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Libye 2011, syrie 2012, mali 2013, le temps des guerres, et des questions

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  • Libye 2011, syrie 2012, mali 2013, le temps des guerres, et des questions

    (1)

    Nous vivons un temps d’incertitudes, de situations complexes et manipulations des idées : la férocité la plus noire se prétend humanisme libérateur, l’impérialisme guerrier en quête de profits et de domination, se dit aide désintéressée aux plus faibles, l’idéologie la plus réactionnaire ou fasciste se déguise en moralisme religieux : Rien d’étonnant dans ce tourbillon des faits et des idées, si les esprits vacillent, nous ne sommes plus au temps de Stalingrad, où d’héroïques combattants rouges de la liberté luttaient pour libérer le monde de la férocité nazie. D’ailleurs, même en 1943, le bien et le mal étaient-ils toujours si simples à déceler pour nos aïeux d’il y a 70 ans ?

    Rien d’étonnant évidemment de constater avec quelle vigueur dirigeants de la droite française et du PS sont pareillement interventionnistes au Moyen Orient, et en Afrique : depuis Guy Mollet, Lacoste et Mitterrand, le parti des socialistes français a toujours soutenu, sinon organisé, les guerres coloniales et la torture en guerre d’Algérie, les expéditions impérialistes en Égypte, en Afrique, au service des sociétés pétrolières ou minières, en quête de pétrole au Tchad, d’uranium au Niger. Rien d’étonnant non plus si les dirigeants opportunistes du PCF- Front de gauche, les yeux rivés sur leur plan de carrière et leurs petits pouvoirs , sont prêts comme depuis trente ans à tous les agenouillements pour avoir les voix du PS aux municipales et aux législatives

    Il est plus surprenant par contre de constater les hésitations, les contradictions, au sein même de la petite armée résiduelle des militants français ou africains anti-impérialistes. Quelques uns semblent avoir provisoirement oublié que tous les impérialismes se valent étant partie liée : on ne peut refaire l’erreur des socialistes en 1914, approuver l’un d’entre eux, fut-il de son pays, contre l’autre, sans trahir les peuples qui sont victimes de tous, coalisés ou concurrents. D’autres condamnent à juste titre les ingérences économiques ou militaires de l’Occident (USA, Europe, France, Qatar, etc.) en Libye, en Syrie, au Mali. Mais ils ont tendance ce faisant à donner un blanc-seing immérité aux politiciens dictatoriaux comme Kadhafi, Bachar El Assad, ou aux intégristes islamistes qui tentent par la corruption, le meurtre et le trafic de s’emparer du Moyen orient et de l’Afrique avec souvent l’appui de l’Occident.

    Face à deux erreurs contraires, il faut le répéter, comme le firent avec lucidité Lénine et les bolcheviks en leur temps : tout impérialisme est néfaste, et toute idéologie réactionnaire aussi, qu’elle se pare d’oripeaux religieux ou non, parce qu’elle soutient le capitalisme, qui porte en lui la guerre comme la nuée porte l’orage.
    Les débats entre nous sont nécessaires, et chacun doit pouvoir exprimer ses analyses contradictoires, sans concession, et sans tabous. Mais il faut en finir avec tous ces procureurs, et donneurs de leçons. Le temps devrait être fini des attaques personnelles publiques, claironnées à l’univers entier par le biais d’internet, de ces excommunications du militant qui ne pense pas comme nous : le sectarisme, la suffisance, sont devenues pour les anti-impérialistes d’autant plus néfastes que nous sommes affaiblis, face à une contre révolution conservatrice qui est la pensée dominante dans le monde de 2013.

    Débats sans concessions, certes ; mais la ligne rouge est franchie quand on oublie les principes fondamentaux ; elle est franchie aussi quand la divergence devient anathème : un anti-impérialiste a aussi le droit à l’erreur. Les faits trancheront entre nous.

    Non, clairement, à toute guerre impérialiste.

    Nous avons été les premiers au nom du Collectif communiste Polex en 2011 à dénoncer en France la guerre menée par Sarkozy, l’OTAN et le Qatar, contre la Libye : elle n’avait pour objectif que d’y établir un gouvernement à la botte de l’Occident. Cela même alors que le PS approuvait la droite, et que les plus opportunistes-carriéristes au sein des directions du PCF (Le Hyaric), du Front de gauche (Mélenchon) ou du NPA restaient muets ou approuvaient cette ingérence-agression, mal camouflée sous des prétextes « humanitaires » de protection des civils. Nous avions bien raison, la Libye écrasée est deux ans plus tard écartelée entre milices intégristes ou ethnicistes, ouverte à l’exploitation de son pactole énergétique par les multinationales occidentales, réduite au non-développement industriel pour longtemps : mission remplie pour les guerriers français de l’Occident…

    Nous avons redit dès le départ notre opposition à toute ingérence extérieure en Syrie, au soutien financier, politique et militaire aux insurgés armés antigouvernementaux, par les puissances occidentales, USA, OTAN, Turquie, France, monarques du Golfe ; nous avons dénoncé l’envoi par le Qatar, avec leur complicité, de mercenaires intégristes internationaux, fer de lance de l’insurrection, pratiquant le massacre de soldats ou de civils syriens lors d’attentats aveugles.

