DE LA HARISSA SUR LE QATAR
Le quotidien d'Oran -par M. Saadoune
En Tunisie, à défaut d'avoir rédigé une Constitution pour institutionnaliser et enraciner la démocratie, la parole est devenue libre. Pour le meilleur et le pire.
La presse tunisienne est, en général, très hostile à la troïka en place même si elle focalise ses attaques sur le président Moncef Marzouki et le chef d'Ennahda Rached Ghannouchi.
Souvent ces attaques relèvent du persiflage et d'assertions véhémentes, certains affirment que des affaires de l'ancien régime se cachent derrière ces médias «hurlants».
Elle n'exprime probablement pas l'état de l'opinion tunisien, la «polarisation» idéologique et politique s'exprimant par excellence dans les médias.
Mais ceux qui sont arrivés au pouvoir par les urnes ne peuvent ignorer qu'une parole excessivement libre - qui pourrait être arbitrée par des juges en cas de diffamation - est meilleure qu'une parole bridée.
Moncef Marzouki qui a fait preuve d'un certain stoïcisme devant des attaques, parfois insultantes, s'est laissé aller à un ton un tantinet menaçant contre ceux qui, dans son pays, critiquent avec férocité le Qatar. «Toute personne qui s'avise de s'attaquer au Qatar aura ses actes sur la conscience, avant d'assumer sa responsabilité devant la justice ».
La sortie était des plus maladroites même s'il est évident que le président tunisien est animé, au-delà de ses propres convictions sur le rôle «révolutionnaire» d'Al-Jazira, du souci des intérêts de la Tunisie.
Exerçant une responsabilité d'Etat, il sait que la Tunisie n'a pas les moyens de faire la fine bouche devant d'éventuelles aides ou investissements en provenance du richissime émirat. Mais le procédé est d'autant plus contre-productif qu'il a abouti à un effet totalement inverse de celui recherché.
Les réseaux sociaux se sont enflammés contre les «menaces» de Moncef Marzouki et les articles anti-Qatar en tout genre se sont multipliés.
Jeudi, c'était au tour d'Ennahda de faire des remontrances en dénonçant une «campagne médiatique systématique» menée contre l'Etat du Qatar et ses symboles par «des parties politiques et médiatiques».
Le mouvement islamiste a affirmé que la campagne a «dépassé toutes les limites morales de la critique» et qu'elle est «préjudiciable au Qatar autant qu'à la Tunisie».
Le mouvement islamiste invoque, lui aussi, l'intérêt national qui serait menacé par ces campagnes en soulignant «l'apport décisif de la chaîne Al-Jazira au succès de la révolution et à l'affranchissement des Tunisiens de l'emprise du dictateur déchu».
Pour une partie des élites tunisiennes, le Qatar est justement trop envahissant et cherche à dicter à la Tunisie sa conduite.
D'autres y voient un grand soutien au parti dominant, les islamistes d'Ennahda, qui concentre toutes les critiques, les appréhensions et aussi les haines.
La chaîne Al-Jazira a bien été un amplificateur médiatique de la contestation tunisienne qui a fait fuir Zine El-Abidine Ben Ali. Elle était en général appréciée par l'ensemble des courants hormis les partisans de Ben Ali. Pourtant, très rapidement, en Tunisie comme en Algérie, la désaffection à l'égard de la chaîne qatarie - vitrine politico-médiatique de l'émirat - est bien réelle. Un média qui «s'oublie» et verse dans la propagande perd à la longue de son crédit.
Le régime du Qatar n’ayant pas résisté à l’envie de faire «joujou» avec la chaîne Al-Jazira en arabe - la précision est utile car la chaîne en anglais, dirigée par des anglosaxons, reste professionnelle et non propagandiste -, le reflux est bien réel.
Dans le cas de la Tunisie, ce reflux s’est accompagné d’un sentiment d’envahissement à l’égard d’un Qatar suspecté de vouloir exercer une tutelle sur la Tunisie. Et surtout, dans les batailles politiques en cours en Tunisie, Al-Jazira est perçue, c’est un retournement de situation, comme un média proche du «pouvoir» en Tunisie.
