M’hamed Mohamed Cheikh à Reporters
Premier conseiller à l’ambassade de la République arabe sahraouie démocratique (RASD) en Algérie, M’hamed Mohamed Cheikh revient, dans cet entretien à Reporters, sur une crise dont l’aboutissement ne semble pas pour demain. A cœur ouvert, il livre ses convictions quant à la complicité de nombre de puissances, notamment européennes, dans l’exploitation illégale des richesses naturelles du Sahara occidental.
Reporters : A la fin du mois de mars, l’envoyé spécial des Nations unies, M. Ross, effectuera une visite dans la région pour faire le point sur le dossier sahraoui. Quel bilan faites-vous de sa mission depuis sa désignation par Ban Ki-moon en tant qu'envoyé spécial pour le Sahara occidental ?
M’hamed Mohamed Cheikh : Depuis sa désignation en janvier 2009 par Ban Ki-moon en tant qu’envoyé spécial pour le Sahara occidental, Christopher Ross a mené huit rounds de rencontres informelles à Manhasset qui n’ont rien donné jusqu’à présent, en raison de l’intransigeance du gouvernement marocain, qui, rappelons-le, a retiré formellement sa confiance à l’envoyé personnel onusien, suite au rapport accablant du SG des Nations unies.
Ce dernier a clairement indiqué que la Minurso éprouvait des difficultés à effectuer ses missions, précisant qu’elle n’est en mesure «ni d’exercer pleinement ses fonctions de surveillance, d’observation et de liaison liées au maintien de la paix, ni d’endiguer, de sa propre autorité, l’érosion de ses capacités de mettre en œuvre son mandat». Il avait également relevé que le principe de neutralité de la Minurso «est, depuis de nombreuses années, compromis par le Maroc», ce qui avait alors amené le Conseil à insister, dans sa résolution, sur la nécessité d’une totale liberté de mouvement de cette mission. Cela dit, M. Ross se rendra du 20 mars au 3 avril dans la région, y compris au Sahara occidental occupé.
Justement, qu’attendez-vous de nouveau ou de plus important de cette visite ?
Nous attendons de cette visite une réelle prise en charge par l’ONU de la question du Sahara occidental, des mesures et des décisions nécessaires à même de sauvegarder et de protéger l’autorité des Nations unies et la crédibilité de son œuvre de paix au Sahara occidental des dérives et conséquences de la stratégie de fuite en avant poursuivie par le Maroc. Celui-ci ne peut indéfiniment continuer à narguer la communauté internationale et à maintenir, contre vents et marées, le conflit du Sahara occidental dans l’impasse.
Dans une déclaration récente, M. Ross a parlé de trouver une solution «mutuellement bénéfique» aux deux parties. Que vous inspire cette déclaration comme analyse et ne craignez-vous pas de la part de M. Ross, qui a eu des difficultés avec Rabat, d’être tenté de défendre la thèse de l’autonomie dans le cadre de la souveraineté du Maroc ?
Ce que doit entreprendre M. Ross, c’est accélérer le processus des négociations et l’arrêt d’un calendrier précis et une date limite pour la tenue d’un référendum d’autodétermination. Les négociations entre le Front Polisario et le Maroc doivent reprendre naturellement, et si possible rapidement, sur la base du mandat du Conseil de sécurité pour trouver une solution juste et durable au conflit de décolonisation du Sahara occidental, garantissant le droit inaliénable du peuple sahraoui à l’autodétermination. C’est la seule et unique solution quant à la prétendue autonomie. Mais dans le cadre de la souveraineté marocaine, c’est un projet mort-né depuis bien longtemps.
Vous avez toujours cherché à faire la différence entre Washington et Paris dans leur relation avec Rabat. Autant vous ménagez les Américains, qui ne sont pas si engagés que cela dans le soutien de la cause sahraouie, autant vous critiquez les Français pour leur alignement sur les positions de Rabat. Croyez-vous sincèrement qu’il existe une différence d’approche entre Paris et Washington ?
Il faut signaler dans ce sens que la France, membre du Conseil de sécurité, responsable de la paix et de la sécurité dans le monde, et eu égard aux multiples et nombreux liens étroits qu’elle entretient avec l’ensemble des composantes du Maghreb, pourrait, plus que toute autre puissance, jouer un rôle déterminant dans la solution juste et durable du conflit du Sahara occidental.
Nous avons toujours regretté que certains gouvernements français aient adopté une politique d’alignement inconditionnel sur les thèses du Maroc, au mépris du droit et au détriment d’une relation harmonieuse de la France avec toutes les composantes du Maghreb et de la coopération et du développement de toute la région. Ils ont, de la sorte, encouragé le Maroc à persévérer dans sa ruineuse entreprise coloniale, qui a hypothéqué l’avenir du pays, pesé lourdement sur son économie et participé à son isolement dans le voisinage immédiat. Ce fâcheux parti pris, peu compréhensible, et par ailleurs assurément préjudiciable à ses intérêts, a fait que la France est devenue, au fil des dernières années, une partie du problème, plutôt qu’une chance pour sa solution, comme nous l’avions ardemment et sincèrement souhaité.
