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la politique étrangère américaine au maghreb.

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  • la politique étrangère américaine au maghreb.

    Ce dossier a été récement publier au journal Liberté.
    Le comble depuis trois semaines j'attends la troisième partie, mais jusqu'à maintenant ils ne l'ont pas fait.

    À propos, je l'ai pas lu encore.


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    Importance de la sécurité et marginalité de la démocratie
    la politique étrangère américaine au maghreb

    Par : Yahia H. Zoubir


    Historiquement, le Maghreb n’a jamais été une région vitale pour les États-Unis, et ce, malgré sa position géostratégique. Mais, depuis la fin de la guerre froide, et surtout le 11 septembre, les Américains montrent un intérêt croissant pour la région, motivé notamment par des considérations énergétiques et sécuritaires. Liberté propose à ses lecteurs l’analyse par Yahia H. Zoubir, un éminent politologue, de l’évolution de la politique américaine au Maghreb. Le chercheur analysera, dans cette série publiée à partir d’aujourd’hui par Liberté, les relations politiques, économiques, militaires et sécuritaires qu’entretiennent les États-Unis avec chacun des États dans la région.
    Beaucoup d’observateurs en France (1) et au Maghreb (2) suggèrent et s’inquiètent que les États-Unis s’intéressent un peu trop au Maghreb et qu’ils veulent supplanter l’influence française dans la région. Le ministre algérien des Affaires étrangères a même déclaré, le 13 avril 2006, que la France n’avait pas “le même poids en Algérie” que les États-Unis, qui sont devenus le principal client de l’Algérie, avec 12 milliards de dollars d’échanges en 2005.
    Cette phrase apparemment anodine sous-entend que les États-Unis sont appelés à jouer un rôle prépondérant dans la région. Qu’en est-il en réalité ? Quels sont les intérêts des États-Unis au Maghreb ? Est-il vrai que les États-Unis souhaitent éliminer l’influence française et européenne au Maghreb ? L’hypothèse principale dans cet article est qu’il existe un intérêt incontestable des États-Unis pour cette région, devenue d’autant plus stratégique depuis le 11 septembre 2001, mais que les objectifs américains au Maghreb, certes réels, sont moins ambitieux et moins inquiétants pour les intérêts européens, français en particulier, qu’on ne le pense. En fait, les relations transatlantiques dans la région relèvent plus de la complémentarité que de la rivalité (3).
    Cependant, on peut se poser la question de savoir si les États-Unis, dont la politique étrangère, surtout au Moyen-Orient, suscite un anti-américanisme certain – qui ne pourra que croître avec le soutien des États-Unis à la guerre menée par Israël contre les Palestiniens et les Libanais en juillet 2006 – pourront établir le même niveau d’influence qu’exerce l’Europe en général, et la France en particulier, sur les pays maghrébins et leurs opinions publiques.
    De plus, l’hégémonisme et l’unilatéralisme de la politique étrangère américaine sous le régime de George W. Bush constituent un obstacle au développement de relations autres que celles relevant du domaine de la sécurité et des intérêts énergétiques.
    La complicité israélo-américaine au Moyen-Orient a un impact certain au Maghreb. De plus, le soutien américain a des régimes autoritaires, malgré le discours de Bush sur la diffusion de la démocratie dans le monde arabe, ne fait que discréditer l’image des États-Unis dans la région.
    Les États-Unis prétendent qu’ils soutiennent la démocratie et les droits humains partout dans le monde et dans le monde arabe en particulier. Or, malgré cette rhétorique, on constate que les États-Unis semblent être de plus en plus effrayés par les perspectives démocratiques dans le monde arabe. Leur hantise aujourd’hui est que des élections libres auraient comme conséquence la montée au pouvoir d’islamistes opposés à la politique américaine. La victoire du Hamas en Palestine ou la montée en puissance des Frères musulmans en Égypte lors des dernières élections parlementaires font craindre aux États-Unis que ces exemples soient suivis d’autres dans le monde arabe et fassent reculer la “lutte antiterroriste” en menaçant les intérêts des États-Unis et d’Israël. Il semble que les États-Unis aient à présent décidé que l’approche la plus prudente serait de soutenir les régimes autoritaires amis des États-Unis qui pourraient graduellement introduire des réformes “démocratiques” sans bouleversements majeurs. La preuve la plus éloquente est le rétablissement des relations avec la Libye, sans qu’aucune pression réelle ne soit faite sur le régime d’ouvrir le champ politique à la population libyenne. Or, une telle politique ne fera que discréditer davantage la politique américaine, accusée, à juste titre, de soutenir des régimes illégitimes, dès lors que ces derniers servent les intérêts des États-Unis.