Le quotidien d'Oran -par M. Saadoune
En Tunisie, à défaut d'avoir rédigé une Constitution pour institutionnaliser et enraciner la démocratie, la parole est devenue libre. Pour le meilleur et le pire.
La presse tunisienne est, en général, très hostile à la troïka en place même si elle focalise ses attaques sur le président Moncef Marzouki et le chef d'Ennahda Rached Ghannouchi.
Souvent ces attaques relèvent du persiflage et d'assertions véhémentes, certains affirment que des affaires de l'ancien régime se cachent derrière ces médias «hurlants».
Elle n'exprime probablement pas l'état de l'opinion tunisien, la «polarisation» idéologique et politique s'exprimant par excellence dans les médias.
Mais ceux qui sont arrivés au pouvoir par les urnes ne peuvent ignorer qu'une parole excessivement libre - qui pourrait être arbitrée par des juges en cas de diffamation - est meilleure qu'une parole bridée.
Moncef Marzouki qui a fait preuve d'un certain stoïcisme devant des attaques, parfois insultantes, s'est laissé aller à un ton un tantinet menaçant contre ceux qui, dans son pays, critiquent avec férocité le Qatar. «Toute personne qui s'avise de s'attaquer au Qatar aura ses actes sur la conscience, avant d'assumer sa responsabilité devant la justice ».
La sortie était des plus maladroites même s'il est évident que le président tunisien est animé, au-delà de ses propres convictions sur le rôle «révolutionnaire» d'Al-Jazira, du souci des intérêts de la Tunisie.
Exerçant une responsabilité d'Etat, il sait que la Tunisie n'a pas les moyens de faire la fine bouche devant d'éventuelles aides ou investissements en provenance du richissime émirat. Mais le procédé est d'autant plus contre-productif qu'il a abouti à un effet totalement inverse de celui recherché.
Les réseaux sociaux se sont enflammés contre les «menaces» de Moncef Marzouki et les articles anti-Qatar en tout genre se sont multipliés.
Jeudi, c'était au tour d'Ennahda de faire des remontrances en dénonçant une «campagne médiatique systématique» menée contre l'Etat du Qatar et ses symboles par «des parties politiques et médiatiques».
Le mouvement islamiste a affirmé que la campagne a «dépassé toutes les limites morales de la critique» et qu'elle est «préjudiciable au Qatar autant qu'à la Tunisie».
Le mouvement islamiste invoque, lui aussi, l'intérêt national qui serait menacé par ces campagnes en soulignant «l'apport décisif de la chaîne Al-Jazira au succès de la révolution et à l'affranchissement des Tunisiens de l'emprise du dictateur déchu».
Pour une partie des élites tunisiennes, le Qatar est justement trop envahissant et cherche à dicter à la Tunisie sa conduite.
D'autres y voient un grand soutien au parti dominant, les islamistes d'Ennahda, qui concentre toutes les critiques, les appréhensions et aussi les haines.
La chaîne Al-Jazira a bien été un amplificateur médiatique de la contestation tunisienne qui a fait fuir Zine El-Abidine Ben Ali. Elle était en général appréciée par l'ensemble des courants hormis les partisans de Ben Ali. Pourtant, très rapidement, en Tunisie comme en Algérie, la désaffection à l'égard de la chaîne qatarie - vitrine politico-médiatique de l'émirat - est bien réelle. Un média qui «s'oublie» et verse dans la propagande perd à la longue de son crédit.
Le régime du Qatar n’ayant pas résisté à l’envie de faire «joujou» avec la chaîne Al-Jazira en arabe - la précision est utile car la chaîne en anglais, dirigée par des anglosaxons, reste professionnelle et non propagandiste -, le reflux est bien réel.
Dans le cas de la Tunisie, ce reflux s’est accompagné d’un sentiment d’envahissement à l’égard d’un Qatar suspecté de vouloir exercer une tutelle sur la Tunisie. Et surtout, dans les batailles politiques en cours en Tunisie, Al-Jazira est perçue, c’est un retournement de situation, comme un média proche du «pouvoir» en Tunisie.
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