Des dizaines d’étudiants sans bac qui suivent des cours d’université dans différentes filières, dont certains seraient déjà diplômés de leur fac… simulée ! Avec la connivence de responsables et d’enseignants universitaires.
Mais qu’est-ce qui a fait que ce diplôme, qui n’était ni contrefait ni vendu du temps où il représentait la garantie d’un minimum de connaissances et d’aptitude à l’assimilation du savoir, tombe, aujourd’hui que le taux de réussite “politique” l’a désormais mis à la portée du plus grand nombre de candidats, dans la sphère des trafics ?
En faisant des taux de réussite des examens nationaux l’expression du succès de la réforme scolaire, on s’était déjà contraint à une politique permissive en matière d’évaluation. Le populisme “subventionniste” finissant par altérer les examens et concours. Un populisme couronné par l’idée d’alléger le programme “examinable” des “terminales”. Il a fallu, en tout, instituer le “smig”, quitte à offrir partout du médiocre : logement, alimentation, transport, administration, santé, scolarité…
Ce faisant, tous les secteurs ont perdu de leur aura. L’ex-citoyen, devenu client, n’attache désormais plus de considération au document, devenu marchandise. En même temps que la déchéance frappait les grandes institutions sociales, la corruption se propageait dans le tissu social, jusqu’à atteindre des sanctuaires que l’on croyait intouchables, parce que sacrés.
“Qu’est-ce que acheter ou vendre un acte de naissance ?” Ainsi s’amorce le processus de pollution morale des institutions ! Après, on achète et on vend la carte grise, la carte militaire, puis… le permis de conduire, l’ordonnance médicale ! Et ensuite, des positions dans les listes électorales ! Au début, l’on appelait la contre-valeur monétaire de cette corruption ordinaire “el-kahoua” (le café) ou “tchipa” (un jeton)… pour mieux faire passer moralement et socialement la pilule. Et l’on continue à l’appeler ainsi. Pourtant, dans de plus en plus de cas, le niveau de trafic va bien au-delà de cette part de délinquance “acceptable” dans toute société.
Or, c’est le caractère incessible, extra-économique, qui fait le statut moral du document officiel. S’il s’achète et se vend, il perd de sa sacralité : l’on peut alors le maltraiter ou le contrefaire sans mesurer la gravité de sa profanation. Il suffit juste de voir certains de ces jeunes, plus aux soins avec leur “carte du Club-des-Pins” qu’avec leurs pièces d’identité, pour se faire une idée de ce renversement de la pyramide des valeurs : le prix et le signe d’appartenance statutaire comptent bien plus que la fonction et la symbolique nationale de l’objet !
Il n’y a pourtant pas longtemps, il fut une génération dont, ni le premier flirt, ni le premier voyage, ni le premier milliard ne constituaient l’évènement d'une vie ; c’était le jour de l’obtention, ou celui du ratage du bac, qui marquait à jamais les jeunes filles et garçons. Mais c’était avant, au temps d’une jeunesse qui croyait encore à la vertu de l’effort et à la légitimité du mérite, et pas à l’efficacité de la fraude.
Cette question vaut pour bien d’autres symboles d’État. Mais il faudra bien que nos responsables successifs répondent un jour, à cette question, car sa réponse, à elle seule, pourrait résumer un bilan de cinquantenaire : qu’avez-vous fait du baccalauréat ?
Mustapha Hammouche- Liberté
Mais qu’est-ce qui a fait que ce diplôme, qui n’était ni contrefait ni vendu du temps où il représentait la garantie d’un minimum de connaissances et d’aptitude à l’assimilation du savoir, tombe, aujourd’hui que le taux de réussite “politique” l’a désormais mis à la portée du plus grand nombre de candidats, dans la sphère des trafics ?
En faisant des taux de réussite des examens nationaux l’expression du succès de la réforme scolaire, on s’était déjà contraint à une politique permissive en matière d’évaluation. Le populisme “subventionniste” finissant par altérer les examens et concours. Un populisme couronné par l’idée d’alléger le programme “examinable” des “terminales”. Il a fallu, en tout, instituer le “smig”, quitte à offrir partout du médiocre : logement, alimentation, transport, administration, santé, scolarité…
Ce faisant, tous les secteurs ont perdu de leur aura. L’ex-citoyen, devenu client, n’attache désormais plus de considération au document, devenu marchandise. En même temps que la déchéance frappait les grandes institutions sociales, la corruption se propageait dans le tissu social, jusqu’à atteindre des sanctuaires que l’on croyait intouchables, parce que sacrés.
“Qu’est-ce que acheter ou vendre un acte de naissance ?” Ainsi s’amorce le processus de pollution morale des institutions ! Après, on achète et on vend la carte grise, la carte militaire, puis… le permis de conduire, l’ordonnance médicale ! Et ensuite, des positions dans les listes électorales ! Au début, l’on appelait la contre-valeur monétaire de cette corruption ordinaire “el-kahoua” (le café) ou “tchipa” (un jeton)… pour mieux faire passer moralement et socialement la pilule. Et l’on continue à l’appeler ainsi. Pourtant, dans de plus en plus de cas, le niveau de trafic va bien au-delà de cette part de délinquance “acceptable” dans toute société.
Or, c’est le caractère incessible, extra-économique, qui fait le statut moral du document officiel. S’il s’achète et se vend, il perd de sa sacralité : l’on peut alors le maltraiter ou le contrefaire sans mesurer la gravité de sa profanation. Il suffit juste de voir certains de ces jeunes, plus aux soins avec leur “carte du Club-des-Pins” qu’avec leurs pièces d’identité, pour se faire une idée de ce renversement de la pyramide des valeurs : le prix et le signe d’appartenance statutaire comptent bien plus que la fonction et la symbolique nationale de l’objet !
Il n’y a pourtant pas longtemps, il fut une génération dont, ni le premier flirt, ni le premier voyage, ni le premier milliard ne constituaient l’évènement d'une vie ; c’était le jour de l’obtention, ou celui du ratage du bac, qui marquait à jamais les jeunes filles et garçons. Mais c’était avant, au temps d’une jeunesse qui croyait encore à la vertu de l’effort et à la légitimité du mérite, et pas à l’efficacité de la fraude.
Cette question vaut pour bien d’autres symboles d’État. Mais il faudra bien que nos responsables successifs répondent un jour, à cette question, car sa réponse, à elle seule, pourrait résumer un bilan de cinquantenaire : qu’avez-vous fait du baccalauréat ?
Mustapha Hammouche- Liberté
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