    L’ÉVOLUTION DES RELATIONS DES Etats-Unis AVEC LE MAGHREB

    Pendant des décennies, les États-Unis ont généralement accordé assez peu d’attention au Maghreb, les dirigeants américains considérant que le Maghreb faisait partie de la zone d’influence de l’Europe et notamment de la France. Cependant, certaines périodes ont régulièrement marqué un regain d’intérêt de la part des États-Unis, tant sur le plan économique que politique. Il y eut au moins trois périodes au cours desquelles les États-Unis accordèrent une attention particulière au Maghreb : la Deuxième Guerre mondiale, la décolonisation dans les années 1950 et 1960 et enfin le conflit du Sahara occidental jusqu’aux années 1980.
    Durant la guerre froide, les États-Unis n’ont jamais perçu le Maghreb en tant qu’entité régionale, malgré son importance géopolitique, et lui ont préféré des relations bilatérales avec chacun des États. Le Maghreb en tant que région n’était important que par rapport aux conséquences que son évolution pouvait avoir sur la stabilité de l’Europe méridionale, flanc sud de l’OTAN (Organisation du Traité de l’Atlantique Nord, NATO’s Southern Flank en anglais). Durant toute la période de la guerre froide, il s’agissait surtout d’endiguer l’influence communiste — celle de l’URSS en particulier — et de promouvoir les intérêts occidentaux. Malgré des relations sécuritaires et politiques privilégiées avec le Maroc et la Tunisie, les Américains s’en étaient remis à la France, ancienne puissance coloniale, pour jouer un rôle prépondérant au Maghreb. Donc, jusqu’au début des années 1990, il n’existait pas de politique régionale américaine au Maghreb [4]. Mais depuis la fin de la guerre froide et l’effondrement du bloc de l’Est, une politique régionale s’est graduellement dessinée, dictée par la stratégie globale de l’“hyper puissance” américaine.
    Ainsi, depuis la fin des années 1990, la politique américaine est devenue manifestement favorable à l’émergence d’un ensemble régional maghrébin intégré dans l’espace de l’économie de marché. Ceci fait partie de la notion de Trading Blocs (“zones commerciales”). Même si la Libye était exclue de ce schéma, il ne fait aucun doute que les États-Unis envisageaient son intégration éventuelle dans cet ensemble, qui s’étend de ce pays au Maroc et inclut le Sahara occidental. La normalisation amorcée depuis décembre 2003, l’annonce le 15 mai 2006 du rétablissement des relations diplomatiques avec la Libye ainsi que la suppression de celle-ci de la liste des pays sponsorisant le terrorisme en sont la démonstration concrète.
    Au cours de la période qui a suivi la guerre froide, l’intérêt américain pour le Maghreb s’est d’abord accru en raison de l’inévitable globalisation, puis surtout suite aux événements du 11 septembre 2001. En effet, à la fin des années 1990, les hommes politiques américains étaient très séduits par la vision d’une entité régionale maghrébine centrée sur le marché ; et depuis les attentats anti-américains, les États-Unis accordent encore plus d’attention à la région, en partie parce que certains membres du réseau terroriste Al-Qaïda, les dénommés “arabes afghans”, sont d’origine nord-africaine. Cependant, la situation de ni paix ni guerre au Sahara occidental continue d’être une source de tensions dans la région et reste le principal point de discorde entre l’Algérie et le Maroc, qui forment la colonne vertébrale du processus de régionalisation [5]. Depuis ses débuts en 1975, le conflit du Sahara occidental a exacerbé les tensions dans les relations algéro-marocaines. L’intégration économique maghrébine restera ainsi laborieuse tant que la dispute entre le Maroc et les nationalistes sahraouis ne sera pas résolue.

