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8 mars : les femmes arabes devraient plus regarder le parcours des Algériennes

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  • 8 mars : les femmes arabes devraient plus regarder le parcours des Algériennes

    Des révolutions arabes, Egyptiennes, Syriennes et Tunisiennes ont déjà tiré une leçon : même les acquis que l’on croit à jamais gagnés peuvent être remis en question pour ramener la femme à un statut inférieur. Et ça, alors que leur pays n’a pas connu de «printemps arabe», les Algériennes ne l’ont jamais perdu de vue.

    «Sans doute parce que depuis la guerre de libération à laquelle elles ont participé pour finalement se voir exclues de la vie politique, les Algériennes ont toujours dû se battre, pied à pied. Elles ne s’en laissent pas compter», analyse Fatma Oussedik, chercheure et sociologue, membre du réseau Wassyla, coalition de plusieurs associations algériennes pour une meilleure prise en charge et orientation de femmes et d’enfants victimes de toutes sortes de violences.


    A l’inverse des Tunisiennes, toujours montrées en exemple, qui aidées par Bourguiba, ont cru que la sécularisation de leur société est irréversible. «Pendant que dans les années 70/80, les femmes algériennes luttaient pour le droit à la citoyenneté, les Tunisiennes vivaient déjà sur leurs acquis», note aussi Nassera Merah, militante féministe, auteure de travaux sur la mémoire de la lutte des femmes. «La société tunisienne a régressé. Ce n’est pas le cas de l’Algérie où les mentalités ont évolué, relève Djabria Naili, secrétaire générale de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme.

    Contrairement aux années 1970, une femme n’a plus besoin de demander à un homme l’autorisation pour travailler. Pour autant, il reste du chemin à parcourir. Trop souvent, quand une femme est victime d’une agression, elle passe du statut de victime à celui de coupable aux yeux de la société.»

    Fatma Oussedik insiste tout de même sur l’évolution du statut de la femme «que l’ont doit analyser à l’échelle de cinquante ans, pas de dix ou quinze ans». Et là, les chiffres parlent tous seuls.

    Double oppression

    A commencer par celui de l’alphabétisation. Au lendemain de l’indépendance, elles étaient 92% à ne savoir ni lire, ni écrire. Aujourd’hui, elles sont à peine plus de 10%.
    «Pourtant, les Algériennes ont eu à subir une double oppression, rappelle Nassera Merah. D’abord celle de la colonisation puis celle des nationalistes qui leur ont bloqué l’accès à l’éducation au moment où les Français avaient décidé de l’instruction des filles.» Le chiffre est remarquable à l’échelle du Monde arabe où malgré des progrès considérables, les deux tiers des analphabètes sont encore… des femmes.

    Les Nations unies, qui n’espèrent pas d’amélioration avant 2040, explique en partie ce déséquilibre par la baisse des dépenses publiques dans l’éducation depuis 1995. Or entre 1990 et 2001, l’Algérie mettait en place un projet spécifique d’alphabétisation à destination de la femme et de la jeune fille. Les Algériennes sont aussi parmi les plus nombreuses sur les bancs des universités (60% toutes disciplines confondues, y compris dans celles jusque-là plutôt masculines, comme le génie civil, l’informatique, la géologie). «Une situation que l’on doit aussi au fait que notre université est gratuite, ce qui n’est pas le cas en Egypte», précise Nassera Merah.

    Brodeuses

    Sur le marché du travail, le statut des Algériennes est aussi un des meilleurs. D’après la dernière étude comparative de la Confédération syndicale internationale sur la législation du travail dans huit pays arabes, même si «les femmes sont concentrées dans le secteur informel et l’agriculture» et que «80% des femmes actives opèrent dans le secteur de la santé ou de l’éducation», la protection des droits des travailleuses est globalement bonne. «En Egypte, les femmes qui travaillent sont exposées à de nombreuses discriminations qui en font les travailleurs égyptiens les plus vulnérables et les plus pauvres», souligne le rapport.