    Nous avons répété souvent que la seule issue à cet égorgement de la Syrie ne pouvait être militaire, mais devait être négocié entre gouvernement et opposants syriens, à l’exclusion d’intervenants extérieurs. Cela ne faisait pas de nous des partisans aveugles d’un protagoniste mais des anti-impérialistes conséquents. Nous fûmes alors trop peu nombreux pour susciter un mouvement français sérieux d’opposition à la guerre en Syrie. Cela reste nécessaire aujourd’hui ; il faut pour cela réunir tous ceux convaincus que seuls les citoyens syriens sont habilités à choisir le destin du pays et son gouvernement. Ce rassemblement ne peut se faire qu’en respectant nos divergences sur Assad et ses bombardiers, sur les insurgés et leur propagande omniprésente aux médias français.

    La guerre déclarée au Mali par le Président François Hollande a été dénoncé par le Collectif Polex dès les premiers jours. Cette dénonciation était d’autant plus remarquable qu’elle rompait un consensus politique ultra-majoritaire en France (du PS à la Droite, du FN aux Verts et jusqu’aux pleureuses « humanitaires » qui peuplent les directions du Front de gauche et des syndicats FSU et CGT). Un consensus si fort qu’il a destabilisé quelques militants anti-impérialistes chevronnés, à Paris, à Dakar, et les a amenés à de trop rapides proclamations de soutien à l’offensive française ou à nier les responsabilités des intégristes du Sahel, alors qu’on les dénonçait en Syrie.

    Non à la guerre française au Mali

    Nous ne pouvons en aucun cas approuver l’intervention militaire de la France du président Hollande : les vraies motivations en sont très différentes de celles, humanitaires, claironnées à tout propos par les dirigeants français et leurs porte-voix médiatiques.

    L’état malien, déjà déconsidéré par la corruption et les mesures de privatisation prises sous la présidence d’Amani Toumani Touré, s’est effondré lors du putsch militaire dirigé par le capitaine Sanogo. Depuis l’armée malienne s’est liquéfiée et les autorités « provisoires » ne représentent plus guère qu’elle-même. Il est vrai que, dans ces condition de déliquescence, le risque était réel de voir les commandos intégristes du nord progresser jusqu’à Bamako sans résistance sérieuse. C’est ce qui a permis à la France d’intervenir à la mi-janvier, à la demande d’un président malien qui n’a jamais été élu, sous le prétexte de stopper l’avancée islamiste que les militaires malien étaient bien incapables de stopper. Les bombardiers et hélicoptères français l’ont fait en quelques jours et nous ne regrettons pas ce coup d’arrêt qui est ressenti par le peuple malien désemparé comme un soulagement immédiat.

    Mais l’objectif guerrier du président Hollande et de Fabius s’est affirmé dès les premiers jours tout autre qu’une aide ponctuelle à un allié : il s’agit d’une guerre pour la reconquête du Nord Saharien non limitée dans le temps et dans l’espace, prévue jusqu’à la « destruction » des djihadistes occupant ces immenses territoires. Pour cela, des milliers de soldats français prêts à combattre au sol, à la place d’une armée malienne qu’il était au départ prévu de former et d’aider, dans la résolution de l’ONU. Nous sommes entrés ainsi dans une guerre française, dont le but est la maîtrise par la France d’un espace saharien plus vaste que l’hexagone, central par rapport à l’ancien domaine colonial. La France, puissance impérialiste et néo coloniale en déclin, entame ainsi la reconquête du nord-ouest africain pour y retrouver à nouveau ses prérogatives de chasse gardée militaire (bases et accords de formation et d’ingérence diplomatique et plus encore économique). Le Sahara et le sahel ont des ressources potentielles immenses à exploiter, minérales et énergétiques (pétrole, gaz, uranium et énergie solaire).