  • #2
    LES OBJECTIFS DE LA POLITIQUE AMÉRICAINE AU MAGHREB

    De nos jours, les États-Unis favorisent un type de développement qui privilégie la croissance économique durable au Maghreb. Officiellement, “ les États-Unis recherchent las “renforcer [leurs] relations avec le Maroc, la Tunisie et l’Algérie, et encourager les réformes politiques et économiques” [6]. Avant les événements du 11 septembre, le principal intérêt américain était d’abord économique, l’indicateur le plus clair étant l’Alliance économique entre les États-Unis et l’Afrique du Nord, aussi appelée l’Initiative Eizenstat. Celle-ci fut lancée en 1999 et fut ultérieurement renommée “Programme économique américain pour l’Afrique du Nord”. Son objectif était de “resserrer les liens entre les États-Unis et les trois pays de l’Afrique du Nord en matière de commerce et d’investissements, de favoriser davantage le commerce entre nos pays, d’inciter un plus grand nombre d’entreprises américaines à investir dans la région et à créer des emplois bien rémunérées […] et de favoriser la réduction des barrières internes entre les pays de l’Afrique du Nord, qui ont freiné les flux de commerce normaux entre ces pays” [7]. Cette déclaration exprime implicitement le soutien aux trois pays du Maghreb central afin qu’ils raniment l’Union du Maghreb arabe (UMA) — à noter l’exclusion de la Libye et de la Mauritanie — et pousse à la réouverture de la frontière algéro-marocaine, fermée depuis août 1994. Le Programme économique américain pour l’Afrique du Nord — qui fait à présent partie du Broader Middle East Partnership Initiative (BMEPI, “Initiative de partenariat avec le Moyen-Orient élargi”) — rappelle constamment que les États-Unis souhaitent que le Maghreb devienne une entité intégrée, qui finisse par s’étendre vers l’Est. Il est fort probable qu’à long terme, les États-Unis souhaitent voir un ensemble nord-africain incluant l’Égypte [8] — qui occupe déjà un rôle d’observateur dans l’UMA — allié proche des États-Unis, qui servirait de maillon important dans la chaîne de normalisation avec Israël. Étant donné l’amélioration actuelle des relations entre la Libye et les États-Unis, cette expansion n’est probablement pas exagérée.
    Dans les années 1990, le principal souci des États-Unis au Maghreb était la situation extrêmement instable en Algérie [9]. Ainsi, l’incertitude dans ce pays a été la première raison pour laquelle les États-Unis, à l’instar des autres États, ont souhaité maintenir le statu quo dans le conflit du Sahara occidental. La forte émergence de l’islamisme radical, le chaos prévu par les analystes en cas de triomphe islamiste dans les urnes et les risques d’insurrection armée ont renforcé l’importance stratégique du Maroc. Aux yeux des Américains et de nombreux Européens, notamment les Français, le Maroc était perçu, jusqu’à récemment, comme une forteresse, en raison de sa stabilité interne et de sa situation de rempart géographique contre l’islamisme radical. La crainte des États-Unis et de l’Europe était que la déstabilisation de l’Algérie ou du Maroc entraîne, par ricochet, des conséquences terribles pour l’Europe. Un régime marocain affaibli, par exemple, faciliterait l’ascension de l’islamisme radical au sein de ce pays, ce qui donnerait lieu à une émigration massive vers l’Europe. Durant la crise algérienne, particulièrement dans la période 1992-1996, alors que le terrorisme islamiste faisait ravage, plus de 400 000 cadres algériens (informaticiens, médecins, etc.) auraient fui vers l’Europe et l’Amérique du Nord [10]. Notons aussi que c’est durant ces années de la crise algérienne que le Maghreb devenait important aux yeux des États-Unis. La mutation qu’ont connue les relations américano-algériennes illustre d’ailleurs bien cette évolution globale de la politique américaine à l’égard du Maghreb. Cependant, la monarchie marocaine demeure toujours l’allié principal des États-Unis au Maghreb.

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    • #3
      LE MAROC : PILIER DES Etats-Unis AU MAGHREB

