Ce dossier a été récement publier au journal Liberté.
Le comble depuis trois semaines j'attends la troisième partie, mais jusqu'à maintenant ils ne l'ont pas fait.
À propos, je l'ai pas lu encore.
------------------------------------------------------------------------
Par : Yahia H. Zoubir
Historiquement, le Maghreb n’a jamais été une région vitale pour les États-Unis, et ce, malgré sa position géostratégique. Mais, depuis la fin de la guerre froide, et surtout le 11 septembre, les Américains montrent un intérêt croissant pour la région, motivé notamment par des considérations énergétiques et sécuritaires. Liberté propose à ses lecteurs l’analyse par Yahia H. Zoubir, un éminent politologue, de l’évolution de la politique américaine au Maghreb. Le chercheur analysera, dans cette série publiée à partir d’aujourd’hui par Liberté, les relations politiques, économiques, militaires et sécuritaires qu’entretiennent les États-Unis avec chacun des États dans la région.
Beaucoup d’observateurs en France (1) et au Maghreb (2) suggèrent et s’inquiètent que les États-Unis s’intéressent un peu trop au Maghreb et qu’ils veulent supplanter l’influence française dans la région. Le ministre algérien des Affaires étrangères a même déclaré, le 13 avril 2006, que la France n’avait pas “le même poids en Algérie” que les États-Unis, qui sont devenus le principal client de l’Algérie, avec 12 milliards de dollars d’échanges en 2005.
Cette phrase apparemment anodine sous-entend que les États-Unis sont appelés à jouer un rôle prépondérant dans la région. Qu’en est-il en réalité ? Quels sont les intérêts des États-Unis au Maghreb ? Est-il vrai que les États-Unis souhaitent éliminer l’influence française et européenne au Maghreb ? L’hypothèse principale dans cet article est qu’il existe un intérêt incontestable des États-Unis pour cette région, devenue d’autant plus stratégique depuis le 11 septembre 2001, mais que les objectifs américains au Maghreb, certes réels, sont moins ambitieux et moins inquiétants pour les intérêts européens, français en particulier, qu’on ne le pense. En fait, les relations transatlantiques dans la région relèvent plus de la complémentarité que de la rivalité (3).
Cependant, on peut se poser la question de savoir si les États-Unis, dont la politique étrangère, surtout au Moyen-Orient, suscite un anti-américanisme certain – qui ne pourra que croître avec le soutien des États-Unis à la guerre menée par Israël contre les Palestiniens et les Libanais en juillet 2006 – pourront établir le même niveau d’influence qu’exerce l’Europe en général, et la France en particulier, sur les pays maghrébins et leurs opinions publiques.
De plus, l’hégémonisme et l’unilatéralisme de la politique étrangère américaine sous le régime de George W. Bush constituent un obstacle au développement de relations autres que celles relevant du domaine de la sécurité et des intérêts énergétiques.
La complicité israélo-américaine au Moyen-Orient a un impact certain au Maghreb. De plus, le soutien américain a des régimes autoritaires, malgré le discours de Bush sur la diffusion de la démocratie dans le monde arabe, ne fait que discréditer l’image des États-Unis dans la région.
Les États-Unis prétendent qu’ils soutiennent la démocratie et les droits humains partout dans le monde et dans le monde arabe en particulier. Or, malgré cette rhétorique, on constate que les États-Unis semblent être de plus en plus effrayés par les perspectives démocratiques dans le monde arabe. Leur hantise aujourd’hui est que des élections libres auraient comme conséquence la montée au pouvoir d’islamistes opposés à la politique américaine. La victoire du Hamas en Palestine ou la montée en puissance des Frères musulmans en Égypte lors des dernières élections parlementaires font craindre aux États-Unis que ces exemples soient suivis d’autres dans le monde arabe et fassent reculer la “lutte antiterroriste” en menaçant les intérêts des États-Unis et d’Israël. Il semble que les États-Unis aient à présent décidé que l’approche la plus prudente serait de soutenir les régimes autoritaires amis des États-Unis qui pourraient graduellement introduire des réformes “démocratiques” sans bouleversements majeurs. La preuve la plus éloquente est le rétablissement des relations avec la Libye, sans qu’aucune pression réelle ne soit faite sur le régime d’ouvrir le champ politique à la population libyenne. Or, une telle politique ne fera que discréditer davantage la politique américaine, accusée, à juste titre, de soutenir des régimes illégitimes, dès lors que ces derniers servent les intérêts des États-Unis.