    Si les USA peuvent envisager en une décennie l’auto suffisance grâce au « gaz de schiste », en ce domaine la France devra toujours importer gaz, pétrole, uranium etc… Il s’agit donc pour ses dirigeants d’interdire dans cet espace les concurrents, quels qu’ils soient certes, mais dont les plus menaçants sont les Chinois, déjà concurrents d’Areva au Niger et potentiellement ailleurs.

    Selon des informations qui circulent sur internet (Capitaine Martin. Cyberrésistances – 28/01/2013), précises et non démenties, les autorités maliennes auraient signé en septembre 2011 trois accords commerciaux avec la Chine pour la coquette somme de 739 milliards de yuans, dont plus de 600 destinés au bassin hydroélectrique de Taoussa près de Gao.

    Curieux emballement de la chronologie : c’est début 2012 que les mercenaires touaregs du libyen Kadhafi vaincu par les bombardements franco-otaniens, se rapatrient vers le désert nord malien avec armes et bagages, sous le regard complaisant du Quai d’Orsay. Conséquence concomitante de la guerre menée par Sarkozy et ses alliés qataris en Libye, des tonnes d’armes se diffusent au Nord Mali, où elles équipent la nébuleuse de trafiquants-« djihadistes » qui y sévissent, séparatistes du MNLA, intégristes d’Ansar Eddine, Mujao et autres « fous de Dieu » et vendeurs de narcotiques. En quelques semaines, ils se rendent maîtres du désert malien, bousculant sans difficultés une armée malienne sans grands moyens et peu combative.

    Le 21 mars 2012, une partie de cette armée, dirigée par le capitaine Sanogo, expulse le président élu Amadou Toumani Touré du pouvoir lors d’un putsch aux motivations peu claires. ATT avait certes laissé se développer corruption et inégalités sociales, peu résisté aux injonctions du FMI (privatisations et austérité budgétaire), mais il était surtout en froid avec la France pour n’avoir pas signé, seul, d’accords migratoires, et lorgné un peu trop vers les concurrents asiatiques ou d’ailleurs.
    Dernière modification par Elghifari, 08 mars 2013, 01h59.

  • #2
    (2)

    Résultats du putsch en tout cas : une armée divisée incapable de faire face à la moindre menace, une flambée des réponses religieuses à la crise sociale, le discrédit des partis, un pouvoir ne représentant que lui-même et les putschistes à Bamako, la quasi disparition d’un état laïque digne de ce nom.

    En janvier 2013, quelques groupes armés djihadistes progressent vers le Sud sans rencontrer de résistance sérieuse, ce qui permet à l’armée française de venir « sauver Bamako des terroristes » (opération « SERVAL ») et de se lancer dans la foulée à la conquête du Nord-Mali, un espace grand comme un état européen.
    N’allons pas plus loin dans les hypothèses : mais convenons que ce déroulement des faits n’en manque pas, ni de mobiles ni de présomptions.

    Imprégnée de son passé colonial, la France officielle, qu’elle soit dirigée par la droite ou le parti socialiste, a toujours considéré depuis les indépendances africaines octroyée de mauvaise grâce en 1960, que tout le nord-ouest du continent, Maghreb, Sahara, Sahel, jusqu’au golfe de guinée, était sa zone d’influence naturelle, économique, diplomatique. Elle a toujours vu d’un mauvais œil les velléités d’indépendance nationale en ces contrées, au point d’y aller imposer militairement des gouvernements à sa botte plus de vingt fois en cinquante ans ; et, dans ce nouveau siècle, elle s’exaspère de constater l’arrivée de nouveaux concurrents : les chinois sont d’ores et déjà présents au Niger, en Algérie…

    Pour ces objectifs, la France impérialiste n’a jamais hésité à faire la guerre, les dernières étant dans la zone, l’installation manu-militari de Ouattara à la tête de la Côte d’Ivoire et la guerre sarkozienne contre la Libye.
    Ces objectifs de l’impérialisme français sont à la fois aventureux sur le plan militaire (la guerre au sol peut durer des années face à une guérilla endémique), et irréalistes sur le plan géopolitique : Paris n’a plus les moyens de mener cette reconquête africaine avec les seuls moyens et à son seul profit, l’exemple libyen le démontre : c’est la France de Sarkozy qui a, pratiquement seule, écrasé la Libye de Kadhafi. Un an plus tard, dans ce pays vassalisé et désarticulé, ce ne sont pas les entreprises françaises qui tirent le plus de bénéfices des sources énergétiques libyennes mais celles, occidentales, anglo-saxonnes ou Qataries. On peut prédire sans grand risque qu’il en sera de même au Mali : La France prend les risques, mais au final, elle ne pourra aboutir qu’au rétablissement des contrées sahélo-sahariennes dans la zone d’influence de l’occident, États-Unis en tête. Ils ont déjà en un an placé leurs antennes militaires un peu partout dans les régions, au Burkina Faso par exemple et s’apprêtent à le faire ailleurs.