      Dans la politique étrangère des États-Unis, le Maroc continue d’être un pilier de la présence américaine au sein du Maghreb et du Proche-Orient, notamment pour la VIe flotte américaine en Méditerranée et pour le “processus de paix” au Proche-Orient. À la fin de la guerre froide, l’aide économique et militaire américaine avait relativement diminué. Cependant le Maroc a su regagner sa place d’allié important, et ce, pour plusieurs raisons. La première était son soutien à la guerre du Golfe de 1991, pendant laquelle 2 000 soldats marocains ont été envoyés en Arabie Saoudite. La seconde raison était, comme nous l’avons vu, l’instabilité de l’Algérie. Alors que le régime algérien luttait pour sa survie et que le spectre d’une révolution islamiste radicale planait sur l’Afrique du Nord, le Maroc retrouvait son rôle de “rempart” contre les forces extrémistes anti-occidentales.
      Le royaume renouait ainsi avec le statut de protecteur des valeurs occidentales contre “l’obscurantisme islamiste”, après avoir rempli cette fonction contre le communisme au cours de la guerre froide. La capacité du roi Hassan II à réprimer les mouvements islamistes radicaux dans son pays lui a permis de devenir un intermédiaire particulièrement utile contre ces forces.
      Parallèlement, grâce à sa capacité à institutionnaliser l’islamisme et à sa tolérance envers certains islamistes agissant dans les limites qu’il a lui-même fixées, Hassan II — au titre de “roi des croyants” et accepté en tant que tel par une partie de la population marocaine — a favorisé une certaine stabilité. C’est d’ailleurs ce qui servit de modèle aux officiels américains, tels Robert Pelletreau, pour encourager un compromis entre le régime algérien et les islamistes “modérés” [11]. La troisième raison du soutien américain au Maroc est peut-être liée à l’accélération des réformes économiques et de libéralisation du marché, comprenant une privatisation à grande échelle, qui coïncide avec les objectifs idéologiques américains. Le soutien au profit du Maroc au sein du Congrès américain joue également un rôle important, le Maroc étant considéré comme un pays moins hostile à l’égard d’Israël. Ainsi, malgré les violations des droits de l’Homme, les États-Unis ont maintenu leur politique envers le Maroc.
      Le gouvernement de George W. Bush a renforcé les coopérations économique et militaire, lesquelles ont été particulièrement importantes dans le domaine antiterroriste. Pour les États-Unis, le Maroc se distingue également en tant que “modèle de démocratie” au sein du monde arabe. L’ancien ambassadeur américain au royaume chérifien déclara au mois de novembre 2000 qu’“en ce qui concerne le Maroc, nous sommes très enthousiasmés par l’expérience démocratique. Au ministère des Affaires étrangères, nous sommes persuadés que le Maroc est probablement la meilleure expérience démocratique en cours au Moyen-Orient” [12]. En novembre 2003, Bush annonça que “les États-Unis comptent prendre de nombreuses et importantes mesures pour renforcer nos relations avec le royaume [du Maroc], notamment des mesures visant le développement de la coopération économique et militaire, ainsi qu’en matière de lutte antiterroriste. Les États-Unis sont également sur le point de concéder au Maroc la considération d’allié de longue durée” [13]. Mis à part l’Égypte, le Maroc a reçu, depuis son indépendance en 1956, plus d’aide financière américaine que tout autre pays arabe. À partir de 1975, lorsque débuta le conflit au Sahara occidental, le Maroc obtint plus d’un cinquième de l’aide totale américaine en Afrique, avec plus d’un milliard de dollars allant à l’aide militaire.
      En 2002, le Maroc reçut 72% de l’aide totale américaine aux trois pays du Maghreb. En 2005, cette aide représentait 81,8%, avec près de 58 millions de dollars [14].
      L’aide militaire s’élève à présent à 20 millions de dollars, afin d’aider le Maroc non seulement à stopper l’immigration clandestine mais aussi, et surtout, à protéger ses frontières et poursuivre la lutte antiterroriste.
      Il convient cependant de signaler que, malgré son soutien affirmé au Maroc, Washington refuse de reconnaître la souveraineté marocaine dans le différend du Sahara occidental [15], afin de ne pas se trouver en désaccord avec les congressistes américains partisans de l’organisation d’un référendum sur ce territoire et surtout afin d’éviter une franche inimitié avec l’Algérie.
      NOTES
      [1] Cécile Jolly, Ambitions américaines en Méditerranée, Arabies, septembre 1999. L’auteur affirmait, il y a déjà sept ans, que nous avançons peut-être vers un “Maghreb américain” et que “les Américains font tout pour écarter du Maghreb les Européens, partenaires traditionnels de cette région”.