    «Les lois du travail ne s’appliquent même pas aux femmes qui travaillent dans le domaine de l’agriculture ou le travail domestique», sans protection en matière de santé, de sécurité. Elles ne sont pas, non plus, autorisées à adhérer à un syndicat. En Tunisie ? Le taux de participation des femmes n’est que de 25/27%, soit moins de la moitié que celui des hommes. Fortement représentées dans le secteur public, elles sont aussi très peu nombreuses à accéder à des postes de responsabilité. «De telles statistiques s’expliquent aussi parce qu’à un moment donné, l’Etat, en voulant démocratiser l’enseignement et assurer l’accès gratuit à la médecine pour tous, a dû exercer une pression sur les salaires. Et la meilleure manière d’exercer cette pression, c’était de recruter des femmes, reconnaît Fatma Oussedik. Mais les femmes se sont accrochées. Et aujourd’hui, on voit de petites brodeuses de La Casbah transformées en chefs d’entreprise !»

    Katia Bengana


    Si le mouvement féministe algérien est avant tout un combat de classes moyennes, de revendications sociales et économiques, «c’est par la résistance aux intégristes dans les années 90, la mobilisation contre le harcèlement sexuel dans les années 2000 et les campagnes actuelles contre les violences faites aux femmes qu’il a pu rayonner au-delà de nos frontières», rappelle Soumia Salhi, présidente de la Commission des femmes travailleuses et de l’Association pour l’émancipation de la femme. Malgré les obstacles dressés par le système pour dévitaliser la société civile, «le mouvement des femmes est celui qui pousse encore aujourd’hui le plus loin la réflexion sur les fondements de l’Etat. Le dépôt de projet de loi contre les violences faites aux femmes (déposé en janvier 2012 par le Collectif Stop à la violence, les droits aux femmes maintenant ! ndlr) en est un bon exemple. La question de la violence est partout posée mais nous questionnons l’Etat sur sa capacité à protéger les femmes. Pendant la décennie noire, Katia Bengana et Karima Belhadj, première femme, fonctionnaire de police, assassinée, sont mortes d’avoir été seules.»

    Des victoires, il y en a. La condamnation de Said Lamrani, ex-directeur de la Chaîne 4, jugé coupable de harcèlement sexuel contre trois journalistes et une scripte à six mois de prison avec sursis et une amende, en est une. Bien que controversé parmi les militantes elles-mêmes, l’article 12-03 sur les quotas de femmes dans les assemblées en est une autre. Au moins sur le plan du symbole. L’Algérie est aujourd’hui le premier pays arabe sur 139 pays à avoir la plus importante représentation féminine dans son Parlement (avec 146 députées).

    Essouflement

    Ce sont ces victoires que la plupart des féministes revendiquent. Tant pis si d’autres pointent du doigt la relativité des chiffres ou l’essouflement du mouvement. «Il ne faut pas regarder les statistiques de manière superficielle, prévient Fadhila Chittour-Boumendjel, vice-présidente du réseau Wassyla. Si tous les indicateurs montrent que les femmes ont accès aux soins, à l’éducation, et même aux places publiques, une force au sein même de la société résiste à cette émancipation. Tant que nous vivrons dans une société autoritaire et un système patriarcal, nous ne pourrons servir d’exemple à personne.» Maya Azeggagh, chef de projet à l’association Rés’Art, réseau d’artisanes d’art algériennes, est aussi pessimiste.

    «Le combat des femmes s’essouffle et avec la nouvelle loi sur les associations, il faut s’attendre à un nouveau recul. Si on n’est pas soutenues, si on n’a pas les moyens d’imaginer, croire en une autre réalité que celle qu’on nous propose, le mouvement va se scléroser. Nous devons nous replier et trouver d’autres stratégies. Multiplier les rencontres et les réunions, nous constituer en une force de propositions.» Sabrina Zouaoui, militante associative qui participe à la création d’un nouveau mouvement dont un des objectifs sera d’obtenir l’abrogation du Code de la famille, pense que la lutte féminine a déjà amorcé un nouveau virage.