    Nous n’ignorons pas les concurrences entre impérialismes occidentaux dans cette partie de l’Afrique. Samir Amin et d’autres anti-impérialistes africains ont raison de faire remarquer que les USA et leurs protégés qataris et saoudiens ont permis à des mouvements intégristes (frères musulmans) d’accéder au pouvoir en Égypte, Libye, Tunisie, qu’ils soutiennent dans leur insurrection contre le gouvernement syrien et que leur attitude à l’égard des djihadistes du Sahara malien est plus qu’ambiguë. Faut-il aller jusqu’à supposer un vaste projet de « sahelistan » contrôlé par des djihadistes qui serait ouvert aux intérêts étatsuniens au détriment même de l’impérialisme français ? Il a pu germer dans les cerveaux de quelques stratèges anglo-saxons, proches des financiers arabes du golfe, mais les tenants de l’impérialisme yankee n’ont pas qu’un fer au feu et ne sont pas unanimes. Même si cette ambition était avérée, cela ne peut en aucun cas nous conduire à approuver l’impérialisme français contre celui de Washington, Doha et Riyad : leur pouvoir de nuisance pour les peuples est identique, nous sommes et demeurons opposés à tout impérialisme, à commencer par celui de notre propre pays. Les chiens de guerre occidentaux ne valent pas mieux que ceux supposés « fous de Dieu » et véritables narcotrafiquants, armés par les monarques du Golfe et instrumentalisés par les USA.

    L’entrée en guerre de la France du président Hollande et ses amis socialistes est aussi une vaste opération de manipulation de l’opinion à usage intérieur. Ce pouvoir, englué dans sa soumission à l’Europe supranationale, soumis jusqu’à la bassesse au moindre désir du patronat français (MEDEF) et des spéculateurs mondialistes (Mittal), multiplie les mesures d’austérité, détruit les conquêtes sociales et ne fait rien sauf en paroles contre la destruction des industries françaises et leur délocalisation vers des taux de profits élevés et exotiques : il le paie d’une impopularité pire que celle Sarkozy avant sa défaite électorale. Comme nous pouvions le craindre depuis un an, le pouvoir socialiste français a lancé, seul, la guerre du Mali pour redorer son blason en faisant oublier dans une aventure consensuelle les sujets qui fâchent, chômage, pauvreté, « flexibilité » etc… Cela en manipulant le rejet justifié par les français de l’intégrisme religieux et du terrorisme et les vieilles nostalgies coloniales qui traînent dans les têtes de ce pays. Pour l’instant, l’opération est réussie grâce notamment au matraquage médiatique de l’opinion. Le déclenchement de la guerre a été approuvé par la quasi unanimité des partis politiques, du PS enthousiaste à la droite sarkozienne et jusqu’au Front National. Front de gauche et NPA vont du mutisme embarrassé aux réticences discrètes, seuls quelques individualités communistes redisent sans écho leur refus du consensus colonial et prennent date pour l’avenir. Car ce brouillard ne pourra occulter longtemps les réalités françaises les plus féroces (les exclus sociaux de Florange, de Renault, de PSA, de FRALIB et d’ailleurs, sont encore en lutte) ; comme ce fut le cas pour la guerre d’Algérie il y a 60 ans, les premières difficultés militaires éveilleront très vite l’opinion anesthésiée…

    Après les premières semaines de guerre, que proposer qui tienne compte à la fois des réalités sur le terrain et de notre idéal permanent d’égalité entre les hommes et les peuples ?

    L’offensive intégriste vers Bamako semble brisée et nous en prenons acte, même si nous étions et restons plus que jamais opposés à l’intervention française.
    La capacité de nuisance des groupes armés intégristes au nord Mali reste grande, et la France, ex puissance coloniale, n’est pas qualifiée pour reconquérir cet espace à son profit, pas plus que les autres puissances occidentales, ou leurs affiliés africains de la CEDEAO ( Ouattara, Compaoré etc.)

    Les seuls qualifiés à décider du sort du Mali sont les citoyens maliens et leurs représentants librement désignés, dès que possible.

    Le rôle des partenaires extérieurs, FRANCE, USA, CEDEAO NE PEUT ËTRE EN AUCUN CAS DE PROFITER DE L’ÉTAT DE FAIBLESSE DE L’ÉTAT MALIEN POUR S’EN RENDRE MAÎTRES ; elle peut être tout au plus d’aider à la reconstruction des forces armées du pays, à sa survie économique et plus tard à son développement économique et industriel (car le non développement et la pauvreté y sont source de tous les maux).

