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Alain Juppé : "La confiance avec l'Allemagne est rompue"

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  • Alain Juppé : "La confiance avec l'Allemagne est rompue"

    "Un péril mortel." L'ancien premier ministre UMP et actuel maire de Bordeaux, Alain Juppé, condamne l'idée du président socialiste de l'Assemblée nationale, Claude Bartolone, d'engager la "confrontation" avec l'Allemagne pour tenter de desserrer la contrainte budgétaire. Accusant François Hollande d'avoir "totalement isolé la France", Alain Juppé veut "déclencher la bagarre avec les anti-européens". Persuadé que l'enjeu est de "faire entrer la France dans le nouveau monde", il veut défendre "sa" ligne et affirme : "Je ne me déroberai pas."

    Comment jugez-vous l'état du pays ?


    Alain Juppé : Inquiétant sur le plan politique car l'ambiance est délétère, très inquiétant sur le plan économique car nous sommes devant des choix qui exigeraient de la part du gouvernement un courage et une force politiques qu'il n'a pas. Les décisions prises par François Hollande depuis près d'un an, l'état d'esprit dans lequel il les a prises, la stigmatisation des entrepreneurs, le matraquage fiscal auquel il s'est livré ont conduit le pays à une quasi-récession. Deux de ses engagements majeurs ne peuvent être honorés : le chômage ne pourra pas reculer à la fin de l'année et l'objectif de ramener le déficit public à 3 % du PIB ne sera pas tenu.

    Claude Bartolone, le président de l'Assemblée, en a pris acte et demande à François Hollande d'engager la "confrontation" avec l'Allemagne pour desserrer les contraintes...

    Pour moi, c'est le péril mortel. Une partie grandissante de la gauche veut engager une bataille politique contre la réduction des déficits en la mettant sur le compte d'une vision libérale allemande ou d'un penchant "bureaucratico-bruxellois". La réalité, c'est que la France va devenir cette année le premier émetteur de dette publique en Europe et que si nous ne faisons pas l'effort de réduire notre dette, les taux d'intérêt vont augmenter. Nous perdrons alors toutes nos marges de manœuvre budgétaires.

    Des économistes pointent le risque de récession. Ne faut-il pas bousculer l'Allemagne ?

    C'est ce qu'a voulu faire François Hollande au début de son quinquennat avec ce fantasme qu'il pourrait s'appuyer sur Mario Monti pour faire céder Angela Merkel. On voit le résultat : la confiance avec l'Allemagne est rompue et nous avons perdu tout crédit pour engager un dialogue musclé avec elle.

    La France est totalement isolée et le président de la République se retrouve dans une situation très délicate. Il doit réduire les déficits sans avoir la croissance pour l'y aider et sans pouvoir augmenter davantage les impôts. Il ne peut le faire qu'en diminuant les dépenses publiques, ce qui est extraordinairement difficile : 60 milliards d'euros à trouver sur cinq ans, cela veut dire réformer en profondeur l'Etat, moduler les allocations familiales, cesser de mentir aux Français sur l'âge de la retraite, toucher aux indemnités chômage, à l'assurance-maladie.

    Toutes ces réformes présentent un double risque politique et récessif. Je ne vois pas comment François Hollande va pouvoir les mener. Il n'a pas la majorité pour le faire.

    Cela peut-il déboucher sur une crise politique ?

    Les institutions sont solides, tant mieux. Mais on ne pourra pas continuer longtemps comme cela. Il faut changer de gouvernement, et surtout, de politique.

    Jean-Marc Ayrault n'est-il pas au niveau ?

    Ce n'est pas une question de niveau mais de choix politiques. Il ne mène pas la bonne politique avec l'autorité nécessaire.

    Que faudrait-il faire ?

    Dire la vérité, enfin. Le pays ne doit pas seulement sortir d'une crise, il doit entrer dans un nouveau monde. Or, une grande partie des Français a peur de ce nouveau monde et certains responsables politiques entretiennent cette peur en parlant de protections et de barrières.

    Certaines formations comme le Front national vont même jusqu'à vouloir sortir de l'euro, ce qui rend encore plus inimaginable l'idée que la droite et l'extrême droite puissent un jour gouverner ensemble.

    Le Monde
    Par Françoise Fressoz et Alexandre Lemarié
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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