L’ÉVOLUTION DES RELATIONS DES Etats-Unis AVEC LE MAGHREB
Pendant des décennies, les États-Unis ont généralement accordé assez peu d’attention au Maghreb, les dirigeants américains considérant que le Maghreb faisait partie de la zone d’influence de l’Europe et notamment de la France. Cependant, certaines périodes ont régulièrement marqué un regain d’intérêt de la part des États-Unis, tant sur le plan économique que politique. Il y eut au moins trois périodes au cours desquelles les États-Unis accordèrent une attention particulière au Maghreb : la Deuxième Guerre mondiale, la décolonisation dans les années 1950 et 1960 et enfin le conflit du Sahara occidental jusqu’aux années 1980.
Durant la guerre froide, les États-Unis n’ont jamais perçu le Maghreb en tant qu’entité régionale, malgré son importance géopolitique, et lui ont préféré des relations bilatérales avec chacun des États. Le Maghreb en tant que région n’était important que par rapport aux conséquences que son évolution pouvait avoir sur la stabilité de l’Europe méridionale, flanc sud de l’OTAN (Organisation du Traité de l’Atlantique Nord, NATO’s Southern Flank en anglais). Durant toute la période de la guerre froide, il s’agissait surtout d’endiguer l’influence communiste — celle de l’URSS en particulier — et de promouvoir les intérêts occidentaux. Malgré des relations sécuritaires et politiques privilégiées avec le Maroc et la Tunisie, les Américains s’en étaient remis à la France, ancienne puissance coloniale, pour jouer un rôle prépondérant au Maghreb. Donc, jusqu’au début des années 1990, il n’existait pas de politique régionale américaine au Maghreb [4]. Mais depuis la fin de la guerre froide et l’effondrement du bloc de l’Est, une politique régionale s’est graduellement dessinée, dictée par la stratégie globale de l’“hyper puissance” américaine.
Ainsi, depuis la fin des années 1990, la politique américaine est devenue manifestement favorable à l’émergence d’un ensemble régional maghrébin intégré dans l’espace de l’économie de marché. Ceci fait partie de la notion de Trading Blocs (“zones commerciales”). Même si la Libye était exclue de ce schéma, il ne fait aucun doute que les États-Unis envisageaient son intégration éventuelle dans cet ensemble, qui s’étend de ce pays au Maroc et inclut le Sahara occidental. La normalisation amorcée depuis décembre 2003, l’annonce le 15 mai 2006 du rétablissement des relations diplomatiques avec la Libye ainsi que la suppression de celle-ci de la liste des pays sponsorisant le terrorisme en sont la démonstration concrète.
Au cours de la période qui a suivi la guerre froide, l’intérêt américain pour le Maghreb s’est d’abord accru en raison de l’inévitable globalisation, puis surtout suite aux événements du 11 septembre 2001. En effet, à la fin des années 1990, les hommes politiques américains étaient très séduits par la vision d’une entité régionale maghrébine centrée sur le marché ; et depuis les attentats anti-américains, les États-Unis accordent encore plus d’attention à la région, en partie parce que certains membres du réseau terroriste Al-Qaïda, les dénommés “arabes afghans”, sont d’origine nord-africaine. Cependant, la situation de ni paix ni guerre au Sahara occidental continue d’être une source de tensions dans la région et reste le principal point de discorde entre l’Algérie et le Maroc, qui forment la colonne vertébrale du processus de régionalisation [5]. Depuis ses débuts en 1975, le conflit du Sahara occidental a exacerbé les tensions dans les relations algéro-marocaines. L’intégration économique maghrébine restera ainsi laborieuse tant que la dispute entre le Maroc et les nationalistes sahraouis ne sera pas résolue.