    A l’issue de quinze jours de guerre au Mali, le ministre français des armées a reconnu que la France avait dépensé pour le seul transport et défraiement des troupes au sol environ 700 millions d’euros. En tenant compte du coût énorme par heure de vol des bombardiers et hélicoptères qui n’ont pas chômé, c’est en milliards d’euros que se chiffreront les dépenses de guerre, pour un pays qu’on dit si endetté que ses salariés et retraités doivent envisager de drastiques cures d’amaigrissement selon nos argentiers sociaux-libéraux. Combien ces sommes folles auraient-elles permis de construire d’usines, produisant vêtements ou outils pour les besoins locaux, fournissant des emplois aux Maliens désespérés de devoir émigrer pour survivre ? Car c’est bien ce désespoir social né du sous-développement agraire et industriel africain qui sert de vivier à l’intégrisme islamiste, nourrit les dérives ethnicistes et séparatistes : l’Afrique livrée au seul pillage de ses richesses naturelles par les sociétés transnationales et l’impérialisme occidental est, de ce fait, condamnée aux explosions guerrières et aux convois de réfugiés, aux délinquances criminelles et politiques.

    Est-ce à dire que les trafiquants, les mercenaires armés qui font régner la terreur au Sahara ou au Sahel, doivent être excusés, voire justifiés, à cause d’un impérialisme occidental prédateur ? Il serait infantile de le faire, ils sont les meilleurs alliés de l’empire d’Occident qui épuise les peuples africains. La misère sociale et culturelle de certains quartiers ghettoisés de France, explique la dérive vers la drogue et le crime de certains de leurs habitants ; elle nous oblige à rappeler que la seule répression sécuritaire n’est en rien une solution ; elle ne justifie aucunement ceux qui deviennent chefs de bandes, dealers ou meurtriers ; d’autres vivant dans le même quartier s’échinent à survivre par leur travail quand ils en trouvent…
    Dernière modification par Elghifari, 08 mars 2013, 01h58.

    Commentaire


    • #3
      (3)

      « Comprendre l’intégrisme islamique » ou le combattre ?

      Ces dernières années, quelques intellectuels d’Occident théorisant leur impuissance douillette et protégée, se laissent aller à confondre l’anti-impérialisme nécessaire avec l’approbation de ses ennemis ponctuels : ils créent ainsi la confusion, et gênent, de ce fait, le rassemblement de tous ceux opposés à l’ingérence coloniale ou impériale.

      Ils condamnaient à juste titre l’intervention de la France et de l’OTAN en Libye : était-ce une raison pour exiger des manifestants contre la guerre une approbation de l’histrion brutal Kadhafi, condamné par l’Occident qu’il avait si souvent servi ?

      Aujourd’hui, aussi mal inspirés, ils confondent l’opposition absolue à l’ingérence militaire des puissances de l’OTAN et du Qatar en Syrie, au service d’insurgés armés soutenus par des mercenaires intégristes venus d’ailleurs ; ils exigent de nous une réhabilitation béate du régime autoritaire d’El Assad, ancré si longtemps dans la répression féroce des progressistes syriens, et désunissent ainsi ainsi le mouvement contre la guerre.