      [2] Les exemples abondent dans la presse maghrébine, qui soutient la même thèse. Voir notamment Hamida Ben Salah, “Le Maghreb suscite l’intérêt grandissant des États-Unis”, Le Quotidien d’Oran, 3 février 2004 ; Sarah Raouf, “Maghreb : les regards identiques de Paris et Washington”, Le Quotidien d’Oran, 8 décembre 2003; et Moussa Hormat-Allah, “Les Américains et le Sahara : les dessous des cartes”, L’Opinion (Maroc), janvier 2003.
      [3] Voir Yahia H. Zoubir, “Les
      États-Unis dans l’espace euro-méditerranéen : complémentarité, rivalité et réajustement d’influence”, Géoéconomie (Paris), n°35 (automne 2005), pp. 65-83.
      [4] Yahia H. Zoubir et Stephen Zunes, United States Policy in the Maghreb [La politique des États-Unis au Maghreb), in Yahia H. Zoubir (dir.), North Africa in Transition : State, Society, and Economic Transformation in the 1990s, University Press of Florida, Floride, 1999, pp. 227-243.
      [5] Yahia H. Zoubir, “Algerian-Moroccan Relations and their Impact on Maghrebi Integration” [“Les relations algéro-marocaines et leurs répercussions sur l’intégration maghrébine”], Journal of North African Studies, vol. 5, n°3 (automne 2001), pp. 43-74.
      [6] The White House, U.S. National Security Strategy Document [Document sur la stratégie de sécurité nationale des États-Unis], Washington, DC, 7 février 2000.
      [7] Stuart Eizenstat, entretien avec Doris McMillon sur WorldNet “Dialogue”, 8 juin 1999, in United States Information Agency, 16 juin 1999. Voir aussi Stuart E. Eizenstat, Third Annual Les Aspin Memorial Lecture, The Washington Institute for Near East Policy, Washington, DC, 8 mars 1999.
      [8] Lors de son passage au Maghreb en septembre 2002, le secrétaire adjoint au Commerce, Sam Bodman, ne laissa aucun doute quant à la volonté des États-Unis d’intégrer l’Égypte et le Maghreb dans l’économie mondiale.
      En effet, il déclara que l’initiative de sa visite était “la preuve de l’engagement de l’Administration Bush à un partenariat commercial fort et à l’investissement dans la région, et de la réalisation de l’objectif d’intégrer l’Égypte et le Maghreb à l’économie mondiale”. Voir “U.S. Commerce Deputy Secretary to Promote Trade and Economic Relations During Trip to Egypt, Tunisia, Algeria and Morocco the Week of September 21-28” [“Le secrétaire adjoint au Commerce va promouvoir les relations commerciales et économiques lors d’un voyage en Égypte, en Tunisie, en Algérie et au Maroc pendant la semaine du 21-28 septembre”], U.S.
      Department of Commerce Newsroom, 20 septembre 2002, http://www.commerce.gov/opa/press
      /Secretary_Evans/2002_Releases /Sept_20_Bodman_trip.htm ;
      Cette volonté de créer un Maghreb intégré économiquement fut réitérée lors du passage de Karen Zens, haut officiel du ministère américain du Commerce. Voir aussi Fayçal Métaoui, “États-Unis : la théorie Burns”, El Watan, 26 octobre 2003.
      [9] Yahia H. Zoubir, Algeria and U.S. Interests : Containing Radical Islamism and Promoting Democracy [ L’Algérie et les intérêts américains : endiguer l’islamisme radical et promouvoir la démocratie], Middle East Policy, vol. 9, 1er mars 2002, pp. 64-81.
      [10] Voir Mourad Saouli, “Algérie : fuite des cerveaux”, Arabies, octobre 2003. Même si le terrorisme islamiste était en grande partie responsable de cet exode, il ne faut pas non plus oublier les phénomènes endogènes tels que la corruption, la dégradation du niveau de vie de la classe moyenne, le favoritisme, la bureaucratie et le népotisme, qui enveniment la société algérienne ainsi que les autres pays du Maghreb.
      [11] Voir sur ce point Zoubir, “Algeria and U.S. Interests : Containing Radical Islamism and Promoting Democracy”, op. cit.
      [12] Voir “Transcript : U.S. Envoy to Morocco on U.S.-Maghreb Trade (Gabriel promotes Eizenstat Initiative)” [“Transcription : Représentant américain au Maroc discute du commerce entre les États-Unis et le Maghreb (Gabriel promeut l’Initiative Eizenstat)”], 16 novembre 2000, http://usembassyisrael.org.il/publish/peace
      /archives/2000/november/me1117a.htm.
      [13] Associated Press, 20 novembre 2003.
      [14] Ces chiffres ont été calculés sur la base des documents du “Congressional Budget Justification for Foreign Operations” [“Justification du budget du Congrès pour les opérations étrangères”], U.S. Department of State, années fiscales 2004-2005.
      [15] Voir la lettre de Robert B. Zelnick, député au Commerce, au député Joseph R. Pitts, 20 juillet 2004.