Le comble depuis trois semaines j'attends la troisième partie, mais jusqu'à maintenant ils ne l'ont pas fait.
À propos, je l'ai pas lu encore.
------------------------------------------------------------------------
Importance de la sécurité et marginalité de la démocratie
la politique étrangère américaine au maghreb
la politique étrangère américaine au maghreb
Par : Yahia H. Zoubir
Historiquement, le Maghreb n’a jamais été une région vitale pour les États-Unis, et ce, malgré sa position géostratégique. Mais, depuis la fin de la guerre froide, et surtout le 11 septembre, les Américains montrent un intérêt croissant pour la région, motivé notamment par des considérations énergétiques et sécuritaires. Liberté propose à ses lecteurs l’analyse par Yahia H. Zoubir, un éminent politologue, de l’évolution de la politique américaine au Maghreb. Le chercheur analysera, dans cette série publiée à partir d’aujourd’hui par Liberté, les relations politiques, économiques, militaires et sécuritaires qu’entretiennent les États-Unis avec chacun des États dans la région.
Beaucoup d’observateurs en France (1) et au Maghreb (2) suggèrent et s’inquiètent que les États-Unis s’intéressent un peu trop au Maghreb et qu’ils veulent supplanter l’influence française dans la région. Le ministre algérien des Affaires étrangères a même déclaré, le 13 avril 2006, que la France n’avait pas “le même poids en Algérie” que les États-Unis, qui sont devenus le principal client de l’Algérie, avec 12 milliards de dollars d’échanges en 2005.
Cette phrase apparemment anodine sous-entend que les États-Unis sont appelés à jouer un rôle prépondérant dans la région. Qu’en est-il en réalité ? Quels sont les intérêts des États-Unis au Maghreb ? Est-il vrai que les États-Unis souhaitent éliminer l’influence française et européenne au Maghreb ? L’hypothèse principale dans cet article est qu’il existe un intérêt incontestable des États-Unis pour cette région, devenue d’autant plus stratégique depuis le 11 septembre 2001, mais que les objectifs américains au Maghreb, certes réels, sont moins ambitieux et moins inquiétants pour les intérêts européens, français en particulier, qu’on ne le pense. En fait, les relations transatlantiques dans la région relèvent plus de la complémentarité que de la rivalité (3).
Cependant, on peut se poser la question de savoir si les États-Unis, dont la politique étrangère, surtout au Moyen-Orient, suscite un anti-américanisme certain – qui ne pourra que croître avec le soutien des États-Unis à la guerre menée par Israël contre les Palestiniens et les Libanais en juillet 2006 – pourront établir le même niveau d’influence qu’exerce l’Europe en général, et la France en particulier, sur les pays maghrébins et leurs opinions publiques.
De plus, l’hégémonisme et l’unilatéralisme de la politique étrangère américaine sous le régime de George W. Bush constituent un obstacle au développement de relations autres que celles relevant du domaine de la sécurité et des intérêts énergétiques.
La complicité israélo-américaine au Moyen-Orient a un impact certain au Maghreb. De plus, le soutien américain a des régimes autoritaires, malgré le discours de Bush sur la diffusion de la démocratie dans le monde arabe, ne fait que discréditer l’image des États-Unis dans la région.
Les États-Unis prétendent qu’ils soutiennent la démocratie et les droits humains partout dans le monde et dans le monde arabe en particulier. Or, malgré cette rhétorique, on constate que les États-Unis semblent être de plus en plus effrayés par les perspectives démocratiques dans le monde arabe. Leur hantise aujourd’hui est que des élections libres auraient comme conséquence la montée au pouvoir d’islamistes opposés à la politique américaine. La victoire du Hamas en Palestine ou la montée en puissance des Frères musulmans en Égypte lors des dernières élections parlementaires font craindre aux États-Unis que ces exemples soient suivis d’autres dans le monde arabe et fassent reculer la “lutte antiterroriste” en menaçant les intérêts des États-Unis et d’Israël. Il semble que les États-Unis aient à présent décidé que l’approche la plus prudente serait de soutenir les régimes autoritaires amis des États-Unis qui pourraient graduellement introduire des réformes “démocratiques” sans bouleversements majeurs. La preuve la plus éloquente est le rétablissement des relations avec la Libye, sans qu’aucune pression réelle ne soit faite sur le régime d’ouvrir le champ politique à la population libyenne. Or, une telle politique ne fera que discréditer davantage la politique américaine, accusée, à juste titre, de soutenir des régimes illégitimes, dès lors que ces derniers servent les intérêts des États-Unis.