      S ‘opposant à juste titre à l’intervention étrangère au Mali, ils se répandent en jérémiades irrationnelles sur les pauvres Touaregs délaissés par Bamako, et nous demandent de « comprendre » les « motivations religieuses » des « combattants islamistes » de l’Afrique saharienne. Il faudra donc être très clair à ce sujet :
      Les communistes ne peuvent avoir aucune complaisance pour les séparatistes du MNLA et les guerriers intégristes qui ont imposé par la terreur leur volonté aux populations du Nord Mali. Les premiers mercenaires nomades au service de Kadhafi, l’ont abandonné quand les bombardiers de Sarkozy et de l’OTAN ravageaient la Libye en 2011 et ont fui vers le désert malien sous la protection de la France. Ils se sont alors découverts représentants des Touaregs et ont revendiqué, avec l’accord complaisant du quai d’Orsay, la sécession absurde du Sahara à leur profit, sous le nom d’Azawad. Ils ont surtout réussi à faire se réfugier les populations affolées du désert, touareg ou non, vers les pays voisins, Algérie, Mauritanie, Niger et sahel malien. Ils n’ont plus aujourd’hui qu’une influence minime ; ils ont surtout permis la conquête du nord Mali par les groupes armés « djihadistes », Ansar Eddine, Mujao, AQMI, etc… qui occupent aujourd’hui les immensités sahariennes autour de Gao et Tombouctou, rayonnent jusqu’aux désert algérien, tunisien, libyen et nigérien et jusqu’au nord du Nigeria. Cette nébuleuse de groupes armés, dirigés par des chefs de guerre de diverses origines (Algériens, touaregs ou non, Nigériens ou d’Afrique Sahélienne), regroupent quelques milliers de baroudeurs aguerris, issus parfois des combats afghans, yéménites ou somaliens et de nationalité diverses, du Maghreb, du Nigeria, voire originaires de pays occidentaux. Ils sont très bien armés et équipés en véhicules tous terrains, matériel de communication et repérage, armement parfois sophistiqué (qui leur a permis d’abattre un hélicoptère français). Ces équipements proviennent des stocks éparpillés lors de la guerre contre la Libye, parfois d’origine occidentale. Mais ils en ont aussi beaucoup acheté, grâce aux bénéfices des divers trafics qu’ils pratiquent dans le désert (de migrants, de drogue, d’otages rançonnés) et à l’aide financière des potentats pétroliers arabes du golfe, d’inspiration intégriste (et pro occidentale) Qatar et Arabie Saoudite. Ces groupes mobiles et d’obédience diverse n’ont en commun que l’idéologie intégriste, instrumentalisation de la religion musulmane au profit de leur vision politique, comme le franquisme en Espagne ou les Oustachis en Croatie il y a 70 ans utilisèrent le catholicisme au profit du fascisme.

      Sous prétexte de revenir à la lettre du Coran d’il y a 7 siècles, ils prônent une pratique terroriste de la loi (la charia), un régime théocratique débarassé par la force de toute forme de démocratie politique, mais tout à fait compatible avec le marché capitaliste. L’intégrisme djihadiste islamiste n’est pas une variété de l’islam, il est une forme de fascisme contemporain en pays musulman.

      Diversités religieuses

      Évacuons d’abord quelques interrogations proprement religieuses, comme de bons esprits pas toujours bien intentionnés nous y incitent, à propos de la foi musulmane. Contrairement à une idée reçue, l’Islam n’est pas la seule à se vouloir totalisante, à prétendre régir aussi la morale, l’économie, la politique : Toutes les « religions du Livre », fondées sur des textes considérés comme sacrés, font de même. La bible judaïque, l’Évangile chrétien, comme le Coran musulman, sont pleins de préceptes moraux, politiques et sociétaux, rédigés il y a parfois plus de 1000 ans , souvent contradictoires, parce que nés de sociétés différentes : chacun y peut y trouver son miel, les théologiens peuvent en faire une lecture littérale, ou s’en inspirer, comme de fables symboliques. Ainsi oublie t’on trop souvent que si certains versets du Coran ordonnent aux femmes le voile pour se protéger du désir masculin, d’autres disent l’inverse, et que Saint Paul, l’un des pères du christianisme, prescrivait le même attirail vestimentaire féminin à ses fidèles. Il existe donc de ce fait , au sein de chaque religion, des pratiques très différentes, liées à des lectures divergentes des textes : Les Musulmans se divisent ainsi en Sunnites ( les plus nombreux du Maghreb en Orient) Chiites (les protestants de l’Islam, majoritaires en Iran). Les adeptes du Soufisme (courant mystique),etc…

      Dans certaines régions, l’Islam s’est enrichi de cultes syncrétiques (issues de croyances antérieures) comme les marabouts dédiés à des saints au Sahel ou au Maghreb, de confréries comme au Sénégal (Mourides, etc…) cette diversité des pratiques de l’Islam est énorme, à l’échelle des trois continents concernés (Asie Afrique, Europe) autant que celles des chrétiens (catholiques, orthodoxes, évangéliques , etc…) et diversifiée jusqu’au niveau des individus : il existe autant de pratiques chrétiennes que de pratiquants, autant de pratiques de l’Islam que de musulmans. Ce foisonnement infini de croyances, de comportements religieux n’interroge que les théologiens, ou les croyants. Gardons nous bien de trancher leurs débats, ils n’ont rien à voir avec notre propos sur l’intégrisme, qui n’est lié à aucune de ces catégories religieuses, plus qu’à une autre. Le 30 janvier 2013, les érudits, prêcheurs et imans musulmans du Mali, du Niger, de Mauritanie, du Burkina, d’Algérie, se sont réunis à Alger pour condamner au nom de leur diversité régionale « la violence, le fanatisme, l’extrémisme » comme contraire à leur conception de l’Islam (El Watan. Alger 31/1/13).