      (A suivre)
      Y. H. Z. (*)

      (*) Professeur en relations internationales et en management international à Euromed Marseille, école de management en France. Il est l’auteur de nombreux articles et chapitres d’ouvrages sur la région du Maghreb et sur la politique étrangère américaine. Il prépare actuellement (avec Haizam Amirah-Fernandez) un ouvrage collectif intitulé North Africa in Motion : Politics, Region and the Limits of Transformation (L’Afrique du Nord en mouvement : politique, région et les limites du changement), Routledge, à paraître.

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      • #4
        2ième partie...

        A la fin des années 1990, les relations entre les États-Unis et l’Algérie ont connu, à tous les niveaux, un essor considérable par rapport à ce qu’elles avaient été jusqu’alors. L’antagonisme politique et idéologique du passé s’est peu à peu dissipé.
        La meilleure illustration de cette évolution fut la visite officielle du président Abdelaziz Bouteflika aux États-Unis en juillet 2001. L’influence croissante de l’Algérie au sein de l’Organisation de l’unité africaine (OUA, devenue l’Union africaine), ainsi que l’importance grandissante de l’axe Algérie-Nigeria-Afrique du Sud, ne sont pas passées inaperçues à Washington, que l’on soupçonne même d’en être un actif promoteur (en comparaison avec l’échec du plan Oméga, défendu par le Sénégal et la France, que le président sénégalais Abdoulaye Wade a tenté de lier au Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique) [16]. Quant à la résolution du conflit du Sahara occidental, les hommes politiques américains sont conscients qu’elle est impossible sans l’approbation de l’Algérie [17].
        Dans un autre registre, les États-Unis avaient compris, bien avant le 11 septembre, qu’il était nécessaire de coopérer avec l’Algérie en matière de terrorisme mondial. En effet, au mois de mars 2001, le directeur du FBI, Louis Freeh, était venu en Algérie pour solliciter l’aide de ses autorités dans la lutte contre le réseau d’Oussama Ben Laden [18]. Néanmoins, les attentats du 11 septembre ont accéléré le rapprochement entre les deux pays, au moins en ce qui concerne la coopération sécuritaire. Malgré certaines réserves, l’Algérie a accepté de se joindre à la coalition internationale menée par les États-Unis. Les autorités algériennes ont ainsi remis à Washington une liste de plusieurs centaines de suspects — militants islamistes algériens réfugiés en Europe et en Amérique — et ont offert leur coopération en matière de sécurité et d’échanges entre les services secrets. Le président Bouteflika a aussi effectué une visite à Washington le 5 novembre 2001. Au cours de ce voyage, dont le thème principal était la lutte mondiale contre le terrorisme, les Algériens ont obtenu des résultats politiques positifs : le soutien à la lutte antiterroriste en Algérie, l’appui au manifeste de l’OUA à Alger sur la lutte contre le terrorisme, la condamnation des violentes prises de pouvoir en Afrique et le soutien à la diplomatie de l’Algérie en Afrique et en Méditerranée. La CIA, le FBI et la NSA (National Security Agency) ou (“Agence de sécurité nationale”) continuent de solliciter l’aide des Algériens, qui ont acquis une expérience extrêmement précieuse dans le domaine de la lutte antiterroriste. Plus important encore, tout en refusant de vendre à l’Algérie des armes de guerre, les États-Unis ont accepté de fournir aux forces de sécurité algériennes un équipement efficace [19], permettant d’éliminer les groupes “résiduels” de militants armés dans les zones rurales. Ceci a permis à l’Algérie de rompre l’embargo militaire qui l’accablait depuis l’annulation du processus électoral en janvier 1992. L’embargo avait longtemps forcé les Algériens à s’approvisionner dans des marchés parallèles et hypothétiques dans l’ancien bloc communiste, en Afrique du Sud et en Turquie [20].
        Ce rapprochement entre Washington et Alger n’aurait pas été aussi facile sans le rôle régional de plus en plus important que l’Algérie pouvait jouer dans la préservation de la sécurité en Méditerranée, une région vitale pour l’Alliance atlantique. L’Otan a reconnu l’importance de la relation entre la sécurité euro-atlantique et la stabilité en Méditerranée. Ainsi, les visites de Bouteflika au quartier général de l’Otan en Belgique, en décembre 2001 et en décembre 2002, ont donné lieu à l’établissement d’un programme de coopération et à des manœuvres conjointes en Méditerranée par les forces algériennes et celles de l’Otan.