L’ÉVOLUTION DES RELATIONS DES Etats-Unis AVEC LE MAGHREB
Pendant des décennies, les États-Unis ont généralement accordé assez peu d’attention au Maghreb, les dirigeants américains considérant que le Maghreb faisait partie de la zone d’influence de l’Europe et notamment de la France. Cependant, certaines périodes ont régulièrement marqué un regain d’intérêt de la part des États-Unis, tant sur le plan économique que politique. Il y eut au moins trois périodes au cours desquelles les États-Unis accordèrent une attention particulière au Maghreb : la Deuxième Guerre mondiale, la décolonisation dans les années 1950 et 1960 et enfin le conflit du Sahara occidental jusqu’aux années 1980.
Durant la guerre froide, les États-Unis n’ont jamais perçu le Maghreb en tant qu’entité régionale, malgré son importance géopolitique, et lui ont préféré des relations bilatérales avec chacun des États. Le Maghreb en tant que région n’était important que par rapport aux conséquences que son évolution pouvait avoir sur la stabilité de l’Europe méridionale, flanc sud de l’OTAN (Organisation du Traité de l’Atlantique Nord, NATO’s Southern Flank en anglais). Durant toute la période de la guerre froide, il s’agissait surtout d’endiguer l’influence communiste — celle de l’URSS en particulier — et de promouvoir les intérêts occidentaux. Malgré des relations sécuritaires et politiques privilégiées avec le Maroc et la Tunisie, les Américains s’en étaient remis à la France, ancienne puissance coloniale, pour jouer un rôle prépondérant au Maghreb. Donc, jusqu’au début des années 1990, il n’existait pas de politique régionale américaine au Maghreb [4]. Mais depuis la fin de la guerre froide et l’effondrement du bloc de l’Est, une politique régionale s’est graduellement dessinée, dictée par la stratégie globale de l’“hyper puissance” américaine.
Ainsi, depuis la fin des années 1990, la politique américaine est devenue manifestement favorable à l’émergence d’un ensemble régional maghrébin intégré dans l’espace de l’économie de marché. Ceci fait partie de la notion de Trading Blocs (“zones commerciales”). Même si la Libye était exclue de ce schéma, il ne fait aucun doute que les États-Unis envisageaient son intégration éventuelle dans cet ensemble, qui s’étend de ce pays au Maroc et inclut le Sahara occidental. La normalisation amorcée depuis décembre 2003, l’annonce le 15 mai 2006 du rétablissement des relations diplomatiques avec la Libye ainsi que la suppression de celle-ci de la liste des pays sponsorisant le terrorisme en sont la démonstration concrète.
Au cours de la période qui a suivi la guerre froide, l’intérêt américain pour le Maghreb s’est d’abord accru en raison de l’inévitable globalisation, puis surtout suite aux événements du 11 septembre 2001. En effet, à la fin des années 1990, les hommes politiques américains étaient très séduits par la vision d’une entité régionale maghrébine centrée sur le marché ; et depuis les attentats anti-américains, les États-Unis accordent encore plus d’attention à la région, en partie parce que certains membres du réseau terroriste Al-Qaïda, les dénommés “arabes afghans”, sont d’origine nord-africaine. Cependant, la situation de ni paix ni guerre au Sahara occidental continue d’être une source de tensions dans la région et reste le principal point de discorde entre l’Algérie et le Maroc, qui forment la colonne vertébrale du processus de régionalisation [5]. Depuis ses débuts en 1975, le conflit du Sahara occidental a exacerbé les tensions dans les relations algéro-marocaines. L’intégration économique maghrébine restera ainsi laborieuse tant que la dispute entre le Maroc et les nationalistes sahraouis ne sera pas résolue.
Commentaire