      L’intégrisme ou « fondamentalisme » actuel dit souvent s’inspirer du Wahhabisme (version politique de l’Islam imposée à l’Arabie en 1803 par les monarques Saud), ou du salafisme (dont l’objectif est la restauration aujourd’hui de la société islamique des origines d’il y a 14 siècles). Il prévoit d’imposer ses objectifs politiques, aux non musulmans et aux musulmans hérétiques qui ne pensent pas comme lui par la force, « le djihad » ou guerre sainte : une lecture spécifique de ce concept, qui pour l’immense majorité des musulmans signifie le combat que le croyant doit mener contre ses mauvais instincts pour se conduire bien à l’égard de Dieu et des autres. Cette distorsion sémantique inventée par les intégristes « islamistes » a réussi à s’imposer aux opinions occidentales, associée au concept fourre tout de « terrorisme ».. il est donc plus que jamais nécessaire de répéter que ce « djihadisme », ce « terrorisme », bien réels n’ont rien de spécifiquement musulman, ne sont que le produit des mouvements politiques « islamistes » ( à ne pas laisser confondre avec « islamiques »)

      Parler à leur propos de fascisme ne relève pas du qualificatif moral, de l’insulte, mais de l’analyse politiques comparée : les similitudes sont troublantes avec les idéologies fascistes qui envahirent l’Europe il y a 80 ans, et notamment avec la plus élaborée d’entre elles, le nazisme.
      Dernière modification par Elghifari, 08 mars 2013, 01h57.

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      • #4
        (4)

        Des parentés « islamismes » - nazisme

        Elles sont d’abord politiques. On sait à quel point les Nazis avaient pour objectif d’éliminer par la terreur toute forme de démocratie politique, de partis de syndicats, de représentativité populaire au profit d’un état totalitaire. Ils l’ont fait une fois au pouvoir en Allemagne après 1933, par les camps de concentration, l’assassinat, l’exil forcé pour les opposants, à commencer par les communistes. Durant la décennie sanglante, il y a 20 ans, les intégristes salafistes ont massacré environ 100 000 citoyens en Algérie, ciblant les militants progressistes, les contraignant au silence ou à l’exil par la terreur, détruisant pour longtemps le tissu syndical ou politique du pays. Les intégristes actuels, qui les prolongent, rêvent de faire la même chose en Égypte, Libye, Tunisie, Syrie ou au Sahel. Leurs agissements politiques ne sont « modérés » que quand le rapport de forces ne leur est pas encore favorable : leur objectif totalitaire est toujours là, l’Égypte et la Tunisie actuelle le prouvent.
        Les nazis savaient utiliser le drapeau rouge et le verbiage anticapitaliste, tout en se faisant financer par les trusts, et en débarrassant le capitalisme de ses ennemis. L’intégrisme islamiste se prétend antioccidental, et ne l’est que dans la mesure où il rejette, comme tous les fascismes, l’héritage idéologique des Lumières et des révolutions démocratiques, de 1789 et 1917. Il est aussi attaché au libéralisme économique, à la loi du marché, que ses animateurs pratiquent grâce à une finance « islamique » insérée dans le jeu mondial du profit. Ses porte flingues, et égorgeurs peuvent être de pauvres diables miséreux comme les S.A. ou S.S. étaient souvent des ouvriers au chômage. L’impérialisme occidental et notamment étasunien, lui, ne s’est jamais trompé sur les motivations de l’intégrisme. Il les a financés et armés en Afghanistan dès la décennie 80 contre les communistes locaux et leurs alliés soviétiques ; il les a soutenus , a accueilli leurs chefs à New York ou Londres quand les tueurs du GSPC égorgeaient les démocrates algériens en 1995 ; il les a aidés à accéder au pouvoir en les finançant au Maghreb, en Égypte, dans les bouleversements récents du « printemps arabe », avec ses comparses du Qatar et d’Arabie saoudite, il les utilise au sein de l’insurrection syrienne armée, et au Mali, en attendant mieux : en quelque sorte conscient de ses intérêts convergents, l’impérialisme occidental, y compris la France de Sarkozy en Libye, de Hollande en Syrie, soutient et utilise l’islamisme à la carte, entre deux discours « antiterroristes ».

        Sur le plan sociétal enfin, le projet ultra réactionnaire intégriste, contre l’égalité des sexes, prônant la barbarie des supplices en guise de justice (la charia), rappelle on ne peut mieux la même idéologie machiste et patriarcale, la même férocité judiciaire de l’ère nazie. Que l’une se prévale d’une lecture bornée du Coran et l’autre d’une race prétendument supérieure ne change rien aux résultats.