        Sur le plan économique, les relations entre l’Algérie et les États-Unis ont connu une croissance remarquable. En juillet 2001, les deux pays ont signé un accord-cadre sur le commerce et l’investissement, établissant une procédure consultative qui donna lieu à un accord bilatéral d’investissements, à des concessions commerciales mutuelles et à un accord sur la double imposition fiscale, ouvrant plus largement les ressources pétrolifères et gazières algériennes aux entreprises multinationales. L’objectif de cet accord était de doubler le volume des échanges et de permettre aux entreprises américaines d’acquérir une plus grande part du marché algérien, notamment en matière d’hydrocarbures. Les États-Unis sont ainsi devenus les plus grands investisseurs dans ce secteur (avec 2,7 milliards de dollars [21]), alors que la France, premier partenaire économique de l’Algérie, n’investit que 500 millions d’euros [22]. Lors de sa visite à Washington en juillet 2001, Bouteflika avait aussi exprimé le souhait que cet investissement double en 2005. Cependant, ces dernières années, les entreprises américaines se sont également intéressées à des secteurs autres que celui de l’énergie, comme par exemple ceux des finances, des produits pharmaceutiques, des télécommunications et de l’informatique.
        Il n’en demeure pas moins que malgré cette évolution positive, les investissements américains, hors hydrocarbures, demeurent faibles. L’instabilité de l’Algérie au cours des années 1990 explique en partie le faible niveau d’investissements étrangers directs (IED) américains. La lenteur des réformes économiques, la vétusté de certaines infrastructures et la bureaucratie sont autant de facteurs ayant maintenu les investisseurs américains à l’écart. Signalons cependant que l’Afrique du Nord, en général, bénéficie d’une part peu élevée du marché mondial d’IDE (cinq milliards de dollars chaque année). L’Algérie a tout de même réussi à attirer 3,4 milliards de dollars en 2004, soit le double de 2003, dont la majorité hors du secteur des hydrocarbures [23]. Il ne fait aucun doute que les relations économiques entre l’Algérie et les États-Unis vont bon train. Les États-Unis sont devenus le premier client de l’Algérie et son troisième fournisseur au premier trimestre 2005 [24].
        La coopération algéro-américaine s’étend peu à peu à d’autres domaines, tels ceux ayant trait à l’activité parlementaire ou au fonctionnement des banques. En janvier 2006, par exemple, une délégation de la National Conference of States Legislatures (“Conférence nationale des institutions législatives des États américains”) a séjourné en Algérie. La mission de la délégation était d’évaluer, sur la base de ce qui avait été accompli jusque-là, les projets susceptibles de figurer dans le nouveau programme de coopération pour le biennum 2006-2007 [25], ceci toujours dans le cadre de la Mepi.
        Il est important de souligner que si les relations entre les États-Unis et l’Algérie ont connu un essor considérable, et même si ces relations semblent faire contrepoids à l’influence de la France en Algérie, il serait faux de croire que les Algériens se sont alignés sur les États-Unis. Les officiels algériens insistent sur le fait que les bons rapports avec les États-Unis ne se font pas au détriment des rapports avec d’autres pays, notamment avec la France. Donc, ce n’est pas un hasard si Abdelaziz Bouteflika a déclaré, après la visite de son ministre des Affaires étrangères aux Etats-Unis, en avril 2006, que “la France est un pays ami”. L’analyse montre en fait que l’Algérie fait tout pour diversifier ses relations politiques, économiques et militaires, comme en témoigne l’accord de partenariat stratégique signé avec la Russie en mars 2006. Il faut aussi suivre les différents déplacements des dirigeants civils et militaires algériens, pour comprendre cette volonté de diversification et d’équilibre dans les relations internationales. Les manœuvres militaires séparées avec les Français, les Russes et les Américains illustrent cette détermination de non-alignement.

