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Piratage des œuvres culturelles : Un vil bradage

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  • Piratage des œuvres culturelles : Un vil bradage

    Le témoignage de dizaines d’artistes algériens, particulièrement des chanteurs et des réalisateurs de cinéma, à propos de la diffusion illicite de leurs produits par voie de piratage, ne peut guère laisser indifférents tous ceux qui tiennent en haute estime le rôle et la mission de l’industrie culturelle dans la dynamique de progrès de la société.

    À les entendre parler de leur abattement et de leur désespoir face à une entreprise qui a pris les dimensions d’une véritable industrie, on est fondé à s’alarmer devant le sort peu enviable auquel sont réduits les produits culturels dans notre pays, déjà malmenés auparavant par un manque d’égards de la part des pouvoirs publics à leur endroit et par la fluette place qu’ils tiennent aujourd’hui dans la société.

    Concurrencés déloyalement par tout ce que les multimédias modernes et l’Internet mettent à la disposition d’une jeunesse insuffisamment instruite aux valeurs culturelles de son pays, les productions culturelles algériennes subissent, depuis quelques années, un coup tordu qui peut leur être fatal, celui du piratage.

    Le phénomène de piratage des œuvres culturelles, auquel se greffe le vol des pièces archéologiques, y compris à l’intérieur des musées, signe solennellement le retrait, voire l’effacement de l’autorité publique dans le domaine de l’application de la loi.

    Révélatrice de la déliquescence de la culture dans notre pays et de l’état de non-droit dans lequel évolue le peu de production culturelle encore valable, la réaction de certains producteurs, particulièrement des chanteurs, a été l’abdication pure et simple face au monstre du piratage.

    Sur les étals des vendeurs à la sauvette, et même dans certains magasins attitrés, des MP3 et des DVD et DVIX sont exposés à la vente sans crainte d’aucune autorité.

    Pire encore, nous avons assisté à des scènes où des policiers se sont approvisionnés de ces étalages en films algériens (une douzaine gravés dans des DVD). La radio chaîne II a rapporté de multiples témoignages de chanteurs kabyles réduits à gagner leur pain exclusivement de galas, lorsque, bien sûr, la possibilité leur en est offerte. Nous avons ici affaire à une politique du “fait accompli” qui ne semble déranger que les producteurs.

    Les gestionnaires du domaine de la culture, les hommes politiques et le monde associatif ne se sont pas signalés par leur implication dans une entreprise qui relève pourtant de la sauvegarde de notre culture dans toutes ses variantes. La situation de déréliction dans laquelle plonge ainsi l’industrie culturelle algérienne est portée à son pinacle par la nouvelle technologie de compilation, de téléchargement et de toute forme de copie numérique non soumise au contrôle. Ce qui rend possible la compression dans un seul disque des centaines de titres de chansons ou des heures de bande vidéo, le tout vendu au rabais (entre 100 et 120 dinars); alors que certains artistes algériens subissent des coups du sort (maladies, déchéance sociale) dans un terrible anonymat. On a poussé le bouchon jusqu’à faire circuler des disques de chanteurs kabyles qui n’avaient jamais mis en vente leurs produits, à l’exemple de Medjahed Hamid. La radio et l’ONDA sont supposés être les seuls dépositaires de ces produits. Et pourtant!

    Le marché illicite des produits artistiques a touché même les documents photographiques de chanteurs et de sportifs, sans qu’une quelconque association ou fondation (à l’exemple de la fondation Matoub Lounès) en profitent. C’est là un marché qui rejoint la grande foire de l’économie parallèle; avec cette énorme différence, qu’il s’agit ici de la mémoire et de l’âme de tout un peuple, qui ne méritent pas ce vil bradage.

    Amar Naït Messaoud- La Dépêche de kabylie
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