Premier conseiller à l’ambassade de la République arabe sahraouie démocratique (RASD) en Algérie, M’hamed Mohamed Cheikh revient, dans cet entretien à Reporters, sur une crise dont l’aboutissement ne semble pas pour demain. A cœur ouvert, il livre ses convictions quant à la complicité de nombre de puissances, notamment européennes, dans l’exploitation illégale des richesses naturelles du Sahara occidental.
Reporters : A la fin du mois de mars, l’envoyé spécial des Nations unies, M. Ross, effectuera une visite dans la région pour faire le point sur le dossier sahraoui. Quel bilan faites-vous de sa mission depuis sa désignation par Ban Ki-moon en tant qu'envoyé spécial pour le Sahara occidental ?
M’hamed Mohamed Cheikh : Depuis sa désignation en janvier 2009 par Ban Ki-moon en tant qu’envoyé spécial pour le Sahara occidental, Christopher Ross a mené huit rounds de rencontres informelles à Manhasset qui n’ont rien donné jusqu’à présent, en raison de l’intransigeance du gouvernement marocain, qui, rappelons-le, a retiré formellement sa confiance à l’envoyé personnel onusien, suite au rapport accablant du SG des Nations unies.
Ce dernier a clairement indiqué que la Minurso éprouvait des difficultés à effectuer ses missions, précisant qu’elle n’est en mesure «ni d’exercer pleinement ses fonctions de surveillance, d’observation et de liaison liées au maintien de la paix, ni d’endiguer, de sa propre autorité, l’érosion de ses capacités de mettre en œuvre son mandat». Il avait également relevé que le principe de neutralité de la Minurso «est, depuis de nombreuses années, compromis par le Maroc», ce qui avait alors amené le Conseil à insister, dans sa résolution, sur la nécessité d’une totale liberté de mouvement de cette mission. Cela dit, M. Ross se rendra du 20 mars au 3 avril dans la région, y compris au Sahara occidental occupé.
Justement, qu’attendez-vous de nouveau ou de plus important de cette visite ?
Nous attendons de cette visite une réelle prise en charge par l’ONU de la question du Sahara occidental, des mesures et des décisions nécessaires à même de sauvegarder et de protéger l’autorité des Nations unies et la crédibilité de son œuvre de paix au Sahara occidental des dérives et conséquences de la stratégie de fuite en avant poursuivie par le Maroc. Celui-ci ne peut indéfiniment continuer à narguer la communauté internationale et à maintenir, contre vents et marées, le conflit du Sahara occidental dans l’impasse.
Dans une déclaration récente, M. Ross a parlé de trouver une solution «mutuellement bénéfique» aux deux parties. Que vous inspire cette déclaration comme analyse et ne craignez-vous pas de la part de M. Ross, qui a eu des difficultés avec Rabat, d’être tenté de défendre la thèse de l’autonomie dans le cadre de la souveraineté du Maroc ?
Ce que doit entreprendre M. Ross, c’est accélérer le processus des négociations et l’arrêt d’un calendrier précis et une date limite pour la tenue d’un référendum d’autodétermination. Les négociations entre le Front Polisario et le Maroc doivent reprendre naturellement, et si possible rapidement, sur la base du mandat du Conseil de sécurité pour trouver une solution juste et durable au conflit de décolonisation du Sahara occidental, garantissant le droit inaliénable du peuple sahraoui à l’autodétermination. C’est la seule et unique solution quant à la prétendue autonomie. Mais dans le cadre de la souveraineté marocaine, c’est un projet mort-né depuis bien longtemps.
Vous avez toujours cherché à faire la différence entre Washington et Paris dans leur relation avec Rabat. Autant vous ménagez les Américains, qui ne sont pas si engagés que cela dans le soutien de la cause sahraouie, autant vous critiquez les Français pour leur alignement sur les positions de Rabat. Croyez-vous sincèrement qu’il existe une différence d’approche entre Paris et Washington ?
Il faut signaler dans ce sens que la France, membre du Conseil de sécurité, responsable de la paix et de la sécurité dans le monde, et eu égard aux multiples et nombreux liens étroits qu’elle entretient avec l’ensemble des composantes du Maghreb, pourrait, plus que toute autre puissance, jouer un rôle déterminant dans la solution juste et durable du conflit du Sahara occidental.
Nous avons toujours regretté que certains gouvernements français aient adopté une politique d’alignement inconditionnel sur les thèses du Maroc, au mépris du droit et au détriment d’une relation harmonieuse de la France avec toutes les composantes du Maghreb et de la coopération et du développement de toute la région. Ils ont, de la sorte, encouragé le Maroc à persévérer dans sa ruineuse entreprise coloniale, qui a hypothéqué l’avenir du pays, pesé lourdement sur son économie et participé à son isolement dans le voisinage immédiat. Ce fâcheux parti pris, peu compréhensible, et par ailleurs assurément préjudiciable à ses intérêts, a fait que la France est devenue, au fil des dernières années, une partie du problème, plutôt qu’une chance pour sa solution, comme nous l’avions ardemment et sincèrement souhaité.
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