        Commentaire


        • #5
          NOTES
          [16] Voir Jean-Pierre Plancade, “Projet de loi autorisant l’approbation de la convention d’établissement entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Sénégal”, Rapport n° 298 (2001-2002), commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, Sénat, 15 mai 2002, http://www.senat.fr/rap/l01-298/l01-298_mono.html.
          [17] Entretiens de l’auteur avec de nombreux hauts officiels américains à Washington DC (en 1996, 2000, 2001, 2004 et 2006).
          [18] Pour plus de détails, voir Hani Rabah, “Algérie-États-Unis : le patron du FBI chez Bouteflika”, Jeune Indépendant (Algérie), 25 mars 2001. Des officiels aussi bien algériens qu’américains ont révélé à l’auteur que les services secrets des deux pays échangeaient des renseignements sur les réseaux terroristes durant les années 1990.
          [19] Voir Richard Boucher, porte-parole du ministère des Affaires étrangères américain, Daily Press Briefing, Washington DC, 11 décembre 2002 ; et Steven R. Weisman, “US to Sell Military Gear to Algeria to Help It Fight Militants” [“Les États-Unis vont vendre du matériel militaire à l’Algérie pour l’aider à combattre les militants”], New York Times, 10 décembre 2002.
          [20] À ce sujet, voir le chapitre de Daniel Volman, “Foreign Arms Sales and the Military Balance in the Maghreb” [“Ventes d’armes étrangères et l’équilibre militaire au Maghreb”], in Zoubir, North Africa in Transition, op. cit., pp. 220-221.
          [21] “Country Profile : Algeria” [“Profil du pays : Algérie”], PolitInfo.com, mai 2004, http://us.politinfo.com/Information/
          Country_Profiles/country_profile_197.html. Selon les chiffres du ministère du Commerce américain en 2002, cet investissement représentait 88,6% de l’investissement total américain au Maghreb et 13,6% de l’investissement total américain dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord. Les échanges commerciaux entre l’Algérie et les États-Unis s’élevaient à 3,5 milliards de dollars, soit 72% des échanges totaux des États-Unis avec le Maghreb. Voir le discours du président Abdelaziz Bouteflika lors de la réception de l’U.S. - Algeria Business Council (“Conseil d’affaires algéro-américain”), New York, 23 septembre 2003, http://www.algeriaus.org/President%2...t%20Speech.htm.
          [22] Alex Lefèvre, “Chirac Promotes French Interests in Algeria” [“Chirac promeut les intérêts de la France en Algérie”], World Socialist Web Site, International Committee of the Fourth International, 15 mars 2003, http://www.wsws.org/articles/2003/ma...alge-m15.shtml.
          [23] Economist Intelligence Unit, Algeria : Country Forecast [“Algérie : pronostic du pays”], The Economist, 21 mars 2005, http://www.economist.com
          /countries/Algeria/profile.cfm ? folder=Profile-Forecast.
          [24] “Les États-Unis, premier client de l’Algérie au premier trimestre 2005”, Agence France Presse, 24 avril 2005.
          [25] Pour plus de détails sur la coopération législative, voir Ghada Hamrouche, “Les Américains contribuent à moderniser le processus législatif algérien”, La Tribune (Alger), 22 janvier 2006 ; et R. N., “Les délégations américaines se succèdent à Alger”, Le Quotidien d’Oran, 15 janvier 2006.

          (À suivre)
          Y. H. Z. (*)
          (*) Yahia H. Zoubir est professeur en relations internationales et en management international à Euromed Marseille, école de management en France. Il est l’auteur de nombreux articles et chapitres d’ouvrages sur la région du Maghreb et sur la politique étrangère américaine. Il prépare actuellement (avec Haizam Amirah-Fernandez) un ouvrage collectif intitulé North Africa in Motion : Politics, Region and the Limits of Transformation (L’Afrique du Nord en mouvement : politique, région et les limites du changement), Routledge, à paraître.

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          • #6
            perso chui contre l'invetisement des americain au magreb surtt en algerie et c vré quil va avoir une base militarie americaine en Algerie?

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            • #7
              Cette ce n'est que des racontards. Jusqu'a présent l'Algérie a toukours refusé, ce qui est je suppose la raison pour laquelle l'Algérie est sur la liste des pays non démocratiques des USA .

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