    «Je dirais que depuis deux ans, le nombre d’associations de lutte pour les droits des femmes a explosé dans tout le pays. Mais il est vrai qu’elles ne sont pas très visibles, car elles ne savent pas communiquer efficacement. Et, ajoute-t-elle, phénomène nouveau : les jeunes, celles qui ont entre 20 et 30 ans, veulent s’impliquer. Elles se sentent très concernées par leurs droits, notamment économiques et sociaux.»

    Minijupe

    Mounia, professeur à l’université de Blida, note aussi un changement dans son public de jeunes étudiantes, pour l’essentiel venues de l’intérieur du pays. «En 2009, j’avais 100% de hidjab en classe. Aujourd’hui, elles ne sont que 80%», remarque-t-elle. Pour Sabrina, cela ne fait pas de doute, cela est très révélateur du «combat quotidien» que les femmes sont en train de mener, pas tant contre les lois de la République mais contre le conservatisme de la société. Fatma Oussedik confirme. «Il ne faut pas croire que tout est acquis ! Les filles luttent contre leur propre famille pour faire des études, contre leur père ou contre leur frère qui s’est fait éjecter du système scolaire en troisième.

    Alors, c’est vrai, elles sont nombreuses à porter le hidjab mais je préfère les voir en hidjab dans un amphithéâtre qu’en minijupe à la maison ! Elles négocient avec l’espace pour sortir et le voile est un élément de négociation. Une fois qu’elles l’ont mis, elles disent : «Voilà, je l’ai mis. Allez, maintenant, parlons d’autre chose. De mon rapport à l’autorité, de salaires, du logement, etc.» Soumia Salhi préfère aussi rester optimiste. «L’Algérie des 800 000 étudiantes de 2013, l’Algérie des femmes politiques et des femmes juges, l’Algérie de la multitude d’associations féminines et de la parole militante, cette Algérie féminine qui a survécu et qui a repris sa marche en avant permet l’espoir, conclut-elle. Pour toutes celles qui affrontent, dans notre région des projets de régression fondamentalistes.»

  • #2
    8 Mars : les familles de disparus interpellent Bouteflika

    «Monsieur le président de la République, à l’occasion de la Journée internationale sur les droits de la femme, nous voudrions vous rappeler qu’il y a vingt ans déjà que nous attendons le retour de nos enfants.» C’est ainsi que le Collectif des familles de disparus en Algérie a interpellé le président Bouteflika dans une lettre rendue publique hier. «Vous savez, Monsieur le Président, nous, mères, épouses, sœurs et filles, continuerons à attendre, car nous ne pourrons jamais croire Monsieur le Président, que nos chers disparus sont morts même si ça fait vingt ans», lit-on dans cette lettre.

    «Monsieur le Président, jusqu’à quand allons-nous nous heurter au silence incessant des autorités administratives et judiciaires ? Le silence des casernes, des gendarmeries et des commissariats à qui nous nous sommes adressées le jour même de l’enlèvement. Le silence de ces agents qui nient toute participation à l’arrestation, alors même que nous les avons vus de nos propres yeux, venir arrêter nos enfants. Le silence de toutes ceux-là mêmes qui refusent de nous donner des informations sur le sort de nos proches et qui refusent d’enregistrer nos plaintes. Le silence de la justice aussi», écrit le CFDA. Et en conclusion de cet appel au Président : «L’heure est venue pour le peuple algérien de se donner les moyens d’assumer son Histoire dans toute sa complexité. Nous affirmons le droit de savoir de toutes les mères, les épouses, les sœurs et les filles, le droit de tous les citoyens de rechercher sans entraves et d’établir la Vérité sur les causes de la violence depuis 1988, le droit d’établir la responsabilité des acteurs de ce conflit.»

    Par : Adlène Meddi- El Watan

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