        Il faut par ailleurs faire un sort à l’affirmation selon laquelle l’islamisme ne serait qu’un anodin discours politique nourri d’Islam, comme les démocrates chrétiens européens se prévalent du christ, ou Chavez au Venezuela se dit inspiré par les Évangiles. Cet amalgame est hypocrite, et historiquement absurde. Car la démocratie chrétienne en France (MRP) celle d’Italie après guerre (relisez Don Camillo…) étaient issues de la Résistance antinazie, et la DC allemande elle-même à toujours réfuté l’héritage hitlérien, au moins en paroles, et le fait que certains révolutionnaires soient aussi croyants n’est pas une nouveauté. Camilo Torres est mort en guérilla en Amérique Latine pour le même idéal que le Che, c’est l’insulter que de l’assimiler aux fanatiques islamistes. Historiquement, à l’inverse de la DC européenne les partis intégristes islamistes se sont construits dans les pays arabes contre les nationalismes progressistes, contre le Nassérisme, contre le Baath socialiste en Syrie, etc…

        Il est vrai qu’il existe en pays musulmans des politiciens, des partis, qui se disent inspirés de l’Islam, et ne sont pas fascistes pour autant, et ne peuvent se définir par le seul intégrisme, qui les a contaminés. Ainsi le Hezbollah au Liban, le Hamas palestinien à Gaza sont d’authentiques mouvements populaires de libération nationale, même si malheureusement, l’idéologie intégriste imprègne certains de leurs dirigeants : c’est d’ailleurs ce qui facilite d’étranges manipulations : sait-on assez que les colonialistes israéliens ont financé au départ le Hamas contre l’OLP et la gauche palestinienne, et que les Émirs pro étasuniens du Qatar le chouchoutent aujourd’hui ?

        On ne peut conclure provisoirement cette analyse nécessaire, mais succincte sans commenter en quelques mots une affirmation qui revient souvent dans les discours militants anti-impérialistes ; « l’intégrisme islamiste comme les xénophobies racistes ou nationalistes, est une conséquence de la crise actuelle du capitalisme ».
        Et il est certes exact que le désespoir que cette société livrée aux mécanismes du marché et du profit fournit la masse de manœuvre de ces formes actuelles d’aliénation politique, en Afrique et jusqu’en Europe. La croissance des intégrismes, des ethnicismes, au Mali, comme en France, n’est pas fabriquée par les financiers ou des services secrets qataris ou étasuniens. Elle naît des difficultés sociales, du chômage, de la misère ….

        Encore faut-il éviter de répéter « la crise, la crise », en sautillant comme un cabri, selon la formule de De Gaulle, comme un croyant explique toutes les complexités de l’univers par Dieu.

        Crise du capitalisme ? certes, mais cela ne doit pas nous cacher que ce capitalisme n’est certes pas en agonie, que depuis les années 1990 il a renforcé son emprise sur les peuples d’Afrique, d’Orient , ou d’Europe, grâce à une véritable contre révolution idéologique. La flambée actuelle des intégrismes en pays d’Islam, comme des xénophobies racistes en Europe, y est aussi la conséquence de la crise des idéologies et mouvements révolutionnaires, de leurs dérives opportunistes, carriéristes, de leur ralliement à la vulgate « libérale ».
        Et de cela, nous sommes comptables. L’histoire sera ce que nous la ferons, en Afrique, en Europe et ailleurs.

        Pas plus qu’en 1936-44 on ne compose pas avec le fascisme, qu’il se prétende catholique, « aryen » ou musulman. On le combat.

        En ce sens, nous comprenons fort bien le désir de la grande majorité des maliens de se débarrasser par les armes de cette peste brume verte qui a envahi Sahara et Sahel. Nous n’oublions pas que c’est dès le départ avec la complicité des monarchies du golfe et des pays de l’OTAN dont la France de Sarkozy. Mais cette responsabilité occidentale dans le déclenchement du drame malien n’atténue en rien celle de ces chiens de guerre intégristes qui veulent asservir à leur pouvoir les peuples africains ; Ils ont à nouveau révelé leur vraie nature en expédiant un commando s’emparer du site gazier algérien de In Amenas, en y exécutant froidement des salariés désarmés, surtout asiatiques. Leur objectif était de détruire les installations construite par la société nationale Sonatrach autant que de prendre des otages : seule l’action résolue de l’armée algérienne les en a empêchés.

        Francis Arzalier publié le : 6 Mars, 2013

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