Journaliste tunisienne à Jeune Afrique, Frida Dahmani revient sur l'assassinat de la figure de l'opposition tunisienne, Chokri Belaïd. Elle nous parle des impacts de ce crime sur la Tunisie. Elle revient aussi sur le fait que cet assassinat peut être considéré plus comme un crime mafieux que politique dans la mesure où, selon elle, il ne profiterait à aucun parti politique tunisien. Appréciez...
L'Expression: Quel est le sentiment qui prévaut chez les Tunisiens après le meurtre de Chokri Belaïd?
Frida Dahmani: Le pays est en état de choc. Ce premier sang versé sur l'autel de la lutte politique révulse une opinion publique désormais habitée par la peur mais bien décidée à se battre jusqu'au bout pour défendre sa volonté de démocratie.
Même ceux qui ne sont pas du même bord que Chokri Belaïd s'insurgent contre cet acte odieux qui est à l'opposé des pratiques de la classe politique tunisienne.
À qui selon vous, profite cet ignoble assassinat?
A personne, du moins à aucune formation politique. Ennahda, suite à cet assassinat, a montré ses divisions et sera lourdement désavouée pour avoir incité à la haine, désigné, plusieurs fois, Chokri Belaïd, comme mécréant et dangereux agitateur.
Mais cette exécution a suscité une mobilisation de l'opposition et la constitution d'un large front démocratique, qui non seulement a adopté une feuille de route pour le salut de la nation, mais pèsera sur le devenir du pays.
Des sources proches du défunt affirment qu'il était en train de constituer des dossiers sur la corruption de dirigeants, qu'il allait publier sous peu. Son exécution peut être assimilée à un acte mafieux.
Outre la dissolution du gouvernement, quelles sont les répercussions politiques qu'induira cet assassinat?
La création de deux pôles antagonistes et l'implosion de la troïka. Cet événement redistribue les cartes et provoque la naissance de nouveaux équilibres politiques. Mais il est trop tôt pour affirmer que cette reconfiguration de la scène politique sera pertinente.
Pensez-vous que le changement de gouvernement va calmer la rue tunisienne?
Le changement ne va pas s'opérer dans la minute, il va devoir en premier suivre le processus prévu par la loi d'organisation des pouvoirs publics. Mais avant d'en arriver là, il est essentiel que le ministère de l'Intérieur rétablisse la situation sécuritaire dans le pays et cesse d'adopter la stratégie du deux poids, deux mesures où il est laxiste vis-à-vis des milices violentes, proches des islamistes et répressif par rapport aux démocrates.
En tirant des bombes lacrymogènes sur la foule qui accompagnait la dépouille de Chokri Belaïd à travers Tunis, les forces de l'ordre ont scandalisé l'opinion publique.
Enfin, comment voyez-vous l'avenir de votre pays après ce premier assassinat politique?
Le moment est très sensible, tout est en devenir et aucun pronostic ne peut être fait. Tout dépendra de la pondération des uns et des autres mais aussi de la volonté politique des islamistes. Ils ne peuvent nier qu'ils ont divisé le pays et engagé leur responsabilité dans les événements actuels.
Il faudra dans tous les cas de figure que les appels à la violence cessent ainsi que la stigmatisation des démocrates.
Walid AÏT SAÏD -L'Expression
L'Expression: Quel est le sentiment qui prévaut chez les Tunisiens après le meurtre de Chokri Belaïd?
Frida Dahmani: Le pays est en état de choc. Ce premier sang versé sur l'autel de la lutte politique révulse une opinion publique désormais habitée par la peur mais bien décidée à se battre jusqu'au bout pour défendre sa volonté de démocratie.
Même ceux qui ne sont pas du même bord que Chokri Belaïd s'insurgent contre cet acte odieux qui est à l'opposé des pratiques de la classe politique tunisienne.
À qui selon vous, profite cet ignoble assassinat?
A personne, du moins à aucune formation politique. Ennahda, suite à cet assassinat, a montré ses divisions et sera lourdement désavouée pour avoir incité à la haine, désigné, plusieurs fois, Chokri Belaïd, comme mécréant et dangereux agitateur.
Mais cette exécution a suscité une mobilisation de l'opposition et la constitution d'un large front démocratique, qui non seulement a adopté une feuille de route pour le salut de la nation, mais pèsera sur le devenir du pays.
Des sources proches du défunt affirment qu'il était en train de constituer des dossiers sur la corruption de dirigeants, qu'il allait publier sous peu. Son exécution peut être assimilée à un acte mafieux.
Outre la dissolution du gouvernement, quelles sont les répercussions politiques qu'induira cet assassinat?
La création de deux pôles antagonistes et l'implosion de la troïka. Cet événement redistribue les cartes et provoque la naissance de nouveaux équilibres politiques. Mais il est trop tôt pour affirmer que cette reconfiguration de la scène politique sera pertinente.
Pensez-vous que le changement de gouvernement va calmer la rue tunisienne?
Le changement ne va pas s'opérer dans la minute, il va devoir en premier suivre le processus prévu par la loi d'organisation des pouvoirs publics. Mais avant d'en arriver là, il est essentiel que le ministère de l'Intérieur rétablisse la situation sécuritaire dans le pays et cesse d'adopter la stratégie du deux poids, deux mesures où il est laxiste vis-à-vis des milices violentes, proches des islamistes et répressif par rapport aux démocrates.
En tirant des bombes lacrymogènes sur la foule qui accompagnait la dépouille de Chokri Belaïd à travers Tunis, les forces de l'ordre ont scandalisé l'opinion publique.
Enfin, comment voyez-vous l'avenir de votre pays après ce premier assassinat politique?
Le moment est très sensible, tout est en devenir et aucun pronostic ne peut être fait. Tout dépendra de la pondération des uns et des autres mais aussi de la volonté politique des islamistes. Ils ne peuvent nier qu'ils ont divisé le pays et engagé leur responsabilité dans les événements actuels.
Il faudra dans tous les cas de figure que les appels à la violence cessent ainsi que la stigmatisation des démocrates.
Walid AÏT SAÏD -L'Expression
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