivait de se déplacer à Alger tous les deux ans pour rendre hommage et verser eux-mêmes les impôts ou denouche, qu'ils avaient collectés. A tous les échelons de la hiérarchie, la vénalité était de règle, et un « bakchich » bien placé « pouvait limiter les inconvénients de l'arbitraire ».

                              LA MACHINE FISCALE.

                              Chaque fonctionnaire préposé, répondait sur sa tête de la rentrée des impôts. Cependant le contribuable en payait beaucoup plus qu'il n'en rentrait dans les caisses de l'État. Des tribus vassales dites tribus makhzen, exemptes d'impôts, encadraient les populations indigènes et participaient à la levée des contributions. « Leur complicité répondait de leur fidélité ».

                              LA JUSTICE.

                              Comme dans le reste de l'Empire Ottoman, elle était rude et expéditive, et les châtiments exécutés séance tenante :
                              - la bastonnade pour la vente à faux poids le récidiviste était cloué par une oreille à la porte de sa boutique,
                              - les voleurs, les destructeurs de canalisations avaient le poignet droit sectionné et portaient la main coupée en sautoir,
                              - le bûcher dressé hors de la porte de Bab el-Oued punissait les relaps,
                              - les ganches de la porte Bab-Azoun sanctionnaient les délits les plus graves.

                              LES TURCS ET LES POPULATIONS

                              Les Turcs d'Alger ne se sont pas associés aux populations indigènes qu'ils dominaient. Il leur suffisait de bien les tenir en mains grâce aux garnisons de Janissaires installées aux points stratégiques. Elles assuraient aussi le contrôle des grandes routes : Alger-Oran, Alger-Cons-tantine, Alger-Médéa, ainsi que l'artère Alger-Aumale. Bou-Saada-Biskra qui commande le Sud.
                              Une politique subtile de pression sur les nomades permettait d'interdire à ces derniers l'accès aux pâturages du Tell. D'une façon générale l'autorité des Beylerbeys et de leurs successeurs ne s'est jamais exercée sur plus du sixième du territoire de la Régence d'Alger. Montagnards kabyles, Nomades des Hauts Plateaux vécurent dans une quasi indépendance. Les Turcs portaient d'ailleurs peu d'intérêt aux populations auxquelles ils demandaient seulement,
                              - de payer l'impôt,
                              - de ne pas entraver le passage des troupes, et surtout, de ne pas se mêler des affaires de l'État.
                              Sur le plan ethnique, les « Kouloughlis », nés de pères turcs et de mères indigènes, n'étaient pas considérés comme Turcs et ne bénéficiaient pas des privilèges attachés à cette qualité. Il en résulta de nombreuses révoltes.

                              LA MILICE DES JANISSAIRES OU ODJAQ

                              La Milice d'Alger, introduite dans la Régence à la suite de son rattachement à l'Empire Ottoman par Khaïr ed-Dîn, possédait les mêmes privilèges que ceux concédés aux janissaires du Sultan de Constantinople et comptait environ 15 000 hommes. C'était à la fois une armée, une garde prétorienne et un instrument de répression.
                              Recrutement
                              Les Janissaires ou Ioldachs étaient recrutés en Asie Mineure, parmi les populations les plus déshéritées. Cependant, débarqués à Alger ils se considéraient comme de « grand et illustres seigneurs ».
                              Durée du service
                              Le service était d'un an, suivi d'un congé d'égale durée, l'engagement se poursuivait ainsi tant que l'homme était valide. L'avancement se faisait à l'ancienneté, tout Janissaire pouvait prétendre parvenir aux grades les plus élevés. La solde était payée au Palais, devant le Bey assisté du Général en Chef de l'armée (Agha) et du Divan. Un changement de Bey, une fête importante, valaient aux janissaires, une augmentation de solde.
                              Logement . A Alger, les compagnies de Janissaires étaient réparties entre 7 casernes, Les Janissaires mariés pouvaient demeurer en ville. Rappelons que l'actuel Cercle militaire, près de l'Opéra d'Alger, occupe deux anciennes casernes de Janissaires, situées le long de l'ancien rempart Bab-Azoun. Dans les centres importants de l'intérieur de la Régence, comme Tlemcen, Médéa, Biskra, etc., des garnisons étaient installées. Les Janissaires des colonnes mobiles et des camps étaient chargés de la répression des troubles et de la perception des impôts.
                              Discipline
                              Chez ces soldats turbulents et pénétrés de leurs prérogatives, les révoltes étaient nombreuses. Les Janissaires renversaient alors la grande marmite de bronze autour de laquelle ils s'assemblaient aux repas, et se répandaient en ville. Cependant, soumis à une juridiction spéciale, ils ne relevaient que de leur: chefs ; les exécutions étaient secrètes.
                              Le Conseil des officiers de la Milice ou Divan, chargé d'abord de défendre les « intérêts corporatifs » des Janissaires, ne tarda pas à « faire de la politique » et à jouer auprès du Bey un rôle consultatif. En même temps, l'Agha de la Milice accrut son influence dans l'État.

                              Conclusion :

                              La Milice est le « second pilier » de l'État Algérien, par son recrutement et son organisation, elle se présente véritablement comme « un morceau de la Turquie lointaine qui s'est trouvé transporté en terre africaine » (Braudel).

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